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Commentaire de Fouad Bahri

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Fouad Bahri Fouad Bahri 20 février 2009 22:54

Que de confusions dans ce texte qui aurait pu s’intituler, Profession de foi d’un athée savoyard (oublier le savoyard).

Je ne peux manquer de sourire lorsque je lis ce type de texte, bien "sérieux", tellement solennels qu’ils n’ont d’autres ambitions que de nous délivrer du mal, celui de notre pauvre nature humaine qui ne peut s’empêcher de croire, d’espérer en une autre vie et en un Dieu salvateur.

Soyons sérieux. Votre démarche est profondément incohérente, cher Zawgyi et vous manquez sérieusement de connaissances en matières religieuses et historiques. Avant d’entreprendre la démolition, à l’aide du fameux marteau nietzschéen, des idôles qui corrompent l’humanité, tâchez de mieux cibler vos coups. Et faîtes attention, vous risqueriez de vous blesser.

Science et croyance sont deux démarches et deux univers différents, parallèles, qui peuvent se rejoindre sur certaines questions, dont on peut établir une transversalité certaine, mais qui ne peuvent, en aucune manière, se confondre.

Vous invoquez la science pour conjurer la croyance. Ce qui s’invalide ou se valide scientifiquement (par un raisonnement rationnel, logiquement formel ou par expérimentation) est objet de science et de savoir, non de croyance. Lisez Wittgenstein "De la certitude" (éditions Tel gallimard)

Vous développer une théorie minable, et au passage psychologique (qui n’est pas ce que l’on peut appeler une science exacte) pour expliquer la foi et le sentiment religieux comme l’expression d’une peur ancestrale face à l’inconnu, à l’incertitude de notre monde. Rien de nouveau. C’est un thème récurrent dans l’argumentaire athée de la philosophie occidentale. Laissez moi vous dire, Zawgyi, que la multitude et la multiplicité des profils pyschologiques de l’ensemble des croyants(es) invalident définitivement cette pseudo thèse. Il n’ existe pas de profil psychologique type du croyant. Il existe des croyants au tempérament fort, d’autre plus vulnérable, certains sans aucune profondeurs, d’autres d’une énergie extraordinaire. La démonstration psychologique est donc une impasse. Sans fondements.

Le fait qu’une conviction confère de la sérennité ou de l’angoisse ne prouve pas en soi, sa véracité ou son invalidité. A ce sujet, d’ailleurs, l’argument peut tout autant se retourner contre vous. La perspective de séjourner éternellement dans les profondeurs de l’Enfer, perspective peu alléchante et qui ne concerne pas seulement ou uniquement les "infidèles" pour reprendre une terminologie religieuse, puisque tout acte irréparable peut y mener, cette perspective est loin d’apporter un baume psychologique au croyant. Mais encore, la perspective de ne rendre aucun compte sur ses actes, d’échapper à toute forme de jugement est une perspective des plus confortables pour un esprit libertin ou anarchiste. Cela est rassurant, n’est-ce pas ? La psychologie ne nous permettra pas de trancher la question.

Vous vous placez sous l’autorité d’un Heisenberg, en extrapolant ses théories scientifiques, physiques, sur le plan philosophique et religieux. C’est votre affaire. Vous êtes libre de croire ce que vous voulez. Mais là-encore vous faites fausse route. Avec tout le respect que je dois à Heisenberg, qui n’est pas en cause dans ce propos et dont vous exploitez l’autorité morale que lui confère son statut de savant, je peux très facilement vous opposez un contre exemple, une contre-argumentation, du même ordre. Avec, excusez du peu, l’autorité d’un Einstein, père de la physique moderne, dont l’aura et le prestige scientifique éclipseraient facilement celle d’Heisenberg, cela va sans dire. Einstein qui disait "« La science sans la religion est aveugle ; la religion sans la science est boiteuse. » Einstein qui était croyant, qui croyait en l’existence de Dieu, à l’instar de Newton, Pasteur et une myriade d’autres savants. Peut importe que cette croyance soit orthodoxe ou déiste, sur le plan philosophique cela ne change absolument rien. Religion et science sont indispensables à la marche de l’humanité. C’est ce que disait déjà, en substance, un Rabelais et un Léo Strauss. Vous risquerez vous à qualifiez ces grands bienfaiteurs de l’humanité de sots, naïfs ou égarés ? Vous croyez -vous supérieurement intelligent pour décréter que ces croyants sont des névrosés en manque de courage moral ?

Ainsi, la science moderne ne nous permet pas davantage de trancher la question. Au demeurant, l’espace des choses que nous maitrisons parfaitement sur le plan scientifique, qui ne font l’objet d’aucune contestation, est très limité. Il ne permet certainement pas d’investiguer et de résoudre la question théologique et philosophique de notre monde. Dieu ? ? ?

D’ailleurs, à le faire, je ne crois pas que vous y gagniez. Croire que le monde physique, biologique, naturel, qui est le notre, un monde construit sur des lois fondamentales (gravité, masse, mouvements....)
soit le fruit du hasard, de rien, est une véritable aliénation sur le plan théorique. C’est penser que le néant puisse produire de l’être, que le chaos produise de l’ordre, que le hasard, asile de l’ignorance, est supérieure à l’intelligence....D’un point de vue probabiliste, c’est une équation impossible car improbable.

Cette question se résout sur un autre plan. Je dirais le terrain philosophico-religieux, (excusez le néologisme), puisqu’il sollicite à la fois la raison mais également le coeur, à travers un champs d’informations et de données extra-sensorielles, sur-naturelles, que nous appelons la Révélation. Des informations indispensables pour comprendre le sens de la destinée humaine, ses origines et son horizon.

J’ajoute que vos remarques sur la dualité foi/raison, science/religion est parfaitement fondée, dans le champs civilisationnel judéo-chrétien. La science, en Europe s’est développé contre l’autorité de l’Eglise. C’est un fait historique indiscutable. Mais vous pêcher (excusez moi l’expression) par ignorance lorsque vous réduisez la religion au judaïsme ou au christianisme. L’islam, sur ce plan, est tout autre, aussi bien sur le plan dogmatique qu’historique. La perspective islamique s’est bâti sur la raison, le coeur les sens et l’ensemble de la nature humaine. Vous ignorez sans doute que la science moderne, la science expérimentale, a été introduite en Europe, par l’islam (la civilisation musulmane), qui a permit la Renaissance, qui fut loin d’être un phénomène histoqriue ex nihilo. Laissez moi vous conseiller une lecture, pour vous en convaincre "Le soleil d’Allah brille sur l’Occident" de la chercheuse allemande, Sigrid Hunke, édition albin michel. Vous n’y perdrez pas votre temps.

La religion n’est donc pas intrinsèquement opposée à la raison. Affirmer le contraire est un ethnocentrisme qui n’a rien de scientifique. Passons.

Vous affirmez, de manière contradictoire, que la morale, indispensable à la gestion des relations humaines, sans doute la réalisation la plus fondatrice de notre humanité, la garantie et la possibilité d’une vie civilisée, peut se passer de Dieu, même si elle fut et demeure l’héritage des religions. A cette contradiction, vous ajoutez que les droits de l’homme furent fondés sans Dieu, ce qui est faux. Relisez la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et vous y verrez qu’ils furent rédigés et présentés sous l’égide de l’Etre suprême, c’est à dire Dieu. Celui qui a pensé et théorisé la république française, Rousseau et son disciple, Robespierre, ont insisté sur la nature éminemment morale de la fondation républicaine, morale fondée sur la croyance naturelle en Dieu.

Nous voici à l’heure de la conclusion, Zawgyi. Le matérialisme philosophique, l’athéisme, n’ont fondé aucune civilisation. Ils n’ont fait que liquider la condition même de toute civilisation, la morale, dès lors qu’elle ne pouvait émaner que d’une conception transcendantale de l’existence. Ils n’ont fait que ruiner la liberté de l’homme, être soumis au déterminisme aveugle du hasard, ce qui interdit tout idée de liberté et donc de morale.

Ceci explique le caractère particulièrement sanglant des idéologies athées (nazisme, communisme, fascisme), très influencées par le darwinisme social, sa logique de l’espace vital et de la sélection naturelle, théories biologiques là-encore dévoyées et extrapolées sur le plan philosophique. Des idéologies qui ont tué infiniment plus d’hommes que ne le pourront jamais les religions. Les deux dernières guerres mondiales, les camps, tout ceci est une conséquence directe de ces idéologies. Alors cessez l’argument fallacieux du type "les religions ont tué et menacé le genre humain" et faites preuve de probité intellectuelle et vous reconnaîtrez que les religions ont codifié et atténuer considérablement la violence naturelle de l’homme.

Alors plus de modestie et de vigilance.

Bien amicalement.


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