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Accueil du site > Tribune Libre > Hissez les voiles, l’identité a le vent en poupe

Hissez les voiles, l’identité a le vent en poupe

Un sentiment de malaise inexprimable commença alors à fermenter dans tous les coeurs jeunes.

Alfred de Musset, La Confession d’un Enfant du Siècle 1836

 

Ce sentiment de malaise inexprimable, inexplicable, ineffable pour les plus pointilleux, voilà ce que l’on peut ressentir à l’heure où la question identitaire est relayée à un statut de simple divertissement cathodique pour bien-penseurs offusqués du samedi soir, ou pur charbon incandescent ravivant un électorat en mal de brevet des collèges ! Voilà la plaie, voilà le diable qui danse sur le débat public, celui qui effraie tout le monde, voilà le mal moderne dans une société qui a définitivement bien du mal à s’arranger avec ses questions de fond. 

Etat des lieux. Inutile de rappeler les événements en terme de démocratie représentative du dernier scrutin municipal : une déroute, Hénin-Beaumont, Béziers, Olivier Py dans un ultime geste de grâce. Puis de petites révolutions au sein de nos institutions ; Finkie, il est pour toi le siège de l’Académie, après tout mai 68 ça va bien deux minutes, avec un livre en poche, L’Identité Malheureuse. C’est aussi simple que cela, tout un résumé en deux lignes à peine, qui cache notre effroyable peur d’une notion centrale qui agite la chose publique et se propage dans tous les domaines. Malheureuse ? Certes oui, elle l’est en vue du sort qu’on lui réserve, auquel elle est promise. Car l’identité, tout le monde l’a compris, c’est la cocarde du Front National, son étendard « glauque » et « nauséabond » puisque ce sont les termes que l’on utilise. Au coeur de l’identité, le parti y puise tous ses projets, de la finance à la culture, véhiculés de-ci de-là par une vision rétrograde et surannée de la société moderne et surtout avec un ennemi (profondément antagoniste à notre identité selon lui), l’Europe, cette machine censée broyer les vertèbres des petits peuples à la seule gloire de la toute puissante Allemagne, d’Angela et de ses sbires maléfiques. En effet il y a de quoi avoir peur. Démocratie oblige, il y a heureusement d’autres formations politiques pour nous aiguiller, nous autres citoyens demandeurs de leadership de la pensée. Que disent-ils ? Rien. Et c’est consternant. Consternant qu’un sujet fondamental qui se meut dans toutes les mentalités soit absent à ce point des réflexions politiques et intellectuelles. Parce que parler d’identité fait peur, on l’assimile alors à une vanité dont le lugubre parti extrémiste se délecte dans la noirceur de ses idées. C’est triste. Se réaproprier notre propre pensée, vandalisée par une tête blonde au sweat bleu marine, voilà le nouveau défit, voilà le vrai fait libérateur, garant d’une fédération au moins culturelle, au mieux politisée. 

Il ne faut pas non plus extrapoler. Montebourg et son « made in France » en aura surpris plus d’un. Mais le fond n’est pas là. Certes il ne faut pas le blâmer, mais l’identité doit sortir des simples considérations consuméristes : s’acheter un polo aux fibres tressées du calvados n’arrangera surement pas les choses (on a encore en tête sa couverture du Parisien magazine, en ménagère endimanchée aux accents de Jean Paul Gauthier). Voici l’exemple typique de la question identitaire revisitée à la sauce économique, édulcorée façon bohème. De cette façon, rien ne dérange, au final rien ne bouge. Le Parti Socialiste essaie tout de même par ce moyen de s’installer dans le débat. L’UMP a eu son heure, l’identité sous l’ère sarkozyste, question lancée dans le quinquennat, mal certainement. C’était se resservir de la question dans la visée du voisin direct pour le coup, la droite de la droite plus si affinités. Cela a fini par entacher définitivement le sujet : en parler c’est adhérer. Et voilà, c’est à peu près tout. On a laissé la seule primeur d’un débat décisif quant au devenir des sociétés en Europe à un parti (et toutes ses déclinaisons dans la mosaïque populiste du continent) qui non seulement n’en vaut pas la peine mais qui en plus, par son ignorance et sa couardise, amalgame, confond, s’embrouille, cafouille. 

Alors oui, il est possible (du moins certainement), de s’emparer de l’identité, de la soumettre aux seules questions véritables, non celles de notre extrémisme national. La passivité ambiante et l’immobilisme puritain qui refuse le débat par peur de questions qui fâchent, vont nous mener là où nous sommes déjà d’une certaine façon : l’hypocrisie conservatrice policée par cet immense surmoi national, celui de la honte et quelque part de l’endoctrinement. 

Bref pour en revenir à Alfred, né trop jeune dans un monde trop vieux, ici tout est à faire. 

 


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3 réactions à cet article    


  • L'enfoiré L’enfoiré 3 mai 2014 15:18

    @Trompettiste dans un abattoir,

     Tout est à défaire et tout est à faire, selon vous.
     Alors, la question est comment ?
     Quelles sont vos idées créatrices, innovantes pour déranger ?
     Il faut avoir un plan.
     Vous dites « l’identité doit sortir des simples considérations consuméristes »
     « L’identité désigne, en philosophie, la relation d’unité à soi, et soulève le problème des rapports avec les autres et avec le devenir. »
     Donc que sont-ils ?
     


    • prolog 4 mai 2014 09:48

      Qu’entend-on par identité (qu’elle soit collective ou individuelle) ?
      Pour moi on est des ordinateurs similaires dont seul le contenu diffère. On marche selon les mêmes mécanismes.

      Alors l’identité existe-t-elle vraiment ? Est-elle basée sur quelque chose de tangible ?

      Une seule chose est sure, si un groupe ou un individu considère qu’il a une identité propre, différente de ses voisins, il finira par lui taper dessus. Si si, c’est un fait, il suffit de regarder, de se regarder.

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