Le soldat en fer blanc mort avec ses mensonges
Dans la série des disparitions discrètes qui n'ont pas fait une seule vague ici dans la presse, celle révélée il y a quelques semaines de Jack Idema est plus que notable. Aussi vite oublié, l'homme qui avait tant servi un pouvoir à une époque en allant hanter les plateaux de télévision pour raconter mensonge sur mensonge à propos de ses exploits totalement inventés est mort dans la plus totale indifférence. Ce dont on pouvait se douter, à le voir s'être réfugié honteusement au Mexique. Ce qu'on a appris, en revanche, c'est de quoi il est décédé, à 55 ans : on s'attendait à une mort violente ou à une crise cardiaque, notre menteur invétéré est en fait mort.... du sida. Un dernier exploit à sa longue liste de ses comportements cachés. Avec Jack Idema disparaissait en fait tout un pan de manipulation des médias sous l'ère Bush : ceux complaisamment étalés, car l'homme qui s'était un jour montré en train de torturer en direct un individu, participait bien à une entreprise de terreur, celle destinée à faire peur au pékin moyen... et à confondre des personnalités : le grand reporter Dan Rather, une référence pourtant, était tombé lamentablement dans son piège. Rappel sur l'étonnante carrière du "soldat en fer blanc" ("Tin Soldier")... comme on l'avait si justement appelé un jour, ou comment l'Amérique entière avait-elle pu être assez idiote pour avaler toutes ses couleuvres.
Le fait que la disparition de Jack Idema ait été occultée par les médias n'est pas un hasard. S'ils avaient annoncé son décès, ils auraient dû ressortir des bandes vidéos enregistrées plus que compromettantes pour eux. Lors de la sortie du pamphlet "Tin Soldier", écrit par Mariah Blake, CBS avait par exemple dû par exemple reconnaître que les sept heures de bandes vidéos censées montrer l'entraînement de membres dAl-Qaida, avaient été complètement bidonnées par Jack Idema. Celui considéré comme le plus grand présentateur de télévision US, Dan Rather, était tombé dans le panneau, lui aussi. Stacy Sullivan dans le New Yorker avait en revanche raconté combien celui qui avait été de tous les plateaux télévisés dès l'opération Desert Storm n'était qu'un menteur invétéré et un mythomane complet. Un peu plus tard, des gens plus subtils et un peu plus courageux, tel Tracy-Paul Warrington, l'ancien commandant adjoint d'une des unités de forces spéciales de contre-terrorisme avait clairement établi que ces vidéos étaient des fausses et ces exploits des racontars complets. Trop tard, le mal était fait : aujourd'hui encore, dans certains journaux télévisés, on utilise toujours les images bidons de Jonathan Keith Idema pour montrer ce qu'était et ce que serait encore Al-Qaida. Ce qu'il a a de plus étonnant, c'est qu'à l'époque où Dan Rather décidait d'utiliser les bandes vidéos, malgré ce qui semble avoir été des mises en garde, une simple recherche sur Google ou LexisNexis permettait de remonter jusqu'au casier judiciaire de Jack Idema. C'est dire la légéreté des médias US... ou leur connivence avec le pouvoir d'un G.W.Bush. Rather, admiré de partout, gardera cette tâche indélébile dans sa carrière. Un casier chargé, Idema ayant été condamné à près de 4 ans de prison à la suite d'une action en justice menée par le FBI en personne, à propos de la sécurité nucléaire du pays. Alors certes, Idema a été responsable de la désinformation, qu'il avait lui-même créé, mais les médias, par incompétence crasse, lui ont ouvert un véritable boulevard. Au moment même où CBS diffisait le reportage de Rather, Idema purgeait alors une peine d'emprisonnement en Afghanistan !
A chacune de ses prestations télévisées, Idema empochait 500 dollars, et en empochera 1 000 pour faire visiter les grottes de Tora Bora, à partir de son fief du Mostafa Hôtel (ici à droite en photo) somme demandée à chaque journaliste visiteur, une visite guidée faite en évitant soigneusement le complexe bétonné où Ben Laden avait été censé se cacher, avant qu'on ne lui offre sur un plateau le moyen de s'échapper. Le plus surprenant, c'est que ce soit Idema qui ait servi de guide aux journalistes, pour montrer les endroits bombardés... alors que ceux-ci, on le sait, l'avaient été sciemment à côté de la cible principale. Idema avait mené en bateau les journalistes, mais en plein désert (*)
"Selon les journalistes, les voyages incluaient des conférences de presse avec Idema lui-même. Certains des médias ont montré l'entreprise extraordinaire d'Idema. Dans un des cas, il aurait attiré un chef de guerre local nommé Hazrat Ali dans un hôtel de Ghar Spin, près de Jalalabad, pour une conférence de presse et les journalistes, à qui il demandait 100 dollars de participation. Il est apparu plus tard qu'il avait dit à Ali que les journalistes étaient responsables du Pentagone". Mentir, Idema n'avait fait que cela toute sa vie. "Il n'est pas difficile de comprendre pourquoi Idema - un agent du gouvernement auto-proclamé à la langue agile, au regard frappant, et un amour de la scène - ferait appel à des journalistes qui, à la fin 2001, avaient versé dans une guerre désespérée pour obtenir des témoignages en Afghanistan. La guerre était menée en grande partie par des soldats des Forces Spéciales, qui se disaient "professionnels", des gens plutôt calmes, qui évitaient assidûment la presse. Le manque d'information avait donné naissance à un sentiment d'urgence. « Les médias étaient dans une frénésie », explique Ed Artis, de Knightsbridge International. "Ils ont fondu les uns les autres sur n'importe lequel à interviewer, s'ils tombaient sur quelqu'un pour l'accepter". Idema semble également avoir capitalisé sur la dépendance croissante de l'armée américaine avec les mercenaires, et la confusion avec laquelle ils pouvaient parler au nom du gouvernement" .
Dans le reportage de Rather, Idema avait été associé à la "recherche de Ben Laden". Il avait été présenté comme "ancien béret vert" et un membre des "forces spéciales". Un autre reportage, où il apparraissait, sur une autre chaîne s'intitulait "Inside al Quaida"... où l'on pouvait voir les amis d'Idema jouant le rôle de terroristes présumés. Bref, rien n'avait été fait pour mettre fin à ses délires, tout au contraire. On lui avait déroulé un tapis rouge pour qu'il raconte ses forfaits comme étant des exploits individuels, sans jamais chercher à les vérifier. Comme point d'aboutissement, on avait même eu droit à la torture filmée d'un de ses otages, présenté comme "terroriste", alors qu'il s'agissait d'un simple chauffeur de taxi qu'il avait enlevé à Kaboul. Le plus étrange, ou le plus idiot, étant que cette vidéo s'était retrouvé dans une bande vidéo signée Al-Qaida, dénonçant les tortures des soldats américains, ce que n'était plus depuis longtemps Idema.
Résultat, Idema était devenu rapidement un habitué des plateaux télévisés. "Après seulement deux mois de présence en Afghanistan, Idema a prétendu avoir trouvé ce qui allait devenir la pierre angulaire de ses médias offensifs : sept heures de séquences qui montraient prétendument les camps d'entraînement d'Al-Qaïda en action. Rapidement, Idema avait vendu ces images vidéo à plusieurs publications et avait demandé à l'agence William Morris d'en vendre aux enchères les droits de diffusion, pour la première fois aux États-Unis. L'intention était de vendre les bandes au plus offrant à des conditions qui seraient finalement déclarées satisfaisantes pour M. Idema, expliquait une lettre signée par Wayne S. Kabak, chef de l'exploitation de William Morris, et remis en main propre à Fox News à New York le 9 janvier - un jour avant que la vente aux enchères prévue n'aît lieu. Les termes inclus donnait Idema "comme la personne qui s'est procuré ces cassettes" et "le droit de refuser toute soumission à moins de 150 000 dollars"." Ces conditions exorbitantes, ainsi que le sombre passé de Idema, ont provoqué une pause dans les réseaux. NBC Nightly News a été rebutée par le prix exorbitant et le manque de signes d'authenticité, comme le logo d'As-Sahab, la maison de production vidéo d'Al-Qaïda, qui apparaîssait sur les communiqués de bandes d'Al-Qaïda destinées au public.
"Il n'y avait pas moyen de les vérifier", explique Robert Windrem, producteur d'enquête pour NBC Nightly News. « C'était soit vous faites confiance à Jack Idema soit vous ne les aviez pas." Faire confiance à un individu qui avait été exclu de l'armée après un rapport très clair du Capitaine John D. Carlson sur ses incapacités notoires : un rapport de 1994 d'un centre de formation militaire de Caroline du Nord où il avait tenté de se ré-inscrire avait en effet cité un évaluateur décrivant Idema comme "l'homme le plus démotivé, non professionnel et immature que j'ai jamais connu", et une lettre de réprimande qui accompagnait son lourd dossier présentait Idema comme faisant preuve "d'immaturité brute, caractérisée par l'irrationalité et une tendance à la violence." La réprimande étant venue après qu' Idema ait "tenté d'attaquer physiquement un officier supérieur."
Idema avait pourtant sévi avant. "Certains d'histoires d'Idema peuvent être vérifiées. Au cours des années quatre-vingt, il a formé des gardes pour protéger les intérêts du gouvernement des États-Unis en Haïti, et il a travaillé dans une certaine mesure avec l'armée thaïlandaise, des exploits étayés par des documents qui m'ont été fournis par son ancien associé en affaires,Thomas Bumback. Pendant cette période, Idema et Bumback dirigeaint une entreprise qui a supervisé une école de formation de contre-terrorisme, le Groupe Counterr, dans l'État de New York, qui s'adressait à un large éventail de clients, dont le fils du président d'alors, Ron Reagan Jr. Alors qu'il effectuait sa lutte contre le terrorisme dans son école de formation, Idema a également accumulé un nombre impressionnant de démêlés avec la justice, y compris un arrêté de 1982, concernant une accusation de possession de biens volés, une charge de 1986 pour résistance à l'arrestation et une agression avec l'intention de blesser physiquement, un arrêté de 1988 pour conduite désordonnée et une arrestation en 1990 pour voies de fait impliquant une arme à feu. Mais les dossiers fédéraux indiquent qu'il y avait absence de condamnations dans ces cas".
Counterr Group, présenté ici sur une chaîne de télévision, avec un responsable se faisant appeler "Keith Idema" (le vrai prénom d'Idema, qui s'appelait en réalité Jonathan Keith Idema) , portant un uniforme singeant celui de la police new-yorkaise, de façon grotesque. L'entraînement se passait près de "Poughkeepsie", dans l'état de New-York, affirmait la bande vidéo. Comment a-t-on pu laisser dans la nature pareil mariole laisse pantois. On y montrait le sauvetage d'otages... alors qu'Idema, en Afghanistan, sera accusé d'avoir l'auteur de prises d'otages ! La vidéo plutôt pompeuse, se terminant sur les mots "professionnalisme", "compétence" et "dedication" ... qui signifie "dévouement" !!!
Devant ce qui était bien un chantage à propos d'éléments invérifiables, "CNN a reculé précisément parce qu'elle a décidé qu'elle ne pouvait pas faire confiance à Idema. Cela s'est passé après que l'analyste du réseau de la sécurité nationale, Ken Robinson, ait recherché sur Google et LexisNexis et avait découvert que non seulement Idema avait un casier judiciaire, mais aussi aimairt beaucoup se battre lors des poursuites judiciaires. En plus de refuser les bandes, le réseau a décidé de fuir Idema comme source. Il fut le seul réseau à le faire." Parmi ceux qui n'avaient pas eu ce genre d'état d'âmes, les présentateurs proches des faucons américains, telle l'ineffable et droitière Katie Couric, qui recevra Idema en mars 2003 en qualité "d'expert du contre-terrorisme" pour parler de ces fameuses bandes enregistrées. Une des scènes montrait "des membres présentés comme d'Al-Qaida terrorisant une école pleine d'enfants".
Sans que cela ne provoque de remarques particulières de la part de Couric. Présenté parfois comme un "béret vert", Idema ne l'avait été que quelques mois et avait quitté l'armée depuis le 27 janvier 1984... Le magazine Rolling Stone tombera aussi dans le panneau, en le présentant en 2005 comme un ancien des forces spéciales, à l'époque où il était le roi du Mostafa Hôtel, à Kaboul, où se croisaient tous les mercenaires du coin. C'est là où Idema recrutera ses "associés" preneurs d'otages, qui "scotcheront" ces derniers dans une cave avant d'appeler leur famille pour obtenir une rançon...
Un Rolling Stone qui mettait cependant le doigt à l'époque sur la proximité effarante du "félon" convaincu avec le pouvoir à Kaboul, comme il l'avait été dans les années 90 avec le pouvoir de Reagan : "Croisant autour de la ville dans son SUV aux vitres teintées, son AK-47, sa barbe et son presque semblable uniforme de l'armée américaine, Idema a réussi à convaincre un nombre étonnamment élevé de personnes à Kaboul qu'il était un chasseur de terroristes ayant des connexions avec les unités les plus secrètes de l'armée américaine. La chose la plus étrange de toutes est qu'Idema, un escroc reconnu coupable qui a fait quatre ans dans une prison fédérale dans le milieu des années 90, dit la vérité quand il dit que sa chasse aux terroristes à Kaboul était connue à la fois à des niveaux élevés du gouvernement afghan et dans le monde trouble de renseignement militaire américain. Qui plus est, il peut effectivement avoir perturbé un complot visant à assassiner des fonctionnaires dans le gouvernement afghan et perpétré des attentats à Kaboul." Un portrait trouble qui fait d'Idema la tête brûlée idéale pour être manipulée par des services secrets désireux de ne pas effectuer eux-mêmes certaines interventions. Idema, emprisonné à Kaboul, dans la prison de Pulacharke, bénéficiera en effet d'un séjour assez particulier, doté d'un confort dont ne disposaient pas les autres prisonniers : sur le blog d'un de ses relais publicitaires, celui des "SuperPatriots", il indiquait, photos à l'appui, qu'au milieu de sa "cellule", il disposait de "davantage de moyens de communications satellitaire que Karzai" ! C'est dans cette prison qu'il se fera interviewer par un journaliste anglais faisant un reportage sur les mercenaires. Dans une des vidéos lors de son procès, on verra l'ancien ministre de l'éducation Afghan Yunus Qanooni remercier Idema d'avoir arrêté deux personnes et lui promettre de l'aide dans le futur pour d'autres opérations du même genre. Au même procès, Idema clamera qu'il était en relation directe avec Heather Anderson, l'Acting Director of Security du Pentagone.
Idema, et sa manie de faire des procès, comme celui engagé contre Cathy et Gary Scurka, scénaristes de chez DreamWorks du film "The Peacemaker" en 1997, dans lequel George Clooney passait pour un militaire confronté à une menace terroriste nucléaire, justement, et chargé de rechercher des armes nucléaires miniatures en Lituanie. Idema avait clamé que le personnage de Clooney avait été copié sur sa personne ! Car Idema, revenait bien de Lituanie, dans les années 90, mais comme mercenaire et non comme béret vert, ce qu'il n'était déjà plus depuis plus de 15 ans déjà. Comme j'avais pu l'écrire ici-même en octobre 2009, "en 1992, de retour du Kosovo et de Lituanie, il avait pourtant déjà défrayé la chronique en clamant lors d’un conférence publique qu’il possédait la preuve de l’existence de bombes atomiques miniaturisées, celles qu’il aurait justement vues en Lituanie lors d’un de ses séjours de mercenaire (déjà). Evidemment, le discours étonnant à peine terminé, deux hommes étaient venus le voir en douce : un du FBI et un de la CIA en lui tenant un discours simple : "ok, bel exposé, c’est très possible, mais il nous faut maintenant les sources". Idema s’étant refusé à les donner, avait alors été envoyé directement en prison pour fraude et trahison.... pendant trois années !"
Ce premier film, toujours réalisé par Scurka, "The Worst Nightmare", expliquait cette théorie du complot sur le vol d'uranium en lituanie et sur les "suitcases bombs". Scurka, au départ étant le réalisateur des reportages chez CBS pour Dan Rather et "60 minutes".
Un second téléfilm tout à sa gloire, "Any Lesser Man", réalisé encore par Gary Scurka, celui à qui il fera un peu plus tard le procès sur The Peacemaker, et filmé par Edward Caraballo, le cameraman qui se retrouvera en prison avec Idema, débitera lui aussi un air de complot mondial, accusant ka CIA, illustré musicalement par du Stevie Ray Vaughan, où l'on voyait un Idema en uniforme des forces spéciales, auxquelles il n'avait jamais appartenu, avait été diffusé aux USA. La "preuve" de son appartenance présumée se résumant au témoignage d'un responsable de mercenaires lituanien arborant un couteau "des forces spéciales" offert par... Idema. Un objet que l'on trouve pour une somme dérisoire sur Internet. Tout le cirque d'Idema sur un prétendu trafic d'armes nucléaires lituanien reposait sur ce genre de témoignages factices. Idema, un temps, vendra sur Internet du matériel pour fans de paintball au nom d'Idema Combat Systems.... les sites du genre annonceront son décès. Scurka et Idema auront plus tard en projet un film sur le cas du Colonel George Marecek, des Forces Spéciales, qui avait assassiné sa femme. CBS refusera le procès quand la chaîne s'apercevra que les deux lascars avaient ouvert un site Internet s'intitulant "Free Marecek". Le site devint après "Point Blank Network News", ou PBN.
Les "sources" d'Idema étant les racontars d'un sénateur américain douteux, Curt Weldon, car lui-même impliqué dans la vente d'armes ; notamment les chars ex-soviétiques "refurbishés" revendus à l'armée irakienne ou proposés repeints à neuf... à Kadhafi. Aucune preuve n'a jamais été apportée de cette prétendue bombe-valise. Dans les vidéos de l'époque tentant de montrer que le premier revendeur de ces chars ukrainiens, puis hongrois cette fois, Dale Stoffel, qui avait été le premier a détecter le juteux filon, avait été tué par Al-Qaida, on retrouvait des gros bras fort proches des amis d'Idema du Mostafa Hôtel. Et au bout de l'opération le sénateur Curt Weldon, celui qui a avait le premier lancé la légende de la bombe valise. Weldon, "vice chairman of the House Armed Services Committee", membre du "Homeland Security Committee",
et sa société Defense Solution, où l'on retrouvait les ex-généraux devenus consultants, dont Barry McCaffrey, administrateur du groupe de mercenaires de DynCorp. Quels ont été les liens entre Idema et le groupe de mercenaires, ou avec les sbires de Weldon, on ne le sait. Quels ont été ses liens avec la presse, idem : le New-York Times n'avait-il pas fait de son livre "The Hunt for Bin Laden" une de ses meilleures ventes (150 000 copies !) ? En le plaçant au passage comme "béret vert", ce qu'il n'était plus depuis quinze ans séjà ?
"Le 17 Janvier, CBS 60 Minutes II a publié une émission à partir des bandes. Dan Rather s'est rendu en Afghanistan pour interroger Idema et visiter le décor poussiéreux, criblé de balles appelé Mir Bacha Kot, où le tournage avait été fait. À une époque où les travailleurs étaient encore à passer au crible les débris mêlés du World Trade Center, l'histoire a renforcé le sentiment dominant de panique.
Les hommes en tuniques camouflées et aux masques de ski ont été présentés en train de prendre l'assaut des bâtiments, ont mis en scène des fusillades, et ont fait le siège de terrains de golf. Parfois, les hommes riaient, comme s'ils répétaient les manœuvres, ce qui plutôt interprété comme la preuve qu'ils effectuaient leur mission sombre avec "joie". Le film contient également de nombreux échanges en anglais, "un signe", ont dit plutôt les téléspectateurs, "comme quoi ils veulent réaliser des scènes comme celles de l'Ouest". Sans jamais imaginer que derrière les masques, il pouvait y avoir des américains déguisés, les amis de Jack Idema. "Vous aviez tout faux, Jack" dira de lui fort justement Rachel Maddow, l'une des rares à avoir fait depuis un sujet télévisé sur sa disparition. L'une des rares à avoir dénoncé auparavant avec virulence également les agissements du désinformateur. L'une des rares à avoir fait son travail, tout simplement. Entre octobre 2001 et juin 2002 l'histoire de Jack Idema était apparue sur près de 1000 journaux US et lui-même invité dans près de 250 shows TV ... visiblement, Idema avait servi une intention !
En juin 2007, libéré de la prison de Kaboul (où au départ il avait été condamné à 10 ans d'emprisonnement !), il avait réussi à mettre en scène son départ du pays, en se présentant à nouveau comme membre des forces spéciales... aux soldats afghans présents sur le tarmac où l'emportait un Ill-76 comme ceux que faisait voler dans le pays... Viktor Bout. Y était cité notamment le général Shamir, "un des commandants sous les ordres de Massoud" selon le site hébergeant la nouvelle. Impossible à vérifier. Le 22 novembre 2008, Jack Idema on apprenait qu'il avait épousé au Mexique une dénommée Penny Alesi, l'héritière d'un magnat de Dubaï, qui ne semblait pas avoir toute sa tête à elle, n'ayant pas remarqué qu'Idema entretenait des relations homosexuelles avec ses serviteurs, ou ceux rencontrés à la Casa Arabia Sex House, lieu de rencontre d'homos et de travestis, et endroit où circulait à fond de la cocaïne des cartels mexicains. Le 30 juillet 2010, le beau mariage romantique prenait fin : Penny Alesi portait en effet plainte contre Idema.... pour tortures physiques. Idema répondant aux accusations via un blog, Cao's Blog, tenu par une dénommée Lynn Thomas, qui depuis toujours avait entretenu sa légende de soldat de fortune. Le site ultra-conservateur a disparu depuis (Lynn Thomas est réapparue sous un autre nom ici, avec un hommage en deux chansons-idiotes- envers Jack Idema et une page dédiée, et un peu plus loin une page en way back). Il était également à l'origine de celui d'Idema, appelé "Superpatriots" : on peut pensez que Lynn Thomas n'était en fait que le prête-nom d'Idema. Un Idema qui aura droit à un site moquant ses exploits, intitulé StuporPatriots !
On l'avait en effet retrouvé au Mexique, à Bacalur, grossi, bouffi, déjà malade, ingurgitant par jour des quantités astronomiques de médicaments, Sida oblige, les cheveux longs, en train de singer cette fois l'art du Katana (du nom de la forge où le sabre est fabriqué) le maniement rituel du sabre japonais des samouraïs. Une grotesque prestation, correspondant bien a ce qu'il aura été toute sa vie : un véritable pantin. En 2009, il avait commis un accident de la route qui avait détruit son véhicule : selon lui, on avait essayé d'attenter à sa vie ! Bien sûr, pourrait-on dire... Un fêlé, complet, à qui on a donné bien trop d'importance, qui aura été manipulé toute sa vie, et qui est mort dans l'indifférence totale de ceux qui l'avaient déifié à la télévision. Sa fin sera parfaitement à son image déjantée et excessive en tout. Il serait en fait mort en janvier 2011, et son décès n'aurait été annoncé qu'en novembre, la presse américaine s'emparant de la nouvelle trois mois après encore : on s'était beaucoup moins empressé à annoncer sa fin qu'à présenter en "exclusivité" ses diverses frasques et ses vidéos trafiquées ! Idema mort, son corps avait été retrouvé à moitié dévoré par sa chienne, Nina, rapportée d'Afghanistan. Une fin à son image : celle d'un pantin retrouvé désarticulé et démembré. En annonçant sa disparition, le New-York Times fera comme épitaphe un texte en forme d'avertissement arrivé après coup : "Idema était de la fabrication pure, et sa mort nous rapproche de la fin d'une ère bizarre quand des fraudes de sociopathes pourraient être prises au sérieux simplement parce qu'on regardait chez eux leur côté militaire. Une barbe et un uniforme kaki ? Vérifiez. Un pistolet attaché à la jambe ? Vérifiez. Le look, plus son impudeur et égocentrique histoire auto-proclamée, lui ont apporté un moment de gloire qu'il n'atteindrait presque certainement plus, en ces temps plus blasés et plus éclairés". Je ne suivrai pas la conclusion tardive du journal, qui l'avait tant encensé, en lui faisant vendre son livre-phare, car je ne suis pas si sûr que ça ne puisse pas remarcher encore... ce genre de cas extrême de manipulation des médias. Jack Idema restera plutôt l'exemple même de la duplicité de l'information vis à vis d'une guerre. Cette duplicité est loin d'être terminée, lorsqu'on observe ce qui a pu être dit lors des derniers conflits comme celui en Libye ou actuellement en Syrie, où une forme évidente de manipulation sévit encore ouvertement, pour le second. Des Jack Idema, il y en a hélas d'autres qui sévissent et qui séviront encore si l'on ne demeure pas vigilant.
(*) Un Jack Idema faisant visiter Tora Bora... mais en sachant beaucoup sur l'itinéraire de Ben Laden, semble-t-il : dans "The Shadow Warrior", l'article de Rolling Stone, sorti en mars 2005, il avait envoyé toute une série de faxs affirmant qu'il savait où se cachait Ben Laden, en citant comme lieu de cachette Hayatabad, dans les faubourgs de Peshawar, au Pakistan. On sait qu'on retouvera paraît-il Ben Laden à Abbotabad, qui n'est situé qu'à 150 km (en ligne droite) de Peshawar. Or là encore, Idema ne s'était pas cassé la tête : Peshawar avait toujours été le fief de Ben Laden, car c'est là où il avait fait sa célèbre annonce de 1988. Il y était arrivé en 1982 ! En 2006, la télévision US (NBC) montrait une vidéo d'un des camps de Ben Laden prise d'un drone, mais en Afghanistan, avant le 11 septembre 2001 dans sa ferme de Tarnak. Les vidéos de Ben Laden, descendant dans les montagnes, parmi les plus connues, visibles dans le reportage, montrait Ben Laden clairement dans les environs d'Abbotabad, filmé avant 2002. Il n'aurait donc pas bougé ou si peu depuis... 29 ans. Et ça, il n'y avait pas que Jack Idema qui le savait... même dans le "Guide du routard", on peut lire depuis des années cette affirmation à propos de Peshawar : "des rumeurs circulent, selon lesquelles Oussama Ben Laden et le mollah Omar, le chef spirituel de la milice talibane, auraient trouvé refuge dans cette zone tampon entre l’Afghanistan et le Pakistan. Cette zone tribale où ni la police ni l’armée pakistanaise ne se risquent plus depuis les escarmouches de 1996. Ces territoires, appelés aussi “ Agencies ” (agences), présentent pour les miliciens intégristes afghans de gros avantages. Ils sont d'abord peuplés de tribus pachtounes, qui s'identifient sans problème aux anciens maîtres de Kaboul. Ils offrent en outre de nombreuses caches, idéales pour des guerriers harcelés par les troupes de l’Alliance du Nord. Certains endroits ne sont en effet accessibles que par hélicoptère. Et les réseaux souterrains d’irrigation constituent de formidables bunkers pour s’abriter lors de frappes aériennes."
les deux articles sur Jack Idema :

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