Paul Desmarais : Funérailles de type nationales décalées

Les funérailles dignes de funérailles nationales auront donc lieu aujourd'hui.
Elles auront été décalées de quelques mois, question de composer avec les médias et les paparazzis.

L'annonce s'est fait le jour même.

Une « messe » pour honorer celui que l'on décrit comme un "philanthrope" (la philanthropie (sic) de ceux qui exploitent le monde ! Une admiration inculquée dans les larbins que nous sommes.),
Paul Desmarais, ce genre de philanthrope qui paie toujours trop d'impôt et qui sait jouir des paradis fiscaux. 

Je disais que Sarkozy serait au rendez-vous.
 
Le protégé, le « projeté » du puissant est là.
Une cérémonie où les grands iront remercier leur généreux mécène. L'émotion sera au rendez-vous afin de bien nourrir ce sentiment bien ancré du larbin qu'on nous inculque régulièrement.

Oui, émotion et admiration seront au rendez-vous, soyons-en sûr.

Souvenons de la première cérémonie où l'on rendait le premier hommage à celui qu'on nous fait admirer :

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Ces philanthropes que nous admirons tant !

La semaine dernière (8 octobre 2013) un grand "philanthrope" est décédé.
Ses funérailles ont été privées et dans la plus stricte intimité. Une intimité comme seuls ces grands philanthropes fortunés peuvent se la permettre. 

Sagard a vibré d'une tristesse immense. Même notre parlement canadien a mis son drapeau en berne pour la journée tellement cet homme était grand.

Sagard avait les portes closes comme celle d'un Bilderberg. Pas de photographes, pas de journalistes « en fonction ». Que des intimes. On dit qu'il y avait au moins deux cents illustres personnages (surtout ses employés, dit-on). Plusieurs sans doute venu en catimini. Personne ne les aura vus. Ces gens dignes savent souffrir loin du regard des caméras. Malgré leur popularité, ils savent se prémunir contre les paparazzis et réussissent toujours admirablement à éviter la première page de « écho vedette ».

Sagard, on dit que c'est un village.
En France, on le décrit ainsi :

« Sagard est un petit village canadien, situé dans la région de Capitale-Nationale et la province du Québec.
Le village s'étend sur 207 km² et compte 147 habitants depuis le dernier recensement de la population. La densité de population est de 0,7 habitants par km² sur le village.
Entouré par Mont-Élie, L'Anse-Saint-Jean et Baie-Sainte-Catherine, Sagard est situé à 45 km au Nord-Ouest de Rivière-du-Loup la plus grande ville à proximité.
Situé à 206 mètres d'altitude, le village de Sagard a pour coordonnées géographiques Latitude : 48° 1' 60'' Nord
Longitude : 70° 4' 0'' Ouest »

Une description totalement conforme à la vision canadienne de Paul et stratégiquement rédigée pour éviter l'afflux touristique. Imaginez vous vous rendez à Rivière-du-Loup, la plus grande ville à proximité,  pour visiter Sagard sur l'autre rive ! Seuls les plus décidés peuvent s'y rendre vraiment. Quoiqu'heureusement il y a le traversier (ferry pour nos cousins français). 

Même Google map reste discret sur le domaine. 

Un malencontreux nuage nous masque l'endroit. C'est vraiment jouer de malchance, car, en faisant un « zoom out », on constate que la photo satellite fut prise par temps clair et que l'unique nuage est au-dessus de Sagard ! Il y a de ces hasards qui respectent l'humble discrétion des riches.

On dit que la messe s'est tenue dans la petite chapelle jaune qui avait été restaurée en 2005 grâce à l'homme d'affaires.

C'est un ancien employé et ami de la famille, le diacre Camil Savard, qui a célébré la cérémonie.

Les deux cents invités ont-ils pu tous pu entrer dans cette petite église de Sagard ? Ont-ils installé un écran à l'extérieur ?

Cette église a été offerte par Paul.
Une fois de plus on note sa générosité démesurée.

Dans le magazine Studio 1 on disait le 9 janvier 2006 :

« L'homme d'affaires Paul Desmarais a offert un cadeau unique aux gens de sa communauté.
En effet, il a défrayé le coût de 1 million $ pour la construction d'une nouvelle église.
Paul Desmarais possède un manoir dans la région de Charlevoix, plus précisément dans le village de Sagard. La petite église de campagne était en ruine et devait être reconstruite. L'homme d'affaires voulait d'abord bâtir une chapelle sur son propre terrain, mais il a décidé que ce serait plus approprié d'en faire don à la petite communauté.
Les 162 résidents du village ont tous un très grand respect pour Paul Desmarais qu'ils considèrent comme un membre à part entière de leur communauté.
Paul Desmarais, âgé de 78 ans [en 2006], est né en Ontario, mais il a fait fortune avec l'empire Power Corp. dont le siège social est situé à Montréal.
Sa fortune est évaluée à plus de 4,25 milliards$ [en 2006].  »

C'est l'unique photo de l'église de Sagard que l'on peut trouver sur internet. Encore là, on remarque cette discrétion notable des riches. Est-ce la chapelle rénovée au coût de 1 million de $ ou est-ce la chapelle avant sa rénovation ?

(Les touristes ayant photographié Sagard cet été peuvent nous laisser leurs commentaires et leurs photos récentes sous cet article.)

Outre le généreux don de l'église, M. Desmarais avait fait construire un terrain de golf qui sera sans doute donné à la communauté. Lors de cet humble aménagement de terrain de golf, on avait détourné un cours d'eau.

Golf privé de Sagard ; Les Desmarais déplacent un cours d’eau.
On dit :

« La famille Desmarais a déplacé un ruisseau pour enjoliver un terrain de golf qu'elle a construit à son domaine de Sagard, dans Charlevoix. Les autorités n'ont toutefois jamais vérifié si l'aménagement final respectait la réglementation environnementale. Et Québec refuse de dévoiler les documents concernés.  »

Encore ici, on note cette immense discrétion des riches. Même le gouvernement refuse de dévoiler les documents démontrant leur générosité.

On constate aussi que ces philanthropes sont d'une générosité renversante. Cet humble terrain de golf sert avant tout à récolter des fonds pour les œuvres charitables.
On dit :

« Le terrain de golf de 18 trous, devenu l'un des plus beaux du monde, est désormais le théâtre annuel d'un tournoi de charité réunissant plusieurs milliardaires.  »

On souligne dans l'article de TVA : « Paul Desmarais a déjà prétendu que son domaine de Sagard, en Charlevoix, situé à 70 km de La Malbaie, était plus grand que la Belgique.  »

Bah ! Il le mérite bien. Il a travaillé fort pour l'obtenir. M. Desmarais est parti de rien, c'est bien connu. Et il était doué. (Doué... ???) Ceux qui le critiquent et ne le respectent pas sont tous simplement des jaloux. Au Québec surtout, on a la manie de toujours critiquer ceux qui réussissent. On devrait plutôt les admirer.

Ces philanthropes cachent-ils leurs revenus faramineux dans des paradis fiscaux ? Voyons, vous voulez rire ! Quelle question, ne voyez-vous pas la générosité de ces gens ! Seraient-ils capables de se soustraire à l'impôt ? Ils savent bien que l'impôt est le moyen de partager les revenus avec les plus démunis de la société afin de leur offrir des services essentiels, entre autres, les soins de santé et l'éducation accessible à tous.

Personne ne se souvient que nous devions avoir la liste des 450 canadiens, dont 46 Québécois, accusés d'utiliser des paradis fiscaux.
Une liste que nous n'aurons jamais eue. On constate encore ici que nos journalistes sont plus doués pour oublier plutôt que doués pour poursuivre un dossier. Jamais un seul nom n'a filtré. Et pourtant, mais quelle émotive indignation il y a eu pendant quelques heures dans tous nos médias !

On disait que « le gouvernement canadien a d'ailleurs réclamé hier que la liste de noms soit remise à l'Agence de revenu du Canada.  » Une grosse affaire !
Et pfffffff comme un pétard trempé, dégoulinant de... (choisissez le terme à votre guise).

En 2011, M. Léo-Paul Lauzon notait  : « Paul Desmarais empoche 242,2 millions$ en vendant 6,5 millions d’actions de Power Corporation (à des fins de gestion du patrimoine qu’il a dit) et paie zéro impôt sur le revenu (Le Journal de Montréal, 12 janvier 2008).  »

Est-ce possible que ce philanthrope ait refusé de payer de l'impôt ? Voyons !

Cette déclaration était faite bien avant qu'une fuite nous révèle qu'une liste de fraudeurs de l'impôt existait. Une liste que nous n'aurons bien évidemment jamais vue. M. Lauzon n'est pas tellement couru par les journalistes. Sans doute qu'il n'est pas suffisamment photogénique et que son image se vend mal. 
Léo-Paul notait :

« Le silence de La Presse et du Devoir  »

Naturellement, La Presse n’a pas envoyé de journaliste à ma dernière conférence de presse du 30 août dernier et ne l’a donc pas couverte, car les gains de capitaux relèvent du domaine des abris fiscaux (REER, CÉLI, REEE, accréditives, etc.) qui représentent un domaine d’activités important et lucratif pour sa compagnie-mère Power par le biais de ses filiales Investors, Mackenzie, London Life, Great West Life, Canada Life, etc. Faut pas mordre la main de ceux qui nous nourrissent, n’est-ce pas ?
Pourtant, j’avais envoyé un courriel à l’actuel rédacteur en chef de La Presse André Pratte qui, du temps qu’il était simple chroniqueur et plus critique, avait pondu le 17 septembre 1998 un texte virulent intitulé : « Un recel au grand jour. Les exemptions fiscales de gains en capital profitent aux nantis, déplore un spécialiste  ».

Pour clore cette très courte, extrêmement courte, saga de la liste des fraudeurs canadiens un superbe article plein de virtuosité nous disait que de nombreux Canadiens aisés ayant des fonds placés à l'étranger s'étaient manifestés pour confesser leurs errances fiscales ! Mais évidemment aucun nom ne filtre. L'article digne de la prouesse pour finaliser le tout se termine en disant :

« Vendredi dernier, le commissaire de l'ARC a écrit au président de la CBC pour demander au diffuseur public de fournir une copie de la liste des fraudeurs potentiels.
« (L'ARC) n'a pas exigé l'identité de la source des renseignements et tous les renseignements que vous fournirez seront traités de manière strictement confidentielle, de la même manière que tous les renseignements sur les contribuables qui lui sont fournis », mentionne la lettre rédigée par Andrew Treusch.
Le diffuseur public a déjà fait savoir qu'il ne partagerait pas la liste, pour protéger son intégrité journalistique.  »

Celui qui est passé des paradis fiscaux au paradis des philanthropes en savait sûrement beaucoup plus que le commun des mortels au sujet de cette liste et au sujet de ces échappatoires fiscales.

Le journaliste Marco Bélair-Cirino nous disait dans Le Devoir que « Le coût des paradis fiscaux pour les États demeure inconnu ». Un inconnu jalousement gardé par nos gouvernements. Ces gouvernements qui mettent leurs drapeaux en berne lorsque les philanthropes nous quittent.

Il y aurait long à dire concernant ces philanthropes qu'on admire tant. Ce sont ces gens qui ont accès à des clubs de philanthropie comme celui de Bilderberg. Des gens qui influencent ces discussions sérieuses des grands sommets des « G ».

Ce qui est intéressant de constater, c'est qu'on les admire. On les admire vraiment, sincèrement. Pourquoi donc ? Vous êtes-vous vraiment déjà demandé d'où venait cette admiration qui nous envahit ?

Vous savez, l'endoctrinement... c'est de la semence subtile à peine perceptible et qui donne d'excellents résultats à long terme.

Serge Charbonneau
Québec