Suite du Discours de Sékou Touré á De Gaule le 25 Août 1958 á Conakry.
" Monsieur le Président, vous me permettrez de rappeler un passage du
discours que j’ai prononcé à l’occasion de la visite récente d’un
Représentant du Gouvernement Français, M. Gérard Jaquet, ancien Ministre
de la France d’Outre-Mer.
Notre option fondarnentale qui, à elle seule, conditionne les différents
choix que nous allons effectuer, réside dans la décolonisation
intégrale de l’Afrique : ses hommes, son économie, son organisation
administrative, et, en vue de bâtir une Communauté Franco-Africaine
solide et dont la pérennité sera d’autant plus garantie qu’elle n’aura
plus dans son sein des phénomènes d’injustice, de discrimination ou
toute cause de dépersonnalisation et d’indignité.
En effet, le monde évolue rapidement et les impératifs de la vie moderne
posent avec brutalité le problème du choix entre la stagnation et le
progrès, entre la division des peuples et leur union fraternelle, entre
l’esclavage et la liberté, enfin entre la guerre et la paix.
Pour l’Afrique Noire d’influence française, ces problèmes doivent être
abordés avant tout avec un esprit réaliste, compréhensif. Notre coeur,
notre raison, en plus de nos intérêts les plus évidents, nous font
choisir, sans hésitation, l’interdépendance et la liberté dans cette
union, plutôt que de nous définir sans la France et contre la France. Et
c’est en raison de cette orientation politique que nos exigences
doivent être toutes connues pour que leur discussion soit facilitée au
maximum.
D’aucuns en parlant des rapports franco-africains situent leur
raisonnement dans le domaine économique et social exclusivement, et
concluent fatalement, compte tenu du grand retard des pays
sous-développés d’Afrique, par l’apologie de l’action coloniale de la
France. Ces hommes oublient qu’au-dessus de l’économique et du social il
y a une valeur autrement plus importante, qui oriente et détermine le
plus souvent l’action des homrnes d’Afrique ; cette valeur supérieure
réside essentiellement dans la Conscience qu’apportent les hommes
d’Afrique à la lutte politique, tendant à sauvegarder leur Dignité et
leur Originalité et libérer totalement leur Personnalité. Qui ne sait
aujourd’hui que les drames douloureux enregistrés dans l’histoire
coloniale française en Indochine et en Afrique du Nord sont interprétés
aussi différemment selon que l’on donne la suprématie à l’économie, ou
que le Droit à l’indépendance, le respect de la Dignité des peuples sont
considérés comme les bases les plus solides de toute association de
peuples différents !
Suite du Discours de Sékou Touré á De Gaule le 25 Août 1958 a Conakry
" Á travers le désordre moral dû au fait colonial et à travers les
contradictions profondes qui divisent le monde, nous devons taire les
pensées idéales afin de serrer au plus près les possibilités réelles,
les moyens efficaces et imrnédiatement utilisables ; nous devons nous
préoccuper des conditions exactes de nos populations afin de leur
apporter les éléments d’une indispensable évolution, sans laquelle le
mieux-être qu’elles prétendent légitimement obtenir ne pourrait être
créé. Si nous ne nous employions pas à cette tâche, nous n’aurions
aucune raison de vouloir remplir les fonctions dont nous avons la
charge, aucun droit à la confiance de nos populations. C’est parce que
nous nous interdisons de confisquer à notre profit la souveraineté des
populations guinéennes, que nous devons vous dire sans détour, Monsieur
le Président du Conseil, les exigences de ces populations pour qu’avec
elles, soient recherchées les voies les meilleures de leur Emancipation
totale."
Le privilège d’un peuple pauvre est que le risque que courent ses
entreprises est mince, et les dangers qu’il encourt sont moindres. Le
pauvre ne peut prétendre qu’à s’enrichir et rien n’est plus naturel que
de vouloir effacer toutes les inégalités et toutes les injustices. Ce
besoin d’égalité et de justice nous le portons d’autant plus
profondément en nous, que nous avons été plus durement soumis à
l’injustice et à l’inégalité. L’analyse logique et une connaissance de
plus en plus grande de nos valeurs particulières, de nos moyens
potentiels, de nos possibilités réelles nous laissent cependant exempts
de tout complexe et de toute crainte : nous sommes uniquement préoccupés
de notre avenir et soucieux du bonheur de notre peuple. Ce bonheur peut
revêtir des aspects multiples et des caractéristiques diverses selon la
nature de nos aspirations, de nos désirs, selon notre état propre ; il
peut être aussi bien une chose unique qu’un faisceau de mille choses,
toutes également indispensables à sa réalisaton. Nous avons, quant à
nous, un premier et indispensable besoin, celui de notre Dignité. Or, il
n’y a pas de Dignité sans Liberté, car tout assujettissement, toute
contrainte imposée et subie dégrade celui sur qui elle pèse, lui retire
une part de sa qualité d’Homme et en fait arbitrairement un être
inférieur. Nous préférons la Pauvreté dans la Liberté la Richesse dans
l’esclavage. Ce qui est vrai pour l’Homme l’est autant pour les sociétés
et les peuples. C’est ce souci de Dignité, cet impérieux besoin de
Liberté qui devait susciter aux heures sombres de la France les actes
les plus nobles, les sacrifices les plus grands et les plus beaux traits
de courage. La Liberté, c’est le privilège de tout homme, le droit
naturel de toute société ou de tout peuple, la base sur laquelle les
Etats Africains s’associeront à la République Francaise et à d’autres
Etats pour le développement de leurs valeurs et de leurs richesses
communes."
Suite du Discours de Sékou Touré á De Gaule le 25 Août 1958 á Conakry.
" Notre esprit, pourtant rompu à la logique implacable des moyens et des
fins, ainsi qu’aux dures disciplines des réalités quotidiennes, est
constamment attiré par les grandes nécessités de l’Elévation et de
l’Emancipation Humaines.
L’épanouissement des valeurs de l’Afrique est freiné, moins à cause de
ceux qui les ont façonnées, qu’à cause des structures économiques et
politiques héritées du réginne colonial en désequilibre avec ses
aspirations d’avenir.
C’est pourquoi nous voulons corriger, non par des réformes timides et
partielles, mais fondamentalement, ces structures afin que le mouvement
de nos sociétés suive la ligne ascendante d’une constante évolution,
d’un perpétuel perfectionnement.
Le Progrès est en effet une création continue, un développernent
ininterrompu vers le Mieux, pour le Meilleur. Etape après étape, les
sociétés et les peuples élargissent et consolident leur droit au
bonheur, leurs titres de dignité, et développent leur contribution au
Patrimoine économique et culturel du monde entier.
L’Afrique Noire n’est pas différente en cela de toute autre société ou
de tout autre peuple. Selon nos voies propres, nous entendons nous
acheminer vers notre bonheur et cela avec d’autant plus de volonté et de
détermination que nous connaissons la longueur du chemin gue nous avons
à parcourir.
La Guinée n’est pas seulement cette entité géographique que les hasards
de l’Histoire ont délimitée suivant les données de sa colonisation par
la France, c’est aussi une part vive de l’Afrique, un morceau de ce
continent qui palpite, sent, agit et pense à la mesure de son destin
singulier. Mais aussi vaste que soit notre ère d’investigation, aussi
étendu que soit notre champ d’action, cela est insuffisant en regard de
nos propres exgences d’évolution.
Pour y répondre, nous devrons engager non seulement l’ensemble de nos
potentialités propres, mais encore tout ce qui constitue les biens et
les connaissances universels, lesquels chaque jour se développent et
s’accroissent de manière inappréciable."
Suite. Discours de Sékou Touré á De Gaule le 25 Août 1958 á Conakry.
Sékou Touré est de la trampe de De Gaule, et il aime son pays comme De Gaule aime la France.
Monsieur le Président du Gouvernement de la République Française,
Dans la vie des Nations et des Peuples, il y a des instants qui semblent
déterminer une part décisive de leur Destin ou qui, en tout cas,
s’inscrivent au registre de I’Histoire en lettres capitales autour
desquelles les legendes s’édifient, marquant de manière particulière au
graphique de la difficile évolution humaine, les points culminants, les
sommets qui expriment autant de victoires de l’Homme sur lui-même,
autant de conquêtes de la Société sur le milieu naturel qui l’entoure.
Monsieur le Président, vous venez en Afrique précédé du double privilège
d’appartenir à une légende glorieuse qui magnifie la Victoire de la
Liberté sur l’asservissement et d’être Ie premier Chef du Gouvernement
de la République Française à fouler le sol de Guinée. Votre présence
parmi nous symbolise non seulement la « Résistance » qui a vu le
triomphe de la Raison sur la force, la Victoire du Bien sur le mal, mais
elle représente aussi, et je puis même dire surtout, un nouveau stade,
une autre période décisive, une nouvelle phase d’évolution. Comment le
peuple africain ne serait-il pas sensible à ces augures, lui qui vit
quotidiennement dans l’espoir de voir sa dignité reconnue, et renforce
de plus en plus sa volonté d’étre égal aux meilleurs ?
La valeur de ce peuple, Monsieur le Président, vous la connaissez sans
doute mieux que nul autre, pour en avoir été juge et témoin aux heures
les plus difficiles que la France ait jamais connues. Cette période
exceptionnelle à l’issue de laquelle la liberté devait resurgir avec un
éclat nouveau, une force décuplée, est marquée par l’homme d’Afrique
d’une manière toute particulière, puisqu’il a, au cours de la dernière
guerre mondiale, rallié, sans justification apparente, la cause de la
Liberté des peuples et de la Dignité Humaine.
A travers les vicissitudes de l’Histoire chaque peuple s’achemine vers
ses propres lumières, agit selon ses caractéristiques particulières et
en fonction de ses principales aspirations sans qu’apparaissent
nécessairement les mobiIes réels qui le font agir.
« Lorsqu´on tombe, on ne regarde pas le point de sa chute, mais du point oú l´on a glissé, ou du moins, la cause de sa chute »
dit un proverbe africain.
C´était prédit ce sous-développement de la France.
Nous sommes en Août quelle coincidence.
Le général De Gaule sentant que les pays d´Afrique francophone vont obtenir leurs indépendances, concoit un plan qu´il nommera Association Franco-Africaine.
Association oú la France va toujours avoir la main-mise sur l´Afrique, une sorte de neo colonisation.
En Été 1958 le général De Gaule vient en tournée en Afrique pour faire valider son Projet Franco-Africain, ceci, sans concertation ou discussion au préalable avec les africains.
Partout oú il passe dans ses colonies en Afrique, ce plan est accepté sans discussion, sans concertation avec les africains.
Le 25 Août 1958 le général De Gaule arrive á Conakry capitale de la Guinée.
Le général De Gaule le dira que ce sera le meilleur accueil qu´il n´aura jamais recu.
De l´aéroport jusqu´á Conakry, sur plusieurs kilomètres, il ya une foule immence d´autres, jonchés sur les arbres, pour voir cette mythique figure symbole de la libération de la France contre l´occupant NAZI.
Partout, des cris De Gaule, De Gaule, De Gaule.
Lors des Cérémonies d´accueils le Président du Conseil de Gouvernement de la Guinée « Francaise » Sékou Touré, prononce un Discours qui restera célèbre.