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Accueil du site > Tribune Libre > Le rouge baiser sur le tableau blanc

Le rouge baiser sur le tableau blanc

Pour avoir osé poser l’empreinte rouge de ses lèvres sur une toile blanche d’un artiste nommé Cy Twombly exposée à la Fondation Lambert à Avignon, le 19 juillet 2007, Mme Rindy Sam a été condamnée par le tribunal correctionnel d’Avignon, le 16 novembre 2007, à verser 1 000 euros de dommages et intérêt au propriétaire de la toile qui réclamait 2 millions d’euros et 33 400 euros de frais de restauration, 500 euros à la Fondation Lambert et un euro symbolique à l’auteur.

Un critique, Jean-Philippe Domecq, a parlé à propos de la production artistique de ces cinquante dernières années de « Misère de l’art » (Calmann-Lévy, 1999). Cet incident romanesque l’illustre à sa façon.

Imposture, arrogance et nihilisme

Il ne s’agit pas d’approuver la conduite de cette jeune femme. La liberté d’expression impose le respect dans son intégrité de l’opinion qu’on ne partage pas. Combattre ce qu’on juge être une imposture, nécessite d’autre moyens. Mais il est vrai que quand l’imposture s’affiche avec autant d’arrogance, certains peuvent justement perdre leurs moyens. Un tableau blanc présenté comme une œuvre d’art, dont le prix peut monter à 2 millions d’euros, réunit les conditions de cette imposture et de l’arrogance avec en prime le cynisme du nihilisme.
On peut donc légitimement s’étonner que des galeries sérieuses et même des musées prestigieux, exposent volontiers depuis quelques années des toiles blanches ou peu s’en faut. C’est même arrivé à l’Accademia de Venise : la particularité de « l’œuvre » était son attache lumineuse. Le peintre américain Ryman s’est fait, lui une spécialité dans le blanc et pas seulement en janvier, le mois du blanc. Il a ainsi trouvé abri pour exposer dix-sept toiles blanches : du blanc, rien que du blanc plus ou moins blanc sur des surfaces plus ou moins lisses, "frottis, empâtements ou glacis", précisait le dépliant publicitaire : on tenait là le sommet de la création, selon certains thuriféraires qui se gaussaient de l’incompréhension "populiste" de ceux qui, pourtant, ne demandaient qu’à voir, à sentir ou à comprendre.
Seulement qu’y a-t-il donc à voir, à sentir ou à comprendre dans une toile blanche, sinon l’abdication de l’esprit devant les injonctions d’une autorité, maîtresse des représentations de la réalité qu’elle entend, selon son caprice, livrer à ses sujets, au mieux de ses intérêts ?

ART de Yasmina Réza

La pièce de théâtre, ART de Yasmina Réza, finalement montée en France en 1994 après avoir dû d’abord chercher refuge et succès à l’étranger, est sans doute la meilleure réplique qu’on ait donnée à l’imposture de cet art contemporain de la toile blanche.
Trois amis de longue date sont au bord de la rupture depuis que l’un d’eux, Serge, joué par un Fabrice Lucchini illuminé, « a acheté un tableau (...), une toile d’environ un mètre soixante sur un mètre vingt, peinte en blanc. Le fond est blanc et si l’on cligne des yeux, on peut apercevoir de fins liserés blancs transversaux. » Marc, réfractaire à ce dévoiement de l’art, joué superbement par Pierre Vaneck, est bouleversé d’apprendre que son ami ait pu mettre « deux cent mille francs » dans cette « merde blanche » : « Vingt briques ! », répète-t-il hébété. Peut-on continuer à rester l’ami de quelqu’un qui perd le discernement à ce point ?

- L’argument d’autorité et la soumission aveugle qu’il impose
S’ensuit aussitôt un échange acerbe entre lui et Serge qui le prend de haut et adopte la stratégie bien connue de l’argument d’autorité en dehors duquel il n’est que désorientation et pas de salut : «  Tu ne t’intéresses pas à la peinture contemporaine, lui reproche-t-il, tu ne t’y es jamais intéressé. Tu n’as aucune connaissance dans ce domaine, donc comment peux-tu affirmer que tel objet, obéissant à des lois que tu ignores, est une merde ? - Mais, c’est une merde ! », lui réplique Marc, en lui opposant la force de l’évidence. Seulement l’argument d’autorité même le plus fantasque n’a jamais cédé devant la force probante de l’évidence : lui seul peut décider que la raison est folie et la folie, raison. Jean de La Fontaine l’a montré dans plusieurs fables, dont Le Loup et l’Agneau et Les Oreilles du lièvres. Il faut entendre Serge parler avec vénération de « l’artiste » qui a créé ce tableau : Marc s’en étonne et lui reproche cette allégeance dévote comme s’il s’agissait d’"une divinité". « Mais pour moi, lui réplique Serge, c’est une divinité ! Tu ne crois pas que j’aurais claqué cette fortune pour un vulgaire mortel ! »

- Les arguments rituels d’une secte
Appelé à départager ses deux amis, Yvan, joué subtilement par Pierre Arditi, est embarrassé. Il n’aime faire de peine à personne. Il ne sait que penser. Serge lui reproche de « jouer au réconciliateur du genre humain ». Yvan tente l’impossible, mais pour cela, il lui faut faire le grand écart quand il relate à Marc sa visite chez Serge qui lui a montré son tableau. On retrouve dans ses propos les arguments rituels si souvent développés par les adeptes de cette secte artistique. « Tu vas être étonné, le prévient-il, (...) je n’ai pas aimé... mais je n’ai pas détesté le tableau.  » Marc explose : «  Bien sûr, on ne peut pas détester l’invisible, on ne déteste pas le rien.  » Et Yvan d’enfiler les perles scolastiques propres à justifier l’injustifiable : «  Non, non, corrige-t-il, il y a quelque chose, ce n’est pas rien . (...) C’est une œuvre, il y a une pensée derrière ça. (...) C’est l’accomplissement d’un cheminement. (...) Ce n’est pas un tableau fait par hasard, c’est une œuvre qui s’inscrit à l’intérieur d’un parcours.  » Forcément, Marc s’esclaffe : «  Tu répètes toutes les conneries de Serge !  », Yvan curieusement insiste : «  Je ressens une vibration  », confie-t-il, soudainement inspiré. Marc, qui connaît sa gentillesse et « ses égarements d’indulgence », l’amène pourtant à avouer que, s’il recevait ce tableau en cadeau pour son prochain mariage, «  bien sûr, (il ne serait pas) content ! »

- Un principe artistique indigent : la loi de la surprise
Mais en présence de Serge, il rechute : il trouve que ce tableau n’est pas « tout à fait » blanc : «  (il y voit même) des couleurs !  » Marc ne se contient plus et l’injurie : «  Tu n’as pas de consistance, lui lance-t-il. Tu es un être hybride et flasque.(...) Un petit courtisan, servile, bluffé par le fric, bluffé par ce qu’il croit être la culture.  »
La rupture entre les trois amis est bien près d’être consommée. Marc croit pouvoir toutefois encore l’éviter en s’efforçant d’exposer calmement son point de vue : «  Je ne crois pas aux valeurs qui régissent l’Art d’aujourd’hui, explique-t-il. La loi du nouveau, la loi de la surprise. La surprise est une chose morte. Morte à peine conçue, Serge. »
Mais la querelle s’envenime à nouveau jusqu’à prendre des allures de « cataclysme pour une merde blanche », selon le mot d’Yvan, qui a repris ses esprits.
Les trois amis, pourtant, hésitent à commettre l’irréparable. Serge fait un pas vers Marc : en lui tendant un feutre bleu, il lui lance, comme un défi, une offre incroyable : qu’il dessine ce qu’il veut sur ce tableau puisqu’il n’y a rien dessus ! Dissuadé activement d’y répondre par Yvan paniqué, Marc finit par s’emparer du feutre et croque sur le tableau blanc un skieur hilare avec son bonnet à pompon dévalant un champ de neige. Un peu plus tard, ils rendront le tableau à sa blancheur originelle grâce à un produit détergent spécial.
Ne resteront alors sur le tableau blanc que les fins liserés blancs transversaux qu’on croit apercevoir, commentera Marc en faisant lui aussi par amitié un pas vers Serge, ... comme les traces qu’aurait laissées un skieur enfui dans une descente.
La crise est derrière eux, mais ce tableau blanc a bien failli faire voler en éclats leur amitié.

« La loi du nouveau, la loi de la surprise ! dénonçait Marc. La surprise est une chose morte. Morte à peine conçue.  » Qu’ajouter de plus devant un tableau blanc ? Yasmina Réza a sans doute signé avec ART sa pièce la plus réussie en livrant cette satire sur la « misère de l’art » contemporain. Paul Villach


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45 réactions à cet article    


  • La mouche du coche La mouche du coche 16 novembre 2007 15:16

    Rien compris. smiley


    • stephanemot stephanemot 19 novembre 2007 11:25

      Je vois deux oublis :

      * Sam a également écopé de 100 heures de travaux - il y a une volonté de lui faire apprendre une leçon et méditer sur son acte

      * rendons hommage à Demian West, tellement à l’West depuis quelques semaines (au Far West d’ailleurs) qu’il ne récolte pas le 3e tome des aventures de Sam après avoir produit les 2 premiers ;)


    • docdory docdory 16 novembre 2007 16:15

      @ DW

      Condamnation faible , dites-vous ??? Les 33400 euros demandés pour effacer une trace de rouge à lèvres sont encore en délibéré , ça fait cher l’application de démaquillant !


    • Julien Julien 16 novembre 2007 16:24

      C’est Rindy, et pas Cindy...

      D’autre part, quand on sait que la toile en question n’est pas un monochrome mais... une toile vierge aprêtée, il devient difficile, vraiment difficile, de ne pas considérer cette affaire comme une vaste imposture.

      Dommage que la justice se soit fait berner : 1000€ c’est quand même cher payé pour une toile vierge !


    • docdory docdory 16 novembre 2007 15:47

      Cher Paul Villach

      L’été dernier , j’ai pris une semaine de congé pour poser un revêtement en fibre de verre dans la cage d’escalier et au premier étage de ma maison , et peindre cette toile de verre en blanc . En effet , les devis exorbitants des divers entreprises de peintures consultées excédaient largement le chiffre d’affaire ( et non seulement le bénéfice ! ) que m’aurait rapporté une semaine d’exercice de la médecine générale . J’avais en mon for intérieur pesté contre ces abus tarifaires , mais finalement , pourquoi en vouloir à ces peintres en bâtiment , qui auraient eu bien tort de se priver , alors que peindre ( probablement au rouleau ) un triptyque en blanc monochrome peut rapporter deux millions de dollars , dès l’instant ou l’on est pris pour un artiste !

      Evidemment , l’artiste et le marchand d’art protesteront que ce qui coûte cher dans cette toile peinte en blanc , c’est la « démarche » artistique ... On imagine la « démarche » que pourraient avoir des artistes d’autres arts voulant « faire moderne » et donc proposer l’équivalent de ce tableau blanc : un chef triplement étoilé se mettant à proposer des assiettes vides , un compositeur contemporain proposerait un concert de silence ( les toussotements des bronchiteux présents dans le public faisant office d’oeuvre musicale ) , un sculpteur ne proposant qu’un socle sans rien par dessus , sa « démarche » ayant été d’avoir sculpté l’atmosphère au dessus dudit socle , et enfin un écrivain faisant éditer cent pages blanches ( finie dans ces conditions l’’angoisse de la page blanche , mais attention aux protestations des ouvriers du livre ! )

      Evidemment , j’aurais rêvé d’une autre suite judiciaire à cette affaire ! Imaginons que celle-ci ait été confiée à un juge facétieux ou pinailleur , ou même simplement intègre , et que ce juge ait déclaré dans ses attendus qu’une toile peinte uniformément en blanc ne saurait être considérée comme une oeuvre d’art , et qu’en conséquence l’adjonction de rouge à lèvre ne saurait être constitutive du délit de dégradation volontaire d’oeuvre d’art ( délit pour lequel l’embrasseuse de tableau a quand même été très lourdement condamnée ) . Un tel juge aurait été semblable à l’enfant de la légende , qui s’exclamait que le roi était nu : un véritable bienfaiteur de l’humanité ! J’avais imaginé avec délectation le choeur d’indignation de l’intelligentsia artistique ( dans ce cas précis , ne devrait on pas plutôt parler d’imbécilentsia ? ) qui aurait fait suite à un tel jugement , je ne peux qu’être profondément déçu de la réalité judiciaire ! Encore une fois , le conservatisme a prévalu ...


      • Paul Villach Paul Villach 16 novembre 2007 16:18

        Vous parlez d’or, cher Docdory ! Paul Villach


      • Leekid 19 novembre 2007 10:10

        @Léon

        Concernant le morceau ’silencieux’, vous parlez sans doute de « 4’33 » de John Cage.


      • Varsass 16 novembre 2007 17:09

        Alors là ! Je viens de m’inscrire juste pour pouvoir réagir à ça !

        Cette Mme Rindy Sam aurait embrassé la joconde, j’aurais été le premier à crier au scandale, mais là ...

        Alors je ne suis peu être que l’abruti moyen qui ne comprend rien à « l’art moderne », mais je vois pas en quoi une toile vierge peut valoir 2 millions (finalement j’ai peut être toutes mes chances si je me lance dans une carrière d’artiste smiley ), et si le tableau est vraiment irrécupérable, je pense que l’artiste qui l’a pondu ne devrais pas avoir trop de mal à en faire un deuxième smiley. (Laissé moi 10 minutes que je passe à Loisir & Création et j’en aurai tout le tour du ventre)

        En plus, quitte à se la jouer « artiste dans le mouv’ de la new générachonne » il aurait suffit de dire que c’était un « happening » (le mot à la mode chez les pseudo-artistes) et le prix du tableau ne s’en serait porté que mieux.

        Enfin bref, tous ces pondeurs de croutes modernes m’énervent au plus haut point, mais pas autant que leurs cliques de pseudo-intellectuels branchés, qui ont compris, eux (pas moi, dommage), ce que c’était que l’art.

        Quand je vois ça, je me dis qu’au final être un inculte totalement hermétique à « l’art moderne », ça évite des problèmes d’argent.


        • Newby Newby 16 novembre 2007 23:38

          Hélas oui, comme beaucoup d’entre nous vous fais partie du club des abrutis moyen qui ne comprennent rien à « l’art moderne ».

          En fait ce qui vaut deux millions de dollars comme dit Docdory, c’est la démarche artistique.

          C’est cela qu’il faut admirer, le travail que représente l’étonnante capacité de l’artiste à « vendre » à des « spécialistes » ses travaux comme des oeuvres et de les convaincre du bien-fondé de sa démarche.

          C’est un autre monde, et vous n’êtes pas tombé dedans tout petit comme certains, mais si cela peut vous consoler, vous n’êtes pas seul. smiley


        • Bravo une fois de plus à Paul Villach pour cet article et merci à docdory. Nous voici au clair ! J’ai trouvé DW très en dessous de ses possibilités ...pourtant cet article le concernait sans doute plus que d’autres J’attends mon tombereau de .... nous verrons bien !


          • Paul Villach Paul Villach 17 novembre 2007 10:59

            Question « beaufitude », Monsieur West, vous en connaissez un morceau ! Vous n’avez pas de rival ! Il n’est que de voir la photo des pauvres filles que vous affichez comme un camionneur en guise de logo sur votre ambulance. Paul Villach


          • docdory docdory 17 novembre 2007 12:08

            @DW

            « Les premiers venus veulent y faire la leçon à ceux qui savent » déclarez vous . Je suppose que vous prétendez vous classer parmi « ceux qui savent » ? Je crains dans votre cas l’apparition rapide d’un oedème des chevilles ...


          • roOl roOl 18 novembre 2007 17:30

            ...

            quel ramassis de conneries, pour quelqu’un qui ne vient ici pour « se marrer en regardant les ignorants ».


          • armand armand 17 novembre 2007 00:18

            Merci à l’auteur pour sa démonstration de l’absurde, à Docdory pour ses analogies plus riches qu’il ne le pense : en effet, il y a bien des ’compositeurs’ modernes qui ont imaginé des symphonies silencieuses !

            La peur d’être comparé aux totalitaires d’antan, contempteurs de l’art ’dégénéré’, empêche certains de dire une évidence, l’’art’ conceptuel est souvent une imposture où la foutaise se combine au snobisme pour les délices masturbatoires de cénacles richissimes. Ce n’est pas de l’art, car celui-ci ne peut être séparé de savoir-faire, et consister en un ’statement’ incompréhensible à la quasi-totalité de l’humanité.

            Est-ce si surprenant que l’un des oligarques français les plus riches, typique de ces élites qui ont dynamité la tradition, soit un grand collectionneur de ce type d’’oeuvre’ ?


            • vinvin 17 novembre 2007 00:59

              Bonjour.

              C’ est la plus grosse fumisterie que j’ ai jamais vu de ma vie !

              Un tableau fait d’ une toile blanche sans aucun motif dessus évalué a un somme d’ argent « gastronomique ».....

              Cette femme en déposant un baiser et une trace de ses lèvres rouge fait un contraste avec la toile blanche, donc non seulement elle ne détériore pas le tableau, mais au contraire, elle le met en valeur.

              L’ « imonde » justice nationale, ainsi que l’ auteur de cet horrible tableau, doivent ils faire payer 1000 euros a cette personne, ?.... ou bien doivent-ils au contraire lui donner une prime pour avoir mis le tableau en valeur en associant le rouge sang de ses lèvres faisant un contraste avec le Blanc Livide de sens de ce tableau ?

              Le blanc est une couleur mortuaire, (d’ ailleurs c’ est la couleur du deuil en Chine).

              Bien cordialement.

              VINVIN.


              • isis 17 novembre 2007 01:02

                ah....

                Voilà un sujet qui ne m’est pas étranger...

                Graphiste, artiste, c’est très précisément ce que je revendique.

                Or là, c’est un fait, je me sens rassuré à vous lire. En effet, reconnaissons le , il y a que peu de rapport entre un boticelli et une toile prête à peindre... Il y a en fait tout l’impatience reine de ce siècle passé, celle qui voudrait que l’on peut toujours atteindre un but en dépensant toujours moins d’énergie, demandant moins d’investissement.

                C’est vrai pour tout, quand on fait nos courses, quand on regarde la télé,... , et même lorsque l’on parle d’art... on peut toujours faire mieux pour moins cher ! Ici, le coût en question n’est bien évidement pas celui de l’oeuvre mais celui de « l’artiste ».

                Ce qui fait la qualité d’une oeuvre, à mon sens, c’est l’investissement de l’artiste. Investissement dans la maîtrise des techniques qui lui permettent de s’exprimer à l’aide du médium choisi. Investissement dans la réalisation de l’oeuvre qui sous entend que l’artiste y exprime des choses profondes ; Condition sine qua non pour que le spectateur puisse y trouver quelque chose aussi. Cette richesse de l’oeuvre n’est pas forcement consciente, mais elle nécessite au moins que l’inconscient de l’artiste trouve dans le médium choisi un mode d’expression maîtrisable.

                Pourquoi est ce nécessaire ? par ce que sans ça, le pseudo artiste est relégué au rang de penseur,de philosophe, voir de journaliste. Rien de bien dramatique (encore faut il avoir quelque chose à dire) , mais c ’est simplement pas la même chose !! Le mercantilisme de notre société est la première raison de tant d’impostures. Le besoin de faire partie de l’élite, d’être différent, au dessus des autres en est la deuxième raison.

                Je crois, je revendique même, l’idée qu’être un artiste c’est exprimer avec maîtrise des émotions toutes personnelles. Cette maîtrise est indispensable car, comme la sagesse et la pertinence, elle demande une vie entière pour l’acquérir. Elle est donc la condition qui nous évite de « parler trop vite ou trop tôt ». Quand je rencontre des individus capable d’exposer des oeuvres que je qualifierai de « supercherie », j’ai honte pour eux ; Et humblement je retourne à mes dessins, me satisfaisant du sentiment que d’années en années je dis mieux les choses, et que je dis des choses plus profondes et plus personnelles.... et ca suffit à mon bonheur !


                • Jean TITOUPLIN Jean TITOUPLIN 17 novembre 2007 08:00

                  Bon, restons positifs. Je suis en train de refaire mes plafonds et il me reste un peu de vinyl.

                  Si un mécène veut bien m’offrir une toile vierge et un chevalet ( trop cher pour ma bourse), je vous fais « la révolte du prolétariat contemplant un couteau démanché sans lame ».


                  • Belle unanimité (moins un) pour suivre totalement l’auteur de ces lignes.


                    • Halman Halman 17 novembre 2007 10:53

                      Bon article.

                      Sous prétexte de mouvement artistique génial on nous fait adminrer des merdes enrobées de chocolat.

                      Ces artistes qui se mettent sur la touche de la société, mais croient y participer, se permettant même de donner des leçons .

                      Que ce soit faire une toile blanche ou y déposer du rouge à lèvres, les deux démarches sont tout aussi nulles.


                      • Paul Villach Paul Villach 17 novembre 2007 11:57

                        Ce reproche de faire le lit des « fascistes » est celui de tous les totalitaires qui se sentent menacés.

                        Sachez que c’est « le non-sens », encouragé et célébré par les cyniques affairistes, qui prépare le terreau de toutes les aventures imbéciles, en vidant les esprits de tous repères sensés.« Ces cerveaux disponibles » peuvent alors être livrés à la satisfaction des pulsions les plus destructrices, les biceps, tatoués d’une pin-up ou d’un dragon, tenant lieux d’hémisphère cérébraux

                        Or, oser ériger un tableau blanc en oeuvre d’art est un non-sens.

                        C’est pourquoi la pièce de théâtre, « ART » de Yasmina Réza est si salutaire. Elle « disperse façon puzzle », « volatilise », « ventile » férocement toutes les intimidations que vous et vos semblables avez comme prétendus arguments pour justifier vos tristes facéties de potaches.

                        Qu’on en soit aujourd’hui à énoncer ces évidences, c’est dire la régression mentale qui est prédominante. Paul Villach


                      • La mouche du coche La mouche du coche 17 novembre 2007 14:12

                        « la pièce de théâtre, »ART« de Yasmina Réza est si salutaire. »

                        Son livre sur Nicolas Sarkozy était mauvais. Son théâtre a de grandes chances de l’être aussi. smiley


                      • Newby Newby 17 novembre 2007 14:21

                        @ la mouche

                        En effet vous n’avez rien compris !


                      • roOl roOl 18 novembre 2007 17:37

                        @ Demian Wild Wild West

                        Connaissez-vous la loi Godwin ? Si tel n’est pas le cas, je vous conseille de l’apprendre par cœur rapidement, elle fera de vous un gourou de l’internet, admiré sur les forums, vénéré comme un Grand Ancien...

                        Que dit cette loi ? Elle s’applique traditionnellement aux newsgroups, et par extension à tous les forums en ligne (notamment par le Web) : « Plus une discussion s’allonge sur un forum, plus la probabilité augmente qu’un des participants recoure à un argument basé sur une comparaison avec les nazis, Adolf Hitler ou le IIIe Reich, sur le modèle « vous êtes des nazis... » ». Lorsque cela arrive, on nomme ce message insultant le point Godwin, et la discussion est considérée comme totalement morte. Dans les newsgroups, on décrète que celui qui a eu recours à un tel argument est le « perdant » du débat.

                        Aussi farfelue qu’elle paraisse, cette loi se vérifie toujours ; un peu de pratique des forums vous en apportera la preuve. La question n’est pas : « est-ce que la loi Godwin est valable ? », mais plutôt : « à quel moment ce forum atteindra-t-il le point Godwin ». L’expérience le prouve, tout forum, traitant de n’importe quel sujet, finit toujours par atteindre son point Godwin ; ça n’est qu’une question de temps. Que l’on cause cinéma, société, philatélie, l’un des intervenants finira systématiquement par en traiter un autre de fasciste. Ca n’est pas loufoque : c’est scientifique !

                        Dès lors, le débat est mort : on plonge dans l’affectif, l’insulté hurle sa rage parce qu’on l’a traité du pire, celui qui l’a insulté explique ensuite pourquoi il a utilisé cette formule (« peut-être excessive, mais... ») en recourant à toutes les approximations historiques et philosophiques possibles, d’autres intervenants récitent par cœur l’historique du mouvement anarchiste (allez savoir pourquoi, mais ça finit toujours comme ça...), l’outragé raconte sa petite enfance anti-fasciste, etc. À n’en plus finir, et plus personne ne sait de quoi on causait au juste...

                        Bref, lorsqu’on en arrive à faire des références au fascisme dans un forum, le débat est mort. Le point Godwin définit donc l’engueulade indépassable des newsgroups.


                      • roOl roOl 18 novembre 2007 19:12

                        et mon poing g dans ta gueule ^^

                        cela dis je pense que cela vous a été profitable tres cher ;) il faut s’ouvrir au sous-cultures, dont celle de l’usenet, que vous semblez méprisez dans votre arrogance crasse de cultures apprises.


                      • Marsupilami Marsupilami 17 novembre 2007 11:28

                        @ L’auteur

                        Excellent article, et merci à Docdory pour son savoureux commentaire. Vu que tous les murs de mon appart sont blancs, je vis à l’intérieur d’une œuvre d’art. Formidable. Je vais demander à Cy Twombly de les signer et je les revendrai aussitôt.

                        Plus sérieusement (si on peut dire), Rindy Sam est sérieusement manipulée par son ex-amant Patrick Levieux qui se fait mousser à bon compte sur son dos, et c’est assez dégueulasse...


                        • Cher D.W ... à l’ouest, Finirez vous par comprendre que l’insulte et l’invective ne font en rien avancer les débats. Voyez les notes qu’obtiennent vos commentaires. Je soupçonne même nombre de voxiens de zapper vos écrits. Mais sans doute préférez-vous le rôle du persécuté et du savant...puisqu’à vous lire presque personne ne trouve grâce à vos yeux.


                          • Jean-Phi 17 novembre 2007 11:43

                            C’est marrant de voir tant de monde s’offusquer d’un artiste qui fait du rien. Personnellement, je suis très admiratif ! Arriver a vendre du rien, on atteint la le summum du commerce !

                            La perfection ! L’energie du vide !

                            Arnaque ? Pas du tout ! les gogos qui achètent, ont d’une part les moyens et d’autre part sont contents de le faire !

                            En fait, on leur vend du bonheur.

                            Ça me rappel un film avec les inconnus (les trois freres, je crois) (a chacun sa culture) ou il y avait un tableau blanc et une antenne de télé comme oeuvre d’art. Sur le tableau, un gamin a fini par faire des dessins et sur l’antenne de télé, il y a eut finalement du linge qui y était accroche.

                            Quand on revient sur terre les choses reprennent leurs places.


                            • docdory docdory 17 novembre 2007 11:54

                              @ Paul Villach

                              Vous noterez que traiter le contradicteur de « facho » , comme le fait DW ci-dessus , a été la méthode systématiquement employée par les staliniens de toutes obédiences pour prétendre avoir raison dans une discussion au cours de laquelle ils n’ont aucun argument pertinent à faire valoir !


                              • Paul Villach Paul Villach 17 novembre 2007 12:11

                                @ Docdory.

                                Nul ne pourra le contester ! Les grands esprits se rencontrent : je viens à l’instant de servir cet argument à Monsieur West : le reproche de faire le lit des fascistes est celui systématiquement opposé par les totalitaires qui se sentent menacés.

                                Comment appelle-t-on ce type de symptôme, docteur ? « Un symptôme discriminant », je crois, puisqu’il signe une pathologie sans erreur possible.

                                Nous savions déjà que les pin-up que Monsieur West arbore comme logo sur son ambulance, le classaient parmi les camionneurs frustes et beaufs.

                                Nous savons désormais qui se cache sour le masque de Monsieur West : c’est un homme nostalgique des anciens régimes de l’Est. Très cordialement. Paul Villach


                              • Halman Halman 17 novembre 2007 12:39

                                Drôle de société où on nous fait passer pour oeuvre géniale une peinture faite avec la queue d’un éléphant, des congélateurs fonctionnant à l’extérieur, l’auteur voulant nous faire croire que c’est sensé compenser les ascendances thermiques d’air chaud de l’atmosphère, symbole anti réchauffement climatique...

                                Et quand je demande aux artistes s’ils ne pensent pas que cela pause des problèmes aux planeurs utilisant ces thermiques, réponse : « heuuuu binnnnnn heuuu... »

                                Sérieux, ça existe !

                                Les hôpitaux sont devenus des lieux de happenings d’artistes délirants autant que des lieux de soins !

                                Ca expose dans les chapelles des galeries de photos ratées noir et blancs de portraits de patients à l’heure de leur fin. Super pour remonter le moral des patients qui viennent à l’office du dimanche !

                                Ca fabrique un arbre métallique auquel du bout de chaque branche une fontaine jaillit les jours de réceptions mondaines. Arbre de 30 mètres de long alongé sur la pelouse, censé représenter les arbres abattus par la tempête de 1999, à l’endroit où les patients allaient habituellement faire leur promenade au soleil.

                                Ca colle, dans la galerie extérieure, tout le long de l’hopital, sur chaque dalle de verre transparente une feuille avec une lettre, le tout formant une phrase pseudo intellectuelle de mes fesses d’un poëte moyen ageux ayant fini sa courte vie à l’asile, privant ainsi les patients du peu de soleil de l’après midi dans cette partie de l’hopital.

                                Ca accroche, le long des toitures, des fresques sur toiles qui pendent jusqu’au sol, pile poil devant les fenètres des patients qui ne voient par conséquent plus rien dehors, ni le soleil ni les plantations des jardinniers.

                                Ca « seme » dans l’hopital des énormes sculptures marrons, de formes et de tailles d’étrons de dinosaures. Faut pas chercher à comprendre... Et c’est content, et ça en prend des photos qui paraitront dans un obscur magazine artistique des plus sérieux.

                                Et autres happenings de crétins délirants. Applaudis par des bobos qui trouvent géniale une sculpture faite de détritus de poubelles où de morceaux de ferrailles ramenés d’une casse d’automobiles, au sommet de laquelle ils ont soudé un ordinateur, bien sur pas n’importe lequel, un de ces ordinateurs mythiques de l’histoire de l’informatique dont la rareté en fait d’exceptionnels exemplaires que les musées de l’informatique et les collectionneurs s’arrachent à prix d’or. Artistes primairement anti informatique comme on est primairement anti communiste ou anti science.

                                Et à chaque fois, tout ce cirque donne lieu à une inauguration au champagne, en plein milieu d’un hopital et des patients, avec journalistes et mondanités.

                                Groupes et associations d’artistes squattant un ancien batiment désafesté, se faisant subventionner par la direction de l’hopital, tronquant du coup du budget qui serait autrement plus utile pour embaucher du personnel et investir dans du matériel de soins. Et quand on leur explique ça se fout de votre tronche, genre qu’est ce qu’il peut y comprendre ce pauvre supot crétinisé de la science en blouse blanche. Et après on va nous parler du trou de la sécu et on vire du personnel et on dérembourse les médicaments pour soi disant le comber...

                                Groupe faisant sa musique de tams tams assourdissants et dissonants en face d’un service de soins la nuit, empéchant les patients de dormir mais n’en ayant rien à foutre malgré les amendes de la police.

                                Et ils sont contents, ils ont réussi leur cirque d’anti sociaux primaires. Pour eux c’est une victoire, pas une honte.

                                On ne va quand même pas me dire que ces artistes pensent au bien du patient et ont la moindre considération pour autrui ! C’est tellement débile de penser aux autres. Surtout venant de nous pauvres incultes en blouses blanches.

                                C’est vrai quoi, c’est tellement smart, trop cool quoi d’emmerder le monde sous prétexte d’une culture artistique de poubelle d’incompris qui se croient cultivés parce qu’ils ont lu deux philosophes et trois poëtes, parce qu’ils ont glandé en fac plutot que de bosser pour soigner des patients, pauvres supots décérébrés du patronariat que nous sommes trop incapables de les comprendre.

                                Mais trop contents de se faire soigner dans nos services quand ils tombent malades !  smiley

                                Pendant ce temps là, comme des cons que nous sommes, nous préférons nous occuper des patients. Nous devons être vraiment trop cons.

                                Pendant ce temps là, j’admire le ciel, les étoiles, les galaxies, les planètes. Et je me marre en sachant que jamais aucun artiste n’arrivera à faire aussi sublime que la nature. Même pas en rêve.

                                 smiley


                                • Halman Halman 17 novembre 2007 12:47

                                  Vous remarquerez au passage que cela ne les dérange pas de cracher dans la soupe de ceux qui les hébergent.


                                • fkl... 17 novembre 2007 15:17

                                  Un tableau blanc qui fait couler beaucoup d’encre

                                  J’aime, j’aime pas, pour moi l’art ce résume à cela. La démarche ou l’ego de l’artiste je m’en fou (ça c’est pour DW). Un artiste qui n’a rien à dire et qui l’expose, c’est drôle non ! Bon je vous laisse, TF1 m’appel....

                                  @ L’auteur : Votre article m’a donné envie de voir la pièce. Merci

                                  http://www.dailymotion.com/video/xkadp_art-piece-de-yasmina-reza_fun


                                  • fkl... 17 novembre 2007 15:59

                                    Cy Twombly : c’est du lard ou du cochon.

                                    Désolé, je vais moi même me mettre-1. je retourne vite regarder vidéo gag


                                    • fkl... 17 novembre 2007 16:19

                                      @ Docdory. Et Villach

                                      Votre réflexion sur les méthodes de DW m’a fait penser au livre de KUNDERA -

                                      La vie est ailleurs.


                                    • Pie 3,14 17 novembre 2007 16:37

                                      La tradition des monochromes est déjà ancienne dans l’histoire de l’art occidental. Elle participe, au début du siècle, à la destruction des conventions héritées de la Renaissance avec Malévitch qui exécute un « carré noir sur fond blanc » en 1915 et un « carré blanc sur fond blanc » en 1918.

                                      Ceux qui ricanent grassement devraient plutôt consulter quelques informations disponibles dans de nombreux ouvrages et sur le net.

                                      La femme qui a dégradé la toile de Cy Twombly joue gros. Elle n’appartient pas au groupe des cinglés classiques qui dégradent des oeuvres d’art.

                                      C’est une opération d’autopromotion qui peut la rendre célèbre et lui donner une place ( on dit que certains seraient prêts à acheter la toile telle quelle pour une somme faramineuse), ou au contaire la déconsidérer et lui apporter les pires ennuis.

                                      Pour ma part , je ne suis pas trés touché par ce geste qui se veut artistique. J’y vois trop de calcul personnel et je préfère ceux qui dégradent leurs propres oeuvres( c’était le cas de certains DADA) ou créent des oeuvres éphémères.


                                      • armand armand 17 novembre 2007 17:21

                                        Curieux comment DW qui pratique un art des plus classiques, consacré à un sujet que tout le mon de peut comprendre et apprécier, s’amuse à défendre des fumistes qui n’ont d’artistes que le nom. Depuis que Dorgelès a démonté la supercherie en faisant peindre une toile à l’âne de Frédo, patron du Lapin Agile. Et pourtant, l’oeuvre de ’Boronali’ (nom d’artiste de l’âne) c’est encore mille fois plus riche que le vide qu’on nous présente.

                                        Il faut rendre l’’oeuvre’ célèbre de Duchamp à sa fonction première.


                                        • boumboum 18 novembre 2007 17:17

                                          @ Mr Villach, je ne pensais pas que je pourrais être à ce point d’accord avec vous sur l’art.

                                          @DW, pourquoi ne pas nous éduquer à votre art ?

                                          je ne peux pas m’empécher de faire une petite pub pour ce site : www.deviantart.com


                                          • Philippakos Philippakos 18 novembre 2007 22:28

                                            Les toiles blanches, ou monochromes, ou un trait de crayon sur une toile gigantesque (Miro)... plus généralement des pieds de nez à l’idée de l’objet pensé, fini, tavaillé, sur lequel on a sué, où on a voulu impliquer tout son être, quand on a voulu transmettre une sensation, une impression, une idée même... vaste problème qui amène chaque fois beaucoup de commentaires. Force est pourtant de constater que cet art-là existe, qu’il se vend bien (pas tout, qu’on se rassure) et qu’il fait maintenant partie de l’histoire de l’Art. Alors pourquoi ? Il vaudrait mieux poser la question en ces termes que de jeter le bébé avec l’eau du bain : monochrome, il se fout du monde, c’est n’importe quoi.

                                            Je ne suis pas peintre mais ai des amis qui le sont. Se planter aujourd’hui devant une toile avec ses pinceaux, en sachant tout ce que les prédécesseurs ont fait, leur pose de sacrés problèmes à ces artistes. Peut-être était-il mieux d’ignorer ce que faisaient ses voisins, même lointains, mais aujourd’hui ce n’est plus possible à moins de verser dans l’autisme. On ne peut plus faire abstraction de l’histoire quand on se retrouve devant la toile blanche (justement).

                                            Constatons tout de même que la désacralisation de l’Art, qui ne date pourtant pas d’hier, a échoué. Le baiser rouge sur la toile blanche (de l’article) en faisait partie et son auteur est attaqué devant les tribunaux. Celui qui casse méthodiquement les urinoirs de Duchamp (pourtant chef de file de cette tendance) aussi. Les expériences tentées pour faire agir le public d’une exposition directement sur les oeuvres ne rencontrent le plus souvent que les réticences des visiteurs qui n’osent pas... Quand une oeuvre est accrochée dans une salle d’exposition, on n’y touche pas... c’est ainsi et cela va à l’encontre du souhait de certains artistes qui manquent donc leur cible. Fluxus qui prônait l’art de tout le monde, l’art du pas sérieux, l’art plaisanterie dans les années soixante est retombé dans l’oubli, ou plutôt son esprit n’a pas connu les retombées qu’il escomptait.

                                            Quand l’objet se sépare de la création (production industrielle) l’art ne doit-il pas en tenir compte ? Pour ma part je reste peu sensible à la négation. Et la toile blanche (je me fais l’avocat du diable), c’est le degré ultime de l’anticréation, la création zéro, l’absence ou la négation. Si des galeries acceptent de l’exposer, si des acheteurs consentent à dépenser de grosses sommes pour l’acquérir, c’est le reflet incontestable d’une époque dont on peut penser ce qu’on veut mais dont on fait malgré tout partie.


                                            • docdory docdory 19 novembre 2007 09:31

                                              @ Philippakos

                                              A mon avis , les meilleurs artistes du XXI ème siècle ont déserté les galeries d’arts depuis longtemps .

                                              Les génies modernes du graphisme préfèrent employer leur talent à faire de la bande dessinée , créer des univers fantastiques dans les jeux vidéos , travailler à la réalisation d’images de synthèse , collaborer à des décors de cinéma ( Giger , le plus grand artiste vivant , à mon sens , faisant les décors et le monstre du film « Alien ») , reconstituer en images de synthèse animées les dinosaures et autres animaux disparus dans les superbes documentaires de la BBC , faire partie des équipes de réalisation de dessins animés etc ...

                                              Ces graphistes de génie resteront , pour nombre d’entre eux , dans un relatif anonymat , mais ils ont compris que leurs talents de graphistes pourront bien mieux s’exprimer dans ce genre d’activité qu’à peindre des toiles en blanc monochrome !


                                            • armand armand 19 novembre 2007 17:55

                                              Nous voici enfin d’accord - effectivement les graphismes dans le S. des A. sont absolument époustouflants. Mention spéciale, le siège de Helm’s Deep dans le n°2 (en plus, cela correspondait à ce que je m’étais imaginé spontanément quand j’ai lu le bouquin pour la Ière fois), mais les représentations de Fondcombe sont également remarquables. La comparaison avec DÜrer est méritée.


                                            • ernst 19 novembre 2007 01:39

                                              Magnifique opération de communication. Pour 1.000€, que paiera volontiers l’artiste du blanc, combien d’articles, à commencer par les vôtres ?...Cette opération est certainement la meilleure de l’année pour lancer un nom, voire deux avec celui de la baiseuse.

                                              Le propriétaire (le galleriste ou un comparse ) réclame 2.000.000€. Voilà une cote rondement menée, diffusée dans le monde entier.

                                              Mon avis ?... Ça sent le coup monté à plein nez !...Il y aurait du J.F.Gobbi derrière tout ça que je ne serais pas autrement étonné !...


                                              • Cotcodec 20 novembre 2007 03:29

                                                M. Villach,

                                                1) Laissez donc les artistes artistiser en paix. Il n’appartient à personne de dire ce qui est artistique et ce qui ne l’est pas. L’art ne s’explique ni ne se démontre, il est ou n’est pas, et cela ne se révèle qu’au fur et à mesure, par l’accueil qu’il reçoit et la reconnaissance qui lui est donnée dans le temps. Et à ce moment, pour la plupart des oeuvres concernées, nous serons tous morts. L’histoire de l’art abonde d’artistes décriés reconnus comme majeurs sur le tard, ou bien après leur mort. Un peu d’humilité en la matière ne fait de tort à personne. L’art nous force à l’humilité, il est à l’opposé des jugements à l’emporte-pièce que nous expose Mme Reza. D’ailleurs, de quel avis est Mme Reza ? Cela n’apparaît pas très clairement.

                                                2) Une oeuvre d’art ne se résume pas au produit fini. Le fait qu’il soit « beau » ou « moche » ou qu’il « fasse sens » ou « n’ait aucun sens » comme vous l’écrivez avec Mme Reza est fort réducteur. Il existe des choses comme la pensée de l’artiste, sa démarche artistique, la technique, le geste, et bien d’autres encore qui entrent en considération. C’est bien la rupture principale de l’art contemporain que d’accorder moins d’importance au produit fini que ses prédécesseurs. Et encore ! Que penser d’un Duchamp ou, plus près de nous, d’un Warhol, dans ces conditions d’analyse de l’oeuvre artistique ? L’analyse que vous faites sur l’oeuvre de Twombly me laisse à penser que vous auriez hurlé contre Duchamp il y a un siècle. Voyez où en est son urinoir aujourd’hui ?! D’ailleurs, il subit lui aussi régulièrement des outrages qualifiés d’oeuvre d’art par son auteur abonné. Et son « air de paris », ridicule, non ? Ou alors, si Duchamp vous agrée en tant qu’artiste, demandez-vous si ce n’est pas la « reconnaissance » d’artiste établi dont il jouit aujourd’hui qui vous influence. Au fond, entre une toile même pas peinte et un ready-made, il n’y a guère de différence.

                                                3) La valeur d’une oeuvre d’art est indépendante de sa qualité perçue. L’oeuvre d’art a un coût, c’est un objet marchand. Le coût est objectif, la valeur est subjective. Il faut reconnaître à l’art cette part de subjectivité. Certains sont prêts à mettre 2 millions d’euros dans une toile même pas peinte. Et à se battre pour. Et à faire encore monter les enchères. Pas vous. Eh bien, c’est votre droit. Et c’est très bien comme cela, non ? Pourquoi vous emporter ainsi ? Tous les goûts sont dans la nature comme disait votre chère maman. Imaginons que vous adoriez les nains de jardin et que vous en peupliez votre carré de gazon quitte à emprunter chez Cofidis pour vous les payer et à finir en Commission de Surendettement à la BDF, devrais-je pour autant conspuer vos goûts de chiotte ? Et puis finalement, est-ce-que c’est si grave que ça docteur ?

                                                4) A mon avis, le tribunal a pris une excellente décision, en condamnant l’agresseuse poète, et en cela je diverge de DW, même si je le rejoins sur son analyse du geste artistique de Rindy et même sur sa dimension poétique certaine. Le tribunal n’a pas à se prononcer sur la valeur artistique d’une oeuvre, mais sur les moyens de défendre la propriété et le montant du dommage. La condamnation étant proportionnée à la propre condition de Rindy et non aux faramineux 2 Millions du galeriste, elle est en outre très équitable. On défend l’objet marchand en punissant les dégradations à la propriété, mais sans entrer dans les excès du marché.

                                                cotcodec


                                                • Paul Villach Paul Villach 20 novembre 2007 19:51

                                                  N’êtes-vous pas en train de défendre l’égalisation des opinions jusqu’à laisser entendre que « le non sens » égale « le sens » ?

                                                  Méfiez-vous ! Car le raisonnement que vous défendez et que je ne peux pas partager, tend à se retourner contre vous dans un beau paradoxe qui fait penser à celui du crétois menteur. « Tous les crétois, dit un crétois, sont menteurs »...

                                                  Néanmoins, vous ne me ferez pas avaler cette équivalence entre rien et quelque chose.

                                                  Dans cette affaire de tableau blanc, m’a fait observer une personne, la justice n’est pas allée au bout de la logique : elle a oublié d’indemniser les fabricants de la toile et du cadre ! Paul Villach


                                                • Cotcodec 23 novembre 2007 02:44

                                                  Je ne mets pas sur le même plan les choses sensées et non sensées. Je suis moi-même une personne plutôt analytique et très (souvent trop) « sensée ». En revanche, je rejette l’application d’une analyse duale sens/non-sens au domaine de l’art en général. L’essence de l’art n’est sans doute pas d’être « sensé ». Car combien d’artistes se fixent pour objectif d’être « sensés » ? D’avoir du sens ? L’art est le domaine des sens et non du sens... au sens où vous l’entendez. Toucher les sens pour provoquer des réactions, des réflexions, oui. Et même des réflexions sensées. L’art est du domaine du sensible, pas du sensé. Et si certains artistes développent des réflexions construites et sensées, cela ne saurait être généralisé et appliqué comme une règle systématique.

                                                  Aussi aimerais-je vous demander de laisser à l’art le droit de ne pas entrer dans ce schéma sens/non-sens. D’être a-sensé. De lui laisser, au contraire, celui de s’exprimer avec « folie ». C’est ce qui lui permet de nous enchanter (pas toujours, certes, mais quelques fois suffisent !), d’être poétique, léger, décalé, prophétique, beau, émouvant, horrible, affreux, horripilant... Et créatif. De nouvelles significations par exemple. Qui pourraient bien, elles-mêmes, en créant de nouvelles perspectives, bousculer les lignes de partage traditionnelles entre sens et non-sens... Pour peut-être finalement créer du sens ?

                                                  Vous voulez faire entrer l’art dans un schéma de pensée trop étriqué pour lui. Et d’ailleurs, ce faisant, vous cherchez à dicter votre manière de voir. C’est bien pire... Qui dicte ce qui est « sensé » et ce qui ne l’est pas ici ? Vous. Or, souhaitez-vous vraiment endosser cette responsabilité écrasante de décréter quel oeuvre d’art est « sensée » et laquelle ne l’est pas ? Quels artistes sont « sensés » et lesquels ne le sont pas ? Si vous voulez vraiment cela, vous vous placez dans une démarche autoritaire et liberticide. Le voulez-vus vraiment ? Reconnaissez enfin que ce qui est « sensé » pour vous ne l’est pas forcément pour autrui. Ce n’est pas entrer dans un relativisme forcené que de dire cela s’agissant de l’art.

                                                  Pour terminer, votre remarque sur l’indemnisation du fabricant de la toile et du cadre m’a bien fait sourire, venant d’une personne qui s’efforce à se montrer « sensée »... Car ce que vous dites est un non-sens total ! La toile et le cadre ont selon toute probabilité été achetés (du moins il n’est pas ici question du contraire et ce n’est pas l’argument que vous avancez). Il n’y a donc pas lieu d’indemniser le fabricant, puisque, ayant été payé, il n’a subi aucun préjudice. Les fabricants de cadres et de toiles n’ont par ailleurs aucune prétention aux oeuvres d’art élaborées sur leurs matériaux... Donc aucun préjudice non plus venant de la dégradation commise par Rindy Sam. C’est bien l’oeuvre de Cy Twombly qui a été détériorée et ce dernier qui a subi un préjudice. Bref, vous voilà pris en flagrant délit de non-sens, vous voilà « insensé ». Et là, il y a lieu de le déplorer, car la fabrication et la vente de cadres et de toiles n’entrent pas dans le champ des activités artistiques, mais celui de l’industrie et du commerce...

                                                  J’espère que vous me pardonnerez le malin plaisir que j’aurai pris à vous apporter la contradiction. En général, j’aime bien vos articles et, pour tout dire, vous me faites pas mal penser à mon père dans vos manières de penser. Un peu rac sur les bords quoi, mais léger smiley.

                                                  cotcodec

                                                  PS : Je serais intéressé de lire un article de vous fustigeant le relativisme. En lisant entre vos lignes, on devine en effet que vous rejetez avec force toute relativisation des choses. De passionnants débats en perspective.


                                                • Paul Villach Paul Villach 23 novembre 2007 15:57

                                                  Cher Cotcodec,

                                                  Vous déployez avec talent les ressources de la rationalité pour tenter de justifier l’injustifiable. Vous réussissez à faire de rien quelque chose : c’est rivaliser avec Dieu !

                                                  Bien sûr que l’art ne s’enferme pas dans la rationalité mais vise avant tout à stimuler les pulsions de l’irrationalité !

                                                  Mais cette irrationalité, moteur de l’action humaine, ne peut se passer d’un volant ni d’un frein, ceux de la rationalité, sous peine d’aller dans le décor et de s’autodétruire.

                                                  Je comprends très bien que les laudateurs de ces « non-sens » qui en sont souvent aussi les collectionneurs, encouragent cette désorientation esthétique. Un peuple désorienté est un peuple qu’on tient à sa merci.

                                                  Vous voyez que je vous accorde que même « le non-sens du rien » - comme un tableau blanc ou une sonate de silence ou n’importe quel « ready made » dont je me réjouis que ce terme obscène n’ait pas trouvé de traduction française - signifie tout de même quelque chose de la part de celui qui ose l’escroquerie et de celui qui se fait escroquer.

                                                  L’art dit « contemporain » se limite trop souvent à des farces de potaches dont je m’étonne qu’on en parle encore des dizaines d’années après leur confection. Mais, je vous l’accorde encore, ceci a un sens et éclaire sur l’indigence contemporaine.

                                                  Comme le dit justement Marc dans « ART » de Y. Réza, ces farces et attrapes ont un point commun : surprendre et seulement surprendre. Mais une fois la suprise passée, il ne reste plus rien !

                                                  À cela s’ajoute cette autorité usurpée que ces auteurs de farces et attrapes prétendent présomptueusement exercer, s’auto-conférant la mission d’ouvrir les yeux du peuple, quand ils ne sont que de tristes histrions au service des puissants, comme d’autres en étaient les bouffons.

                                                  J’ai apprécié la démonstration juridique sans reproche que vous avez tenu à développer pour justifier que les fabricants de la toile et du cadre n’avaient aucun droit à dédommagement. Élémentaire, mon cher Watson !

                                                  Comment vous qui êtes tout prêt à excuser l’inexcusable d’une toile blanche, n’avez pas pressenti qu’en reprenant cette observation d’une lectrice, je faisais oeuvre artistique ?

                                                  Ainsi, il y a des non-sens que vous excusez, et d’autre que vous vous ingéniez à démontrer et démonter avec bonheur mais que vous ne pardonnez pas ! Me pardonnerez-vous tout de même le malin plaisir esthétique que j’ai pris à cette audace puisque vous avez pris le même à me la reprocher ?

                                                  Cordialement, Paul Villach

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