Le Bal des faux-culs
Bienvenue en lacrymocratie...
Ça y est : pratiquement un mois jour pour jour, après le début du mouvement des gilets jaunes, la presse française dévoile une nouvelle facette de ce qu’il est désormais convenu d’appeler sa veulerie, et son extrême soumission aux pouvoirs en place.
Nous assistons, depuis quelques heures, à un retournement de veste sans précédent dans l’histoire des mouvements sociaux : après plusieurs milliers de blessés, dont des centaines très graves ; après 17 éborgnés et 4 amputés, après plusieurs morts, dont au moins un (Zineb Redouane, à Marseille), indirectement lié à la répression policière démesurée ; après les alertes d’Amnesty International, et de plusieurs associations (collectif « Désarmons-les », ACAT...) sur le niveau de répression absolument inédit, et un usage de la force complètement disproportionné par les forces de l’ordre, sur des manifestants pacifiques, désarmés, incapables de se défendre dans leur immense majorité…
Après deux mois non seulement de silence radio complet, mais aussi de soutien inconditionnel aux « forces de l’ordre », de la part de tous les éditocrates, journalistes, grands reporters et petits courtisans que compte ce pays,....Alleluia ! « ils » se réveillent enfin…
« Ils » ? BusinessFinancesMédias TV, Libération, Le Figaro et consorts, la « crème » des médias oligarchiques français, possédés rappelons-le à 90% par une dizaine de milliardaires proches du pouvoir…
BFM, hier :
Violences policières : les lanceurs de balles de défense sont-ils trop dangereux ?
Libération, ce matin :
Violences policières : les armes du déni
LCI, ce matin :
Gilets jaunes et violences policières : la polémique enfle autour de l'usage du LBD
Europe 1, ce matin :
David, victime de violences policières lors d'une manifestation de "gilets jaunes" : "C'est clairement voulu, c'est l'envie de blesser"
Y avait-il le même type d’article, la même vague d’indignation médiatique, la même envie de dénoncer ce scandale, ne serait-ce qu’une semaine auparavant ? Nous avons eu beau chercher, à part un article d’Acrimed (clairement pas possédé par un oligarque, et clairement pas un « grand média mainstream rempli de grands éditorialistes et de grands reporters ») daté d’il y a 21 jours ( !) (lien disponible dans le titre)
Gilets jaunes : voile médiatique sur les violences policières
article qui faisait je job, et le faisait bien...
Sinon, ailleurs ? Rien de rien…
A quoi est donc dûe cette soudaine prise de conscience de la majorité autrefois non seulement silencieuse, mais activement complice ?
Sans doute à cause de ça :
Gilet jaune dans le coma : les policiers ont-ils caché des preuves ? (vidéo)
Une nouvelle vidéo de la charge de la police à Bordeaux samedi 12, ayant amené à la blessure grave d'un manifestant montre la scène du point de vue des policiers. Il apparaît que les forces de l'ordre ont semblé dépassées par la situation et n'ont pas porté secours à la victime.
La gloire du régime macron dans toute sa quintessence…
Et cette fois-ci impossible d’affirmer qu’il s’agissait d'un sauvage venu "pour casser et tuer du policier", puisque c’est un pompier, père de trois enfants…un défenseur de la société donc, quelqu’un qui n’est pas, a priori, assimilable à un casseur ou, pour reprendre les mots de notre bien-aimé monarque micron Ier, susceptible de faire partie d' « une foule haineuse »…
Cette fois c’était trop gros, d’ailleurs, n’avait-on pas aussi pu lire, quelques heures après « ce malheureux incident », cette magnifique déclaration du directeur général de la police nationale, relayée partout sur les médias et les réseaux ?
RT, le 16/01/2019 :
LBD contre les Gilets jaunes : le chef de la police rappelle les règles à ses subordonnés
Face à la polémique grossissant sur le recours aux armes non-létales par la police lors des manifestations des Gilets jaunes, le directeur général de la police nationale a envoyé à ses subordonnés un document rappelant les conditions du recours au flash-ball.
Pas sûr que cela ne suffise…Il semblerait que cette instruction (très) tardive, n’ait plutôt pour effet, que de se couvrir au cas où un mort serait à déplorer. Comment croire en effet qu’elle n’arrive que maintenant, deux mois après le début du mouvement, alors que depuis au moins cinq semaines, le niveau de répression est totalement inédit, et signalé comme tel par Amnesty International notamment ? Ainsi dès le 17 décembre, cette association qui exerce une veille sur les répressions policières et étatiques, partout dans le monde, alertait :
ENQUÊTE
USAGE EXCESSIF DE LA FORCE LORS DES MANIFESTATIONS DES "GILETS JAUNES"
Publié le 17.12.2018.
Là aussi, silence assourdissant de tous les bien-pensants médiatiques, pas un BHL, un Ferry, un Toussaint, une Salamé ou que sais-je quel autre complice objectif de ce pouvoir aux abois, en train de se transformer en lacrymocratie.
Et que dire du sinistre de l’intérieur, Castaner, interpellé à l’Assemblée par un député FI ? N’a-t-il pas affirmé, droit dans ses bottes " « Moi je ne connais aucun policier, aucun gendarme, qui ait attaqué un manifestant. À l'inverse, j'ai vu des manifestants attaquer systématiquement nos forces de sécurité(…) »
Un telle dénégation ne confine-t-elle pas au psychiatrique ?
Alors, pour notre belle presse journalistique française, il apparaît désormais clairement que ça devenait trop gros pour rester invisible.
Déjà, il y a deux ans lors des manifestations contre la loi El Khomri, dite « Loi (de casse du Code du) Travail », le niveau de répression avait atteint ce pic, cette intensité nouvelle qu’on lui connait désormais : usage disproportionné de grenades dites « de désencerclement » jetées, au mépris de tout le règlement, directement à la tête des manifestants, occasionnant de nombreuses blessures, avec notamment le coma d’un photographe de 28 ans atteint par un éclat…on avait échappé de peu au pire. Mais il y avait quand même eu plusieurs éborgnés, et quelques mutilés…sans parler des 48 plaintes contre l’IGPN.
L’opération anti-ZAD avait également vu le niveau de répression monter d’un cran :
https://zad.nadir.org/spip.php?article5633 (attention personnes sensibles s’abstenir, images choquantes)
plusieurs dizaines de blessés, dont certains très graves, suite à l’emploi massif de grenades (plusieurs milliers tirées en quelques jours…)
Retour à l’envoyeur.. Le 19 avril 2018, lors d’une action symbolique, des militants anti-aéroport ont déposé plusieurs mètres cubes de douilles de grenades lacrymogènes ramassées sur la ZAD, devant la préfecture, à Nantes. Deux femmes étaient poursuivies pour dépôt d’ordures.
Là aussi, « l’IGPN avait été saisie ». Sans aucun résultat, tous les policiers et autres CRS mis en cause avaient été blanchis par les « bœufs-carottes ».…Un petit mot sur cette institution, L’iGPN. Dès qu’une violence policière semble assez sérieusement avérée pour que la plainte soit estimée recevable par … la police (passons sur ce premier « filtre », qui en dit long sur le nombre réel d’affaires passées à la trappe), l’IGPN est « saisie ». Ses membres étant des policiers directement nommés par le Ministère, on ne s’étonnera pas de savoir que seule une affaire sur dix, environ, aboutisse à quelque chose de concluant… en France, « seulement » 5 morts sont directement imputables au maintien de l’ordre depuis 40 ans (Source). On pourrait se féliciter de ce chiffre, ou se demander non pas si, mais quand il sera dépassé..
Car désormais, ce qui est en cause c'est l'emploi massif de ces LBD, ou Lanceurs de Balles de Défense, par des agents de la BAC appelés en renfort, et qui d'une, ne sont pas formés au maintien de l'ordre comme les CRS, et de deux, sont lâchés dans la rue, tels des miliciens, sans presqu'uaucun contrôle de leurs actions...rappelons que depuis quelques années, ce nouveau type de Flashball, considérablement modernisé, est responsable d'au moins 23 mutilations directes (perte de l'oeil, défigurations...) et d'au moins un mort (Source ).
Si le régime macronien n’arrête pas sa fuite en avant, il se pourrait que ce chiffre soit hélas très rapidement dépassé dans les mois qui viennent. Avec, à la clé, une explosion sociale dévastatrice pour un pouvoir qui se retrouverait totalement nu, exposé à la face de l’opinion internationale, dans toute son essence répressive et totalitaire.
Reste la presse, cette magnifique presse française, tous supports et canaux confondus, télés, journaux, radios... toute désormais acquise à la cause des victimes, comme on peut le remarquer ces jours-ci. Quelle ouverture d'esprit, quelle prise de conscience, quel désillement !
On peut légitimement s’interroger sur ce véritable bal des faux-culs : durera-t-il jusqu’à la dernière danse du régime de Micron 1er ? Et les Français, gilets jaunes ou pas, s'en souviendront-ils, lorsque les masques tomberont pour de bon, et que le roitelet sera mis à nu ?
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