@ la taverne,
« Les règles d’éligibilité au FSE sont très strictes et contrôlées ».
Vous êtes un comique qui s’ignore. Je ne peux pas vous en vouloir car vous vous en tenez à la lettre des textes.
Mais l’Europe est loin, et la France, qui ne recule devant rien lorsqu’il s’agit de gabegie, sait précisément y faire.
L’éligibilité et le contrôle relèvent à peu près de la même fumisterie, et comme chacun sait la fumisterie c’est tout un métier.
Sur l’éligibilité :
En pratique, les demandes de concours pour des cofinancements européens au titre du FSE sont « examinées » par des agents en DDTEFP et DRTEFP (respectivement directions départementales et régionales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle).
Le principe est simple : si vous faites partie du réseau existant d’associations qui vit des subventions étatiques, et des entreprises ayant leurs entrées dans les chambres consulaires, vous avez toutes les chances d’être retenu. Sinon, ce n’est pas la peine d’insister…
Je dis toutes les chances parce qu’une fois que le réseau reposant sur le clientèlisme existe cela devient un jeu d’enfant, les services déconcentrés du ministère de l’emploi ayant pour objectif quasi unique de « consommer » du FSE pour justifier à l’année N+1 le recours à une enveloppe toujours plus conséquente. Autant dire que l’on s’assoit allègrement sur les règles d’éligibilité, qui n’existent que sur le papier.
Sur le contrôle :
Là aussi on nage en pleine fumisterie, ce sont les mêmes services qui paient et qui contrôlent la régularité de la dépense. En clair, c’est le Préfet de région qui accorde la subvention et qui signe la décision de reversement en cas d’irrégularité manifeste. Il est difficile de concevoir que la même personne reprenne de la main gauche ce qu’elle a donné de la main droite…
Il y a évidemment des contrôles supérieurs, en simplifiant on trouve la CICC ou commission interministérielle de coordination des contrôles. Cette commission dont les membres sont d’éminents hauts fonctionnaires dont la probité n’est pas en cause, est chargée de contrôler ce que l’Etat français a fait de l’argent de l’Europe (cela vise évidemment tous les fonds structurels). Le problème, c’est que ces fonctionnaires, s’ils contrôlent l’Etat français, dépendent aussi de lui.
L’Europe fixe des limites en terme de taux d’irrégularités.
Toute la subtilité consistera alors pour les services ayant été contrôlés de procéder à un nettoyage pointilleux. En clair, aménager les statistiques, voire en virer les dossiers trop gênants parce que faisant « exploser » les taux d’irrégularités. C’est fondamental parce que l’Europe est en droit de dire à chaque pays membre : -vous faîtes du grand n’importe quoi, j’arrête de financer…
Des centaines de milliers d’euros, parfois des millions, sont dépensés au mépris des règles de droit élémentaires. Ce ne serait pas si grave, serait on tenté de se dire, si l’argent dépensé allait vraiment au bon endroit.
Ce n’est pas si simple. Un exemple, prenons un chantier d’insertion (type maraîchage bio, très en vogue). Un chantier d’insertion est une sorte de vaste centre aéré pour adultes qui a le bonheur de cumuler trois avantages non négligeables : 1) il permet de justifier l’emploi du temps des encadrants de ces chantiers 2) il fait sortir l’espace d’un temps un bon nombre de chômeurs et RMIstes des chiffres du chômage 3) il permet de remettre le couvert l’année d’après puisque sa raison d’être n’est évidemment pas de trouver du travail durable aux personnes concernées.
En clair, ça coûte très cher, c’est particulièrement peu efficace, mais au niveau de la politique de communication locale c’est un franc succès …