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Commentaire de Abderraouf

sur L'islam en question : un devoir de vérité


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Abderraouf 30 octobre 2010 07:37

Bonjour M. Mourey,
Vous êtes libre évidemment d’avancer les hypothèses que vous voulez que ce soit dans une approche militaire comme vous dites ou pas.
Mais là où ça coince dès le départ c’est que vous ignorez complètement le contenu du texte fondateur, un contenu pourtant qui nous est parvenu en l’état contrairement à ceux qui l’ont précédé.

Extrait d’un ouvrage que vous devriez reconnaître même si vous avez fait le choix de ne pas le lire :  

La première Révélation fut la suivante (sourate 96, versets 1 à 5)¹
« Lis au nom de ton Seigneur qui créa
 Qui créa l’homme de quelque chose qui s’accroche
 Lis ! Ton Seigneur est le très Noble
 Celui qui enseigna par la plume
 Qui enseigna à l’homme ce qu’il ne connaissait pas. » 

Le professeur Hamidullah fait remarquer, dans l’introduction de sa traduction du Coran, qu’un des thèmes de cette première Révélation était « l’éloge de la plume comme moyen de connaissance humaine » et qu’ainsi s’expliquerait le souci du Prophète pour la conservation du Coran par écrit ».

Des textes établissent formellement que, bien avant que le Prophète eût quitté La Mecque pour Médine (c’est-à-dire bien avant l’Hégire), le texte coranique déjà révélé était fixé par écrit. On va se rendre compte que le Coran en fait foi. Or l’on sait que Mohamed et les croyants autour de lui avaient coutume de réciter de mémoire le texte révélé. Il serait donc inconcevable que le Coran puisse faire allusion à des faits qui n’auraient pas correspondu à la réalité alors qu’ils étaient très aisément contrôlables dans l’entourage du Prophète auprès des auteurs de la transcription.

Quatre Sourates pré-hégiriennes font allusion à la rédaction du Coran avant que le Prophète eût quitté La Mecque en 622 (Sourate 80, versets 11 à 16) :
« Non, non ! Vraiment ceci est un Rappel
 Quiconque veut, donc, qu’il se rappelle
 En des feuilles honorées
 Elevées, purifiées
 Entre les mains de scribes
 Nobles et pieux. » 

Yusuf Ali a écrit, dans les commentaires de sa traduction du Coran de 1934, qu’au moment de la Révélation de cette sourate il en existait quarante-deux ou quarante-cinq autres entre les mains des musulmans de La Mecque (sur un total de cent quatorze).

Sourate 85, versets 21 et 22 :
Ceci est au contraire une glorieuse lecture².
Sur une tablette conservée.

1. Ces paroles bouleversèrent Mohamed. On reviendra plus loin sur leur interprétation, en liaison en particulier avec le fait que Mohamed ne savait ni lire ni écrire à cette époque.

2. Dans le texte : Qur’an qui veut dire aussi lecture

Sourate 56, versets 77 à 80 :
Voici une lecture noble
 Dans un écrit gardé avec soin
 Que seuls touchent les Purifiés
 C’est une Révélation du Seigneur des Mondes.

Sourate 25, verset 5 :
Ils ont dit : Ce sont des histoires de nos aïeux qu’il se fait écrire (ou écrit) et qui lui s’ont dictées matin et soir.

Il s’agit ici d’une allusion aux accusations portées par les adversaires du Prophète qui le traitaient d’imposteur. Ils colportaient qu’on lui dictait des histoires de l’Antiquité qu’il écrivait ou faisait écrire (le sens du mot est discutable, mais il faut se rappeler que Mohamed était illettré). Quoi qu’il en soit, le verset fait allusion à cet enregistrement par écrit que relèvent les adversaires même de Mohamed.

Une sourate postérieure à l’Hégire fait une dernière mention de ces feuilles sur lesquelles sont inscrites des prescriptions divines :

Sourate 98, versets 2 et 3 :
Un envoyé de Dieu récite des feuilles purifiées où sont des prescriptions immuables.

Ainsi le Coran renseigne lui-même sur sa mise par écrit du vivant du Prophète. On sait que Mohamed avait autour de lui plusieurs scribes, dont le plus célèbre Zaid Ibn Thâbit laissa son nom à la postérité.

Dans la préface de sa traduction du Coran (1971) le professeur Hamidullah décrit bien les conditions dans lesquelles la transcription du texte coranique s’est effectuée jusqu’à la mort du Prophète :

« Les sources sont d’accord pour dire que toutes les fois qu’un fragment du Coran était révélé, le Prophète appelait un de ses compagnons lettrés, et le lui dictait, tout en précisant la place exacte du nouveau fragment dans l’ensemble déjà reçu... Les récits précisent qu’après la dictée, Mohamed demandait au scribe de lui lire ce qu’il avait noté, pour pouvoir corriger les déficiences s’il y en avait... Un autre célèbre récit nous dit que le Prophète récitait chaque année au mois de Ramadan, devant Gabriel, tout le Coran (révélé jusqu’alors)..., que le Ramadân qui précéda sa mort, Gabriel le lui fit réciter par deux fois... On sait que dès l’époque du Prophète, les musulmans prirent l’habitude de veiller, le mois de Ramadan, par des offices surérogatoires en récitant le Coran tout entier. Plusieurs sources ajoutent que lors de cette dernière collation, son scribe Zaid était présent. D’autres parlent de nombreux autres personnages aussi. »

On se servit, pour ce premier enregistrement, d’objets très variés :

Parchemin, cuir, tablettes de bois, omoplates de chameau, pierres tendres pour graver, etc.
Mais, en même temps, Mohamed recommanda que les fidèles apprissent par cœur le Coran, ce qu’ils firent pour tout ou partie du texte qui était récité lors des prières. C’est ainsi qu’il y eut des Hafizûn qui connaissaient tout le Coran par cœur et le propageaient. La double méthode de conservation du texte par l’écriture et par la mémoire se révéla très précieuse.

Peu de temps après la mort du Prophète (632), son successeur Abu Bakr, premier calife de l’Islam, demanda à l’ancien premier scribe de Mohamed Zaid Ibn Thâbit de préparer une copie, ce qu’il fit. Sur l’initiative de Omar (futur deuxième calife), Zaid consulta toute la documentation qu’il pouvait collecter à Médine : témoignages des Hafizûn, copies du Livre faites sur divers objets et appartenant à des particuliers, tout cela pour éviter toute erreur possible de transcription. On obtint ainsi une copie très fidèle du Livre.

Les sources nous apprennent qu’ensuite le calife Omar, successeur d’Abu Bakr en 634, en fit un seul volume (mushaf) qu’il conserva et donna à sa mort à sa fille Hafsa, veuve du Prophète.

Le troisième calife de l’Islam, Ûthman, qui exerça son califat de 644 à 655, chargea une commission d’experts de pratiquer la grande recension qui porte son nom. Elle contrôla l’authenticité du document établi sous Abu Bakr et en possession jusqu’alors de Hafsa. La commission consulta des musulmans qui connaissaient le texte par cœur.

La critique de l’authenticité du texte s’opéra d’une manière extrêmement rigoureuse. La concordance des témoignages fut jugée nécessaire pour retenir le moindre verset qui pût prêter à discussion ; on sait, en effet, que certains versets du Coran peuvent corriger certains autres pour ce qui concerne les prescriptions, ce qui s’explique parfaitement quand on se rappelle que l’apostolat du Prophète porte sur vingt années en chiffres ronds. On aboutit ainsi à un texte où l’ordre des sourates reflétait celui — on le pense aujourd’hui qu’avait suivi le Prophète dans sa récitation complète du Coran durant le mois de Ramadan, comme on l’a vu plus haut.

On pourrait s’interroger sur les motifs qui conduisirent les trois premiers califes, Uthman en particulier, à opérer des collections et recensions du texte. Ils sont simples : l’expansion de l’Islam fut d’une extrême rapidité dans les toutes premières décennies qui suivirent la mort de Mohamed et cette expansion se fit au milieu de peuples dont beaucoup possédaient des langues qui n’étaient pas l’arabe. Il fallut prendre des précautions indispensables pour assurer la propagation du texte dans sa pureté originelle : la recension d’Uthman eut cet objectif.


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