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Commentaire de Étienne Chouard

sur « Le coup d'Etat permanent des banques » : entretien avec Etienne Chouard


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Étienne Chouard Étienne Chouard 9 novembre 2007 17:28

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Bonjour à tous.

Une réponse @ Fifilafiloche :

Vous dites : « Fort heureusement que lorsque 13 pays partagent une monnaie commune, chacun n’est pas autorisé à créer de la monnaie selon son bon vouloir, imposant ainsi sa turpitude aux autres. »

Vous n’avez pas compris ce que je demande (avec Maurice Allais et quelques pointures en renfort, je suis loin d’être seul sur ma position) : c’est bien sûr la Banque Centrale Européenne - indépendante des exécutifs comme il se doit - qui devrait récupérer le pouvoir de création monétaire dont je parle, et non pas chaque État comme vous me le faites dire.

D’ailleurs, le fait que ce soit « l’État nation » ou « l’État européen » qui crée la monnaie importe peu, à ce niveau de discussion où il faut sauver l’essentiel (la fonction régalienne maîtresse) : dans les deux cas, le produit de l’intérêt éventuel (perçu lors de la création monétaire) pourrait servir directement et intégralement à l’intérêt général (pour financer toutes sortes d’investissements publics, nationaux ou européens, au lieu de filer dans les poches très privées des banques privées.

Vous dites ensuite : « Lorsqu’un État emprunte la monnaie, il est comptable de ses choix d’investissement. S’il s’agit d’investissement dans la paix sociale ne permettant pas de créer des ressources futures, il reporte sur les générations futures le poids de sa démagogie. »

Tout cela me semble sans aucun rapport avec ce que j’ai dit, puisque je vous parle de l’intérêt versé ou pas au créateur de la monnaie (et donc pas de l’opportunité des dépenses ou des crédits, qui sont un tout autre sujet).

Pour progresser dans le débat, Fifilafiloche, puisque j’imagine que vous êtes soucieux comme moi de l’intérêt général et que vous faites sans doute passer cet intérêt général avant les intérêts particuliers, donnez-moi donc une raison, s’il vous plaît, une seule me suffira - du point de vue de l’intérêt général évidemment - pour payer d’un intérêt ruineux la monnaie que nous pourrions (*) tout aussi bien créer nous-mêmes (rigoureusement dans les mêmes quantités et en respectant rigoureusement les mêmes échéances de remboursement : toutes choses étant égales par ailleurs, donc).

Quelle est la raison qui vous conduit intellectuellement à souhaiter payer cet hôpital (par exemple) « prix + intérêt versé à des acteurs privés » plutôt que seulement « prix » ?

Qu’est-ce que gagne la collectivité à ce jeu de dupes ?

Vous demandez ensuite : « De quels peuples parle-t-il ? Faut-il créer une Europe française, finlandaise, roumaine ou autrichienne ? »

Une Europe européenne ira bien, qu’allez-vous chercher là ?

Et pour moi, tous les peuples se valent et méritent d’être défendus (il faudra d’ailleurs, sans doute, qu’ils se défendent eux-mêmes) contre la cupidité des banquiers (car le processus de dépouillement des peuples de leur souveraineté monétaire par les banques privées semble universel).

Vous dites ensuite : « L’Europe s’exonère de son ancien squelette national désarticulé pour muer vers un exosquelette fédéral à l’échelle continental. Je trouve l’Europe bien plus respectueuse des droits des individus que la France, qui s’est imposée aux Peuples qui la composent de façon beaucoup plus centralisatrice, et donc dictatoriale. »

Et bien nous ne sommes pas d’accord, voilà tout. J’ai précisément développé un manque criant de respect des peuples par leurs prétendus « représentants » dans mon document « Une mauvaise constitution qui révèle un secret cancer de notre démocratie » - voyez http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Constitution_revelateur_du_cancer_de_ la_democratie.htm . Comme je ne me paie pas de mots et qu’il ne suffit pas d’affirmer « nous sommes en démocratie » pour que j’en sois convaincu ipso facto, je vais lire les institutions et je contrôle les rouages institutionnels qui permettent aux citoyens d’exercer le précieux droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Et si - comme c’est le cas aussi bien en France qu’en Europe - je ne trouve RIEN, aucun rouage pour résister à un abus de pouvoir entre deux élections, alors oui, Fifilafiloche, je conteste le mot de « démocratie » et de « respect », parce qu’il faut que les mots aient un sens, et je parle d’escroquerie.

Vous concluez : « Au moins, dans cette Europe, il y a une culture du dialogue... entre États ! »

Pour être précis, vous devriez dire : « entre chefs d’État », car c’est bien là le problème majeur de nos prétendues démocraties : les chefs d’États (et leurs ministres) s’autonomisent progressivement, jusqu’au point où nous sommes où ils se sont arrogé même le droit de créer et modifier les institutions, simplement par traité - loin des peuples, sans les peuples et même contre les peuples comme aujourd’hui -, ce qui est un gravissime abus de pouvoir, une forfaiture.

Comme je le répète depuis plus de deux ans, « ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire eux-mêmes les limites de leurs propres pouvoirs », cela tombe sous le sens, et je ne sais pas quelles pulsions suicidaires (ou quel endoctrinement quotidien) vous conduisent à accepter cette invraisemblable régression qui consiste à voir des ministres écrire ou réviser la Constitution.

Mais si vous gagniez, vous nous emporteriez avec vous dans la régression ; souffrez donc que nous résistions puisque nous avons peur de vos choix, aveuglément confiants dans tout chef élu, du seul fait qu’il est élu.

Notre échange n’est qu’un débat (ne pas le dramatiser lui, ce n’est pas lui qui est dangereux) et c’est bien qu’il puisse avoir lieu.

Merci de votre attention et de votre respect.

Étienne.

À lire :

Reprendre le pouvoir sur notre monnaie : http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?id=81

et

Non, ce n’est pas « trop cher » : le financement des besoins collectifs est rendu sciemment ruineux par un sabordage monétaire étonnant : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/05/01/72-non-ce-n-est-pas-trop-cher-le-financement-des-besoins-collectifs-est-rendu-sciemment-ruineux

(*) « Nous », cad les États, puisque l’État, ce n’est pas un étranger ou un ennemi, bien sûr : l’État, c’est nous tous qui mutualisons nos ressources.


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