@Luc-Laurent Salvador
Ce n’est pas une question de providence. J’essaie de lire
tous tes articles, juste retardé par des contretemps qui ne sont guère des
providences.
Crois-tu à cette hétérodoxie selon le catholicisme (voire
une hérésie ?), ou est-ce que tu navigues entre conceptions ad hoc selon
les circonstances ?
En quoi le fait de croire au néant de la conscience après la
mort (en gros le même que celui de notre conscience avant notre conception)
amènerait au néant ? Je n’ai jamais connu cette conception, selon laquelle
les théistes auraient une vie après la mort, mais non les athées (Y crois-tu
vraiment ?). Dans ce cas, les méchants n’auraient qu’à être athées pour
échapper à l’enfer (j’ignore si l’enfer est dans tes croyances).
Quant à Ghislaine qui serait morte, « ait consenti à se
sacrifier » pour me faire prendre conscience du « Ciel »,
je n’y crois pas du tout, à cause déjà de tout ce que nous vivions, ce que je
savais, entendais d’elle, nos projets, tout ce que nous pouvions faire de bien
pour nous et pour la société.
« tu n’as pas non plus les moyens de preuve du contraire » :
il n’y a pas à inverser la charge de la preuve ; c’est celui qui émet ses
thèses ou hypothèses de les démontrer. Là, j’ai regardé la notion de cause première,
car dans ta démonstration, tu l’amenais vers Dieu, car c’était ainsi que la
plupart des gens l’appelait (drôle d’argument, qui est le sophisme de
la majorité ou argumentum
ad populum) : tu as ainsi écrit que « La cause première qui a fait
qu’il y a quelque chose plutôt que rien a toujours été appelée Dieu »,
en reprenant « L’Aquinate [Saint
Thomas] termine ses preuves de l’existence de Dieu en disant que c’est cet être
que tous les hommes appellent Dieu. » ; or, d’autres
causes premières ont été invoquées, en particulier par les philosophes
présocratiques ; et donc un matérialiste peut affirmer que la cause
première est par exemple l’énergie (celle-ci considérée comme étant sans cause).
Tu écris : « tu es libre de choisir le monde dans
lequel tu vis », invoquant ton « article
sur la croyance des Raja Yoga (répétition du même à l’infini) » ;
or, tu y écrivais qu’« il est très clair que nous pouvons refuser de nous
soumettre à la réalité. Mais il faudra alors en payer le prix et, par exemple,
passer pour un dingue si nous voulons systématiquement entrer dans un bâtiment
en passant par une fenêtre. ». Donc, je ne comprends en quoi on est libre
de choisir le monde dans lequel nous vivons. Comme chantait Maxime Le
Forestier, « On choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille | On
choisit pas non plus les trottoirs de Manille | De Paris ou d’Alger pour
apprendre à marcher ». Après, on peut toujours affirmer que le miséreux
est libre de rester dans son pays, ou de risquer une migration en rafiot afin
de changer de « monde », comme le fortuné peut choisir de faire un
chemin inverse (c’est plus rare).
« Si, comme moi, tu choisissais de croire le contraire » :
c’est étrange de penser qu’on peut choisir ce qu’on croit. Toi-même n’invoques
pas un choix mais un environnement précoce et puissant avec les capacités
paranormales de ta grand-mère (je ne connus rien de tel). Il n’y a jamais eu un
moment où tu aurais « choisi » d’être théiste. Les choix concernent
des actes (c’est du conatif), pas des croyances (ce n’est pas du cognitif). On
ne peut pas choisir une croyance comme on choisit un aliment ou un bulletin de
vote. Si je ne crois pas ce que tu crois, c’est que cela ne me semble pas
crédible. Après, je comprends qu’on y croit avec l’environnement culturel qu’on
a, et les bénéfices psychiques que cela procure.
La fin de ton commentaire revient vers son début : en
quoi croire ce que tu crois me ferait obtenir « la vie éternelle et la
possibilité de retrouver Ghislaine » (après ma mort, j’imagine), et
en quoi le fait de ne pas y croire l’empêcherait ? Et d’ailleurs, si par
exemple, Ghislaine y croyait et pas moi, me retrouverait-elle ou pas ? Il
y a là une aporie.