@Surya
D’abord, je constate que, comme d’habitude, vous éludez le fond de la question, à savoir : comment vivre avec des gens qui sont contre la liberté de conscience, contre l’apostasie, la liberté des femmes, la liberté de l’humour, la liberté de vivre comme on est pour un homosexuel. C’est une question que vous évitez,
peut-être ces choses n’existent-elles pas pour vous ? Je vous renvoie dans ce cas au dernier rapport du Sénat (juin) sur l’extension de la radicalisation islamiste en France. Et à ce qui est arrivé à Charlie Hebdo. Ou aux enfants juifs tués par Merah (on est loin du trafic de drogue, n’est-ce pas ?). Quand vous aurez des yeux pour voir, et un cœur, vous vous rendrez compte de ces dangers réels qui font souffrir beaucoup de gens, y compris des musulmans.
Votre vision d’une opinion qui suivrait aveuglément les positions pro ou anti immigration d’un gouvernement est naïve et déconnectée de la réalité (et cela n’a rien à voir avec votre photo) car depuis longtemps les enquêtes d’opinion sur ce sujet, en France, se suivent et se ressemblent quels que soient les gouvernements.
Les phrases d’un tel ou d’un tel n’y change pas grand-chose.
Il n’y a pas d’hypocrisie et je ne me planque pas (à l’inverse de vous qui esquivez le débat de fond), car tout le monde sait en France qui menace les libertés fondamentales. Tout le monde sait quels adeptes de quelle religion empêchent à toute force leurs filles de suivre les cours de natation obligatoires à l’école. Tout le monde sait quels adeptes, chauffeurs de bus, refusent de s’asseoir sur un siège précédemment occupé par un chauffeur femme. Tout le monde sait qui aimerait bien instaurer la charia. Tout le monde... sauf vous. Vous plaignez les femmes voilées qui ne peuvent pas mettre le nez dehors. Vous ne connaissez visiblement pas certaines villes françaises, où au moins un tiers de toutes les femmes que je vois dans la rue sont voilées. Moi, c’est les femmes qui ne peuvent pas mettre le nez dehors si elles ne sont pas voilées que je plains, ou qui ne peuvent pas mettre le nez dehors tout court sans le soutien d’une association qui organise des marches collectives pour montrer que l’espace public appartient aussi aux femmes. On est où là ? En France au 21e siècle ou au Paléolithique ? Où sont vos yeux pour ne pas voir cela, puisque vous êtes une humaniste avec des yeux ?
Et donc, vous parlez sans savoir. Vous imaginez. Vous essentialisez le pauvre immigré victime de questions déplacées, d’inquisitions incessantes.
Je suis petite-fille d’immigrés dont les enfants ont subi quolibets, mépris et rejet dans les cours d’école. Pour autant, ils ne se sont pas repliés sur eux-mêmes, ils ne se sont pas « jetés sur le premier Jésus-Christ qui passe », ils n’ont pas cherché d’autres valeurs ou une autre communauté à laquelle appartenir. Ils ont fait leur vie dans ce pays qu’ils aiment, tout en maintenant des liens forts avec le pays de leurs parents. Cela a été facilité, et c’est important, parce que les deux cultures étaient proches, sans antagonisme fondamental de valeurs.
Je conçois tout à fait que des enfants nés en France de parents venant d’une culture très différente aient des problèmes d’identité et aient du mal à s’identifier aux valeurs d’un pays qui ne sont pas celles qui sont vécues à la maison. Il y aurait trahison vis-à-vis de leurs parents, et c’est une chose quasi impossible à vivre pour un enfant. Je comprends qu’un enfant se sente rejeté par un pays, fut-il son pays de naissance, si le mode de vie de ce dernier ne correspond pas à celui de ses parents, je comprends même qu’il rejette ce pays pour cette raison alors que celui-ci n’y est pour rien. Je comprends encore mieux que si cet enfant est systématiquement rejeté ou soupçonné en raison de ses origines, il nourrisse un ressentiment légitime et se réfugie et se replie dans sa communauté d’origine pour y trouver force et réconfort, même si (ou surtout si ?), cette communauté rejette le pays en question. C’est un cercle vicieux.
Seulement, encore faudrait-il prouver que cet enfant ou cet adolescent a subi ce rejet systématique de la population, et ça, vous le croyez mais ne pouvez pas le prouver. Il me semble au contraire que beaucoup de choses sont faites pour eux, que beaucoup d’associations et de gens se dévouent pour eux, que l’Etat donne beaucoup d’argent public avec par exemple des classes de CP à 12 élèves, alors que chez moi, nos enfants sont dans des classes de CP à 28 (je dis ça sans amertume). Et que les grands médias minimisent pudiquement les déchaînements de violence en banlieue contre les policiers et les pompiers, pour que les habitants ne se sentent pas « stigmatisés ». Et donc, dans le cas où ces enfants n’auraient pas vécu de rejet systémique et général en raison de leur origine, d’où viendrait la radicalisation islamiste agressive et revendicatrice ?
Bref, j’ai non seulement des yeux et un coeur, mais aussi un cerveau. Cette question de culture, d’acculturation et d’identification est complexe et je vous invite à vous servir du vôtre pour ne plus voir le monde en noir ou blanc, façon binaire.