Quand Gergovie honorait une vierge mère du nom de Marie
M. Matthieu Poux, c'est à vous que je m'adresse. Vous êtes un archéologue connu et reconnu, notamment par vos travaux sur le plateau de Corent où vous situez la capitale ou le centre de la capitale éclatée de Gergovie. Vous êtes, comme moi, un rédacteur d'Agoravox et nos positions ont été jusque-là diamétralement opposées. Je ne nie pas l'intérêt de vos travaux et de votre site, bien au contraire. Je vous demande seulement d'étendre votre réflexion jusqu'à l'éperon du Crest où je situe la forteresse.
Le titre de mon article est volontairement provocateur. Certains ne vont pas manquer de m'accuser de mélanger scandaleusement les époques tant ils ne veulent pas enlever au Moyen-âge l'âge d'or de la construction des cathédrales pour une Antiquité tardive qui aurait sombré, selon eux, dans l'anarchie des grandes invasions.
Sans être angélique au point de nier la grande tragédie humaine de ces deux époques, comment ne pas voir cette foi en l'avenir, cette flamme qui animait les Gaulois jusqu'au sacrifice de leur vie. C'est elle qui explique en partie leur histoire et qui permet de mieux la comprendre. C'est dans cet esprit que je propose une réflexion sur ce qui, pour les Arvernes, fut peut-être l'équivalent du drapeau national de notre époque : les vierges mères. La Vierge Marie s'inscrivant en lettres de feu dans cette croyance, il m'a paru logique de commencer par là.
A 80 ans, victime d'une récente chute de mon échafaudage, il est trop tard pour moi d'aller sur les plateaux de télévision pour défendre ma cause. Je jette le gant de la paix. A vous de le relever dans le sens que vous décidez.
L'église Notre-Dame du Port est à l'image d'un sphinx qui nous pose des énigmes encore inexpliquées.
Comme je l'ai expliqué dans mon précédent article http://www.agoravox.fr/ecrire/?exec=articles&id_article=124138, Notre-Dame du Port est la basilique que l'empereur arverne Avitus a fait construire au Vème siècle, à une époque où le pays arverne faisait encore partie de l'empire romain et où le christianisme des évangiles n'avait pas encore supplanté une religion druidique qui s'était judaïsé dans un croyance en un Christ du ciel qui devait venir. Il s'ensuit qu'il ne faut pas interpréter l'iconographie qui s'y trouve en fonction des évangiles mais en fonction de ce que j'appelle le livre prophétique de Jacques qui les a précédés, à savoir une épître et une révélation/annonciation connue sous le nom de protévangile. http://catholicus.pagesperso-orange.fr/Apocryphes/Apocryphe5.html
1. Portail latéral. Je propose l'interprétation suivante.
Au centre, en partant du haut, maison de Dieu dans le ciel, voûte du ciel du sanctuaire du temple de Gergovie/Le Crest (voir photo, à droite), lampadaire à huile/lumière de l'esprit qui descend, autel/sarcophage recouvert du linge sacré.
En bas, à gauche : ETHEREO REGI TRES DANT TRIADONA SABEI. Je propose la traduction suivante : AU ROI DE L'ETHER (du ciel) LES TROIS SABĖENS OFFRENT LES TROIS DONS. Nous ne sommes pas là dans la pensée de l'Ėvangile mais dans celle de Jacques. En effet, Matthieu fait dire aux mages dans son évangile : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? ». Il n'est pas déja roi du ciel. C'est Jacques, dans son épître antérieur aux évangiles, qui montre son Jésus, Christ, dans le ciel avant qu'il ne vienne (un Jésus, Christ qui n'est que le Yahvé qui vient). Mais si l'on s'en tient à "aethereo regi", on remarque qu'il s'agit d'une expression courante pour désigner Jupiter, le Dieu du ciel que les Gaulois vénéraient (César, DBG VI, 18)). En haut : VOICI LES MAGES. http://www.romanes.com/Clermont/ND_Port/Notre_Dame_du_Port_de_Clermont_0016.html
(Remarquez la position assise de la Vierge tout à fait typique des statues arvernes, vierges mères, virgo paritura, la vierge qui devait enfanter ; d'où la question concernant la datation des vierges dites romanes dont on dit qu'elles ne seraient pas antérieures au XI ème siècle.)
En bas, à droite : accouchement, baptème, linge pour sécher l'enfant. HIC PUER EXCIPITUR IN ULNIS A SIMEONE ce que M. Baty traduit ainsi : VOICI L'ENFANT, IL EST REÇU DANS LES BRAS DE SIMON. En haut : PROLEM DOMINI que je traduis IL EST ISSU DU SEIGNEUR . http://www.romanes.com/Clermont/ND_Port/Notre_Dame_du_Port_de_Clermont_0010.html.
Au sujet de Simon, je rappelle le passage de la prophétie de Jacques : C'était lui, Simeon, (les Esséniens, voir mes ouvrages) que le Saint-Esprit avait averti qu'il ne verrait pas la mort avant d'avoir contemplé le Christ dans la chair.
La mention de Simon est conforme à la prophétie de Jacques où il est dit que l'enfant est né mais... qu'il ne s'est pas encore dévoilé. Et en effet, il n'y a rien à l'intérieur de l'église qui pourrait évoquer la vie d'un Jésus. Nous sommes toujours dans la croyance en un Christ du ciel... qui est descendu dans la communauté arverne... mais qui ne s'est pas encore révélé.
2. Le chapiteau du roi David. Je propose les traductions et interprétations suivantes.
Un jeune homme ardent et beau, armé d'un glaive, vêtu d'une cotte de mailles, côtoie un personnage échevelé qu'un seul pagne habille. Le premier personnage porte sur son bouclier en lettres mystiques, inversées pour le premier mot : « Caritas ; Jes XoP H(IC) », ce qui signifie : « L'amour de la patrie (caritas patriae) ; celui-ci est Jes XoP ». Le deuxième personnage est ainsi qualifié : « Avaritia ; H(ic) Ab(sa)lon », ce qui veut dire : « L'insoumission militaire et la fraude fiscale ; celui-ci est Absalon ». Derrière les deux personnages, un guerrier masqué présente un livre ouvert sur lequel est écrit ceci : « Demon co(n)tra virtu ???????t » — Plutôt que "le démon se bat contre les vertus", je pencherais plutôt pour " le courageux se bat au contraire du mauvais".
Cet homme barbare, échevelé, est l'indigène local, un GAULOIS, ou un étranger qui est venu avec sa famille s'installer dans la nouvelle ville de Clermont. Enfant indiscipliné comme Absalon le fut à l'égard du roi David son père, il écoute volontiers le mauvais génie qui le pousse à la révolte. Ce jeune homme, symbole de la vertu, c'est l'amour de la patrie, c'est Gergovie sur la hauteur du Crest ; c'est Jes XoP, l'oint ou le fils de Jessé : le roi David (un CELTE/Kaldaï/Chaldéen ?). Il rétablit l'ordre et fait la police dans son peuple. En dépit des troubles et des révoltes continuelles de son enfant, il fait preuve à son égard d'une insigne mansuétude. Le Crest, comme un père sévère mais bon, aime son enfant turbulent (Clermont) et lui pardonne, comme David aimait Absalon et lui pardonnait, mais il lui demande de prendre, lui aussi, les armes pour défendre la cité. Engagez-vous ! Rengagez-vous, hommes de Clermont ! Ou bien revétez la tenue militaire, ou bien contribuez par vos impôts à la défense de la patrie ! Riches, ne dissimulez pas vos revenus et votre argent dans la cruche de l'avare ! N'écoutez pas le mauvais génie ! Donnez ! Alors, l'étoile d'Absalon viendra rejoindre l'étoile de David pour ne plus former qu'une seule étoile, qu'une seule cité, la cité d'Augustonemetum. Au pied de Gergovie/Le Crest, le serpent/dragon des anciennes croyances rôde. (Sur le premier extrait, on lit le H, puis un A accolé, puis un B penché et accolé au A, puis la fin du mot Absalon. Sur le deuxième extrait, on devine JES, autrement dit Jessé, un signe kabalistique qui ne peut désigner que David - le fils de Jessé - puis le H de Hic).
3. Autres chapiteaux.
Les autres chapiteaux ne présentent pas de difficultés particulières. Il s'agit de la mise en images du protévangile de Jacques. On y voit Zacharie annonçant la naissance de Jean, l'annonce de l'ange à Marie, la rencontre de Marie et d'Elisabeth, la perplexité de Joseph et l'espérance de la naissance à venir dans le sanctuaire de l'église du Crest toujours existante. Quant au palais de Vercingétorix également représenté au-dessus, il existait encore lors de ma dernière visite mais à l'état de ruines. Reste la question fondamentale à laquelle on ne peut échapper : pourquoi toute cette icographie, au V ème siècle de notre ère ? Oui, cela me semble évident ; il s'agit d'un grand appel à l'union nationale arverne sous le drapeau d'une Gergovie qui renaît sous le nom de Marie, et cela dans la continuation de ses virgo paritura - vierges/populations pieuses dont on attend qu'elles enfantent un sauveur. C'est ce que nous dit ce dernier chapiteau. On lit ceci : première ligne ECCE LIBRO, deuxième ligne V E (un petit I dans le V, un petit T entre les deux lettres) puis ECCE, troisième ligne MARIA (les lettres MAR sont entrelacés, le I plus petit et déplacé vers le haut), ce qui donne : ECCE EX LIBRO VITAE / ECCE MARIA, en français : VOICI (ce qui est écrit) DANS LE LIVRE DE VIE / VOICI MARIE. Enfin reste le dernier mot que je déchiffre ainsi : ... Et dans un autre chapiteau, force est de constater que ce n'est pas le Christ ressuscité qui est honoré dans le ciel mais Marie.
Et nous voilà tout naturellement conduit à l'hymne acathiste traduit du grec par M. Armel Guerne que j'ai réintreprété et dans lequel je crois deviner un ancien hymne religieux patriotique de la nation arverne.
Il faut s'imaginer la scène à l'intérieur de Notre-Dame du Port. A l'autel, dans le saint des saints, le prêtre déclame les couplets face à l'assistance qui se trouve dans la nef. Les assistants, le bras levé faisant le salut romain, reprennent le refrain en choeur.
L'ange arrive chez Joseph et à la Vierge, il dit
« Le voilà, l'Incorporel qui tient le ciel, Il vient.
Inchangé, Il accepte de descendre en ton sein. »
Et moi, le voyant s'habiller de notre chair servile,
Je m'exclame ravi :
Epouse indéflorée, je vous salue, Marie !
A l'ange Gabriel répond la Vierge, hardie :
« De mes chastes entrailles, un fils pourrait-il naître ?
N'ayant pas connu l'homme, je ne puis. »
Mais l'ange l'acclamait, la glorifiant ainsi :
« Epouse indéflorée, je vous salue, Marie »
(Le prêtre)
La puissance du Très-Haut a couvert de son ombre la Vierge, et elle a conçu, ô toi la très pure.
(Tous)
Ô toi, la très pure.
Ô toi, champ fertile de l'espoir, terrain de l'immortalité !
Ô toi, jardin du jardinier des grâces et de la sainteté !
Ô toi, autel de l'alliance et plante de la vie !
Ô toi, porte du paradis !
Celui qui devait naître, Il est né à son heure,
S'incarnant dans le monde — les anges le proclament —
Accourent les bergers vers l'illustre pasteur,
Sur le sein de sa mère, le voyant paître, ils clament :
Salut, mère du pasteur, salut, mère de l'agneau.
Salut, mère de l'astre qui jamais ne se couche.
Salut, flamme de vérité ; salut, flambeau.
Salut, joie des nations et des générations.
Voilà l'étoile qui conduit jusqu'à Dieu.
Voilà les mages ; ils entrent dans le saint lieu.
S'agenouillant pour honorer le tout puissant des rois,
Il touchent l'Inaccessible et ils s'écrient tous trois :
« Alleluia ! »
(Le prêtre)
Le créateur est descendu au milieu de ses créatures. Il a germé dans un sein qui n'avait pas été ensemencé. Voyant cette merveille, acclamons ! Il est venu sur terre comme une simple créature. Alleluia, Il est venu chercher, pour les tirer vers le ciel toujours mieux et toujours plus haut, ceux qui crient vers Lui.
Crions : Alleluia ! Alleluia !Alleluia !
Nous sommes dans le prolongement de la croyance exprimée, au Vème/VIème siècle avant J.C, dans le cratère de Vix http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-civilisation-de-gergovie-110469
(Extraits de mon "Histoire de Gergovie" publiée en 1993 sous le pseudonyme de Jean)
En ce qui concerne l'origine de Marie, voyez mon article http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/les-evangiles-sont-des-textes-49157
Les photos de chapiteaux sont extraites de www.romanes.com et de www.art-roman.net
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