AVIS
de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de
l’alimentation, de l’environnement et du travail relatif aux
« mesures à prendre sur les bouquetins pour lutter contre
la brucellose sur le massif du Bargy, Haute-Savoie »
Avis
de l’Anses du 4 septembre 2013
Saisine
n° « 2013-SA-0129 »
L’Anses
a été saisie le 9 juillet 2013 par le
ministère chargé de l’Agriculture
et le ministère
chargé
de l’Ecologie pour la réalisation de l’expertise suivante
: saisine
relative aux mesures à prendre pour les bouquetins pour lutter
contre la brucellose sur le massif du Bargy, Haute Savoie.
la
présente saisine en urgence
Le
ministère de l’écologie, du développement
durable et de l’énergie et le ministère de
l’agriculture
de l’agroalimentaire et de la forêt proposent un protocole
d’abattage des
bouquetins
dans
le but de : «
Maîtriser la brucellose dans la faune sauvage en
Haute-Savoie où le bouquetin semble jouer le rôle de
réservoir primaire pour abaisser significativement
le risque de transmission aux animaux domestiques notamment
sur le massif du Bargy, et cela dès le début de
l’automne, mais aussi pour protéger les autres
massifs et maîtriser le risque de décantonnement ».
L’expertise
collective a été réalisée par le groupe
d’expertise collective d’urgence (GECU)
«
Brucellose bouquetin Bargy », multidisciplinaire, regroupant des
compétences complémentaires : épidémiologie
et analyse de risque, biologie du bouquetin et de la faune sauvage de
montagne, maladies de la faune sauvage, microbiologie, brucellose à
Brucella melitensis, méthodes de diagnostic, méthodes
de lutte contre les maladies infectieuses.
Le
GECU a disposé de plusieurs documents liés au foyer de
brucellose du massif du Bargy (Et
notamment) :
_
la lettre et le dossier de « demande d’avis au CNPN relatif à
une autorisation d’abattage des bouquetins du massif du Bargy (74)
préalable à une réintroduction de l’espèce,
dans l’intérêt de la santé et de la sécurité
publiques, pour prévenir des dommages importants à
l’élevage, pour des raisons économiques majeures et
pour assainir l’enzootie de brucellose au sein de cette population
»,
émanant de la préfecture de Haute-Savoie, reçus
le 19 juillet 2013 ;
Le
suivi de la population de bouquetins du massif du Bargy a permis de
dégager les éléments suivants pour l’année
2013 :
− une
population âgée, avec pour les mâles
68% d’individus de plus de 5 ans, 14% d’individus de 4 et 5 ans
et 16% d’individus de 2 et 3 ans ;
− un
succès de reproduction apparemment très faible :
un maximum de 16% de femelles observées était suitées.
Ces
éléments sembleraient indiquer que la population de
bouquetins du Bargy est âgée et que ses performances
reproductives sont très basses. A titre de comparaison, le
taux de femelles suitées dans d’autres populations alpines
est plus proche, également en 2013, de 30% (32% en Belledonne,
36% en Vanoise).
Il
est cependant difficile d’interpréter la dynamique de cette
population. Les auditions n’ont pas permis de dégager de
jugement majoritaire permettant d’expliquer cette situation.
La
séroprévalence apparente des bouquetins du massif du
Bargy semble très élevée (de l’ordre de 38%)
et touche toutes les classes d’âge de 2 à 15 ans.
Toutefois, la classe
d’âge la plus touchée semble être celle des
animaux de 6 ans et plus.
Les
femelles semblent plus touchées que les mâles (47%
versus 24%) et il semble y avoir un effet cumulatif de
l’âge
Sur
la base seule des résultats de séroprévalence,
un abattage ciblé sur certaines classes d’âge peut
s’envisager, notamment celle des animaux de plus de 5 ans (mâles
et femelles) pour laquelle la séroprévalence apparente
est proche de 55% (contre 15% chez les bouquetins de moins
de 5 ans).
L’abattage
ciblé laissera intacte une partie de la population qui
comprend des animaux infectés,
certes en moindre proportion (15% des animaux de moins de 5 ans sont
séropositifs).
Conclusions
et recommandations des experts
En
préambule, les
experts s’interrogent sur la réalité de l’urgence
Pour
atteindre l’objectif, fixé dans la saisine, de réduction
rapide et significative du risque de transmission du réservoir
constitué par la population de bouquetins aux cheptels
domestiques, les experts s’accordent sur la nécessité
de réduire de façon importante et rapide la taille du
réservoir par des abattages envisagés par le GECU
selon deux modalités :
-
l’abattage massif aléatoire avec un objectif
d’élimination des bouquetins (selon la définition des
experts et non de la saisine) ;
−
l’abattage
ciblé de tous les individus âgés de plus de 5
ans. Néanmoins cette option aurait un impact
important sur la dynamique de la population restante, dont une
fraction est infectée.
L’évolution
de l’infection dans un tel cadre est imprévisible et
nécessiterait un suivi sanitaire et populationnel,
voire d’autres mesures de maîtrise
pour aboutir à un résultat équivalent à
la 1ère option.
Les experts n’ont pas disposé de suffisamment de
temps pour évaluer tous les scénarios possibles. Ils en
ont toutefois envisagé deux : un abattage sanitaire
(séropositifs et suspects cliniques) des jeunes animaux
restant ; des campagnes de vaccination, selon des modalités
qui resteraient à définir
Les
experts ne peuvent, dans l’état
actuel des connaissances et compte tenu du délai imparti,
estimer si
une de ces méthodes sera plus efficace que l’autre pour
maîtriser le risque de transmission de la brucellose des
bouquetins aux cheptels domestiques
CONCLUSIONS
ET RECOMMANDATIONS DE L’AGENCE
L’Agence
nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de
l’environnement et du travail endosse les conclusions de son
groupe d’expertise collective d’urgence.
http://www.anses.fr/sites/default/files/documents/SANT2013sa0129.pdf
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