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Commentaire de Philippe VERGNES

sur Empathie, conscience morale et psychopathie – Une nouvelle conscience pour un monde en crise (partie 3/3)


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Philippe VERGNES 2 septembre 2014 12:24

Bonjour Hervé,

J’ai bien suivi toutes tes explications et tu me confirmes par là que tu généralises ton propre vécu à la définition de la psychopathie. Malheureusement, tu commets là une erreur. En effet, il est bien différent, comme tu l’analyses fort bien, d’être dans l’impossibilité de supporter davantage une émotion que de vivre l’impossibilité de perte d’une émotion forte.

Le problème, c’est que tu ramènes ces deux situations à la question de la psychopathie. Dans la première solution, la réponse est la psychopathie, dans la seconde, ton cas d’après ton témoignage, c’est celle de ce que l’on appelle les états limites. On retrouve ce schéma dans l’un de mes articles que j’ai souvent cité en commentaire ici : Perversion narcissique et traumatisme psychique - L’approche biologisante.

C’est une confusion hyper fréquente, mais s’il est vrai que le pervers narcissique appartient le plus souvent à la catégorie borderline, peu de borderline adopte une défense perverse. C’est cette indistinction qui rend confuse ta compréhension de la psychopathie.

Je m’explique, ce n’est pas parce que tu t’es retrouves un jour à devoir refouler tes émotions qu’automatiquement tu es un psychopathe. Cela n’a rien à voir. As-tu déjà fait payé à autrui la responsabilité de ton propre développement psychique et ce même à une époque où tu n’avais pas les prises de conscience que tu as eu ?

Sincèrement j’en doute, mais cela peut toutefois survenir ponctuellement à tout un chacun à la suite d’un deuil (au sens très large qu’en donne la psychanalyse : stress intense dû à une situation exceptionnelle). Or, c’est ce que fait le psychopathe : il se venge sur autrui ad vitam aeternam. Mais il ne se venge pas sur n’importe qui, ni n’importe comment, il se venge sur les personnes les plus fragiles de son entourage où les personnes qui le prennent en empathie. Si tu ne comprends pas ce mécanisme de transport et d’export (que je n’ai pour le moment pas encore explicité dans aucun de mes articles) tu ne peux pas comprendre ce qu’est la psychopathie de forme perversion narcissique.

Je te donne une exemple des conséquences de ces phénomènes de transport et d’export. Je tiens mon expérience de plusieurs milieux et dans l’un d’eux j’ai rencontré des personnes (deux cas) dont le mari était deux fois veuf par suicide de ses compagnes. Celui le plus graves était celui d’un homme dont les six enfants qu’il avait eu de ses trois épouses successives avaient tous de graves problèmes psychiatriques. Au final, c’est plus d’une dizaine de vies qui étaient sacrifiées pour qu’un seul d’entre eux conservent son masque de santé mentale.

Que penser de ce type d’exemple qui est bien plus courant que tu ne peux le croire. Je précise également une chose : l’un des plus grands spécialistes français sur la question du suicide en France a été interrogé à ma demande par la journaliste qui a écrit le premier dossier de presse paru sur le sujet en première page d’un grand hebdomadaire. Sa réponse, suite à ma suggestion a été très claire : « Le phénomène me paraît de plus en plus évident et compréhensible » dit Yves Prigent, neuropsychiatre et auteur de l’ouvrage « La souffrance suicidaire - Essai sur le mal insupportable » paru en 1997. « Si je devais actualiser mon livre, je le ferais en ce sens. On reçoit en consultation de plus en plus de traumatisés psychiques sur lesquels un pervers a jeté son dévolu ». Dans ce dossier, un autre spécialiste de la question précise qu’il serait pertinent après un suicide de se poser la question de la prédation morale". Etc. etc., etc.

J’aborderais la question du suicide dans un prochain article, lorsque j’aurais terminé avec le sujet de la perversion narcissique. Mais je suis encore loin du compte.

Nous sommes-là très loin de ce que tu comprends pour l’heure de la psychopathie. Toutefois, cela n’empêche pas tes développements d’être d’un très grande pertinence pour l’immense majorité des gens.

Pour conclure en prenant une image souvent utilisée dans nos échanges : le développement itératif ne peut fonctionner que sur la base de deux miroirs parfaitement bien polis. Or, le miroir du psychopathe n’a jamais été poli. D’où le fait, on pourrait dire, qu’il aire dans les limbes sans trouver de sortie. C’est ce qu’il te faut intégrer dans ta conceptualisation de la psychopathie.

Bon avec ça, peut-être comprendra tu mieux le sens de ma question pour laquelle j’attends toujours ma réponse. smiley


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