"Clear, Hold and Build"

Exactement trois ans après les premières attaques contre la coalition américaine en Irak, on peut s’étonner de voir poser avec toujours autant d’acuité la question la plus élémentaire : « qui est l’adversaire ? ». L’opposition armée serait-elle restée désorganisée et amateur, au point de n’avoir encore aucune identité définissable ? Les catégories fréquemment utilisées pour la décrire évoquent en effet une constellation d’acteurs qui semblent n’entretenir aucun rapport les uns avec les autres : anciens officiers demeurés patriotes, terroristes étrangers, criminels cyniques, Arabes sunnites déterminés à recouvrer le bénéfice d’un pouvoir qui leur aurait été imparti depuis des siècles, musulmans rétifs à toute présence étrangère, Irakiens simplement écoeuré par l’occupation (les POI ou « Pissed-off Iraqis » selon le jargon militaire de la coalition), fractions tribales opérant dans une logique de vendetta, Baassistes incorrigibles, etc.

http://www.crisisgroup.org/home/index.cfm?id=4127 

En somme, l’Organisation d’al-Qaida au pays des deux fleuves porte un nom trompeur. Elle n’entretient finalement qu’un rapport distant avec Al-Qaida, le réseau responsable des attaques du 11-Septembre. La figure de M. Oussama Ben Laden est certes mobilisée, mais seulement en tant qu’icône. Ses avis religieux ou ses conseils pratiques ne sont pas sollicités – et lui-même se garde bien, dans ses allocations, d’énoncer davantage que des généralités. Les orientations données par M. Zarqawi au djihad en Irak constituent même un désaveu public de certaines des positions les plus fermement défendues par M. Ben Laden. Notamment la priorité donnée par Zarqawi à la lutte contre "l’ennemi intérieur" s’oppose à la prééminence de "l’ennemi extérieur" aux yeux de Ben Laden. Pour celui-ci qui plus est, les chiites appartiennent à la Oumma musulmane et, à ce titre, représentent des cibles illégitimes.