Le projet de réforme de l’assurance-santé, cher à la Maison-Blanche,
provoque une avalanche de critiques. Trop vives pour être honnêtes.
De notre correspondant
Ils montent à la tribune la peur au ventre, flanqués de gardes du
corps nerveux : les élus du Congrès américain, qui espéraient profiter
calmement des vacances parlementaires du mois d’août pour promouvoir
dans leurs circonscriptions le plan de réforme de l’assurance-santé
de Barack Obama, essuient des huées et des insultes. Mais aussi, de
plus en plus souvent, des menaces de mort de la part de citoyens qui se
disent en guerre contre la « dérive communiste » et le "viol du
contribuable". Par endroits, on a vu émerger, au-dessus de la foule,
pendue à une potence de carton, l’effigie du « politicien traître ».
La violence et l’organisation parfaite de ces débordements font
douter de la spontanéité du mouvement. Afin de perturber les réunions,
les protestataires ultraconservateurs ont parfois reçu le renfort
d’agitateurs rétribués par des associations militantes au financement
opaque, comme FreedomWorks. Et le Parti républicain, minoritaire au
Congrès, ainsi que les puissants lobbys des assurances et de
l’industrie pharmaceutique tardent à désavouer ces "soulèvements
populaires" qui servent leur cause.
Relayées par les télévisions et par Internet,
ces scènes de chaos attisent la polémique autour du projet d’assurance
publique, cher à la Maison-Blanche. De nombreux électeurs s’inquiètent
du prétendu virage à gauche de Barack Obama, que certains sondages
créditent d’un taux de popularité réduit à quelque 50%. "L’absence d’un
mouvement populaire en faveur de la réforme et la passivité de ses
promoteurs donnent des ailes à l’opposition", regrette Marshall Ganz,
politologue à la Kennedy School de Harvard.
Huit Américains sur dix disposent de leur propre assurance-santé, et
sont peu sensibles au drame des 46 millions de leurs concitoyens
contraints, faute de couverture, d’aller se faire soigner dans les
services d’urgence des hôpitaux. Quant aux élus, ils détestent la
controverse. Brad Miller, représentant démocrate de Caroline du Nord, a
reçu des menaces sur le répondeur de sa permanence, et annoncé qu’il
annulait sa campagne locale pour une « Sécu » américaine...