Cette vision de l’argent comme un péché n’est pas nouvelle. Depuis
Philippe le Bel (qui annulé sa dette en neutralisant ses créanciers les
Templiers), les catholiques ont un rapport compliqué avec l’argent.
Ensuite, la Réforme protestante a été avant tout une
histoire de sous opportu,iste. Luther s’en prenait aux « indulgences », des
papiers qui permettaient en échange de quelques pièces d’écourter le temps
passé au purgatoire.
Un des grands changements a concerné le prêt à intérêt (faire
de l’argent avec de l’argent) qui était interdit par la doctrine catholique,
quand Luther et Calvin ont admis la possibilité d’un taux d’intérêt et estimé
que les théologiens n’étaient pas compétents pour les affaires temporelles,
même si, soucieux de « protéger les pauvres », ils avaient fixé un
plafond autour de 5 %. La légalisation du prêt à intérêt a déclenché une déculpabilisation
vis-à-vis de l’argent et de la finance dans les pays à majorité protestante, et
depuis, les principales bourses occidentales - Francfort, Londres et New York se
situent toujours en terre protestante.
Mais malgré cette déculpabilisation, les protestants ont
toujours cultivé l’austérité et préfèré l’épargne à l’endettement, ce qui
explique en partie le parti pris allemand actuel. Calvin avait une conception
curieuse de la richesse qui, pour lui, était un signe de la grâce et
considérait que ce « don gratuit de Dieu » obligeait le croyant à
redistribuer sa richesse, le fameux ruissellement : il faut la faire
croître sans l’utiliser pour soi-même.
L’économie n’est pas une science, mais une idéologie.