Querelle des investitures : quand les appareils partisans sacrifient l’enracinement local
Ils se nomment Didier Peralta ou Manuel Valls. L’un est connu de tous, l’autre inconnu du grand public. Leurs étiquettes politiques diffèrent. Cependant, ils ont tous les deux en commun une volonté féroce d’accéder à la députation, malgré une défiance puissante de l’électorat local ou national à leurs égards.
En obtenant l’investiture de leurs partis dans une circonscription, ils sacrifient d’autres candidats, plus petits, plus engagés et plus proches des électeurs. Parfois, ces querelles virent au psychodrame familial et à la tragicomédie la plus frustre. Tour d’horizon des épisodes les moins glorieux des prochaines élections législatives.
C’est en Seine-Maritime que la situation est, sans nul doute, l’une des plus désastreuses. Dans la 9ème circonscription, la querelle des investitures vire au psychodrame familial, tant trahisons et coups bas s’enchainent. A l’origine, Clarisse Coufourier (LR) devait représenter la droite dans la circonscription. C’était sans compter l’arrivée impromptue de Didier Peralta (UDI). Au nom de l’accord UDI – LR, Clarisse Coufourier est ainsi sacrifiée par son propre camp pour respecter un accommodement décidé en -très- haut lieu, sans considération des promesses faites à la candidate LR et surtout, des attentes des électeurs locaux. Selon Paris Normandie, l’ancien suppléant de Clarisse Coufourier, rallié à Didier Peralta, aurait même été « piégé » par l’UDI pour l’encourager à abandonner l’ex- candidate LR[1]. Les arrangements -purement mathématiques- entre appareils partisans devraient tout de même faire des heureux dans la circonscription. En effet, pour le Front National, dont les résultats électoraux détonent dans une région traditionnellement hostile à l’extrême-droite, ces querelles sont une aubaine, renforçant la défiance d’électeurs déboussolés par des partis déracinés des réalités locales. Clarisse Coufourier a finalement choisi de jeter l’éponge, malgré les nombreux soutiens qui souhaitaient sa candidature, tant au sein de son propre camp que chez les électeurs de la circonscription. Tombé par hasard sur cette triste affaire en scrutant la presse régionale, l’auteur de ces quelques lignes s’est ému du sort réservé à Clarisse Coufourier et a souhaité l’évoquer dans ce papier.
Dans l’Essonne, sans crainte du ridicule, Manuel Valls aura tout essayé pour rester en politique. En tentant de briguer –mendier ?- l’investiture « En Marche ! », il a définitivement rejeté son parti. La scène grotesque, décrite par « Valeurs Actuelles », frise le pathétique. Oserait-on, un seul instant, imaginer Maurice Couve de Murville, ancien Chef de gouvernement du Général de Gaulle, supplier une investiture ? Manuel Valls a finalement réussi à négocier l’absence de candidature « En Marche ! » face à lui, tout en créant un profond sentiment de défiance et de trahison au sein même de son propre camp. Comble du mépris populaire pour un ancien chef de gouvernement, le breton Nolan Lapie, connu pour avoir giflé l’ancien Premier Ministre pendant un de ses déplacements, a annoncé se présenter dans la même circonscription avec, en suppléant, le très controversé humoriste Dieudonné[2]. Si l’exemple malheureux de Didier Peralta en Seine-Maritime symbolise la déconnexion croissante entre les partis et les électeurs, l’épisode Manuel Valls représente l’honneur déchu des hommes d’Etat et la perte du sens public.
Ces deux exemples peuvent se décliner par dizaines. Très récemment, la guerre ouverte entre le Parti Communiste et la France Insoumise fut l’expression parfaite du sacrifice de l’espérance politique sur l’autel des intérêts particuliers. Alors même qu’ils partagent, notamment sur les enjeux locaux, une approche commune et une même vision de l’engagement politique, les deux mouvements se déchirent et présenteront des candidats distincts dans la plupart des circonscriptions. Si l’auteur de cet article est très loin d’adhérer à leur programme ou de souhaiter le triomphe de la gauche radicale aux élections législatives, il ne peut que déplorer l’abandon d’une grande partie des électeurs de cette mouvance politique au nom des intérêts privés de quelques cadres.
Loin des scandales financiers très largement relayés par les médias nationaux et la presse d’opinion, les affaires locales n’intéressent que trop peu les grands journaux. Cependant, ces problèmes concernent pleinement la vie quotidienne de nos concitoyens, qui demeurent les premiers sacrifiés par les querelles partisanes. Dénoncer les arrangements d’appareils, les parachutages et les coups bas dans les différentes circonscriptions, c’est œuvrer quotidiennement pour la défense des électeurs, qui doivent pouvoir choisir leurs représentants, librement et en conscience.
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