Augmenter la production mondiale de viande ?
Que la demande augmente, cela ne fait aucun doute : la consommation moyenne des Chinois est ainsi passée de 13,7 kg de viande par an et par habitant en 1980 à 59,5 kg aujourd’hui, et cette tendance peut continuer puisqu’elle est encore loin des 82,1 kg des pays occidentaux.
Que cette augmentation soit gérable, c’est une autre chose.
Comment peut-on penser à doubler la production de viande alors qu’on n’est même pas encore capable de nourrir toute la population de la planète simplement avec des céréales et de lui donner de l’eau en quantité suffisante ?! Sachant que pour produire une protéine de viande de bovin, il faut par exemple 9 protéines végétales, qu’il en faut 7 pour la viande porcine et 3 pour la volaille, on peut être inquiet pour la production des céréales et des légumes destinés à être consommés directement par la population. Produire de la viande demande beaucoup d’eau, beaucoup de terres. 80% de la surface agricole est déjà consacrée à l’élevage ou à la production de céréales pour les animaux. Comment peut-on imaginer augmenter cette production et nourrir toute la population de la planète ? Cela semble utopique.
Par ailleurs, tenter de le faire aurait des répercussions désastreuses sur notre environnement. Le méthane produit par les ruminants et l’oxyde nitreux produit par le fumier sont des gaz à effet de serre bien plus puissants que le co². Trouver toujours plus de nouvelles terres conduirait à aggraver la déforestation.
Certaines populations, pourtant, auraient besoin d’augmenter leur apport en protéines d’origine animale pour une alimentation plus diversifiée, mais cela ne signifie pas qu’il faille augmenter pour autant la production mondiale : une meilleure répartition suffirait. Beaucoup d‘occidentaux essaient de limiter leur consommation de viande pour des raisons de santé mais, à plus de 80 kg par an, ils peuvent encore mieux faire !
D’une façon plus générale, en ce qui concerne l’alimentation, il faut arrêter de se lamenter et d’évoquer le mauvais sort ou la malchance, là où il n’y a que responsabilité humaine. Pour l’instant, la planète pourrait nourrir tout le monde puisque la consommation moyenne sur terre est de 2800 calories par jour par habitant alors qu’il faut à l’être humain, en fonction de son sexe et de son activité physique, entre 2000 et 3500 calories par jour. On voit bien que le problème pourrait être résolu par une meilleure distribution plutôt que par une augmentation générale. 3700 calories par jour en moyenne en Europe de l’ouest et aux Etats-Unis, c’est peut-être beaucoup… 1520 dans certains pays d’Afrique, c’est dramatique.
Notre planète peut nous nourrir mais il faut l’aider un peu en étant raisonnables. Quand il y a un plat à se partager et que l’un des convives est gourmand, il a le choix entre se servir largement et intimider ses frères pour les empêcher de protester ou bien il modère sa gourmandise en songeant que la démesure n’est jamais bonne pour la santé ou bien il réclame un plat plus copieux mais sa mère n’a pas forcément les moyens de cuisiner davantage. Notre planète est cette mère qui fait ce qu’elle peut, qui fait déjà beaucoup mais qui ne peut pas grand-chose contre l’égoïsme de certains de ses fils. Les rappeler à l’ordre ? Les punir ? Mais s’ils sont grands et majeurs ?
Pour en revenir à la consommation de viande, le problème est peut-être avant tout un problème de commodité. Faire griller un steak, c’est rapide et facile. Manger un saucisson aussi. Mettre un poulet dans le four, tout le monde peut le faire. Mais cuire, assaisonner, gratiner, préparer les légumes ou des céréales et satisfaire les gourmets, c’est une autre affaire et, plus les sociétés deviennent pressées et affairées, moins elles ont le temps de le faire et les savoirs culinaires se perdent. Je suis persuadée que ce n’est pas tant par goût ni par souci nutritionnel que la consommation de viande a augmenté et reste forte dans les pays industrialisés mais par facilité tout simplement.
Pour toutes ces raisons, songer à augmenter la production de viande me paraît dangereux et non justifié. Mais il y a une demande, dira-t-on ! Et alors, faut-il écouter toutes les demandes ?
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