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Accueil du site > Actualités > Société > Des souris et des hommes

Des souris et des hommes

J’ai trouvé cette chronique juste et concise, avec sa jolie flèche de Sparte qui retombe pile sur la tranche du pointu et là où ça fait mal, cette intéressante question vaut mieux que toutes les bonnes réponses prédigérées, ou plutôt, prédirigées... Guy Carlier s’est fendu ce jour là de la plus sobre façon de résumer notre modeste condition de rat de laboratoire. Je me suis permis pour votre plaisir d’en retranscrire le texte exact :

« Vous connaissez peut-être la célèbre expérience scientifique du professeur Laborie, on introduit un rat de laboratoire dans une cage et on le soumet à des décharges électriques qui passent par le sol métallique et que l’on envoie à intervalle régulier. La puissance du courant est douloureuse mais pas suffisamment pour tuer l’animal, alors évidemment dès qu’il reçoit sa première décharge il cherche à s’échapper, puis quand il s’aperçoit qu’il n’y a pas d’issue, il commence à stresser, il s’anémie, et peu à peu il développe des maladies graves et finit par crever. Si on met deux rats dans la même cage, dès qu’on envoie les premières décharges, ils deviennent agressifs et se battent entre eux puis le plus faible des deux, qui en a marre de se prendre des décharges puis de se faire tabasser après chacune d’elle cherche à sortir mais comme la porte est fermée, il finit par se faire tuer par le rat le plus fort qui lui est en pleine forme puisqu’il a évacué son stress.

Hé bien ce matin, je vais tous vous démontrer que nous sommes tous des rats de laboratoires. Il y a quelques semaines, on a mis dans la cage de Tf1 deux rats ensemble, le rat Axel-Duroux-et le-rat-Nonce-Paolini. les actionnaires les ont soumis à un stress terrible et comme prévu les rats ont commencé à se battre avec une rare violence. Lorsque le rat Duroux a compris que le rat Paolini était le plus fort, il a cherché à s’enfuir, bon, comme à Tf1 ils sont humains ils ont ouvert la porte en grand et en plus ils lui ont donné un million d’euros, pour avoir participé à cette expérience.

Un million d’euros pour cinq semaines de stress, ça va, c’est bien payé.

Avant hier soir, un gros rat président d’un club de foot professionnel battu par Auxerre a évacué son stress en traitant un joueur adverse de petite tarlouze et en le menaçant de violence physiques quand il le retrouvera dans la cage de Montpellier. D’habitude, ce gros rat qu’on appelle affectueusement Loulou parvenait à évacuer son stress en consommant exagérément de grosses quantités de nourriture, je connais la méthode, je l’ai pratiquée. Mais en ce moment, Loulou doit être au régime et lorsqu’il ne bouffe pas, Loulou évacue son stress avec des propos homophobes et des menaces physiques. D’un point de vue scientifique on peut donc déduire que le stress induit par le football professionnel peut rendre totalement con.

En ce moment, on a tendance à balancer des décharges de stress de plus en plus fortes dans ces cages qu’on appelle des entreprises et où sont enfermés multitude de rats. Alors de temps à autres, les rats les plus faibles qu’on appelle les ouvriers ou les employés tentent bien de se révolter contre les plus forts qu’on appelle les patrons, ça s’appelle la grève et parfois vont plus loin en enfermant les rats patrons dans une cage dans la cage, on appelle ça la séquestration des dirigeants d’entreprise. Mais quand ils s’aperçoivent que cela ne change rien, les rats de l’entreprise finissent par se suicider.

Mais s’il arrive parfois qu’un rat ouvrier devenu fou par le stress parvienne à tuer le rat le plus fort dans un accès de folie, il y a trois jours à Toulouse, Eric, chauffeur livreur dans la société de transport Senges, ( UPS selon divers médias, ndt ), a tué son patron parce qu’il exigeait qu’il effectue son préavis avant de quitter la cage pour une autre cage de transport public avec des horaires un peu plus stables et une paye un peu meilleure.

En politique c’est la même chose. Bon, dans la cage socialiste plus rien ne bouge, les rats se sont entretués, tiens, même dans la cage dorée du Sénat où on pensait que la moquette épaisse isolait des décharges électriques puisqu’on y voyait somnoler de vieux rats bien nourris, voilà soudain que le rat...farin, stressé par la réforme de la taxe professionnelle est devenu fou et se révolte à son tour.

Vous l’avez compris, nous sommes tous des rats de laboratoire mais plutôt que d’avoir le choix entre la violence et la résignation, si on essayait plutôt de savoir qui nous balance toutes ces décharges électriques  ? »

___________

 

Deux autres expériences peuvent nous aider à répondre à cette question soulevée par Guy Carlier.

L’expérience de Milgram, où de vrais cobayes humains balancent des fausses décharges de 450 volts sur des comédiens qui simulent la douleur, mais qui nous rappelle que la convention de Genève exige de chacun le refus d’exécution des ordres qui la violeraient, et c’est cette même convention que le sommet de l’Etat étasunien a remis en cause pour pouvoir opérer la torture au sein de ses camps tels Guantanamo.

Cette expérience démontre que soumis que nous sommes à l’autorité, nous participerions nous même à transmettre ce courant en temps que conducteurs, et même, irai-je jusqu’à dire, comme supracon-ducteurs...

Une dernière expérience qu’on peut aisément vérifier au bord d’un champs devant une clôture électrique quand l’on se balade en groupe : On se donne tous la main en prenant soin de laisser le plus costaud en chaussettes à l’autre bout et le premier de la file prend le fil électrique à pleine main quelques secondes. C’est le dernier de la chaine qui récolte la chataîgne...parait-il ?

Dans le contexte qui est le notre, nous avons tous une main dans chacune des nôtres. L’une que l’on a tourné vers le haut en demandant assistance matérielle à un supérieur social, qui nous la remplit et, que l’on souhaite rejoindre par ce geste, et l’autre tournée vers le bas pour attraper celle que nous tend quelqu’un qu’on aime et à qui l’on donne le surplus venu d’en haut. C’est donc dans cette chaine de solidarité généralisée que passe le courant et dont nous sommes les maillons actifs, sauf que : si nous prenons la main de celui qui nous la tend pour le faire grimper à notre niveau dans l’échelle sociale, c’est le maillon supérieur de cette échelle qui nous tiens l’autre et qui parfois, peut tout aussi bien que le premier, nous prendre tout le bras voire même, la tête et tout le reste avec...

Et donc, pour savoir d’où vient le courant, il suffit de lâchement lâcher la main d’un des deux, mais aussi faire le bon choix, car l’on sera tout de suite renseigné sur la direction d’où vient le flux et sur celui des deux « qui recevra la décharge ».

En rompant de cette façon cette chaine de la solidarité sociale, on épargne la transmission vers les derniers maillons, déjà les plus faibles, mais surtout, l’on ne rompt qu’à moitié la chaine de la solidarité qui nous pardonnera pour notre demie faute.

http://www.europe1.fr/Radio/ecoute-podcasts/Chroniques/Douche-froide-Guy-Carlier/Des-souris-et-des-hommes


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20 réactions à cet article    


  • ASINUS 14 novembre 2009 11:52

    bonjour , je croyais que l on disait « fleche du Parthe »


    • Lisa SION 2 Lisa SION 2 14 novembre 2009 12:06

      Merci pour cette info, en effet, c’est pour cela que je ne retrouvais pas la trace sur le net de cette expression qu’on n’emploie pas tous les jours.

      Et merci à la modération pour la photo.


      • Salsabil 14 novembre 2009 12:40

        Me demandais pourquoi tu m’avais servi du « souris » ! Comprends mieux aujourd’hui... smiley

        Suffit d’être mauvais conducteur pour stopper la chaîne, non ?

        Petit apparté sur les mains : Les derviches tourneurs tournent ainsi, une main vers le ciel, une autre vers la terre, c’est le lien sacré de la Création, l’aube de l’humanité.

        Bisous de chat, Na !


        • Lisa SION 2 Lisa SION 2 14 novembre 2009 13:02

          L’allusion à la souris, c’était pour t’exciter...enfin, de mon courant positif !

          Intéressante liaison que tu proposes avec la position spirituellement haute de ces danseurs.

          Un peu lointain, mais en rapport avec la soumission à l’autorité, le courage du héros qui refuse de tourner dans le même sens que les soumis du cachot de la prison de « Midnight Express » et affiche sa liberté de tourner le dos à la pensée unique. C’est une belle image de la résistance, présente en veille permanente dans les confins de notre conscience, et parfois activée par le simple geste de savoir dire non.

          Labisatoi.


        • Salsabil 14 novembre 2009 20:50

          Lisalou,

          Tu sais mieux que moi que la vraie révolte, celle qui mène à la liberté de l’esprit, celle que personne ne peut jamais combattre, n’est que liée à des choses très simples, animalement simples.

          A l’inverse des rats, nous avons l’extraordinaire chance, nous, humains, d’avoir été dotés d’intelligence. Liaison (pas fait exprès !) unique entre l’instinct et la pensée.

          Pourquoi on n’y arrive pas mieux ?


        • eugène wermelinger eugène wermelinger 14 novembre 2009 16:55

          Bonjour Lisa et bravo pour cette excellente et clairvoyante analyse de notre situation à tous.

          Cela s’applique partout, un exemple actuel : les élèves infirmiers sont sommés de vacciner sinon on les casse (paraît-il), plus haut le préfet est obligé de faire exécuter la Loi, sinon il serait probablement limogé à St Pierre et Miquelon. Et la rosse Line est tenue par les labos qui ont crachés au bassinet et veulent le retour de profits. Et le roi nu, vous croyez qu’il ne stresse pas, avec tous ses tics ? Et tous ceux-là stressent encore plus quand on leur rappelle fort à propos l’histoire des fins peu glorieuses d’un Papon ou d’un Pétain ! 
          « Ouvrez la cage aux oiseaux » dit la chanson.
          Continue Lisa, on a besoin d’entendre encore ton mélodieux chant, avant le chaos. 


          • Lisa SION 2 Lisa SION 2 14 novembre 2009 17:56

            Bonjour Eugène et merci pour ce vrai soutien franc et massif,

            mais rendons hommage quand même à Guy Carlier qui fabrique de ces puissantes rubriques tous les jours alors que je peine à faire deux ou trois articles par mois...Bon, c’est vrai, contre le chaos cela ne changera peut-être rien, mais c’est tellement moins stressant de voir arriver les choses en toute conscience comme l’orchestre qui continuait de jouer pendant la chute du Titanic. Tu sais, j’ai vu arriver la chute du mur depuis les semaines qui précédaient et m’en réjouissais le jour même et les suivants. Effectivement Il y a tellement peu de bonnes nouvelles de fins de tension sociales voires mondiales que ces temps qui courent sont lion d’être réjouissantes, stressées par un flux tendu qu’alimentent les grands décideurs auxquels tous obéissent sans compter la médecine qui te cours après la seringue à la main...

            Bien à toi. L.S.


          • Monica Monica 14 novembre 2009 19:14

            Chère Lisa,

            J’ai pris grand plaisir à lire ce texte. Nous serions donc faits comme des rats. A nous déprimer lorsque nous sommes seuls, à nous jeter sur les parois de la cage pour nous électrocuter plus vite ... ou bien à nous entretuer lorsque nous sommes plusieurs. Le plus fort gagne, il agite ses pattes et fait vibrer ses moustaches d’aise, le salaud ;-(

            Optimiste, je vois cependant une solution smiley
            Il nous faut soudoyer les chercheurs, c’est clair. Ainsi, ils nous font sortir de la cage, coupent l’électricité, nous filent pour nous requinquer des bons morceaux de Comté (c’est plein de calcium), du bon chocolat noir (c’est plein de magnésium) et hop, nous voilà partis, patte dans la patte, dans le grand monde.

            Non mais, ils ne nous auront pas comme ça, ces ratiers ! 


            • Lisa SION 2 Lisa SION 2 14 novembre 2009 19:38

              Chère Monica,

              en effet, elle n’est pas très reluisante notre condition de rat de laboratoire soumis à des tests idiots et nous aurions tort de nous résigner ou de nous violenter en face d’excitations tssk tssk...La meilleure manière de ne pas s’énerver en réponse à celui qui vous électrise moralement suffit à ce que s’énerve seul l’arroseur arrosé. Ce monde matériel nous éloigne de la nature au point que nous ne vibrons plus avec elle que quelques fois qui nous sont mémorables.

              Soudoyer les chercheurs. Figurez vous que cet organe de calcul extraordinaire que nous manipulons vous et moi, au sommet de sa fonction, permet de calculer en trois jours l’influence des cent mille substances chimiques sur une cellule vivante. Cette technique s’appelle la toxicogénomique http://www.antidote-europe.org/informez_fr.htm . Un gros logiciel peut aujourd’hui libérer l’animal de la condition sordide où les chercheurs les soumettent à la torture légale quotidienne.

              On a coutume de dire que l’homme est un loup pour l’homme ? Mais, le loup est bien plus noble de caractère et c’est sa crainte de l’homme qui le sauve de ces cages que nous construisons avec fierté...

              Ouvrons la cage aux oiseaux comme dit si bien Eugène et merci pour votre coup de gueule. L.S.
               


            • eugène wermelinger eugène wermelinger 14 novembre 2009 20:26

              Chère Monica, ayant apprécié votre commentaire je suis allé sur votre autre et seul article récemment paru dans ce média et y ai laissé le commentaire suivant :

              « Merci Monica pour votre témoignage ..... réconfortant.
              Vous méritez respect et admiration.

              Belle vous l’êtes physiquement qui est le reflet de la belle âme qui vous habite.
              Moi aussi je dis : soyez bénie. »

              Je suis l’heureux papa d’une fille médecin (39ans, mariée à un médecin et maman de trois enfants) et je pense que vous pourriez être des soeurs spirituelles. Cela me rempli de bonheur. Permettez que je vous embrasse cordialement. 
              Je suis dans l’attente d’autres articles prometteurs.
              Eugène. 



            • eugène wermelinger eugène wermelinger 14 novembre 2009 20:34

              l’article de Monica est là :

              avec 100% de votes positifs ! 

            • Salsabil 14 novembre 2009 20:52

              Et Eugène a eu un coup de coeur !

              Mais que demande le peuple ?

              Lire encore plus d’articles de Lisa Sion !


              • Monica Monica 14 novembre 2009 21:03

                Cher Salsabil,

                Lisa et Monica ne sont pas rivales.

                Ce sont deux petits rats qui cherchent ensemble à sortir des cages et à éviter l’électrocution, patte dans patte
                 smiley  smiley


              • Salsabil 14 novembre 2009 21:08

                Je ne voyais aucune rivalité entre vous, au contraire !

                Vous me semblez être quelqu’un à découvrir et cela fait plaisir. Je vais d’ailleurs aller lire votre article.

                De ce que je peux lire sur ce site, les foires d’empoigne ont l’air fréquentes et féroces alors quand on lit de la bonne humeur, du bon sens et de l’envie de partager, c’est tout bénéf !

                Bien amicalement.


              • Vladivostok 1919 Vladivostok 1919 14 novembre 2009 20:55

                L’experience de Labori sur les rat est utilisé dans le film « Mon Oncle d’Amérique » un vieux film d’Alain Resnais, avec Gérard Depardieu, ou des scénes du film, (une intrigue assez banale), sont coupés par des docus sur ces experiences...
                Ou le parrallele des situations montre les similitudes de comportement entre les rats et celles entre les protagonistes... Jusqu’a une fusion des deux, de la réalité et les experiences, en des scenes surealiste ou les acteurs ont des masques de rat !!

                Notre prof de philo nous l’avait passé, en terminal. Je l’ai revu recemment, ça vaut le coup...

                http://fr.wikipedia.org/wiki/Mon_oncle_d%27Am%C3%A9rique
                http://www.youtube.com/watch?v=hxXvuvUpjls


                • Vladivostok 1919 Vladivostok 1919 14 novembre 2009 21:03

                  un passage plus révélateur de ce qu’est le film..
                  http://www.youtube.com/watch?v=S0msBPXObAA

                  Dans cette video - 4eme minute - vous verrez l’experience sur les rat que Guy Carlier décrit... Avec la transposition dans un bureau, entre 2 collègues..
                  Comme quoi Guy Carlier connait ses classiques !!


                • Lisa SION 2 Lisa SION 2 21 novembre 2009 12:44

                  merci pour cette contribution, en effet, bien des expériences de laboratoire révèlent les caractères animaux sous-jaçant à la race humaine, et réveillés par le catalyseur de l’autorité.


                • PhilVite PhilVite 16 novembre 2009 00:12

                  Je n’ai lu vers 18/20 ans que deux livres de l’excellent Laborit, « La nouvelle grille » et ’’éloge de la fuite’’ qui ont changé en profondeur ma vision de l’humanité.
                  Etonnant ce que les hommes sont ’’bêtes’’ !!


                  • Lisa SION 2 Lisa SION 2 21 novembre 2009 12:51

                    Les hommes sont bêtes, mais certains animaux sont aussi capables de sentiments affectueux, libre à nous de conditionner nos instincts basiques au profit de l’amour et la compassion.


                  • Lisa SION 2 Lisa SION 2 19 décembre 2009 17:22

                    J’ai retrouvé le lien sur la torture dans l’armée étasunienne :

                    http://www.mediapart.fr/contenu/torture-made-usa-une-enquete-exclusive

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