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Gorbatchev, Frederick De Klerk, Pierre Buyoya. Trois réformateurs, trois destins

A l’instar d’autres grands réformateurs, tels Michael Gorbatchev ou Frederick De Klerk, le crime de Pierre Buyoya serait d’avoir contribué à sortir son pays de l’impasse à deux reprises. Le destin de tous les réformateurs serait-il finalement d’être des éternels incompris ? Sa candidature pour la tête de la Francophonie suscite des commentaires pour le moins étranges, même s’ils viennent d’une minorité d’opposants.

Avec David Gakunzi et Edgar C. Mbanza. URSS années 80. Le système soviétique semble figé et immuable. Lourdeurs bureaucratiques, corruption généralisée, l’économie est dans un état déplorable et les droits de l’homme bafoués. En 1982 surgit Gorbatchev. Homme d’appareil du Parti communiste de l’Union soviétique, Mikhaïl Gorbatchev est jeune, parle bien et semble audacieux. Libéralisation de la presse, réhabilitation des victimes de la répression stalinienne, glasnost, perestroïka, rétablissement du dialogue américano-soviétique sur les armes nucléaires, rapprochement avec la Communauté européenne… Tremblement de terre, effondrement de l’Union soviétique. Chute du rideau de fer, réunification allemande. Après avoir démissionné de son poste de président de l'URSS en décembre 1991, Mikhaïl Gorbatchev se tourne très vite vers l’écologie. Très populaire en Occident, Gorbatchev l’est beaucoup moins dans son pays : candidat à l’élection présidentielle en 1996, il ne recueillera que 0,5% des suffrages exprimés.

Autre destin : Frederik de Klerk. 1990 l’Afrique du Sud est dans l’impasse. Grèves, manifestations, marches de protestation, le pays est devenu ingouvernable. Une part de la classe politique blanche s’accroche pourtant à la loi de l’apartheid. Son leitmotiv : « No change ». Pas de changement, toujours plus de répression. Frederik de Klerk, lui, préfère négocier : « la rigidité est mauvaise ... je crois à la persuasion » dira-t-il. Le 2 février 1990, il fait un discours historique : il annonce la fin de l’apartheid, la légalisation des mouvements anti-apartheid, la libération des prisonniers politiques et surtout celle de la figure de proue du mouvement anti-apartheid : Nelson Mandela. L’Afrique du Sud ne sera plus jamais la même. Négociations entre De Klerk et Nelson Mandela, négociations âpres, difficiles mais avec au bout l'établissement d'une constitution provisoire et les premières élections multiraciales en avril 1994 à la suite desquelles le nouveau Parlement élit Nelson Mandela à la présidence de la République. Frederik de Klerk devient vice-président avant de retirer de la scène politique. De Klerk est aujourd’hui un homme parfois controversé mais respecté.

Enfin Pierre Buyoya. Burundi 1987. Tensions au pays des mille collines, libertés religieuses et civiles bafouées, peurs, rumeurs de guerre civile. L’impasse est totale. Il faut un changement de cap. Le pays n’étant pas doté de mécanismes démocratiques, tout changement de régime ne peut venir que d’un coup de force. Début septembre, un groupe d’officiers décide de prendre les choses en main.

Immédiatement, le nouveau régime libère la parole, lance de nombreuses réformes. En juin 1993, pour la première fois les Burundais se rendent aux urnes pour élire leur président. Ndadaye est choisi dans ambigüités. Buyoya accepte le verdict des urnes, s’incline et se retire du pouvoir. Mais dans certains milieux du pouvoir, on grince des dents. Le 20 octobre 1993, le nouveau président est assassiné lors d’une tentative de coup d’Etat. Le Burundi entre dans une zone de turbulences : massacres, purifications ethniques, rebellions. Actes génocidaires affirment même certaines ONGS. En 1996 le Burundi est au bord du gouffre, avec déjà 300 000 morts dans le pays. L’impasse est totale.

Qui pour éviter au Burundi un scénario à la rwandaise ? Poussé par des voix éminentes de la société civile et certains hauts gradés de l’armée, Pierre Buyoya s’engage, reprend le pouvoir, rétablit la sécurité. Immédiatement, il initie des négociations inclusives avec toutes les forces prenantes au conflit. Le processus aboutira à un accord de paix global – l’accord d’Arusha – conclut sous la médiation de Nelson Mandela.

Pierre Buyoya se retire de nouveau du pouvoir et décide de mettre son expérience au service de la cause de la paix et de la démocratisation en Afrique. Depuis, il a supervisé plusieurs processus électoraux en Afrique, a assuré la médiation lors des négociations pour la paix au Soudan. Quand la crise malienne éclate, l’Union africaine se tourne naturellement vers lui et le désigne comme son Haut Représentant pour le Mali et le Sahel. Pierre Buyoya est aujourd’hui candidat au poste de secrétaire général de l’OIF. Et depuis, dans certains médias, il y a cette étrange phrase qui revient comme un refrain : oui, Buyoya est un diplomate apprécie ; oui, au regard de son expérience, il est le candidat idéal pour ce poste mais… Mais quoi donc ? Mais il y a ses deux coups de force. En somme le crime de Buyoya serait d’avoir contribué – au risque de sa propre vie - à sortir son pays de l’impasse à deux reprises. Etrange … Etrange… Le destin de tous les réformateurs serait-il finalement d’être des éternels incompris ?


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6 réactions à cet article    


  • Jean-Pierre Llabrés Jean-Pierre Llabrés 6 octobre 2014 19:22

    À l’auteur :
    "Après avoir démissionné de son poste de président de l’URSS en décembre 1991, Mikhaïl Gorbatchev se tourne très vite vers l’écologie.« 

    Gorbatchev n’aurait-il pas mieux fait de rester président et de réaliser une privatisation équitable de l’économie ex-soviétique au lieu de laisser le champ libre à une »privatisation oligarchique" (qui a stérilisé tous les sacrifices du peuple russe depuis 1917) ?

    Pauvre peuple russe : Spolié en 1917 et en 1991 !


    • Frédéric MALMARTEL Le Kergoat 6 octobre 2014 21:33

      Gorbatchev a été une catastrophe. Vous ne trouverez aucun ex-soviétique pour le défendre.


      • filo... 7 octobre 2014 09:53

        @@l’auteur

        Vous êtes formaté au prêt à pensé occidental. Vous me donnez l’impression de regarder le monde avec des lunette noir de soudeur. Gorbatchev est une erreur de l’histoire, plus exactement résultat d’une manipulation. Je m’explique.

        En 1983, un 1er septembre au dessus de l’ile de Sakhaline la chasse de URSS abat un avion Boeing 747 de Koréan Airlaines faisant 269 victimes.

        La propagande anti soviétique est gigantesque. Effet garantie. Émotion est planétaire.

        Les soviétique continuent avec leurs stratégie défensive. Mais peu de temps après ils cèdent.

        Commandement militaire soviétique est décapité. Ce changement va affaiblir les positions politique à l’intérieur et ouvrir la voie à l’arrivée de Michaïl Gorbatchev. Les résultats ensuite nous les connaissons.

        Quelque années plus tard les américains ont reconnu qu’à proximité de Boeing et à l’ombre de radar il avait un RC-135 avion espion américain.

        Gorbatchev n’était donc pas du tout un hasard de l’histoire.
        Récemment les autorités russes ont ouverts une enquête afin de savoir si un tel agissement de Gorbatchev pendant son règne, relevait de sa naïveté politique ou d’un cas de corruption.

        Le bruit a couru que le Prix Nobel était la récompense des américains d’avoir laissé des renards entrer dans le poulailler.

        Ces même américains ont essayé avec vol MH17 de récidiver avec Poutine.
        Apparemment raté !

        Donc comme vous le voyez c’est tout sauf idéalisé à votre façon, à la sauce hollywoodienne.

        Est ce que la raison profonde de votre article est le doute qui vous ronge que tout n’est pas rond comme ont nous le présentent ou bien vous avez voulu affirmer vos convictions que l’Occident est le meilleur, le plus parfait de l’empire de l’histoire de l’humanité, donc un exemple à suivre absolument ?


        • filo... 8 octobre 2014 12:00

          @l’auteur

          Je constate que vous n voulez pas me répondre à ma question que je vous ai posé dans mon commentaire.

          Pourtant je me suis donné de la peine, consacré mon temps à lire votre article et faire une réflexion sous forme d’un commentaire

          Dommage et hautain de votre part.
          Mais j’en prend note.

          Je vous souhaite bonne continuation.


          • PIERRE LAURENT 8 octobre 2014 12:49

            Bonjour Filo, Bonjour tout le monde,

            Je vous promets que je vais vous répondre rapidement (je suis dans les trains depuis ce dimanche :). Dans tous les cas, cela confirme mon idée centrale : Gorbatchev a été incompris par plus d’un. Mais on va discuter... A très bientôt.

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