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Commentaire de jean-jacques rousseau

sur Atlas historique de l'Afrique : Des origines à nos jours par Bernard Lugan


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jean-jacques rousseau 26 mars 2019 13:07

Ce genre d’analyse que vous qualifiez « d’imparable » fait partie de ces lieux communs, de ces formules éculées qu’il est de bon ton de ressortir de la naphtaline dans les diners en ville.

Il y a aussi : "Les africains sont tellement arriérés, tellement peu entrés dans l’Histoire que le principe même de l’État leur est inaccessible...« 
 »Leur système culturel et politique est celui de la Tribu au niveau arriéré des palabres interminables sous un arbre..."

Entre ici toutes les considérations racistes et anthropomorphiques des nostalgiques de la belle époque coloniale. D’un ridicule de bassesse humaine à faire pleurer.

Bref il s’agit seulement de justifier à rebours et en creux l’ingérence occidentale que l’on déplore pour mieux poursuivre le pillage organisé de l’Afrique au nom du développement, l’activation des conflits ethniques et religieux au nom de l’humanisme.

Je cite :

 Comme l’explique très bien Lugan : « Sur les décombres de ces empires ou sur les mosaïques ethniques régionales, les tracés coloniaux ont plaqué un artificiel maillage à l’intérieur duquel les Etats post-coloniaux ne sont le plus souvent que des coquilles juridiques vides ne coïncidant pas avec les patries charnelles qui fondent les véritables enracinements humains. »

A pousser ce genre de raisonnement, cela veut dire que l’Etat ne serait qu’une formation politique viable pour population ethniquement, géographiquement et culturellement homogène. C’est adhérer implicitement à la formule nazie : "Ein Reich, Ein Volk, Ein Fuhrer".

Sachez cher monsieur que la France a connu et subit ce genre de doctrine « Un Dieu, un Roi ». Ce fut la période la plus noire de son Histoire. Celle des dragonnades, de la St Barthélemy, de l’exil en masse des plus érudits, des plus honnêtes des sujets de France, etc. Heureusement que nous sommes revenus de ce genre de fadaises et que la Tolérance, la liberté de conscience et le pluralisme ont prévalu et que cette période trouble a offert gracieusement un précédent juridique (Les Traités de Paix de Münster et Osnabrück de la Guerre de Trente ans en 1648) et de nouveaux concepts à la pensée occidentale pour se détacher de ces sanglantes vieilleries ataviques.

Les frontières d’un État sont toujours arbitraires. Il ne s’est jamais vu qu’une frontière ne sépare pas un même groupe ethnique, une plaine fertile, une ancienne contrée impériale, une zone d’influence culturelle ou religieuse, etc. Il s’agit le plus souvent d’un partage opéré sur la dernière possession reconnue, la dernière ligne de front d’une guerre ancienne. Mais qu’est-ce que ça prouve ? Qu’il faut reconstruire de nouveaux États, redessiner des frontières ? Non. Cela tend simplement à démontrer qu’il faut apprendre à vivre ensemble, prendre le meilleur des uns et des autres, s’entendre sur le même sens à donner pour se comprendre et travailler ensemble.

De même qu’une famille est composée d’enfants qui ne se sont pas donné rendez-vous, pour être forte et unie elle doit recevoir une culture de tolérance et de coopération, plutôt que celle que vous propagez de dénigrement, de querelle impossible à partager, d’ingérence dans les affaires d’autrui.

Avant de parler pour ne rien dire. Relisez l’Histoire de France. Celle d’un territoire très improbable, sous l’agression permanente de voisins puissants et vindicatifs. Qui n’a pu survivre que par l’acceptation de sa diversité, l’association fraternelle pour un destin commun des Bretons, Alsaciens, Savoyards, Poitevins, Basques, Provençaux, etc. C’est l’union des peuples qui a prévalu par dessus toute leur différence pour établir la Justice et la Paix d’un État légitime.

La plus belle leçon que vous avez à offrir en tant que français (pour peu que vous le soyez de cœur) c’est celle-là : « Qu’à partir de tout ce qui nous sépare, il est seulement possible de s’entendre ». Cette leçon — que seuls des esprits arriérés ne peuvent comprendre — c’est : que l’État, la République ne se fonde pas sur l’homogénéité, la conformité mais que la Concorde, la Solidarité nationale naît de l’acceptation de la différence comme le principe d’une vraie richesse.


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