Macron et le tango du Covid

Le tango est une danse de bal qui se danse à deux. C’est une danse d’improvisation, au sens où les pas ne sont pas fixés à l’avance pour être répétés séquentiellement, mais où les deux partenaires marchent ensemble vers une direction impromptue à chaque instant. Un partenaire (traditionnellement l’homme) guide l’autre, qui suit en laissant aller naturellement son poids dans la marche, sans chercher à deviner les pas.
C’est donc à un tango que nous a invités E. Macron depuis le début de la pandémie : il dicte la marche à suivre et nous devons nous laisser guider sans mot dire. On doit marcher avec lui sans que ni nous ni lui ne sachent où nous allons. Chaque pas amorce une direction aussi impromptue qu’inconnue. Il est ainsi de la vaccination.
"Je ne crois pas à la vaccination obligatoire pour ce vaccin. Je crois beaucoup plus au travail de conviction par la transparence qu’à l’obligation." Voilà ce qu’affirmait Emmanuel Macron le 4 décembre 2020 lors de son interview chez Brut. Il ajoutait "Mon souhait, c’est de convaincre tout le monde que c’est par le vaccin que nous pourrons nous en sortir. Il faut qu’il y ait entre 70 et 80 % qui soient vaccinées ou qui aient les anticorps pour que le virus s’arrête de circuler au sein du pays". Dans cette déclaration il faut relever trois points qui interrogent sinon l’intelligence du président du moins son bon sens et surtout son honnêteté :
- Quelle transparence a-t-on vécue en 2020 : les masques, les lits d’hôpitaux, le danger du virus…
- Que nous n’atteindrions pas 70 % de gens vaccinés compte tenu de la faiblesse du nombre de doses à l’époque, et ça ne s’est amélioré que tardivement en 2021, donc on ne pouvait pas compter sur une vaccination massive et volontaire, et on ne pouvait pas en l’absence de dose la rendre obligatoire… il avait beau rôle le tartuffe d’être opposé à l’obligation de vaccination,
- Avoir comme stratégie la conviction c’est hasardeux, et visiblement il n’a pas vraiment convaincu. Et, médecins et journalistes, ne mettez pas dans la catégorie des gens qui ne se font vacciner que par une tacite soumission.
Pour ne pas se déjuger et laisser éclater au grand jour une image peu flatteuse d’un gouvernant manipulateur, E. Macron ne veut toujours pas rendre obligatoire la vaccination sauf pour les personnels soignants. Personnes ne s’opposerait à cela, pensait-il. Mais, bon nombre de personnels soignants qui se sentent peu considérés, voient dans cette obligation une marque de mépris supplémentaire. Le « Ségur de la santé » n’a posé qu’un léger voile de gaze sur des plaies vives, la preuve en étant le nombre des démissions qui s’il n’est pas énorme n’en demeure pas moins significatif, d’ailleurs le gouvernement se garde bien de publier les chiffres. En plus il y a des gens nombreux, soit qu’ils soient actifs dans les manifestations soit qu’ils soient plus réservés pour leurs actions, qui refusent pour des raisons variées cette obligation : la plupart ne rejettent pas la vaccination mais montre le refus dont on la rend obligatoire sans le dire haut et clair, en douce, en catimini. Quand on lit les 8 pages de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire il faut une loupe, un microscope pour trouver qui n’est pas obligé de se faire vacciner. Les ouvriers de chez Renault n’ont aucune obligation vis-à-vis de la vaccination, mais s’ils ne sont pas vaccinés ils se verront interdire l’accès aux activités de loisirs, aux activités de restauration… à l’hôpital ou à l’EHPAD pour visiter un parent. Ah ! Bien sûr ils pourront avoir recours à un test de dépistage virologique. On ne s’étendra pas ici sur la contrainte que cela impose même si on constate qu’il devient de plus en plus difficile d’accéder à un test dans le délai que l’on souhaite.
Sans doute est-ce parce qu’il est conscient (une fois n’est pas coutume) que le gouvernement avec son ministre de la Santé vient de prolonger, on se demande sur quelle base scientifique, le délai de validité des tests de 48 heures à 72 heures. En fait 72 heures ont toujours été le bon délai, il faut donc se demander par quel miracle de la science macronienne il avait été réduit à 48 heures : stratégie de la contrainte et de la peur. Comme il est difficile de se faire tester le gouvernement autorise depuis aujourd’hui, 8 août, l’usage des autotests à propos desquels le ministère de la santé (Les autotests - Ministère des Solidarités et de la Santé (solidarites-sante.gouv.fr)) écrit « Le prélèvement des autotests n’étant pas réalisé par un professionnel de santé, mais par l’usager lui-même, la possibilité d’obtenir un « faux négatif » causé par une erreur de prélèvement est bien réelle. Il est donc primordial de garder à l’esprit qu’un résultat négatif ne signifie pas nécessairement que l’utilisateur n’est pas porteur du virus. ». Qui va contrôler le résultat du test, sera-ce du déclaratif, y aura-t-il une auto-attestation, l’autotest sera-t-il réalisé à l’entrée de l’établissement où le passe sanitaire est obligatoire… autant de questions pour l’instant sans réponse. Mais, le ministère a prévu et annonce sur la page consacrée aux autotests : « Après avoir réalisé mon autotest, j’indique le résultat sur www.monautotest.gouv.fr », encore faut-il connaître l’existence de ce site, un de plus mais pourquoi s’en étonner dans une France numérique ? Rassurons-nous Monsieur Véran a tout prévu, comme toujours, et un décret paru le 8 août au journal officiel prévoit : « un autotest réalisé sous la supervision d’un des professionnels de santé » qui sera chargé de l’inscription sur monautotest. Chacun se débrouillera dans ce dédale réglementaire et suivra le tango de Macron et de ses ministres comme il pourra. Mais, il y en a qui n’ont pas envie de danser, en tout cas pas cette danse.
Ils se retrouvent dans des cortèges bigarrés depuis quatre semaines, le samedi, toujours plus nombreux pour dire leurs désaccords à la vaccination (ce ne sont pas les plus nombreux), au passe-sanitaire vécu comme un véritable ausweis (en français : un laissez-passer) qui mettra chacun dans la bonne ou la mauvaise catégorie et surtout – ce qui sans doute est l’élément le plus fédérateur — dire leur détestation du gouvernement, de ses actions et leur haine envers E. Macron dont ils considèrent – pas forcément à tort- qu’il les méprise. D’ailleurs le ministre de la Santé, fin psychologue et philosophe d’élite, a déclaré au journal le Parisien du 8 août : « Je veux bien entendre les peurs, et tout faire pour les rassurer. Mais à un moment, ça suffit. » Monsieur le ministre cessez de nous parler comme à des enfants ! Quelle crédibilité avez-vous pour prétendre nous rassurer alors qu’il y a un an vous nous disiez que nous n’avions pas besoin de masques, qu’il y a quelques mois (en décembre 2020) vous vous opposiez à l’ouverture de « vaccinodrômes » ? Les outrances sont de tous les bords même ceux de la philosophie quand Raphaël Einthoven déclare (le 7 août) sur Europe 1 à propos des manifestants que leur mouvement est « un mouvement liberticide », d’ajouter "un monde où chacun peut contaminer l’autre est un monde où nous sommes moins libres qu’un monde où il faut présenter un passe sanitaire à l’entrée d’une boîte de nuit ou d’un restaurant." La Covid tue moins de monde que bien d’autres maladies comme la tuberculose, la poliomyélite, la coqueluche… dans le monde bien sûr, ici nous sommes protégés, et la Covid tue bien moins de monde que les guerres dont certaines sont « discrètement » soutenues par la France. Alors, un peu de pudeur même ou y compris dans l’analyse philosophique d’une situation. D’ailleurs ce philosophe, pas forcément intelligent, devrait regarder le monde et voir qu’en Israël par exemple la vaccination n’a pas empêché une reprise de l’épidémie. Trop d’intellectuels médiatiques sont mus par d’incroyables pulsions narcissiques quand ils sont en présence des journalistes et pire quand ils sont à l’antenne. En quoi et en vertu de quelle science peut-il être assuré que le vaccin est inoffensif ? Pour l’instant on ne connaît des vaccins à ARN-m (messager) que les effets « secondaires » à court terme, on ne sait rien des conséquences génétiques éventuelles, c’est comme pour le nuage de Tchernobyl, on constate le présent et peu importe l’avenir. J’entends d’ici la cohorte des Diaphoirus médiatiques imbus de leur science mais qui oublient qu’en science la certitude n’est pas de mise. Bref, les gens se sentent malmenés et méprisés par l’élite et par le président de la République. J’ai écrit comment les propos des uns et des autres (gouvernants, politiciens, journalistes et parfois intellectuels de seconde zone) concernant les manifestants relèvent du mépris, du mépris de classe : il y a l’élite intellectuelle, politique, médicale et les autres ; les autres ce sont tous ceux qui manifestent une opinion contraire à celle de la bien-pensance. On n’a pas le droit de critiquer le « chef », pas non plus le Conseil constitutionnel dont la décision concernant la loi sanitaire est pourtant sujette à interrogation, en France on ne critique plus sauf à y être dûment autorisé dans le cadre d’un parti politique d’opposition, toutefois en respectant des règles ; en France on n’a plus le droit de manifester sauf à être encadré par un bataillon de robocop appelés « policiers », demain seront-ce l’armée et les chars comme à Tienanmen au printemps 1989. Mais le chef a dit que nous ne sommes pas en dictature ; à ceci près qu’aucun pays n’était en dictature avant que la dictature soit installée et dans la plupart des cas de façon assez furtive. Ces manifestations montrent surtout qu’une partie de la population en a assez de cette politique où un jour on flatte pour le lendemain mieux frapper.
Cette partie de la population est peu importante en nombre : 200 000 personnes, c’est toujours comme ça que naît une révolte ou une révolution. D’abord quelques « grandes gueules » puis bien vite la masse des « soumis volontaires », ceux qui en 1940 admettaient et se soumettaient à l’occupation. Bien sûr les braillards ont tort de penser que la liberté « consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » comme l’indique l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 ; ils oublient que dans la même déclaration Les députés de l’Assemblée nationale de 1789 ont eux-mêmes convenu de la nécessité d’imposer des bornes à la liberté individuelle en soulignant que « ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ». La loi sanitaire fixe donc, bien qu’à la tartuffe, ces bornes et on ne pourra pas plus s’opposer au passe-sanitaire qu’au port de la ceinture de sécurité. Est-ce pour autant qu’il y a une obligation quelconque à être d’accord ? Les députés de 1789 avaient aussi gravé dans le marbre que : « La loi est l’expression de la volonté générale » (Article 6). C’est peut-être là que le bât blesse le plus : un président de la République qui décide seul, en plus en adoptant la marche du tango, peut-il se prévaloir de dire l’expression de la volonté générale. Certes non, surtout avec une personnalité narcissique et orgueilleuse comme celle de Macron, et c’est bien pour cela qu’ont été inventés le Sénat et l’Assemblée nationale, encore faut-il que ces assemblées fonctionnent de façon autonome, or de plus en plus elles ne sont qu’un satellite du président. Les manifestations contre le passe-sanitaire sont aussi des manifestations contre une illégitimité des gouvernants qui devraient se souvenir de se que disait Albert Camus : « La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité. »
Si les journalistes respectaient la charte de Munich ils iraient sur le terrain pour enquêter, ils inviteraient divers scientifiques pour des débats contradictoires, ils expliqueraient dans un vaste mouvement de vulgarisation la science… Et le président de la République resterait dans son rôle, ouvrir vers de vraies perspectives, au lieu de jouer les scientifiques et les paters familias, il rassemblerait au lieu de diviser… Mais, rien de tout ça, jusqu’où la France tiendra-t-elle ?
En attendant, moi, je suis vacciné mais avec Astra Zenecca, j’aurais refusé si on m’avait proposé Pfizer ou Moderna pour l’inquiétude liée à la méconnaissance des effets de l’ARN-m dans un vaccin et en raison de leur attitude outrancièrement mercantile.
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