• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > La carte du Tendre (Théorie du PCRA 2)

La carte du Tendre (Théorie du PCRA 2)

Dans un précédent article, nous avons commencé à explorer la notion de PCRA (Plan Cul Régulier Affectif) avec l’objectif d’en comprendre le « pourquoi ». Nous en étions restés à l’hypothèse que le PCRA pourrait être non une fin en soi mais le résultat d’une tentative inaboutie pour échapper au couple traditionnel. Car de plus en plus de personnes savent ce à quoi elles veulent échapper mais elles ne savent pas forcément vers où elles souhaitent se diriger. A cette fin, après avoir répondu à la question du « pourquoi », nous tenterons d’esquisser les premières lignes d’une version actuelle et non mythique de la carte du pays de Tendre afin de faciliter autant que possible l’orientation de ceux qui cherchent leur chemin en ce beau pays.

S’il ne fait aucun doute que les adeptes du PCRA se sont écartés des habitudes des couples traditionnels, il n’est pas certain qu’ils en soient forcément beaucoup plus heureux.

Tout se passe un peu comme si voulant s’éloigner de la rive de la tradition, ils s’étaient engagés dans le fleuve du Tendre, le pays de l’amour, et se trouvaient en quelque sorte coincés au milieu du gué, dans une situation qui a ses avantages mais qui n’est pas vraiment confortable, en tout cas, pas très satisfaisante. De fait, la tonalité dominante est celle du « blase ». Quelque chose manque : la traversée n’a pas été achevée !

Il ne paraît pas insensé d’imaginer que cette situation découle d’une méconnaissance de la dimension sur laquelle les « explorateurs » du Tendre ont à progresser pour atteindre l’autre rive.

Et il y a bien des raisons de penser que cette dimension cruciale pourrait être celle qui va de l’autre comme objet à l’autre comme sujet, c’est-à-dire, l’autre comme individu libre et autonome.

Si on considère que le fleuve partage cette dimension en son milieu, alors il est une rive à fuir assurément : celle de la tradition, celle dont le PCRA s’est quelque peu éloigné et où l’autre est avant tout objet de désir, de plaisir, de satisfaction. C’est la rive où l’autre est un « être-sous-la-main » que nous voulons conforme à nos attentes et que, en conscience ou en toute inconscience, nous nous pensons en droit de « transformer » ou de « modeler » pour qu’il corresponde aussi exactement que possible à l’idée que nous nous en faisons.

Cette attitude s’est trouvée illustrée durant deux millénaires au moins par la domination masculine qui — avec une violence aux multiples formes, omniprésente, mais encore bien loin d’être reconnue comme telle (ainsi qu’il apparaît avec l’affaire Strauss-Kahn) — a fait de la femme la « chose » du mâle, notamment sous l’angle sexuel.

Celle-ci n’a longtemps été qu’une poupée, une marionnette devant se soumettre à la volonté de l’autre. Elle n’était donc pas respectée dans sa dimension de sujet. Elle n’était pas vue comme un être qui serait source, cause, responsable de ses choix, comme de ses actes. Elle n’était pas désirée en tant qu’être libre, agent ou acteur de sa propre vie et non patient. C’était avant tout une femme-objet.

L’invention de l’amour courtois au XIe siècle a, de manière presque miraculeuse, amené, au moins dans les représentations sinon dans les actes, un complet renversement de ces valeurs, de sorte qu’une forme d’adoration masculine de la femme est apparue. L’imagerie du preux chevalier tout dévoué à la dame de ses pensées l’illustre parfaitement. Mais les institutions sociales et religieuses ont très vite étouffé la révolution dont ce renversement était porteur.

Il y avait en effet un énorme potentiel de subversion dans le fait que ce qui était valorisé alors était un amour d’une pureté absolue, dégagé de toutes les contingences matérielles et légales liées à la vie de couple que le mariage officialise.

L’amour courtois était à l’origine un amour adultère entre deux êtres libres tant du point de vue social que biologique (ils ne cherchaient ni le mariage ni la reproduction).

Ce qui s’affirmait alors était le souci de l’être de l’autre et l’absolu respect qui lui était dû, en particulier de la part du rustre, le mâle, qui allait devoir faire montre d’une capacité de régulation de ses instincts sexuels, par exemple, dans l’épreuve de l’assag (essai) ce sommet de tension dans le désir amoureux que la belle et son homme éprouvaient lorsqu’ils devaient passer une nuit nue à nu sans se toucher, avec dans la couche, une épée les séparant et marquant la limite à ne pas dépasser.

La maîtrise de soi affichée par les amants sachant se contenir ou s’abstenir alors qu’ils se trouvaient ainsi portés à l’apogée du désir est ce qui permettait de faire passer l’autre du statut d’objet désiré à celui de sujet désiré — car en faisant preuve de continence ou d’abstinence, chacun prouvait à l’autre que ce qui était désirable était non sa possession physique mais sa présence en tant qu’être, en tant que sujet... désirant.

Aussi étrange que cela puisse paraître, il me semble que c’est précisément cet idéal du rapport humain qui est en train de refaire surface — mais à reculons — au travers de cette nouvelle forme du désordre amoureux qu’est le PCRA. Si les apparences peuvent sembler bien éloignées d’un quelconque idéal, c’est que le principal moteur de cette évolution n’est pas tant le souci de l’autre que le souci de soi.

Chacun se bat pour préserver sa liberté, de choix, d’action, de désir, son statut de sujet, c’est-à-dire, son pouvoir de décider pleinement de sa trajectoire de vie. Ceci amène une remise en cause des déterminismes socioculturels sous l’égide desquels les couples se sont jusqu’à présent formés. Il y a de moins en moins de normes qui vaillent en matière relationnelle. De plus en plus, chacun fait ce qu’il lui plaît.

Ceci vaut, bien sûr, autant pour les hommes que pour les femmes. Car même si les rôles masculins et féminins traditionnels ont, depuis plus de deux millénaires, amené une domination masculine au plan socioculturel, ils ont été l’occasion d’une instrumentalisation réciproque dans la mesure où la femme a pu elle aussi demander à son conjoint qu’il satisfasse ses attentes, besoins, désirs, etc. Que ces derniers diffèrent ou non de ceux de l’homme n’importe pas ici. Ce qui compte, c’est qu’ils peuvent tout aussi facilement se présenter comme des exigences qui, en tant que telles et aussi légitimes qu’elles puissent paraître à première vue, font de l’autre un objet, au sens où il s’agit alors d’exercer sur lui un pouvoir qui, par ce fait même, nie son statut de sujet.

Au masculin comme au féminin, la tendance actuelle est donc de se préserver de ce qui est vécu de plus en plus comme un système de contraintes que l’autre impose et qui limite le sentiment de liberté ou de « toute puissance »… :

(a) dont nous retirons tellement de jouissance

et que

(b) nos sociétés individualistes et capitalistes cultivent en nous depuis l’enfance.

Ainsi, nous fuyons la pulsion d’emprise de l’autre et, si nous disposons d’un minimum d’empathie, nous comprenons que l’autre puisse vouloir fuir la nôtre. Comme indiqué plus haut, le PCRA me paraît l’expression directe de ce besoin de préservation de soi en tant qu’être libre.

A priori, cela pourrait sembler bel et bon mais il convient de noter qu’il s’agit d’une dynamique purement égoïste, car l’individu reste ici seulement centré sur ses besoins et l’autre n’intègre cette « non relation » qu’est le PCRA qu’en tant qu’il/elle ne satisfait pas complètement lesdits besoins.

De fait, l’adepte du PCRA reste complètement disponible à la perspective de tomber amoureux… par ailleurs. Car il/elle se garde bien mélanger les genres ! Il en résulterait une situation désaxée et douloureuse dont le caractère aversif a été joliment exprimé par ce cri du cœur d’une chateuse  : « en fait je suis love de mon plan cul .......... argh » !

Dans le PCRA, l’autre est donc le non-complètement-satisfaisant qui vient alimenter le système d’attentes du sujet d’une manière qui, bien que suffisante pour engendrer du plaisir, reste en deçà de l’idéal qui conditionne l’accès à l’état amoureux proprement dit.

Nous restons ainsi ici dans un fonctionnement où l’autre est appréhendé en tant qu’objet venant combler tant bien que mal les attentes de son partenaire. S’il a gagné en liberté et peut se poser comme sujet, c’est seulement parce que ce partenaire a déjà perçu qu’il ne correspond pas à l’objet idéal et qu’il renonce donc à le… posséder.

Le côté affligeant du PCRA tient donc, tout à la fois… :

1. à son enracinement dans le négatif, c’est-à-dire, le fait que l’autre soit appréhendé comme « non conforme à l’objet idéal » que l’idéologie occidentale, individualiste et capitaliste, nous invite à poursuivre sans fin, dans une constante extension du domaine de la lutte.

2. au fait qu’une forme de résignation apparaît au fur et à mesure que cet « objet idéal » semble de plus en plus difficile à atteindre : c’est le « blase », à tonalité dépressive, vécu comme une désillusion alors même que le sujet garde complètement ses illusions, son espoir de rencontre idéale, source du vécu négatif. Bien que son expérience l’amène à ne plus vraiment espérer la réalisation de cet idéal, le pratiquant du PCRA reste incapable de l’anéantir pour le lire, enfin, comme totalement illusoire, comme ne pouvant avoir de réalité. S’il doit remettre quelque chose en cause, ce ne sera pas l’idéal, mais lui-même.

3. Cette centration sur l’objet idéal fait que l’autre est, au moins en principe, absent en tant que véritable sujet, c’est-à-dire, en tant que sujet que l’on désire connaître. Certes, le cadre du PCRA offrira à certains l’occasion de se découvrir puis de se rencontrer véritablement, hors de toute instrumentalisation. Mais ce n’est pas la loi du genre. L’autre est d’abord là comme source (objet) de satisfactions.

En résumé, on pourrait dire que le PCRA résulte tout à la fois… :

a. D’un ensemble de besoins sexuels et affectifs qui porte à l’attraction vers l’autre.

b. d’une volonté de se préserver en tant que sujet — c’est-à-dire, en tant qu’être libre de ses choix — et donc d’un refus et même d’une fuite de la situation d’instrumentalisation de soi par l’autre à des fins biologiques, sociologiques ou psychologiques.

c. d’un refus de renoncer définitivement à certains désirs (l’idéal) malgré l’échec répété des expériences passées.

d. et, par conséquent, d’un consentement à prendre ce que l’autre non-complètement‑satisfaisant a à offrir dès lors qu’il se contente de ce que l’on a soi-même à offrir.

Pour revenir à l’image d’une traversée du fleuve du Tendre d’une rive à l’autre, on peut dire que le PCRA se trouve au beau milieu du gué parce que :

1. il s’est éloigné de la rive de l’instrumentalisation, celle où l’individu est traité par son partenaire comme un objet de satisfaction

2. mais il reste également loin de l’autre rive, celle où tout est fait pour que l’individu comprenne qu’il est désiré et respecté en tant que sujet, libre par définition.

3. autant il s’agit d’un mode relationnel qui reconnaît à chacun plus de liberté que la relation de couple traditionnelle, autant l’autre reste un « objet » visant à la satisfaction de besoins qui, bien que dépassant la seule sphère sexuelle, n’en sont pas moins le mobile premier de la relation.

Nous pouvons à présent nous figurer pourquoi il existe quelque chose comme le PCRA et nous voyons du même coup « ce qui manque ici » : tout simplement le fait d’atteindre la rive où l’autre est pleinement sujet.

Ce qui veut dire, revenir à la source de l’amour en Occident, revenir à l’esprit de l’« amour courtois » pour l’actualiser ici et maintenant.

Comprendre l’essence de la révolution que fut l’amour courtois constituera l’objectif des troisième et quatrième parties de cette étude.

Dans les deux dernières, la réflexion portera sur les aspects pratiques, sur les conditions de mise en œuvre d’un nouveau mode relationnel qui soit pleinement respectueux de l’autre en tant que sujet.


Moyenne des avis sur cet article :  3.18/5   (11 votes)




Réagissez à l'article

15 réactions à cet article    


  • Gollum Gollum 30 mai 2011 13:23

    Ce qui s’affirmait alors était le souci de l’être de l’autre et l’absolu respect qui lui était dû, en particulier de la part du rustre, le mâle, qui allait devoir faire montre d’une capacité de régulation de ses instincts sexuels, par exemple, dans l’épreuve de l’assag (essai) ce sommet de tension dans le désir amoureux que la belle et son homme éprouvaient lorsqu’ils devaient passer une nuit nue à nu sans se toucher, avec dans la couche, une épée les séparant et marquant la limite à ne pas dépasser.

    Merci d’évoquer ici ces tentatives de tantrisme propre à l’Occident à travers l’amour courtois et qui sont effectivement l’exacte inversion de ce que sont devenues beaucoup de relations de couple aujourd’hui.. Bref, c’est l’avenir...

    Alors que de plus en plus en Occident il est difficile de ne pas traiter l’autre en objet tellement nous sommes soumis, contaminés par la facilité et le consumérisme ambiant, ces tentatives du Moyen-Âge de diviniser la Femme et de promouvoir une érotique dégagée de la chair méritent notre attention.

    À noter ici la notion de sacrifice afin d’obtenir un statut supérieur. Que l’on retrouve dans les tantrismes indiens puisque lors du rapport sexuel sacralisé, l’éjaculation concrète est remplacée par une éjaculation « subtile » qui permet là aussi de s’affranchir de la chair.
    Ce qui permet d’ailleurs d’avoir des rapports beaucoup plus longs que les rapports normaux et plus riches..

    Notons qu’en latin le mot Amor des Fidèles d’Amour est l’exacte inversion de Roma, ce mot désignant la puissante Église romaine que l’on était obligé d’ « épouser » à contre-cœur.. 

    C’est l’occasion ici de relire Dante soupirant après sa Béatrice.

    • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 30 mai 2011 18:44

      @ Gollum

      Oui, on peut bien rapprocher l’amour courtois d’une forme de tantrisme propre à l’Occident car il est probablement héritier du tantrisme via l’Iran et les pays arabes (cf. le beau livre de Denis de Rougement, « l’Amour et l’Occident »).

      Le sacrifice (de soi), le renoncement, j’essaierai de le montrer, est par excellence la voie du sublime dans la rencontre amoureuse. Son inverse, la volonté de possession ou d’emprise mène droit au n’importe quoi.
      Il est clair que le renoncement à l’éjaculation participe de cet esprit mais, et c’est là notre seul point de divergence, précisément par une inscription au plus profond dans la dynamique corporelle, dans la logique de la chair.

      Car ce renoncement, en portant au maximum la tension du désir, fait toucher au sublime car, exactement comme les psychanalystes se servent du terme, une sublimation opère.

      L’énergétique qui devrait normalement se perdre avec l’éjaculation vient irriguer tout notre appareil sensible et engendre précisément des sensations qui touchent au sublime.

      La chair nous y sommes en plein, c’est elle qui nous porte, dès lors que nous savons canaliser son énergie plutôt que de la laisser se gaspiller.

      Mais n’allons pas trop vite.
      Nous aurons l’occasion d’y revenir sans doute.


    • Raymond SAMUEL paconform 30 mai 2011 19:07

      Bonjour l’auteur,

      Je ne commenterai (sommairement) que sur un point votre très méritoire étude :
      Sur un point en effet, nous ne sommes pas sur un pied d’égalité, vous et moi.
      Vous traitez du patriarcat de façon historique, puisque vous ne l’avez pas vécu. Vous n’avez pas la possibilité de confronter les idées qui se sont implantées depuis l’avènement du féminisme, avec la réalité.
      Moi, par contre, j’ai bien connu la fin de cette période du patriarcat.

      Vous écrivez (entre autre) :
      - « Celle-ci (la femme) n’a longtemps été qu’une poupée, une marionnette devant se soumettre à la volonté de l’autre. Elle n’était donc pas respectée dans sa dimension de sujet. Elle n’était pas vue comme un être qui serait source, cause, responsable de ses choix, comme de ses actes. Elle n’était pas désirée en tant qu’être libre, agent ou acteur de sa propre vie et non patient. C’était avant tout une femme-objet. »

      Vous écrivez aussi : -« Cette attitude s’est trouvée illustrée durant deux millénaires au moins par la domination masculine qui -avec une violence aux multiples formes, omniprésente, mais encore bien loin d’être reconnue comme telle (ainsi qu’il apparaît avec l’affaire Strauss Kahn)- a fait de la femme la »chose« du mâle, notamment sous l’angle sexuel. »

      Tout ceci manque de la caution du vécu et conforte (sans doute sans mauvaise intention) des tendances qui sont favorables à l’émergeance de dérives dangereuses du type raciste ou fasciste.
      Raciste puisque selon vous les hommes, tous les hommes exerçaient sur les femmes des violences aux multiples formes, omniprésentes, faisant des femmes la chose du mâle, une poupée, une marionnette soumise à sa volonté, non respectée comme sujet, toujours femme-objet etc...
      La stigmatisation d’un groupe, quel qu’il soit, c’est la définition même du fascisme.

      Ainsi les hommes seraient, par nature, très mauvais.

      Je ne me reconnais pas dans cette description, et je peux affirmer que je ne suis pas le seul.

      Bien entendu, la situation juridique de la femme (voir code Napoléon) était indigne et laissait la possibilité à l’abus de pouvoir, abus contre lequel je me bats depuis toujours d’ailleurs (je ne me suis pas incliné par obligation devant les lois qui ont donné l’égalité de droit entre les femmes et les hommes, j’ai toujours pratiqué cette égalité).
      Je dois vous dire que pendant la période du patriarcat, si la juridiction incitait à l’abus de pouvoir, la pratique était bien plus souvent à la discrimination positive en faveur des femmes.
      Vous devriez en imaginer la possibilité puisque vous citez l’amour courtois. Vous croyez au miracles ? En effet, vous écrivez : « l’invention de l’amour courtois au XI ème siècle a, DE FAÇON PRESQUE MIRACULEUSE, etc... »
      Cet homme si mauvais serait devenu miraculeusement bon ? Puis, il serait retombé dans la barbarie, poussé par les institutions et la religion...

      P.S. Je vous affirme que ma grand-mère maternelle menait mon grand-père à la baguette, décidant de tout, que mon grand-père paternel « commandait aux champs et que ma grand-mère commandait à la maison » et que, dans nos campagne, c’était le schema classique, les femmes ayant au moins autant de pouvoir que maintenant, sinon davantage. Elles étaient aussi mieux respectées (ce qui nous incite à penser que l’amour courtois reposait sur un certain substrat, qui ne vous est pas sensible, de toute évidence).


      • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 30 mai 2011 19:33

        @ paconform

        Il me semble que nous ne parlons pas de la même chose.

        J’évoque une domination masculine qui a plus de deux mille ans, que vous ne pouvez pas (je crois) contester dans sa réalité historique et vous me parlez de votre posture personnelle et de vos grand-parents.

        Voyez-vous la disparité ? Présentez-moi là maintenant 100 grand-mères qui ont mené leur homme à la baguette, que prouverez-vous ?

        Toute l’histoire de l’Occident (et pas seulement de l’Occident) est témoin de cette domination masculine. L’épisode de l’amour courtois est un renversement ponctuel, comme les points dans le symbole du Tao.

        La domination féminine dans l’espace domestique est du même ordre. Elle est une réalité, je ne le conteste pas, mais sachant qu’elle se rencontre aussi dans les cultures arabes elle ne peut pas vraiment passer pour l’expression d’un réel pouvoir féminin, n’est-ce pas ?

        Mais soyons clairs, je ne dis pas que la femme a été sans pouvoir, sans ressource, soumise ou quoi que ce soit. Seulement qu’elle a été historiquement dominée.

        C’est un constat statistique, historique, qui est compatible avec toutes les exceptions individuelles que vous voudrez. Jeanne d’Arc est sous ce rapport un bel exemple n’est-ce pas ?

        Par ailleurs, je trouve que vous y allez un peu fort en me disant que je stigmatise les hommes, les mâles, en les renvoyant à leur violence et à leur brutalité dont je crois, l’histoire, témoigne suffisamment.

        Votre schéma est un peu court. Stigmatiser les faibles, les fragiles, les dominés, les rejetés, les exclus, oui, ça il faut s’en abstenir, bien sûr.

        Mais rappeler aux puissants, aux dominants, leur violence, est-ce de la stigmatisation ?
        Je ne le crois pas.
        A un moment donné il faut pouvoir dire les choses telles qu’elles sont, sans pour autant chercher à lyncher qui que ce soit ;

        Au contraire, il s’agit de contribuer à la prise de conscience qui, seule, peut aider aux changements d’attitudes et de comportements.

        Alors, bien sûr, ce que je dis tombe comme un jugement ex cathedra qui n’aide pas forcément à la prise de conscience,

        Mais ce n’était pas mon projet que de travailler ici à cette prise de conscience.

        D’une certaine manière, votre message m’en offre l’occasion et je vous en remercie.


      • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 30 mai 2011 21:28

        Je dois apporter ici un correctif.

        Contrairement à ce que j’ai fort maladroitement indiqué, le beau post qui introduit l’article précédent a été publié par LaNe Door sur son blog The Stage Door.

        J’ai donc confondu le nom du blog (raccourci) avec le nom de l’auteur. Toutes mes excuses à LaNe.


        • Raymond SAMUEL paconform 30 mai 2011 22:04

          Cher auteur,
           vous critiquez d’emblée mon témoignage- grand’mère. Mais songez que tout le monde a, ou a eu, deux grand-mères. Par contre, peu de personnes pratiquent le tantra.
          Ainsi mon témoignage a plus de validité que l’Histoire que vous invoquez avec persistance car celle-ci est largement distordue par les historiens comme elle est centrée sur les monarques et autres dirigeants, laissant dans l’ombre tout le reste.

           Il est bien plus important de vérifier les choses dans les faits.

          Or les faits sont que les femmes avaient au moins autant de latitude pour être dominantes dans la vie privée que les hommes en avaient dans la vie publique.

          Je ne vois pas non plus comment vous pouvez échapper au reproche de la stigmatisation des hommes dans leurs relations avec les femmes après ce que vous avez écrit dans votre article.
          Il n’y a d’ailleurs pas de statistiques fiables qui prouveraient que les hommes sont plus violents que les femmes dans le domaine du privé.
          Il est vrai qu’il y a plus d’hommes meurtriers de leur femme (et ex) que d’hommes, mais on devrait avoir le droit d’évoquer deux choses  : les séparations à l’origine de la plupart des meurtres sont le fait des femmes à 80% et d’autre part la réaction physiologiquement puissante, violente si l’on veut, a été attribuée par la nature aux hommes défenseur de la tribu (On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre). Les femmes sont par contre bien mieux armées que les hommes pour exercer la violence psychologique et la domination par la manipulation.
          Quand à l’argument guerrier que vous ne manquerez pas d’évoquer, après mes grand-mères je cite mon père que les gendarmes sont venus chercher dans son pré en 1914 et à qui ces derniers ont fait lâcher sur le champ la fourche qu’il tenait à la main pour l’emmener rejoindre son unité et tirer sur les Allemands.
          Je peux vous affirmer que mon père n’avait aucune intention belliqueuse.
          Je ne connais aucune guerre qui n’aie été déclenchée par les chefs d’Etats.
          Souvent d’ailleurs les hommes pauvres bougres croyaient devoir protéger les femmes et les enfants contre des ennemis.
          Par ailleurs, ces hommes n’auraient pas admis que des femmes soient exposées aux pieds gelés et à être déchiquetées par les obus, comme ils ne souhaitent pas maintenant qu’elles deviennent des « liquidateurs » dans les centrales nucléaires explosées.

          Je voudrais bien que tout ceci soit dépassé aujourd’hui et qu’il soit vain de rechercher si la domination féminine dans la vie privée contrebalançait (contrebalance) ou non la domination masculine dans la vie publique.

          Vous reconnaissez que vous n’allez pas dans cette voie. allez un peu plus loin et admettez que vous allez carrément en sens contraire.


          • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 31 mai 2011 05:27

            @ paconform

            "Il est vrai qu’il y a plus d’hommes meurtriers de leur femme (et ex) que d’hommes, mais on devrait avoir le droit d’évoquer deux choses : les séparations à l’origine de la plupart des meurtres sont le fait des femmes à 80% et d’autre part la réaction physiologiquement puissante, violente si l’on veut, a été attribuée par la nature aux hommes défenseur de la tribu (On ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre). Les femmes sont par contre bien mieux armées que les hommes pour exercer la violence psychologique et la domination par la manipulation."

            Merci pour cet exemple. J’aime tellement l’abstraction que je tarde souvent à venir à des exemples concrets. Vous m’en offrez un excellent.
            Oui, la violence conjugale, celle qui est passible de la loi, est (sauf erreur de ma part), principalement le fait des hommes.
            Même si la violence féminine est loin d’être négligeable.
            Nous sommes d’accord sur ce constat et il est clair, je crois, qu’il étaye efficacement l’hypothèse de la domination masculine.
            Oui, la nature a doté le mâle d’une force physique supérieure et, dirons-nous, d’une propension à s’en servir. Elle commence ici la domination masculine.
            Combien de fois avez-vous lu dans les journaux qu’un homme portait plainte parce qu’il avait été violé par une femme ? A peu près zéro fois pour ces 40 dernières années j’imagine.
            Et l’inverse ? On ne le compte plus.
            Quand à celles qui ne portent pas plainte, rien que d’y penser ça fait frémir.
            Oui la domination masculine s’exerce d’abord au plan physique, dans le sexe et la violence.

            Maintenant, concernant votre tentative pour instaurer une forme d’équilibre entre l’homme et la femme sous ce rapport, j’ai peur qu’elle fasse apparaître chez vous des tendances très masculines sous le vernis d’une attitude bienveillante et respectueuse de la femme.

            Vous dites en effet que si la femme subit la violence masculine, elle en est à l’origine dans 80% des cas en raison de son désir de séparation.
            Et que devait faire d’après vous la femme vivant avec un être violent qui va finir par la massacrer quand elle voudra le quitter ? Désirer subir indéfiniment ?
            Cette lecture n’est pas acceptable. D’autant plus que la référence à la nature tendrait à faire passer cette violence pour naturelle. D’autant plus que (si je vous ai bien compris) vous en venez à attribuer à la femme une forme de supériorité dans la violence psychologique, ce qui n’est fondé sur aucune évidence que je sache.

            Donc, non, non, je maintiens complètement ce que j’ai avancé concernant la domination masculine et je considère que la violence conjugale en constitue un bon élément de preuve.

            Je ne sais comment vous pensez, mais la violence ne contrebalance pas la violence, elles se nourrissent l’une l’autre. Donc quoi que ce soit d’idéal que vous désiriez in fine, il nous faut pour le moment faire l’effort de penser cette violence. Et la première chose que les hommes, les mâles, ont à faire, plutôt que de se chercher des excuses et des prétextes en accusant les femmes de je-ne-sais-quoi, c’est de prendre conscience de leur propre violence, d’en faire le constat et d’apprendre à s’en garder.


          • rakosky rakosky 30 mai 2011 22:09

            J’ai rien compris mais j’ai bien rigolé
            Au début je croyais que c’était un gag cet article...


            • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 31 mai 2011 05:32

              Merci d’indiquer que c’était seulement au début... smiley


              • Raymond SAMUEL paconform 31 mai 2011 10:21

                Bonjour,

                Vous êtes aussi féroce qu’injuste, et ce n’est pas peu dire.

                Dans votre texte ci-dessus on peut prendre presque au hasard.

                Soit :

                - « Vous dites en effet que si la femme subit la violence masculine, elle en est à l’origine dans 80% des cas en raison de son désir de séparation »
                 (j’ai écrit ci-dessus en effet qu’il fallait tenir compte du fait que les séparations étaient à 80% le fait des femmes. ce qui amène à sous-entendre que la réaction violente ne peut venir que de l’homme dans ce cas).

                Et l’explication que vous donnez dans votre réponse c’est :

                - « Et que devrait faire d’après vous la femme vivant avec un être violent qui va finir par la massacrer quand elle voudra le quitter ? Désirer subir indéfiniment ? »

                Ainsi vous affirmez sans hésiter que 80% DES HOMMES SEPARES c’est à dire 40% DE TOUS LES HOMMES SONT DES MASSACREURS !

                Parmi les « mâles », (un mot que vous utilisez péjorativement -je ne me permettrais par d’appeler les femmes des « femelles » avec le même état d’esprit -) insultés de la sorte, certains risquent fort d’avoir en effet envie de vous massacrer !


                • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 31 mai 2011 10:48

                  Bonjour paconform,

                  Je vous sens très mobilisé pour défendre les hommes, bien davantage que les femmes, et c’est votre droit, je ne le discute pas.

                  Il se pourrait cependant que cette énergie vous aveugle par moment. La phrase qui vous fait bondir fait référence aux cas de violences conjugales effectives. Une femme est battue et se demande que doit-elle faire ? Nous sommes dans ce contexte particulier, donc oubliez les statistiques fallacieuses que vous m’attribuez.

                  Si on suit votre logique, (les hommes sont plus violents oui, mais c’est les femmes qui veulent les quitter), qui justifie (presque) la violence faite aux femmes qui veulent se séparer, la femme battue devrait s’abtenir et subir plutôt que de susciter le courroux de l’homme violent doté d’une force supérieure par la nature (c’est pas de sa faute à lui).

                  Je poussais votre logique ou plutôt votre rhétorique à la limite pour en montrer... la limite.
                  C’est tout.
                  N’’y voyez aucun mal, c’est juste de l’argumentation entre gentilhommes.

                  Concernant l’emploi du terme « mâle » il n’est, me semble-t-il, qu’un juste retour des choses lié au fait que le « mâle », par sa domination, a fait disparaître la femme derrière le mot « homme » (usage générique). Je me refuse donc à employer ce terme pour l’usage spécifique consistant à désigner le « mâle ».

                  J’ai fait ça sans penser à mal, et que je sache, le terme « mâle » même s’il sonne comme le « mal », n’en est pas péjoratif pour autant. Pas intrinsèquement en tout cas. Car enfin, se servir du mot « mâle » qui a, certes, une connotation sexuelle, pour désigner la gent masculine, me paraît assez pertinent au final. Diriez-vous le contraire ?


                • Raymond SAMUEL paconform 31 mai 2011 15:37

                  Bonjour,
                  « je vous sens plus motivé pour défendre les hommes que les femmes ».
                  C’est bien là l’un de vos problèmes. Votre balance est aussi déréglée que celle des féministes ultra qui considèrent comme criminel de relever les injustices dont sont victimes des hommes.
                  Tant que cette habitude se maintiendra, il sera nécessaire de défendre spécifiquement les hommes. Cessez vos attaques spécifiques et injustes contre les hommes et ainsi vous contribuerez à rétablir un climat normal.
                  Je ne manque pas de souligner que la balance joue également en défaveur des enfants et que nous ferions bien de nous mobiliser tous pour que change le regard que les adultes portent sur l’enfant.
                  Nous serons arrivés à bon port quand les injustices pèseront du même poids, qu’elles atteignent des femmes, des hommes ou des enfants.

                  Vous dites que la phrase qui me fait bondir fait référence aux cas de violence conjugale EFFECTIVES.
                  Donc, vous confirmer votre point de vue :
                  1°) Il ne faut pas ébruiter les violences conjugales féminines (violences conjugales = seules violences exercées par les hommes).
                  Pourtant la plupart des hommes n’ont pas de réel chez eux, ils habitent chez leur femme, les tyrans domestiques féminins ne sont pas rares, il y a plus d’enfants tués ou maltraités que de femmes, mais on n’en parle guère).
                  2°) 40% de tous les hommes sont des massacreurs.

                  Je vous laisse sévir.


                  • Lucadeparis Lucadeparis 31 mai 2011 20:43

                    Cette discussion me fait penser que dans une société patriarcale, le chef brime le subalterne, qui brime sa femme, qui brime son enfant, qui brime son chien. Chacun a son bouc-émissaire.

                    Et la domination des sociétés patriarcales peut être liée à leur violence, qui a écrasé bien des plus pacifiques.  Des formes de sociétés matriarcales sont devenues des isolats.

                    L’évolution de l’émancipation de la femme dans notre société patriarcale n’a pas eu que des causes généreuses, et a été voulue par la société marchande (et les Etats qui prélèvent les taxes des échanges marchands) qui veut que la femme ne soit plus soumise au mari mais ait un métier, soumise comme lui à la domination capitaliste, à la production hétéronome, et à l’accaparation de l’éducation par l’Etat et les firmes. Ainsi en parlait David Rockefeller à Aaron Russo.

                    Je pense en particulier à une société, où j’ai eu la chance de passer (et où je voyais des femmes jouer aux cartes devant leur épicerie...) après en avoir découvert les vertus dans un livre (de l’ethnologue Cai Hua) dont le titre m’avait intrigué : Une société sans père ni mari. Les Na de Chine :

                    « Plus de la moitié de la population d’hommes et de femmes vit sous le régime du nana sésé, ou « visite furtive » : la nuit, les hommes se glissent dans le lit des femmes des maisons alentours. Les uns comme les autres se font un devoir de n’être ni jaloux, ni fidèles (dispositions mal vécues chez les amants Na). »

                    Les Na, dans les contreforts de l’Himalaya, ont ainsi créé un système où ils ont disjoint la famille et l’amour, pour une plus grande stabilité et paix des familles, une plus grande sécurité pour les enfants, et une plus grande liberté des amours.


                    • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 31 mai 2011 21:02

                      Dans l’article 1, Ariane Walter évoquait aussi les Miaos (les Hmongs). Les Na ont-ils un lien avec eux ?

                      Quoi qu’il en soit, comme je le disais dans mon commentaire, les frères n’ont plus envie actuellement d’"assumer les enfants de leurs soeurs.

                      On les comprend. Je les comprends.

                      Dès lors, ce système traditionnel, matriarcal n’est pas la solution pour les individualistes que nous sommes.

                      D’où l’importance de ressourcer de manière radicale la voie de l’amour courtois.

                      Il y a peut-être d’autres possibilités, mais je n’en ai pas connaissance.


                      • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 31 mai 2011 21:54

                        Au cas où, voici le lien vers l’article précédent :

                        Théorie du Plan Cul Régulier Affectif

                        et le lien vers l’article suivant :

                        L’amour courtois comme aban-don de soi

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON







Palmarès