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Accueil du site > Tribune Libre > La grande escroquerie du Palais de Tokyo

La grande escroquerie du Palais de Tokyo

Le débat sur l’art contemporain fait déjà rage et l’on devrait sans doute se retenir d’intervenir lorsqu’on ne possède pas les patentes et certifications reconnues dans un univers où l’on se retranche d’autant plus volontiers derrière l’élitisme esthétique que l’on est forcément conscient du regard goguenard de la majorité du public. Il y a des moments, néanmoins, où critiquer devient un devoir civique. Et l’exposition actuellement en cours au Palais de Tokyo (jusqu’au 14 janvier) est une telle caricature de ce que peut produire l’art (?) contemporain que l’on ne saurait passer outre au devoir d’indignation.

Pour les lecteurs qui ne seraient pas familiers de cette forme d’expression artistique, il faut préciser qu’on n’attend pas des artistes contemporains qu’ils proposent du « beau ». Ou bien le beau en question ne peut être que le sous-produit, généralement non désiré, de la démarche de l’artiste. L’art contemporain se doit d’être troublant ; il s’agit de choquer (et bien souvent de choquer « le bourgeois »). Cet art prend le plus souvent la forme d’ « installations » : on confie à l’artiste une pièce ou une partie de pièce dans le musée, espace dans lequel il a la liberté de disposer dans l’ordre ou le désordre qui lui convient le mieux une série d’objets, parfois fabriqués pour la circonstance, parfois simplement rassemblés là, et c’est alors de leur juxtaposition que doit naître la surprise, le trouble, puisque ce sont là les ressorts principaux de cette sorte d’art. Parfois l’installation se réduit à un objet unique. Tout le monde connaît l’urinoir exposé par Duchamp, sorte d’œuvre inaugurale de la modernité dans l’art, au sens où beaucoup la conçoivent encore aujourd’hui. On notera que, depuis Duchamp, le scato- (ou le pisso-)logique est resté une source d’inspiration essentielle. L’auteur de ces lignes garde en mémoire une installation présentée à la biennale de Sydney en juillet 2004 : la reproduction d’une salle de classe de l’école maternelle avec ses petits bureaux et ses petites chaises colorées, et pour couronner - si l’on ose dire - le tout, pour ajouter la touche d’art indispensable pour convaincre les commissaires de l’exposition, bien en évidence au milieu de chaque bureau, une crotte en plastique disposée sur une petite assiette.

On conçoit que, si l’artiste qui propose une telle œuvre se situe dans une « esthétique » bien particulière, son œuvre n’est pas nécessairement « nulle » : que le spectateur soit étonné, dérangé, voire simplement dégoûté, et le but recherché sera déjà atteint. Une telle démarche, qui repose principalement sur la surprise du spectateur, trouve néanmoins assez vite ses limites. Les « concepts » nouveaux susceptibles de faire mouche ne sont pas en nombre infini. D’où l’impression de répétition et de déjà vu que l’on éprouve bien souvent dans les expositions d’art contemporain.

Pour les connaisseurs un peu avertis, le fait de se retrouver devant un « à la manière de » n’est d’ailleurs pas obligatoirement désagréable. Ce peut être l’occasion de rafraîchir sa culture dans le domaine, d’effectuer des comparaisons, de repérer le détail qui fait la différence. Dans l’exposition en cours au Palais de Tokyo, l’œuvre la plus contemplée - celle devant laquelle les visiteurs ont envie de s’arrêter - est un petit bonhomme de Kristof Kintera qui n’est pas sans évoquer ceux de Maurizio Catelan. Ici, il s’agit d’un garçon de six à sept ans, vêtu comme les gamins d’aujourd’hui, avec son baggy, son sweat à capuche et ses tennis. Immobile contre un mur, on ne voit pas son visage et l’on peut croire tout d’abord qu’il s’agit d’un enfant véritable en train de bouder et l’on peut même se prendre à chercher du regard ses parents parmi les autres visiteurs du musée. Néanmoins on comprend vite, à voir avec quelle attention certains des visiteurs déjà présents le contemplent, qu’il ne s’agit pas d’un garçonnet en chair et en os mais d’une « œuvre » et qu’il va se passer quelque chose. De fait, au bout de quelques minutes, la poupée se met à se cogner la tête contre le mur contre lequel on l’a disposée. Après quoi elle reprend sa position figée. L’enfant est mignon ; il se cogne la tête avec une telle force que la violence est désamorcée et le spectateur est plutôt porté à sourire qu’à s’effrayer. Est-ce en raison du caractère paradoxal de notre réaction ? Toujours est-il que cette œuvre là « marche », qu’elle est « effective ».

Reste... le reste de l’exposition intitulée « 5 000 000 000 d’années ». Non seulement la sélection ne justifie en aucune manière ce titre (à l’exception du chimpanzé naturalisé de Toni Martelli, vêtu d’un tee-shirt blanc sur lequel est inscrit « Gone ») mais encore, et hélas, les œuvres retenues sont le plus souvent d’une écrasante nullité. Un seau noir comme abandonné sur une marche et titré (oh surprise !) « bucket » ; une barre métallique verticale qui sert de support à une barre horizontale avec une ampoule clignotante à chaque extrémité, dont on nous prie de croire qu’il s’agit d’un « Light Space Modulator » dont les « séquences lumineuses (seraient) inspirées du film L’Exorciste 2 » ; un cercle blanc projeté par un spot sur un mur ; l’image vidéo d’un Gianni Motti vu de dos parcourant d’un pas ferme le tunnel long de 27 km de l’accélérateur du CERN à Genève, etc.

Tant de prétention associée à une telle impuissance créatrice ne peuvent que laisser les visiteurs troublés, mais il s’agit là d’un trouble très différent de celui que l’art contemporain était censé faire naître en nous. Les œuvres nous laissent totalement insensibles. Notre inquiétude est à la mesure de notre incompréhension du projet de cette exposition. Qui a pu vouloir une telle accumulation d’objets sans message et sans âme ? A quelle fin ? Voulait-on simplement nous provoquer ? Etait-ce du second degré ? Rien dans les documents qui accompagnent l’exposition ne permet de le déduire, mais sait-on jamais ce qui peut se passer dans la tête d’un commissaire ? Quoi qu’il en soit, nous avons le droit de faire savoir que nous n’apprécions pas ce canular, qu’il existe - malgré tout - des œuvres fortes dans la création contemporaine, et que le Palais de Tokyo n’a pas été rénové à grands frais (et tout particulièrement à nos frais de contribuables) pour montrer ce qui se fait de plus nul dans le domaine.


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26 réactions à cet article    


  • miaou (---.---.165.198) 11 janvier 2007 11:58

    L’art contemporain est destiné à une élite de bazar, désireuse de se démarquer du commun, qui reste toujours bêtement attaché à une notion d’esthétisme (quelle qu’elle soit). L’art contemporain est partout, donc il est nulle part ; la conséquence logique devrait être que ces « artistes » s’abstiennent. Une telle dégradation atteint également la littérature, avec son obsession maladive du moi.

    Un beau jeu vidéo (esthétisme des décors, temporalité, interactions), voire un éconmiseur d’écran réussi, correspond davantage à l’idée d’art que ces platitudes quotidennes ou ces ridicules scatologies qui ne choquent plus personne depuis belle lurette. L’avenir de l’art est dans le numérique et le virtuel...Si le but est de choquer, les caricatures danoises de Mahomet, quelle que soit leur valeur artistique, auont été bien plus efficaces.


    • Marsupilami Marsupilami 11 janvier 2007 20:23

      Excellent commentaire Miaou, je le signe des deux mains. Connais-tu le peintre contemporain Zende ? Ininvitable au palais de Tokyo...


    • julot (---.---.218.22) 12 janvier 2007 10:29

      L’art contemporain a pour principal moteur de dégouter le peuple l’art. Intialement proposé comme un art du peuple, il échoue précisemment dans ce domaine.

      Il permet aussi des montages financiers et des detrournements spectaculaires. Car si l’on peut trouver ridicule qu’un balais à chiotte soit exposé, sa valeur ne l’est pas.

      Ce qui revient le plus souvent à échanger le produit d’un travail de 5 minutes contre un chèque de 100.000 euros.

      Il n’y a pas besoin d’être très affuté du bulble pour se rendre compte que un art qui n’est vu par personne ni reconnu comme tel (la fréquentation du musée d’art contemporain à paris est la plus basse de toute), n’a aucun avenir.

      Oui, les impressionistes furent critiqués de leur temps. Il n’empêche que la plupart d’entre eux auraient été contre l’exposition d’un urinoir.

      Et l’étape suivante ou est-elle ? Après les films d’opérations chirurgicales en direct, le morbide, le scato (machine à chier de 50 m à beaubourg), que va-t-on bien pouvoir faire ?

      Dernière reflexion. Avez-vous notés la véritable haine que les partisant de l’art moderne portent à l’art « classique ». Essayez de justifier cette haine, et vous verrez que le débat sur l’art n’est en réalité qu’un débat politique et idéologique.

      Relisez les écrits de lénine, qui précaunise de donner des couvertures laides et fantaisistes au livres, afin de décourager le lecteur. car selon lui, la littérature est un produit de bourgeois...

      Relisez la lettre de confesssion de picasso, trouvable partout sur le web.

      Et demandez-vous une fois pour toute si l’homme se grandit en s’abaissant.


    • Le Hérisson (---.---.46.229) 11 janvier 2007 12:13

      @ l’auteur

      Je ne connais pas l’exposition dont vous parlez ; il est vrai qu’en terme d’art contemporain, les « choix » ne sont pas faits, c’est à dire que l’écrémage qui eut lieu de tout temps entre les grands artistes et ceux qui n’avaient aucune valeur n’est pas opéré. Souvent, même à la FIAC par exemple, je trouve qu’il y a environ 15 % d’oeuvres qui valent le coup. Les autres n’étant que des reproductions ou de la prétention. Sur ce plan là vous avez raison.

      Mais pour juger, il faut avoir un oeil des plus aigus. J’avoue qu’étant passionné par ce domaine, il m’arrive pourtant d’être incertain. Le « beau » n’est pas le « plaisant », contrairement à la confusion que font beaucoup de personnes et bien des artistes furent ignorés ou sous estimés de leur vivant, y compris la dernière période d’un peintre que nous trouvons aujourd’hui des plus classiques comme Rembrandt.

      J’aime bien cette phrase qui, je crois, est de René Huygues, un très grand critique et auteur dans tous les domaines de l’art : « La grande oeuvre n’est pas celle qui vous dit : regarde comme je suis belle ! Elle est celle qui vous dit : Et si tu venais jouer avec moi ? »


      • jipé (---.---.221.74) 11 janvier 2007 14:46

        critique et ouvert, sauf pour ceux qui préfèrent la provoc et le n’importe quoi. Dilemne de l’art contemporain : donner du sens et de l’émotion, pas du beau, sans tomber dans le blabla ou avoir besoin d’un ’médiateur’ culturel...Rarement réussi, encore plusque dansle classique qui supportaitde bons artisans


        • Stravos (---.---.132.162) 11 janvier 2007 17:31

          Mon critère d’appréciation en matière d’art est des plus simples : serais-je en mesure de faire la même chose et, si oui, en aurais-je le goût ? C’est un moyen infaillible d’éliminer l’arnaque. Car les vrais oeuvres sont impossibles à reproduire ; sans compter que cette démarche constitue à elle seule une initiation à l’art. Celà implique aussi qu’il faut se contrefoutre du quand dira-t-on et du snobisme... Autrement dit, ne jamais dire « c’est bien » parce qu’une revue ou un type soit disant connaisseur a dit « c’est bien »... Je me souviens d’un passage de Stendhal qui m’avait émerveillé indépendamment de toute référence à la « critique autorisée » ; plus tard, j’apprenais que ce même passage avait émerveillé aussi Balzac... Comme quoi je n’avais pas tout faux, puisque je n’avais pas attendu l’opinion de Balzac pour en jouir... Un coup de coeur confirmé en quelque sorte, mais je n’en aurais pas moins aimé Stendhal si Balzac avait dit de lui pire que pendre... En résumé : je ne conçois pas d’autre attitude en matière d’art que celle-ci, et si un célèbre barbouilleure me laisse froid, je ne vois pas pourquoi il me faudrait faire semblant de me pâmer à la manière des débiles branchés...


          • julot (---.---.218.22) 13 janvier 2007 13:49

            Je te suit à 100%

            Etre capable de dire « c’est de la merde », même si tout le monde dit le contraire, c’est une remarquable indépendance d’esprit.

            Et ca montre aussi que l’on rejette un système de pensée dans lequel tout se vaut et ou l’on devrait s’interdire d’excercer son esprit critique.

            Etre un homme libre !


          • Marie Sallantin (---.---.250.127) 11 janvier 2007 18:00

            Je reprends la finale de votre article car elle est éclairante « Pour les lecteurs qui ne seraient pas familiers de cette forme d’expression artistique, il faut préciser qu’on n’attend pas des artistes contemporains qu’ils proposent du « beau ». Ou bien le beau en question ne peut être que le sous-produit, généralement non désiré, de la démarche (...) »

            En effet, ce qui est présenté au musée, car le Palais de Tokyo est un musée et non un « salon des refusés », est une forme d’expression artistique ou un genre et non de l’art au sens de faire une oeuvre soumise à des critères esthétiques. Et ce genre dit Art Contemporain, qui a ses propres critères et qui succède dans le temps à l’art moderne, se porte très bien. Il est gros et gras. Il prolifère même tant qu’on lui colle l’étiquette depuis 1997 « art officiel », étiquette dont il ne parvient pas à se débarrasser. Le comparer aux impressionnistes ( dans un des commentaires) est un argument depuis dix ans abandonné par les observateurs du phénomène ! Ce qui me semble intéressant aujourd’hui d’observer, est la fin de cet art officiel. N’en déplaise aux dévots du genre, il y a des craquements, des fissures et qui sait si on n’en a plus pour très longtemps de cette hégémonie qui aura lassé à force de farces, de grimaces et de transgression obligées.


            • julot (---.---.218.22) 13 janvier 2007 13:52

              D’autant que l’on sait à présent à quel point notre environnement nous influence. Mr Le corbusier porte une grande responsabilité dans le mal-être des banlieux.

              Vivre dans du béton, avec des soucoupes en inox rouillé...

              Il faut vivre dans du beau, être entouré de belles choses.

              Comparez les campus américains à nos universités style malakoff !

              Laquelle donne envie d’étudier ? Laquelle llaisse présager un avenir glauque ?


            • d’accord avec l’auteur (---.---.230.60) 11 janvier 2007 23:19

              Je suis allé à ce qu’ils appellaient le « marché de noël du palais de tokyo ».

              Un stand et demi consacré à des bibelots inuiles mais extrêmement cher, même pas de oeuvres d’art mais coûtant ostensiblement un prix démesuré pour faire « art chic ».

              J’avais honte d’être venu croyant y trouver un vrai marché de noël...

              Scandaleux, on ressort avec l’impression d’avoir failli se faire avoir comme un gros imbécile en achetant une de ces merde.

              Lamentable.


              • Goldy Goldy 12 janvier 2007 01:53

                Je serais presque d’accord avec Demian. Juste une question à Demian pour étayer mon analyse : Dites moi Demian, ce n’est pas vous qui cherchiez à réaliser une expression artistique dans les commentaires que vous laissiez sur Agoravox ?

                Vous en êtes arrivé à être détesté par tout le monde (le fameux classement sur le site web dont j’ai oublié le nom), pensez vous avoir réussie ce que vous aviez entrepris dans votre démarche artistique ? Si c’est le cas, et par cet article sur agoravox, il est alors possible que l’auteur de cette exposition ait réussis également. Il a choqué (vous définissez l’art contemporain avec ces termes) non pas les bourgeois, mais les amateurs d’art contemporain en les prenant complètement à leur jeu de prout-prout artistique. Il s’est moqué de vous. Mais je pense que vous vous en êtes rendu compte (sur la fin de votre article).

                Je « plusoie » l’artiste !


                • Goldy Goldy 13 janvier 2007 02:48

                  Merci pour votre réponse, je ne suis pas certain d’avoir tout compris, mais merci d’y avoir accordé du temps. J’ai personnellement toujours eu du mal avec « l’art » à l’état brut, les cours d’histoires que l’art que je devais suivre lors de mes études de photographe me faisait chier... mais d’une force...

                  Enfin, en ce qui concerne votre démarche artistique dans les commentaires, tout ça, il me semblait l’avoir lu dans votre interview sur agoravox, certainement qu’avec le temps mes souvenirs se sont effrités.


                • julot (---.---.218.22) 13 janvier 2007 14:00

                  Incroyable somme d’anachronismes. Ce qui a choqué dans le temps, ce fut le fond, pas la forme. Contrairement à maintenant ou l’on enfonce des portes ouvertes.

                  Personne n’est contre le fait qu’une oeuvre d’art dénonce la dictature ou la guerre.

                  C’est la représentation qui peut choquer, surtout si elle est de mauvais gout.

                  Car le mauvais gout existe. C’est tout simplement quelque chose qui heurte le bon sens et qui va à l’encontre du bien commun. Quelque chose que vbous ne souhaiteriez pas que votre petit garcon voit.

                  Provoquer c’est une chose, et souvent utile. Provoquer pour provoquer n’a plus aucun sens.

                  Je n’ai pas besoin que l’on me choque pour touver la guerre affreuse. Si c’était le cas, cela reviendrait à me prendre pour un enfant. Car on choque les enfants quand ils n’ont pas atteint l’age de raison (attention au grand méchant loup).

                  Je suis un adulte. J’attends que l’on me parle en adulte.

                  Enfin, je suis désolé, mais oui, j’ai ouvert des livres d’arts contemporains. Oui j’ai lu les argumentaires des contemporains. Et non, 100 fois non, cela ne m’a pas convaincu.

                  Ca vous arrangerait que je soit un gros bourgeois borné. Mais ce n’est pas le cas.


                • tho (---.---.87.251) 12 janvier 2007 14:13

                  100% d’accord avec cette critique. Cette expo est anodine. Vivement la prochaine.


                  • W (---.---.55.7) 12 janvier 2007 15:17

                    l’art contemporain est malheureusement un discours de spécialiste. alors tous à vos livres. Le Ready-made a presque 100 ans... vos mentalités environ 130.


                    • Tulipe (---.---.235.62) 12 janvier 2007 15:24

                      Demian, svp : « Aussi, Le Bernin qui osa montrer l’extase de Sainte Thérèse dans une manifestation d’orgasme féminin »les yeux vaincus« selon l’expression latine. » Pouvez-vous m’en dire plus sur cette expression « les yeux vaincus » ? Quel rapport avec la sculpture de Le bernin, cela m’intéresse beaucoup ? Ceci dit je suis assez d’accord avec le regard (nourri) de Michel Herland sur l’art contemporain, tout en étant farouchement opposé aux propos scandalisés de certains commentateurs sur ce même art et qui en profitent pour y engouffrer une nouvelle police de la dépense correcte. Et c’est bien là le danger, qu’il me semble que Michel essaye justement d’éviter. On se LASSE d’un bazar qui ne cesse de dénoncer finalement ce à quoi il ne cesse d’essayer de participer (le marché de l’art par exemple). On se lasse d’un mono-sens permanent critiquant l’ego artistique pour mieux s’y élever soi-même. Il est vrai que c’est une situation qui peut se rapprocher de « je suis une merde, voire un lâche, et j’en jouis ». Situation à faux risque puisque toute la société fonctionne comme ça maintenant, et qui va donc à contre-sens dans le sens de son poil. C’est une astuce dont Marcel Duchamp porte la prophétie. La lacheté étant d’éviter la prétention de l’artiste qui se targue d’un savoir-faire avec la matière qui la dépasserait (un peu comme le matador avec le taureau) et que là tout le monde demande à voir qu’il se casse la gueule comme tout le monde. Et bien, non, il y en a qui ne se casse pas la gueule ! Ils prétendent et ils font bien. Les autres (les lâches, spectateurs et artistes), dans leur médit-ocrité, ne savent que rire... d’un rire mineur. On peut se contenter d’un rire mineur. Tulipe


                      • Icks PEY (---.---.232.221) 16 janvier 2007 09:54

                        Cela ne m’étonne pas que les lubriques du XXIème siècle cherchent à relire les oeuvres du passé avec leurs yeux d’aujourd’hui.

                        Tout d’abord, Le Bernin n’a rien inventé puisqu’il s’est reposé sur les écrits de Sainte Thérèse : son oeuvre n’est donc que la translitération de l’oeuvre d’une autre. Or, Sainte Thérèse n’avait pas grand chose d’une romancière érotique !

                        Simplement, le principe même d’une extase mystique vous dépasse, alors, puisque vous ne la comprenez pas, vous voulez absolument la rattacher à des notions qui vous sont moins inconnues. Donc l’orgasme est tout trouvé et en plus vous pensez que cela défrise le bien-pensant, alors c’est tout bon à vos yeux.

                        Heureusement que les hommes d’Eglise sont moins cons que vous ne le pensez car ils voient dans cette oeuvre ce que Sainte Thérèse dit avoir vécu et non une bestiale scène de cul comme vous l’insinuez.

                        Décidément, les pornocrates d’aujourd’hui ont vocation a tout ramener à des histoires de fesses !


                      • (---.---.165.157) 12 janvier 2007 23:36

                        bande con ! Bravo W


                        • (---.---.165.157) 12 janvier 2007 23:36

                          bande de con ! Bravo W


                          • (---.---.235.62) 13 janvier 2007 19:02

                            Merci Demian et pour l’appréciation sur mon commentaire, qui m’a beaucoup touché, et sur la mine d’informations concernant le Baroque, Le Bernin, Ovide et la jouissance féminine via Dolto. Ca change un peu de mon Lacan et de l’injonction à bander con ! smiley En ce sens, merci du texte latin : ca fait du bien. Aux Victos Ocellos, donc, comme on dirait des bulles de Champagne ! Amicalement. Tulipe


                            • seb59 (---.---.180.194) 15 janvier 2007 09:37

                              @ a l’auteur

                              Merci pour cet article qui nous change de la beatitude habituelle concernant l’art.

                              De nombreuses oeuvres sont fabuleuses, mais on peut se demander legitimement si certaines ne sont pas juste une belle escroquerie organisée.

                              J’ai eu l’occasion de voir recemment dans un musée d’art moderne une grande photo « artistique » representant un avant bras dont les veines etaient sectionnées.

                              Plutot choquant, surtout que c’etait visible par des enfants. Ca n’avait rien d’artistique, c’etait juste une photo pourrie à 10000 euros.


                              • Tulipe (---.---.235.62) 18 janvier 2007 15:21

                                Je ne sais pas si c’est une bestiale scène de cul, ce que je sais c’est que St Thérèse jouit (je parle de la vraie) et qu’elle le fait avec tout son corps en Dieu (le Verbe). Pour Le Bernin, c’était un baiseur notoire (il avait beaucoup d’énergie), l’Eglise a bien su en profiter (comme de Michel-Ange) pour en faire son porte-parole de la Contre-Réforme. Pour faire l’extase de St-Thérése (la sculpture), il faut quand même s’y connaître un peu en jouissance féminine, on ne tape pas dans le marbre comme ça. Il y faut un peu de savoir -faire, qui ne s’aprenne pas uniquement sur les bancs de l’école mais dans la vraie vie, la pratique. Et si St-Thérése jouit, c’est que LES femmes ont un rapport avec cette jouissance autre... cette jouissance mystérieuse dont elles ne peuvent rien dire mais qu’elles éprouvent et pas uniquement en lisant des livres. Cette jouissance l’avez-vous éprouvée dans ce que subitement elle vous échappe, dans ce que étrangement vous ressentez qu’elle vient d’ailleurs, que vous n’en êtes que le pré-texte, ne lui laissant à elle que ses yeux vaincus. Tulipe


                                • Jaspert (---.---.95.171) 22 janvier 2007 09:10

                                  C’est marrant cette discussion partant de l’art contemporain, se transforme en bravades de camionneurs, style « qui est le plus gros baiseur » ; vous vous êtes grillés au bout de quelques lignes ! (Les bigotes, n’en parlons pas.) Je vois ici des gens qui parlent pour rien. Je vous explique : Le monde se divise en 3 catégories : 1/ Ceux qui ont le pouvoir, 2/ Ceux qui suivent (95%) et 3/ Ceux qui essayent de vivre en dehors du système (0,5%). Ces derniers sont parfois obligés de vendre aux premiers leurs chiottes usagés pour vivre. Les 1/ ne sont pas dupes (je vous rappelles qu’ils ont le pouvoir, donc le choix) mais ils achètent par sympathie pour aider les 3/ , pour se donner bonne conscience ou se sentir actifs dans l’art de leur époque ect. Pour ce qui est de la façon de s’exprimer des artistes les commentaires de camionneurs ne sont pas tellement pris en compte. Les 2/ ne peuvent pas acheter, et n’ont donc rien à dire. Ils devraient en rester à parler de foot, ou de la dernière Clio, ils n’ont pas les références nécessaires, il existe pour eux de l’art populaire sur des marchés d’art qui prolifèrent ça et là (ex : Bastille). Et puis ce commentaire récurant du beauf devant l’oeuvre : « Moi aussi je pourrai le faire », si véritablement il pouvait le faire, c’est à dire : Réussir à vendre un chiotte au prix de l’or, vous croyez qu’il se gênerait le beauf ? Il faut un peu de courage et d’intelligence, beaucoup de ténacité ! Il faudrait aussi être capable de dire non à la société du travail, de l’asservissement..dire non quitte à en mourir de faim, non à tout compromis.. Ne voyez vous pas ce derniers rêve de liberté, ce braquage légal ? Mais cette beauté là vous étouffe et vous vous étranglez en regardant le prix ! Le travail n’a pas de prix ! Au même titre que la vie ! Retournez bosser et courbez l’échine, l’artiste est parti avec la galette, il n’y a plus rien à voir. Bientôt diparaîtra cette dernière liberté..ne m’a-t-on pas parlé de commisaires d’exposition mis en examen.. ? Moi je ne fais pas dans le braquage légal parceque je suis presque aussi bête que les 2/ mais quand même un 3/, ce que je fais c’est plutôt populaire /boucherieart.free.fr>

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