En l’état, l’augmentation de la CSG pour les retraités sera invalidée par le Conseil constitutionnel… Mais que cherche M. Macron ?
Etude critique des mesures sociales
PERSONNE NE PEUT IMAGINER UNE LOI QUI FERAIT PAYER L’ASSURANCE AUTOMOBILE PAR CEUX QUI N'ONT PAS DE VOITURE… Faire payer l’assurance chômage aux retraités est contraire au bonsens et à la Constitution. A MOINS QUE M Macron veuille remplacer l’assurance chômage par une prestation uniforme financée par l’impôt ?
Derriere la réforme de la CSG M MACRON met en place deux réformes structurelles avec la fin des allocations familiales pour tous et une prestation basique qui remplacerait l’assurance chômage.
NE PAS CONFONDRE ASSURANCE ET ASSISTANCE
Lorsque l’on étudie les systèmes de protection sociale, leur mode de fonctionnement et de financement, on constate qu’ils sont structurés autour de deux archétypes : le modèle bismarckien (fondé sur la conception du chancelier Bismarck) et le modèle beveridgien (reposant sur les idées de l’économiste Beveridge).
Le premier renvoie à des modes de prise en charge privilégiant la logique assurantielle (les prestations sont versées aux individus qui se sont assurés contre tel risque), le second à une logique assistancielle (les prestations sont versées aux individus qui en ont besoin).
Le financement des allocations beveridgiennes en France se fait par l’impôt, l’Etat a le droit de fixer librement les montants et les bénéficiaires.
Créée par la loi de finances pour 1991, la contribution sociale généralisée (CSG) est un impôt destiné à participer au financement de la protection sociale de ceux qui ne cotise pas et sont hors logique d’assurance.
Aujourd’hui, elle est affectée :
à la branche famille, au taux de 1,08 % sur les revenus salariaux et allocations chômage et de 1,10 % sur les autres revenus. C’est le prélèvement créé initialement, en contrepartie de la suppression des cotisations sociales « famille » ;
Au fonds de solidarité vieillesse (FSV) qui finance le minimum vieillesse (1%)
À la branche maladie de la sécurité sociale, elle remplace les cotisations sociales maladie des salariés (hormis le financement des « indemnités journalières » dites également « congés maladie ») ;
À la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), instituée par le gouvernement Raffarin pour gérer les prestations liées à la dépendance, au taux de 0,10 % sur tous les revenus.
Les retraites relèvent de la logique de l’assurance financée par les cotisations le nombre de trimestres cotisés, et les trimestres validés, qui se composent des trimestres cotisés auxquels on ajoute tous les trimestres obtenus pendant les périodes de chômage, de maladie, de maternité, ainsi que les trimestres de majoration pour enfants – en bref, tous les trimestres dont vous bénéficiez sans avoir cotisé.
Malheureusement il existe de toutes petites retraites particulièrement pour les agriculteurs et les commerçants.Mon père après plus de 60 ans de cotisation bénéficie d’une retraite de la MSA de 757 euros par mois.
L’allocation de solidarité aux personnes âgées (ex minimum vieillesse) peut être supérieure à la retraite des travailleurs elle relève de la logique de l’assistance, son financement se fait par l’impôt.
Elle est attribuée sous conditions de ressources en tenant compte de toute les autres ressources (loyers, revenus du capital) Cette prestation est ouverte à toute personne âgée de 65 ans dont les ressources annuelles, allocation comprise, sont inférieures à 9 638,42 € (soit 803 € par mois) pour une personne seule, et à 14 963,65 € (soit 1 247 € par mois) pour un couple (montants en vigueur depuis le 1er avril 2017).
L’allocation de solidarité aux personnes âgées (ex minimum vieillesse) peut donc être supérieure à la retraite des travailleurs elle relève de la logique de l’assistance, son financement se fait par l’impôt.
LA LOGIQUE EST SIMPLE les petits épargnants ayant travaillé sont donc les victimes désignées Un couple de smicards à la retraite sera devenu propriétaire de son appartement après bien des sacrifices Le couple touchera après 44 ans de cotisation 1466 euros par mois.
Un couple n’ayant jamais travaillé et n’ayant pas d’épargne touchera 1247euros par mois . Le gouvernement prévoit une revalorisation de 12% de ce minimum et rien pour les retraites des vieux travailleurs.
DANS LA LOGIQUE DE L‘ASSURANCE IL EST IMPOSSIBLE D’EXCLURE CELUI QUI COTISE et de faire cotiser celui qui ne court pas le risque
Les cotisations chômage salariales sont des cotisations contributives qui ouvrent des droits à des prestations dépendant des cotisations versées. On ne peut demander à des retraités ou à des titulaires de revenus du capital de contribuer pour des prestations d’assurances sociales, auxquelles ils n’ont jamais droit. Le niveau des prestations de remplacement dépend du niveau des salaires qui ont donné lieu à cotisations.
En juin 2014, le gouvernement avait fait voter par le Parlement la dégressivité des cotisations sociales salariales, afin d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés à bas salaires. Selon ce projet, un salarié payé au SMIC aurait bénéficié d’une réduction de 3 points de cotisations. La ristourne aurait diminué avec le niveau de salaire pour s’annuler à 1,3 fois le SMIC. Le 6 août 2014, le Conseil Constitutionnel a censuré cette disposition. Il avait rappelé que les cotisations salariés financent des prestations de retraites ou de remplacement, d’assurances sociales, réservées aux personnes ayant cotisé, et qui dépendent des cotisations versées. Il s’était opposé à une mesure qui aurait brisé la logique contributive du système. Le Conseil Constitutionnel avait souligné la spécificité des cotisations sociales contributives et rappelé ainsi un principe fondamental de notre système de sécurité sociale : les prestations d’assurances sociales doivent être financées par les personnes couvertes.
L’assurance chômage est jusqu’à présent régie selon les principes de l’assurance sociale. Chaque salarié a droit à des prestations (l’ARE, Allocation d’aide au retour à l’emploi) qui dépendent, pour leur montant comme pour leur durée, des cotisations que lui et son entreprise ont versée. Actuellement, les cotisations employeurs représentent 4 % du salaire brut ; les cotisations salariés 2,4%. Les règles sont définies par accord contractuel entre les partenaires sociaux qui gèrent le système.
Comme l’assurance chômage couvre des pertes d’emploi involontaires, elle ne couvre pas les salariés démissionnaires. Toutefois, elle couvre les démissions jugées légitimes (comme suivi du conjoint ou harcèlement au travail) et tout salarié démissionnaire peut demander un réexamen de ses droits après 4 mois. Les partenaires sociaux ont décidé que la rupture conventionnelle ouvre les droits aux prestations chômage.
Elargir l’assurance chômage telle qu’elle est, avec des droits dépendant des cotisations, nécessite qu’elle reste essentiellement financée par des cotisations assises sur les revenus d’activité Transformer les prestations chômage en une prestation universelle suppose de supprimer les cotisations chômage employeurs ou de faire payer une cotisation équivalente aux non-salariés et aux revenus du capital. En tout état de cause, on ne peut avoir une prestation financée pour partie par la CSG, assise sur tous les revenus des ménages, pour partie par des cotisations employeurs assises sur les seuls salaires du privé, prestation à laquelle auraient droit les salariés du privé selon les cotisations versées par leurs employeurs et les non-salariés (de manière non encore définie) et pas les salariés du secteur public.
Le gouvernement propose d’ouvrir ce droit aux salariés démissionnaires, ce droit ne serait donné qu’une fois tous les 5 ans, au lieu de dépendre du motif de la démission.
L’autre réforme envisagée est d’ouvrir le droit à l’ARE aux non-salariés, mais cela supposerait, en toute équité, qu’ils cotisent pour 6,4% d’une base de leur revenu équivalente au salaire brut, base qui permettrait de calculer leurs droits à l’ARE. Les non-salariés voudront-ils bien payer une telle cotisation ?
S’agit-il de compenser la perte totale de revenu d’activité ou les fluctuations de celui-ci ou la baisse durable de revenu ?
Dans la réalité M. Macron entend bien substituer la logique bismarckienne de notre système de protection sociale par un logique beveridgienne d’assistanat.
Une logique confirmée par l’augmentation de la csg pour supprimer les cotisations salariales sur l’assurance chômage.
L’objectif de l’opération est clair : remettre en cause le principe même de l’assurance chômage. Il s’agit de remplacer un droit des salariés, issu de leurs cotisations, à une prestation d’assurances sociales leur assurant un taux de remplacement relativement satisfaisant, par une prestation uniforme, de faible montant. Bref la proposition de Macron, en apparence favorable aux salariés, consiste à tirer le premier fil par où détricoter les protections sociales dont bénéficient aujourd’hui tous les salariés.
Il s’agit aussi d’écarter les syndicats de la gestion de l’assurance chômage. L’Unedic n’étant plus financée par des cotisations salarié, sa gestion paritaire n’aurait plus de justification.
La suite : une prestation basique réservée aux plus pauvres.
Si les cotisations des employeurs et des salariés sont remplacées par le financement par l’impôt le risque est triple :
– il y a une étatisation du système car si les pouvoirs publics financent ils décident et c’est la fin de la gestion par les partenaires sociaux.
– on sort de l’assurance, le niveau de la prestation ne dépend pas de ce que l’on a versé et l’Etat peut décider d’exclure de la prestation les plus riches ou d’autres.
Une prestation financée par l’impôt et donc par tous les contribuables ne profite pas obligatoirement à tous.
Le remboursement des soins et les allocations familiales ne sont pas financés par l’assurance mais on évoque alors le principe d’universalité.
Les prestations famille ou maladie (soins) sont universelles car elles ne dépendent pas des cotisations versées. Le financement des « indemnités journalières » dites également « congés maladie relève logiquement de l’assurance et du financement par les cotisations car les prestations dépendent du montant des cotisations.
Depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, les allocations familiales sont versées à toutes les familles ayant au moins deux enfants de moins de 20 ans à charge. Ce principe, défendu notamment par les associations familiales, la droite, mais aussi historiquement par le PCF et les syndicats, a pour objectif de compenser la charge que représente un enfant. En juillet 2015, pendant le quinquennat de François Hollande, les allocations familiales ont été modulées en fonction des revenus, les plus aisés les voyant divisées par deux, voire par quatre. Cette décision avait suscité de vifs débats et avait été décrite par ses adversaires comme une première atteinte au principe d’universalité.
Les allocations familiales pour tous ne se conçoivent que dans une logique d’assurance et d’universalité.
En Allemagne les allocations familiales de base sont versées sans conditions de ressource.
La mise sous condition des allocations familiales n’est qu’une question de temps. Elles sont versées en fonction du principe d’universalité inscrit dans la Constitution. C’est selon ce principe que l’Ecole publique est ouverte et gratuite pour tous les enfants, quel que soit le niveau de vie des parents.
En réalité, rien n’interdit de préférer au principe d’universalité et d’assurance celui, davantage lié à une logique assistancielle, d’égalité concrète ou encore d’équité : les prestations étant alors accordées non plus à tous mais – via leur soumission à une condition de ressources – à quelques-uns seulement. C’est le choix de Rawls et des Anglo saxons.
Encore faut-il que le débat puisse avoir lieu.
Attention, dans une situation avec d’une part des foyers qui payent l’impôt sur le revenu mais ne bénéficient pas des allocations familiales, et d’autre part des foyers qui reçoivent des allocations familiales mais ne paient pas d’impôt sur le revenu. Dans ces conditions, les allocations familiales ne seront plus réellement soutenues par les classes moyennes aisées. Or, il n’aura échappé à personne que les personnes et associations qui défendent actuellement la politique familiale ne sont pas toutes issues des classes populaires. Sans soutien des classes moyennes, les prestations familiales risquent d’être rognées peu à peu, avant de disparaître.
Demain la remise en question du principe d’universalité peut conduire à un remboursement différencié des soins. Si les classes moyennes se voient imposer un plafonnement différencié il en sera fini de la sécu.
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