EDF/ENEDIS : les Chiens de Garde de la République sortent la sulfateuse
Octroyer des avantages à ses salariés dans la France d'Emmanuel Macron, c'est comme regarder dans un rétroviseur, plus on avance, plus l'image rétrécit jusqu'à disparaitre.
Quelques mois après avoir entériné la réforme de la SNCF, il y a fort à parier que la prochaine cible, vestige d’un Service Public qui fut jadis une fierté nationale enviée dans le monde entier, s’appellera EDF. Afin de se plier aux technocrates européens, l’énergéticien français a déjà dû accepter de se soumettre à la loi NOME en 2010. Puis en 2018, le Gouvernement sous l’impulsion de Bruxelles a privatisé les barrages hydrauliques, EDF ne pouvant se présenter aux appels d’offres, et qui font le bonheur de Total et Engie, qui aux côtés de groupes étrangers vont s’affronter pour dépecer ce secteur clé.
Cette précision est indispensable afin de comprendre ce qui se passe, et pourquoi l’Etat s’apprête à mettre à mal un modèle unanimement reconnu dans le monde comme un modèle de distribution d’électricité, la moins chère d’Europe. Depuis fin Janvier, les Chiens de Garde du gouvernement se sont immiscés dans la brèche ouverte par la Cour des Comptes. Les éléments de langage sont relayés avec une redondance abjecte, et les articles à charge et sans la moindre preuve pullulent dans les médias français. Dans quel but ? Diviser pour mieux régner, attiser la jalousie d’une population qui commence à manquer de tout, jusqu’à ses libertés fondamentales. S’attaquer à une entreprise et ses salariés pour préparer le terrain d’une réforme brutale, voilà le but honteux de journalistes qui n’enquêtent pas, mais qui diffusent les dernières élucubrations de Sages dont on ne met jamais en lumière les luxueux avantages. Alors démontons les, car le fonctionnement de cette entreprise ne m’est pas inconnu, loin de là.
Le « tarif agent ». Chaque salarié du groupe EDF bénéficie de la gratuité de l’abonnement d’électricité, et est facturé d’environ 6% de ses consommations. Ce que ne dit aucun des articles à charge, c’est que l’avantage en nature est déclaré aux impôts à un niveau bien au delà de son utilisation. Moralité les consommations en énergie sont payées directement aux impôts.
Deuxième élément de langage, les salaires. On a tout entendu ou presque, un salaire médian à 5000€, un salaire annuel à 40000€, plus un treizième mois, et une prime d’intéressement aux bénéfices. Encore une fois des chiffres purement fantaisistes, et sont clairement gonflés en y ajoutant la rémunération des hauts dirigeants. Il y a vraiment de quoi se dire que si les journalistes comptent les salaires comme ils comptent les manifestants, il n’est pas étonnant que les Gilets Jaunes les accueillent avec tant de colère. Le salaire de base d’un salarié des IEG (entreprises électriques et gazières) n’est pas bien élevé, et c’est bien là la clé du problème. Les augmentations de salaires sont régies par une grille et un système d’avancement clairement dépassé, et ne couvrant plus l’inflation depuis très longtemps. La rémunération étant pour un agent d’exécution à peine supérieure au SMIC, et à peine supérieure pour un agent de maitrise. Une augmentation représentant entre 20 et 40€, et ne se représentant que tous les cinq ou six ans en moyenne. Le salaire est complété par des primes d’exposition aux radiations pour les salariés en centrales, et par les primes d’astreintes pour les techniciens assurant la sécurité du réseau et les missions de dépannage. Ces mêmes agents qui se battent au quotidien pour que les temps de coupure soient les plus réduits possible, et qui interviennent de jour comme de nuit. Ces primes n’entrent pas dans le calcul des retraites, et ce travail d’astreinte sur le réseau ou en centrale nucléaire, posté, vaut aux agents de cumuler ce que l’on appelle du service actif, permettant de partir en retraite plus tôt due à la pénibilité de leurs tâches.
Troisième point découlant des éléments précédents, le système des retraites est entièrement auto financé et ne coûte pas un centime à l’usager. De même que le système de mutuelle interne à l’entreprise, qui de plus est excédentaire. Un salarié à la retraite peut effectivement toucher aux alentours de 2000€, mais pourquoi donc vouloir irrémédiablement niveler les retraites par le bas ? Ceci est d’autant plus inaudible que ce système est alimenté par les salariés eux-mêmes.
Le raccourci est vite fait lorsqu’on ne souhaite pas faire connaître la réalité. Le TURPE, le tarif acheminement, qui assure 90 % des recettes du Distributeur ENEDIS est réévalué d’après un calcul réalisé par la CRE (Commission de Régulation de l’Energie) qui est un organisme indépendant d’EDF.
Enfin, les œuvres sociales tant enviées ont fondu comme peau de chagrin au fils des années, de nombreux centres de vacances ont été vendus, et aucun journaliste ne parle des actions solidaires. Il n’est pas rare de nos jours que les agents soient dans des situations financières critiques, qu’ils dorment dans leurs voitures, et cela ne les empêche pas de faire leur travail.
L’âge d’or est bien lointain, mais pour satisfaire la gargantuesque Europe dans sa quête de nivellement par le bas, rien n’est trop beau, y compris faire tomber un des derniers bastions des Services Publics tricolores, quitte à pousser dans la précarité des milliers de salariés, et des millions d’usagers. Car il faut se souvenir des conséquences de l’ouverture du marché, qui promettait des baisses de tarifs, il n’en a rien été, et l’ensemble des français n’a plus qu’à se perdre aujourd’hui dans les méandres d’un système illisible. Une fois EDF et ENEDIS rognés jusqu’à l’os et la distribution publique offerte aux multinationales, qui se souciera de la satisfaction des usagers et de la qualité de fourniture ?
Alors par pitié, Messieurs les Chiens de Garde de la République, laissez tomber les éléments de langage. Faites votre travail de journalistes, et enquêtez au lieu de préparer lentement l’opinion publique à détester et jalouser ses semblables.
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