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Commentaire de Henrique Diaz

sur Le rôle de l'art dans le mensonge organisé de l'oligarchie


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Henrique Diaz Henrique Diaz 18 mai 2012 02:06

A l’auteur,
Je partage votre critique de l’art contemporain dans l’ensemble, mais je trouve qu’il y a certaines approximations voire contradictions.

D’abord, il y a certainement des artistes contemporains qui éprouvent un vrai plaisir à la fois sensible et intellectuel dans leur pratique artistique et qui le transmettent.

Je trouve ensuite que vous ne définissez pas très clairement ce que vous entendez par art : d’un côté, vous l’assimilez presque à l’artisanat, et vous indiquez un critère pour distinguer l’artiste à l’ancienne du charlatan : le savoir faire et d’un autre côté, vous suggérez que tout le monde est artiste alors qu’il est évident que tout le monde n’a pas acquis un savoir faire artistique. Et aussi, vous mettez en avant la notion de beauté, de plaisir esthétique et vous dites en même temps que peu importe si le portrait n’est pas réussi ou que la cuisine, c’est de l’art. Pourquoi pas le foot tant qu’on y est ?

Je crains que vous confondiez le beau et l’agréable. Le cri du Munch peut être reconnu comme beau, non parce qu’il représente une belle chose (l’angoisse de l’existence) mais parce qu’il est la belle représentation d’une chose. En ce sens, l’œuvre d’art est un moyen d’éclaircir un peu le mystère de ce que c’est que d’être une conscience incarnée, ce que vous avez l’air de dire à des moments tout en suggérant que cela peut être un peu tout et n’importe quoi du moment qu’on soit sincère et de bonne volonté.

Quant au rôle de l’oligarchie, vous avez l’air de présenter un complot orchestré en toute connaissance de cause. Je pense qu’il s’agit surtout d’effets qui découlent de la logique capitaliste et plus généralement de la concentration des pouvoirs dans une société. Comme l’avait vu Bourdieu, la classe dominante a toujours eu besoin d’affirmer une sorte d’essence foncièrement différente du reste de la population pour justifier son existence. Le goût pour les œuvres que le public ne comprend pas n’est pas particulièrement un goût pour ces œuvres mêmes mais un moyen de distinction sociale. Quand Van Gogh ne vendait pas une toile de son vivant, le public populaire n’aimait pas plus ses œuvres que le public dominant. Quand le marché de l’art a valorisé Van Gogh, le public n’a pas mieux compris au départ puis le plaisir de contempler du Van Gogh est apparu, avec le temps. Mais si cet intérêt populaire pour Van Gogh était apparu trop vite, avant que le marché de l’art écoule toutes ses œuvres, il n’aurait plus eu de valeur ou beaucoup moins aux yeux des dominants.


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