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Commentaire de Analis

sur Charcutage régional : c'est n'importe quoi !


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Analis 4 juin 2014 11:40

Beaucoup de commentaires se trompent complètement en évoquant la concrétisation d’un danger des « euro-régions » ; elles ne sont pas là du tout en question, car ces nouvelles monstruosités ne sont que des régions INSEE, artificielles et sans légitimité. Elles sont justement l’expression du jacobinisme le plus extrémiste, conçues pour éliminer toute espèce d’identité régionale. Et ne sont donc pas du tout un danger pour l’Etat, bien au contraire.


Là où existait le danger d’une contestation violente, récemment revigorée, c’est à dire en Bretagne, le gouvernement a reculé, en renonçant à une fusion artificielle avec les Pays de la Loire. Mais sans procéder au seul élargissement de la région administrative Bretagne souhaité par la population locale, à savoir le rattachement de Nantes. Même là, la tyrannie technocratique a prévalu, et sans doute aussi le souci de ménager l’ancien premier ministre Jean-Marc Ayrault. Ajoutons quelques autres incongruïtés, comme la jonction de Midi-Pyrénées avec le Languedoc-Roussillon, alors que l’ouest de la première se rattache historiquement à l’Aquitaine et l’est au Languedoc, la fusion de Rhône-Alpes, déjà une pure création technocratique, avec l’Auvergne, pourtant plus proche culturellement et géographiquement du Limousin. La fusion de la Franche-Comté, historiquement à identité forte (si on excepte l’adjonction artificielle de Belfort) avec la Bourgogne (agrégat qui n’a de commun avec la Bourgogne historique que le nom), et la réunion de l’Alsace, encore une région à forte identité, et de la Lorraine (là aussi peu de rapports avec une identité locale historique).


Manifestement, le but est de détruire toute identité régionale, afin de créer de grosses préfectures plus faciles à contrôler du centre. Le tout fait à la française, c’est à dire sans concertation avec les habitants, décidée en haut entre technocrates et dirigeants de partis dans la plus pure lignée jacobine-bonapartiste. Dans sa variante du jacobinisme pseudo-décentralisateur.


La suppression des départements est là encore une réforme prise à la va-vite qui ne va pas vraiment dans le bon sens. Certes, ce ne sont là encore que des entités artificielles, sans légitimité historique ou culturelle, les jacobins auraient tout aussi bien pu tracer des carrés à l’étatsunienne (ils l’ont d’ailleurs envisagé). Et leur tracé n’a plus d’utilité. Mais mettre directement un niveau intercommunal (conçu comme un niveau communal de substitution) face à un nouveau régional (élargi qui plus est) est très peu pratique ; une région est trop éloignée pour traiter de nombreux problèmes de proximité qui dépassent l’intercommunalité. Sans doute faudrait-il doter des entités plus naturelles comme les pays ou les arrondissements de certaines des compétences des départements, nous rapprochant de ce qui se fait en Allemagne et se met en place dans certaines autonomies espagnoles (comme la Catalogne et l’Aragon avec les comarcas).


Enfin, toutes les réformes proposées font l’impasse sur le véritable problème de l’organisation territoriale française : le nombre immense de communes. Dont beaucoup sont évidemment vraiment trop petites. Combien font moins de 600, 500 voire 100 habitants ? Déjà, réunir toutes celles de moins de 800 est une urgence, au besoin en l’imposant quand on ne parvient vraiment pas à dépasser l’esprit de clocher. Cela nous ramènerait autour de 11 000 municipalités, les autres se réuniraient ensuite au choix. La piste de l’intercommunalité est une diversion. Ces mini-communes sont trop petites même dans le cadre d’une structure syndicale. L’intercommunalité est indispensable, mais ne doit pas dispenser de cette réforme. Et qu’on ne vienne pas me parler de destruction de la démocratie locale, cet émiettement l’empêche au contraire de vivre. De telles réformes ont été mises en place en Allemagne, Belgique, Italie, Espagne, Pays-Bas, Suède, Norvège et Suisse il y a belle lurette, et tous ces pays ont une démocratie locale infiniment plus développée que celle de la France. L’émiettement et le super-esprit de clocher qui va avec favorisent le jacobinisme.


Il faut se garder de toute réforme uniforme. Les problèmes ne sont pas les mêmes d’une région à l’autre, là où les départements peuvent être supprimés cela ne s’applique pas forcément ailleurs. Les formes des réunions de communes peuvent aussi être diverses. Mais là, on entre dans une toute autre logique, démocratique et anti-jacobine. Une logique qui impliquerait aussi une profonde refonte des modes de scrutin, une véritable représentativité qui irait de pair d’ailleurs avec une diminution du nombre d’élus locaux et des rentes.


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