Tout est bon dans le conflit ?
Sur la toile fleurissent des articles et des commentaires sur le bon côté des conflits, sur ses apports bénéfiques pour le groupe et les individus. Peut-être pouvons-nous aller un peu plus loin que ce raccourci qui vise à mettre en avant ce que certains retirent du conflit comme étant l'issue d'un conflit. Enfin, on peut se demander si le terme conflit est utilisé à bon escient, ou s'il s'agit de polémique, de controverse, de discussion...
Dessin : avec l'aimable autorisation de Eddie Pons
Tout d'abord, y a t'il du bon dans le conflit, on pourrait polémiquer ici et là et ne jamais tomber d'accord sur ce qu'est un conflit. J'ai déjà réagi par ailleurs sur cet aspect. Le conflit est la résultante d'une dégradation de la qualité relationnelle qui rend impossible la discussion apaisée.
Un conflit, c'est violent et ça se termine, en adversité, par la domination de l'un des protagonistes, l'abandon ou la résignation. Rien de positif à tout ça sauf si on aime tendre l'autre joue après avoir reçu un coup.
Un conflit, ça n'est pas non plus une maladie, et il n'y a pas d'agents pathogènes qui en sont à l'origine, il n'y a donc pas de traitement, de thérapie même sous couvert de science cognitovo-comportementale.
Une entreprise ne génère pas de maladie, elle ne génère pas non plus de conflit. La demande de reconnaissance du burn out comme maladie professionnelle va dans ce sens de médicalisation des rapports interpersonnels. Avec la médicalisation arrive la déresponsabilisation, le sachant arrive et déclame (ou prescrit) la façon de faire. L'individu est nié et relégué à l'état d'objet, possession de l'entreprise, de plante à laquelle il faut apporter de l'engrais et des médicaments (on dirait presque une procédure Monsanto, créer la maladie pour prescrire le remède)
Dans le conflit rien de bon, c'est dans le confit qu'il y a du bon.
Alors quoi, un conflit on en fait quoi ?
Ce qui est vrai c'est que quand il y a conflit, il y a des enjeux différents.
Il y a deux alternatives possibles, qui vont déterminer la manière dont les choses vont être accompagnées et au final, la pérennité de la solution. Ces alternatives sont liées à la vision que l'on a de notre société. Platon (dans La République) disait que l'état est tout à la fois en chacun de nous et structure globale. La vision de l'autre et de la société va déterminer la façon dont les choses vont se résoudre ou se gérer.
Gérer ou résoudre ?
Faire taire la contestation, arbitrer les choix, concilier les points de vue ne marchent que si les participants aux conflits sont en accord avec les décisions qui leur seront imposées. Pour assurer la pérennité d'un accord sur ce qui faisait conflit, il faut résoudre le conflit, démonter le conflit pour le rendre intelligible et trouver sur le fond des arguments sur lesquels on peut appuyer son raisonnement.
Un conflit bon sang, c'est quoi ?
Les composantes d'un conflit sont connues, l'élément moteur en est l'émotion que la situation déclenche et porte à son apogée. Un conflit c'est violent.
Que peut il y avoir de bon dans la violence ?
Ca permet de trancher la situation (quand l'autre en marre de souffrir, qu'il ne peut pas lutter, qu'il fuit la violence, il se tait, se range à sa vision des choses... jusqu'au jour où...).
Il y a un gagnant et un perdant, et si possible, autant être le gagnant dans l'histoire.
La violence c'est le déni de l'autre, c'est le "moi j'ai raison alors tais-toi", c'est en même temps la bonne volonté de celui qui la commet, de son point de vue légitime, mais c'est forcément maladroit parce que ça ne résoud rien, ça permet de gérer. Alors, aurait il fait autrement s'il avait su qu'il y a une autre solution, une autre alternative ?
Le conflit c'est violent, c'est un mode relationnel qui détruit la relation, qui se construit avec des éléments tangibles, il est donc aisé de démonter les conflits, des faire redescendre les personnes de leur point de vue en leur permettant de s'approprier une autre alternative, celle de la raison, qu'ils n'avaient jusqu'alors pas perçu, ressenti, vu, compris.
Le conflit c'est violent et le médiateur professionnel ne dira jamais que le conflit c'est bon, ce serait comme dire que la mort d'un proche me rend plus vivant, non c'est la prise de conscience de la courte durée de la vie qui nous pousse à vivre au lieu de survivre.
Descartes et Platon avant nous incite à faire usage de la raison pour comprendre ce qui nous entoure, un autre, Albert Camus, trouve que "mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde".
Le conflit c'est violent, et le résoudre est la seule voie pérenne.
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