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La torture deviendrait-elle un système de management au ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie ?

Les salariés du secteur public comme du secteur privé soumis au harcèlement moral savent par expérience qu'il existe une multitude de façons de détruire les capacités de résistance physique et morale d'un individu.

Mais un fonctionnaire est davantage démuni pour faire respecter ses droits qu'un salarié du privé puisque l'administration a les pleins pouvoirs sur ses agents dés lors qu'elle a décidé de se débarrasser de l'un d'entre eux.

En effet un fonctionnaire ne peut pas s'adresser à l'inspection du travail ni aux prud’hommes, son seul recours est le tribunal administratif.

Sans préjuger des décisions du tribunal administratif saisi par le fonctionnaire, il s'écoulera au minimum deux ou trois années avant tout jugement au fond.

L'administration peut dormir tranquillement sur ses deux oreilles en attendant un hypothétique jugement en faveur du fonctionnaire.

Pendant ce temps : silence ! On torture.

Le mot peut sembler fort, mais quel autre terme employer ?

Le cas dont il question, un fonctionnaire du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l'Énergie, est symptomatique des méthodes ''managériales'' employées par l'administration, et en démontre la ''toute puissance''.

Cela à commencé en novembre 2011, date à laquelle cette administration mute '' d'office, dans l’intérêt du service'' un de ses agents à 80 kilomètres de son domicile.

Pour parvenir à ses fins sans coup férir, l'administration ne convoque pas de commission administrative paritaire, dont l'avis préalable est obligatoire avant toute mutation.

Il s'agit là d'une première entorse et non des moindres aux règles supposées protéger la carrière des fonctionnaires.

Aux demandes de communication de son dossier formulées par ce fonctionnaire, l'administration garde le silence et prétexte même avoir perdu son dossier administratif.

Aux tentatives de résistance à un tel déplacement, l'administration a menacé cet agent de refus d'obéissance et d'abandon de poste, ce qui offrait la possibilité à l'administration de le sanctionner plus sévèrement encore.

On peut s'étonner que la loi offre toutes les garanties d'un procès équitable à un criminel mais refuse de fait ce même droit à un fonctionnaire.

Cet agent a demandé l'annulation de cette sanction déguisée à son ministre,mais sans succès, ce qui l'a contraint, par deux fois déjà, à demander une mutation afin de se rapprocher de son domicile.

Par deux fois, son administration lui à refusé le droit à se rapprocher de son domicile.

Or les conditions de travail imposées à cet agent ont de graves répercutions sur son état de santé comme en témoigne ses deux congés maladies qui ont été jugés '' très peu compatibles avec le suivi d'une opération en période d’exécution (il s'agit de travaux routiers)'' par écrit sur son évaluation professionnelle.

Non seulement l'administration a les pleins pouvoirs sur son personnel, mais elle peut impunément mettre en cause l'état de santé ses agents.

Je reproduis ci-dessous des extraits d'un courrier adressé par cet agent à sa ligne hiérarchique et à des représentants du CHS-CT de son ministère :

 

..

J'avais pensé que ma hiérarchie prendrait en compte mon état d'épuisement physique et morale mais à l'inverse, …..semble vouloir accentuer d'avantage mes difficultés sous couvert de la réglementation administrative.
….. (
ma direction) avait la possibilité de me muter d'office dans un service moins éloigné de mon domicile, mais en faisant le choix délibéré de me muter à XXXX , (ma direction) ne pouvait ignorer les retombées sur mon état de santé en me contraignant à ces longs trajets.
C'est donc depuis novembre 2011, que mon Administration me contraint à prendre mon service tous les matins à XXXXX, exigeant par là-même que je me lève à 4h45 tous les jours et, en conséquence, j'accumule un déficit de sommeil considérable depuis 18 mois.
Ce déficit de sommeil est la cause d'un épuisement physique et morale qui met en danger ma santé, mais aussi ma vie car, comme je vous l'ai déjà exposé, il m'est arrivé a plusieurs reprises de devoir faire demi-tour le matin pendant le trajet domicile-travail par crainte de m'endormir d'épuisement sur l'autoroute et j'ai ainsi épuisé de nombreuses journées de congé annuel.
C'est en toute connaissance de cause que mon administration me fait subir un tel traitement que je ressent de plus en plus comme une véritable torture physique et morale, la privation de sommeil est un traitement indigne qu'une société civilisé n'inflige pas aux criminels.
Non seulement j'ai été sanctionné sans CAP disciplinaire par cette mutation d'office, mais les effets de cette sanction déguisé se font sentir chaque jour avec plus de gravité.
Comme je vous l'ai déjà exposé, j'arrive au bout de mes capacités de résistance et pourtant mon administration m'interdit toute mutation afin de me rapprocher de mon domicile.


 

Au delà d'un système insidieux de harcèlement, insidieux car anonyme, est-il exagéré de parler de torture.

Comme l'écrit ce fonctionnaire à sa hiérarchie, il lui est imposé de longs trajets sur autoroute avec un énorme déficit de sommeil accumulé.

La toute première conséquence du manque de sommeil est, de loin, le risque d’accident lié à la somnolence excessive.

La privation de sommeil est un des moyens classiquement utilisé pour inféoder un individu.

La connaissance scientifique des effets de cette privation est récente et au-delà des situations répressives, elle est sous estimée dans des pratiques plus communes : garde à vue, prisons, services de réanimation, organisation du travail (travail de nuit, travail posté), rythmes familiaux.


La privation partielle est une variante de la privation totale de sommeil mais l'apparition des troubles est plus progressive et peut s'étaler sur plusieurs semaines.

Les mêmes troubles qu'une privation totale sont observés avec une privation partielle de sommeil de deux heures chaque jour. Qu'en est-il quand cela dure depuis 18 mois ?


Les troubles de l'humeur sont les premiers à se manifester.

On observe : une irritabilité et une irascibilité croissantes, une alternance rapide d'euphorie et de dépression, une désorganisation de la pensée.

Les troubles se caractérisent par : un ralentissement de l'idéation entraînant une parole lente et basse. Aux questions posées, la réponse est longue à venir comme si le délai de réflexion était augmenté, des difficultés à trouver le mot correct.

Les phrases restent inachevées. Le sujet a des difficultés à garder un raisonnement logique. Il perd "le fil" logique du discours, une suggestibilité accrue, des oublis des faits récents.

À long terme, on observe une recrudescence des maladies métaboliques, cardio-vasculaires et dégénérative.

La privation du sommeil diminue la capacité des globules rouges à transporter l’oxygène au cerveau, ce qui entraîne des pertes de mémoire, la léthargie, des douleurs intenses et des effets psychologiques à long terme.

Des experts médicaux ont aussi signalé que la privation du sommeil peut causer des dommages au cerveau et induire le diabète et d’autres conditions débilitantes.

La privation de sommeil a des conséquences importantes sur la santé mentale et l'état psychologique.

En dehors des effets hallucinatoires et difficultés physiques qu'entraîne un important manque de sommeil, les séquelles peuvent parfois, même après repos, être définitives.

La privation de sommeil n'est en rien anodin, et utilisée volontairement, elle est une atteinte à la personne physique et psychique d'autant plus pernicieuse et perverse qu'elle ne laisse pas de séquelles physiques.

La privation de sommeil est une des formes les plus cruelles de torture et est considérée comme telle par la Croix rouge, Amnistie Internationale et tous les organismes internationaux de droits de l’homme, y compris la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants,

 

Alors comment comprendre qu'une administration inflige en toute connaissance de cause un tel traitement à l'un de ses agents depuis 18 mois ?

 


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14 réactions à cet article    


  • LE CHAT LE CHAT 12 avril 2013 10:03

    malgré les textes sur le harcélement moral et les lois sur les risques psychosociaux , c’est très difficile de faire condamner l’employeur , que ce soit dans le public ou le privé ;
    car il faut rassembler quantité de preuves , de témoignages pour prouver ce harcèlement moral ! sans l’appui d’un syndicat , c’est vraiment une quête du Graal ................


    • chapoutier 12 avril 2013 10:55

      vous avez tout à fait raison, non seulement il est difficile de faire condamner l’employeur, mais il est également très difficile de simplement tenter de se défendre car en général la personne harcelée est souvent au bout du rouleau et n’a même plus le ressort moral nécessaire pour dire simplement stop.


    • taktak 12 avril 2013 15:14

      Les réorganisations permanentes, l’éclatement des effectifs en une multitude de petits services favorisent tout à la fois le replis individuel et la désyndicalisation et aussi le comportement de harcèlement par des petits chefs devant porter une politique inepte sous la pression de la haute administration.

      Sous la pression de syndicats, le MEDDE a du s’intéresser aux risques psychosociaux. Sans rien de concret pour le moment. On aurait pu s’attendre, qu’à défaut de changement, un gouvernement de gauche stoppe la valse des régorganisations/suppressions de services et missions. Dans les faits, c’est exactement pareil que sous Sarko (Borloo et NKM).


    • eric 12 avril 2013 11:01

      Vous touchez un point central de la vie politique française ; L’administration est une jungle sociale. Peuplée de militant de gauche( 70%), elle se caractérisée par son machisme ( les femmes ont systématiquement moins de pouvoir que dans le privé), le mépris des « petits » ( mystique des diplômes, des grades, etc...), emploi systématique de petites mains sous payées et sous protégées socialement pour faire le sale boulot à la place des titulaires ( 17% de précaires dans le public contre 11% dans le privé, et cela va s’aggraver avec les « emplois sans avenir »), caractère souvent dominant des affiliations et copinages politiques par rapport aux compétences ( essayez d’avoir un poste d’expat à l’E.N. sans être dans le bon syndicat, ou d’avoir un bon emploi du temps si vous ne faites pas la bonne grève).
      Complètement ignorant en général des réalités du secteur privé, ces gens s’imaginent, parce qu’on le leur répète en boucle, que cela ne peut être que pire.

      A peu prêt toutes les « réformes » que la gauche fonction publique impose au privé, relèvent d’une recherche de curer chez les autres, les maladies qu’elle vit en interne. Ainsi de la parité par exemple. On veut des quotas dans les boites, mais les directeurs d’école primaire sont des hommes dans un milieux extrêmement féminisé.

      A cela s’ajoute le contexte actuel. J’ai un pote dans le ministère dont vous parlez. A l’image de l’essentiel de ce gouvernement, le ministre et son cabinet sont tellement nuls et évanescents, que les services expédient les affaires courantes au moins mal en attendant que cela passe.

      Quand il n’y a pas de direction, le formalisme l’emporte. Personne n’ira tenter de prendre une responsabilité.


      • chapoutier 12 avril 2013 11:23

        je peux vous garantir que le MEDDE n’est pas peuplé de gens de ’’’ gauche ’’’ mais ce qui est vrai c’est que les cadres de ce ministère n’ont qu’une seule devise : ’’ pas de vague ’’ !


      • eric 12 avril 2013 11:51

        Vous etes fonctionnaire ? Au medef, il y a très longtemps que les gens ont compris que les salariés motivés et heureux rapportent plus d’argent que les exploités


      • taktak 12 avril 2013 13:35

        Eric, vous êtes comiques.
        Il suffit de voir le bien être des salariés du technocentre de Renault par exemple. Vous ne connaissez visiblement absolument pas la façon dont fonctionne l’administration.

        S’agissant du MEDDE, ce ministère qui reprend les missions de l’Ex Equipement est en train d’être démantelé pour confier la quasi totalité de ses prérogatives au privé. La pression des majors du BTP, des ingénieristes privés encouragés par le dogme de la concurence libre et non faussée a eu raison de ce service public
        Ce service public a doté la france d’infrastructures performantes et placé le pays comme un leader dans le domaine des transports, du génie civil et de l’aménagement des territoires. En récompense de cette efficacité indéniable, ses agents vivent actuellement le démantellement de ses services, avec une réduction drastique des effectifs la suppression de ses missions et des réorganisations incessantes depuis 10 ans.

        Par exemple, la gestion des routes a été confiée en quasi totalité au conseil généraux qui externalisent massivement et le réseau concédé est sans cesse en augmentation, l’état ne gardant que les parties les moins rentables (routes à forts trafics où on ne peut pas mettre de péages). La décentralisation a conduit au démantellement des structures déconcentrées, et les dogmes de l’UE capitaliste au retrait de l’ingénierie publique, de la maitrise d’oeuvre, du conseil et de l’expertise technique pour faire la place aux prestataires privés. Rappelons que ces derniers se plaignaient de ne pouvoir lutter avec les tarifs du publics jugés pas assez rentables pour eux !

        Pour conduire ce démantèlement ultra rapide, sous le paravent de la RGPP puis de la MAP et avec la mascarade du grenelle de l’environnement, il a fallu -comme pour france telecom - employer les grands moyens. C’est à dire s’attaquer aux travailleurs de ce ministère.
        Des mutations comme il a été décrit dans cet article, il y en a eu des milliers et il s’en prévoit encore des milliers. Pire, il y a en continu la négation des métiers et des missions de service public, détruisant les savoirs faire, méprisant les compétences et laissant les agents dans le flou faute de pouvoir leur annoncer de nouvelles missions alors que le but et de faire disparaitre. En vérité, la situation s’assimile à un gigantesque plan social qui ne dit pas son nom. Et dégouter les fonctionnaires n’est pas le moindre des moyens pour faire maigrir les services ou leur faire accepter des réorganisations imbéciles.


      • eric 12 avril 2013 15:32

        Ouf, moins de rond ponts hideux, inutiles et couteux en perspective alors ? Ou ils vont continuer de toucher lerus com ?


      • ZenZoe ZenZoe 12 avril 2013 12:34

        D’abord, et si ça peut consoler l’auteur, le harcèlement existe aussi dans le privé, et les harceleurs font preuve des mêmes tactiques vicelardes. La nature humaine est la même partout. A quoi ça rime d’essayer de dire que dans le privé c’est pire ? On fait la course ?
        Pour le reste de l’article, je compatis totalement. Le harcèlement est la pire chose qui puisse arriver à un salarié, qu’il soit du public ou du privé. A quand une luttte vraiment efficace contre ce fléau qui bouffe la vie de la victime (sans parler des suicides !) ?
        Pour le moment, et malgré les beaux discours de convenance, on préfère quand même regarder ailleurs dans les faits.
        Bien du courage à vous. Mon conseil, barrez-vous avant de vous laisser détruire.


        • Mr Dupont 12 avril 2013 14:05

          Il faut voir le bon coté des choses

          A partir de maintenant , grâce au retour de la gauche, ce fonctionnaire n’aura plus de journées de carences pour ses arrêts maladie

          Ce qui n’est quand même pas rien

          De quoi lui redonner le moral, non ?


          • spartacus69 12 avril 2013 14:13

            J’ai vécu une histoire similaire avec l’Office national des Forêts et j’aurais voulu la raconter à l’auteur de cet article mais je ne connais pas son adresse mail.Si vous le connaissez merci d’avance de me l’indiquer


            • marguerite 12 avril 2013 19:07

              Pourquoi ne pas nous faire partager votre histoire. Cela pourrait peut-être aider celles et ceux qui connaissent la même chose.


            • BOBW BOBW 12 avril 2013 21:33

              Crassus : « Paroles,paroles » sans preuves  ! ....
              Et Vlan contre un service public que la droite et les libéraux veulent abattre !!


            • spartacus69 13 avril 2013 09:28

              Je pense que Marguerite a raison ci-dessous mon histoire en gros :


               je travaillais en tant que contractuel en CDI, à L’OFFICE NATIONAL DES FORÊTS et exerçais les fonctions de l’Adjoint du chef du service comptabilité à Lyon. A l’issue de mon congé de mobilité d’un an, mon employeur a refusé de me réintégrer dans mon poste initial du fait que mon poste était pourvu par un fonctionnaire.

               

              Afin de ne pas payer le chômage pour refus de réintégration, mon employeur, par un courrier v alant décision administrative individuelle, m’a ordonné de prendre un poste d’assistant commercial (90% de taches secréterait commerciale) situé à Bourg-En-Bresse. (Sachant que je suis comptable de niveau bac+4)

               Je n’ai pas manqué de rappeler à l’ONF que le poste qui m’était proposé, se situant à plus de 82 km de mon affectation d’origine, n’était en rien similaire avec le poste que j’occupais avant mon congé de mobilité et que celui-ci ne correspondait pas à mes qualifications professionnelles.(Cela impliquait aussi une modification substantielle de mon contrat de travail en lieu de travail et en qualifications- il n’y a pas non plus de clause de mobilité dans mon contrat de travail).Mon contrat de travail fixait mon lieu de travail à Lyon et mes fonctions étaient bien soulignées.

               

              J’ai contesté cette décision illégale, j’ai engagé un avocat et déposé un recours auprès du tribunal administratif.

               

              En même temps, j’ai contacté le syndicat de l’ONF. Au départ, le syndicat a qualifié l’attitude de l’ONF « horrible, scandaleuse…etc » et puis, celui-ci n’a même pas répondu à mes messages. Sachant que le syndicat est subventionné par l’ONF.

              Finalement, j’ai été radié des cadres du personnel de l’ONF pour refus de ce poste et pour que je ne puisse pas bénéficier de l’allocation chômage, l’ONF m’a considéré en abandon de poste.(donc Pôle emploi refuse de m’accorder l’allocation chômage)

               

               

               

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