Nord-Malisation, faut pacifier !

Debut du massif

L’Adrar des Iforas, de Kidal à Tessalit, un coin superbe et méconnu.

Géographie, histoire et inculture :

Adrar signifie montagne en langage tamashek (touareg), cela n’empêche pas une journaliste inculte de bmf-tv (ce qui est un pléonasme), de parler du massif de l’Adrar (ce qui est aussi un pléonasme), alors qu’elle est présentée comme correspondante en poste à Gao. Elle est allée là-bas sans rien lire ni connaître de la géographie de la région. Exceptionnel !

Iforhas a plusieurs orthographes : Ifoghas, Iforas, Iforhas. Cette orthographe élastique vient de la prononciation de “gh” ; en arabe cela s’écrit “ غ ” et se prononce un peu comme un « r » français très guttural. Cela n’empêche ni le présentateur mal fringué et spécialiste en géopolitique de bmf-tv (Harold Hyman) de même que le président Pompimou, chef de guère, de parler de l’Ifoga ! J’aimerai bien les entendre prononcer Marylin Monroe et Sean Connery, ces deux comiques-là !

L’Adrar des Iforhas est un massif composé essentiellement de roches métamorphiques qui suscite l’intérêt des géologues et des financiers, en effet qui dit métamorphique sous-entend schistes. Et sachant qu’on y a déjà trouvé des traces d’uranium et de cuivre…

(voir lien : http://www.universalis.fr/encyclopedie/adrar-des-iforas/)

Au nord de cette région, il y a la transsaharienne Reggane-Tessalit, ce sont 700 km de piste, seuls les 10 derniers kilomètres sont montagneux, le reste est une immense étendue désertique, le Tanezrouft (mot arabe qui signifie « là où il n’y a rien »). Cette région est connue grâce à nos atomistes qui y ont procédé à nos premiers essais nucléaires souterrains. On peut difficilement imaginer des djihadistes s’aventurer dans cette zone sans être repérés (voir photos jointes).

Ensuite nous avons la liaison Tessalit – Gao, c’est entre 550 et 600 km de piste de sable, de pierres et de tôle ondulée et la dune de Marcouba, avec deux axes possibles, la vallée du Tilemsi, une zone de dépression très roulante et la piste directe très caillouteuse et obligeant à divers arrêts au niveau des villes/villages comme Tabankort, Aguelhok, Anéfis, histoire d’arroser les flics et miliciens locaux.

Pour les aventuriers, ce lien : http://www.sahariens.info/le-sahara-en-4cv

Pour les rebelles, il y a une autre zone dont nous n’avons pas encore vraiment entendu parler, c’est celle de Taoudenni, a plus de 600 km au nord de Tombouctou (voir lien : http://fr.images.search.yahoo.com/search/images?_adv_prop=image&fr=fp-yie9-s&va=taoudenni+mali)

Cette sebkha présente des paysages superbes et des pistes, des pistes …. On arrive même en Mauritanie via Araouane (reliant Néma et Chinguetti) et aussi via Aguéraktern (reliant Chinguetti et Bir Mogrein). Donc là encore le refuge mauritanien est une opportunité non négligeable pour les rebelles.

Taoudenni c’est aussi une zone potentiellement très riche en pétrole, déjà en 2009 un projet avait été étudié et avait échoué (voir lien : http://www.malikounda.com/Economie/la-recherche-petroliere-dans-le-bassin-de-taoudenni-dans-limpasse-quand-le-qpartenaireq-algerien-torpille-le-projet.html).

Nous avons donc, outre l’immense intérêt de libérer cette région où quasiment personne ne vit, celui totalement négligeable d’y caser ensuite Areva, Total, Bouyghes, etc ….

Ces données historico-géographiques posées, abordons la nouvelle phase dans laquelle nous sommes engagés.

Nos dirigeants ont décidé de sécuriser une zone historiquement peuplée par des noirs, virés par des arabes, puis revenus, et tout cela dans un climat conflictuel qui s’est amplifié grâce aux frontières que nous avons tracées. Ce serait simple si chaque « race », chaque tribu, chaque ethnie était restée chez elle bien tranquille. Oui mais voilà, certains sont nomades, et qu’ils soient commerçants ou éleveurs leur rôle est capitale dans l’approvisionnement des villes et villages.

Ces activités font qu’ils ont souvent des moyens financiers supérieurs aux populations sédentaires, ce qui leur permet de prendre épouses et de sceller des alliances grâce à ces mariages. Comme chantait Brel « une femme dans chaque port et un port dans chaque pays ! ». Même si on peut raisonnablement penser que les tribus noires ont peu de sympathie envers les touarègues et les arabes en général, cette donnée des alliances est fondamentale pour comprendre que, un peu partout, des gens sont cachés, protégés, couverts. Des terroristes en armes sont devenus des terroristes dormant, un danger potentiel à moyen terme.

Nos dirigeants ont également décidé de ne pas comptabiliser les djihadistes tués. C’est une méthode révolutionnaire de la guerre, probablement pensée par des énarques, que de ne pas (plus) faire croire à l’ennemi qu’il est décimé. Nous avons même un ministre, l’ineffable « fafa », qui dit qu’un pick-up explosé par nos missiles ne retrouve dans un tel état qu’on ne peut pas compter les cadavres !

Pourtant les deux jeunes français, assassinés il y a deux ans grâce à l’intervention conjointe de sarkoléon et de Juppé, ont pu être autopsiés, on a même pu dire que notre armée n’était pour rien dans leur décès. Faudrait savoir, quand on explose un 4x4, on vitrifie tout ou on peut comptabiliser les dégâts ?

Mieux, si on se souvient de la mégalopole Konna, bombardée à outrance, aucun bilan des victimes civiles. Ne pas compter les morts quand ils sont nègres, c’est normal ? Cela me rappelle cette remarque de Guy Marchand dans Coup de torchon, « les nègres y-z-ont pas d’âme ! ».

Enfin il y a cette 3^ème facette du problème, que faire de ce Nord-Mali quand l’armée malienne est dans un état de délabrement et de corruption avancés ? Quand l’administration malienne, quasi totalement composée de noirs, est elle aussi dans un état de corruption chronique ? Bref quand un état n’existe pas dans une zone de plus de 800.000 km² ! Plutôt que d’argumenter sur ce sujet, voici un petit extrait d’une mésaventure qui nous est arrivée au sud de Gao, il y a quelques années, quand le pont sur le fleuve Niger n’existait pas.

Guelta dans le massif

« Quand on part de Gao vers Mopti et Bamako par la route goudronnée, il faut passer le bac sur le fleuve Niger. Quelques heures d’attente si l’on n’est pas pressés, et un paiement au tarif normal, et tarif triple si on veut passer directement. En général on n’arrive jamais à l’heure du tarif normal, à croire qu’il y a plusieurs panneaux qui sont changés selon les heures d’arrivée des touristes voyageurs. Après le bac, quelques kilomètres de route et c’est le contrôle de la douane. Un bidon de 200 litres peint en rouge et blanc au bord de la route, une baraque en terre en contrebas, c’est le poste. Pas de voiture, pas de ligne téléphonique, mais un tampon obligatoire si on ne veut pas être refoulé à Mopti, 580 Km plus loin. Alors nous nous arrêtons, les quatre véhicules, et après quelques minutes un douanier apparaît. D’habitude, les formalités sont simples, pas de contrôle, un peu de temps perdu, un sourire, et on passe avec le passeport tamponné.

Mais là, le douanier semble avoir décidé de s’occuper de nous. Contrôle des triangles, des phares, des trousses sanitaires, et enfin des extincteurs. Et là commencent les problèmes. Un des extincteurs est dégoupillé. Nous lui expliquons qu’un de nos véhicules a brûlé et qu’on a éteint l’incendie avec un extincteur, et ce véhicule est en ce moment en réparation à Gao, qu’il va suivre dans quelques heures. Le douanier comprend, et nous dit...

-Oui, mais l’extincteur est vide, et ça c’est interdit.

Alors nous lui expliquons que nous avons voulu faire recharger notre extincteur à Gao, mais que cela ne se fait pas là, mais seulement à Mopti et à Bamako. Le douanier nous confirme, il sait bien tout ça, mais notre extincteur est vide, et ça c’est interdit. Nous sommes des contrevenants, et nous devons payer une amende. Que n’a-t-il pas dit là ! Régis, un de mes compagnons de voyage, explose.

-Quoi ! On doit payer alors qu’on vient en Afrique donner des voitures ! Vous n’avez pas le droit, c’est du racket !

Il faut dire que Régis est de Marseille mais a un physique assez particulier, blond, barbu, cheveux longs, 1,85 mètre au garrot, une tête de mule dans toute sa splendeur mais un très bon fond surtout quand on lui fout la paix. Le douanier est surpris, au début blême car il se demande si il ne va pas se prendre une paire de claques bien assénées, mais voyant que Régis retourne dans sa voiture, il reprend de l’assurance et sa réaction est encore plus surprenante pour nous.

-Puisque c’est comme ça, la douane est fermée.

Et le voilà qui nous tourne le dos, part vers le bâtiment de terre, ferme la porte du taudis, puis le contourne et s’éloigne à pied. Que faire, nous savons bien que passer sans le tampon, c’est à coup sûr être refoulé plus loin, et plus loin cela peut être après avoir parcouru 500 kilomètres. Attendre, oui, mais jusqu’à quand ? Alors je prends ma voiture et rejoins le douanier.

-Chef, je peux vous emmener ?

Il me regarde, hésite puis monte dans la voiture. Ouf ! La première étape est réussie. Maintenant il faut inverser la tendance.

-Vous savez, on vient réellement pour une action de solidarité, on est tous très fatigués et inquiets avec cette voiture en panne qu’on a laissé à Gao, et notre ami qui s’est énervé, il ne connaît pas l’Afrique, alors il faut le comprendre.

Le chef me laisse un peu continuer ma route vers son village puis me dit soudain…

-D’accord, je ré-ouvre la douane pour toi, mais il faut que ton ami s’excuse.

De fait, c’est ça qui a été le plus dur, faire comprendre à Régis qu’il fallait qu’il s’excuse. »

Donc bon courage à nos pacificateurs, nos investisseurs, nos foreurs, nos bétonneurs, nos mineurs ….. à tous ceux qui vont suivre nos bidasses.

En plein milieu du Tanezrouft

Camping entre Reggane et Tessalit