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Accueil du site > Tribune Libre > Les nouveaux kémalistes dans l’erreur

Les nouveaux kémalistes dans l’erreur

Il y a quelque temps, je me suis retrouvé face à une affiche de propagande mettant en scène deux soldats se battant sur le front des Dardanelles. Le slogan qu’ils étaient censés illustrer était le suivant : "Lorsqu’il est question de la patrie, tout le reste n’est que détail..."
Par détail, entendez ici démocratie et droits de l’homme. Venons-en donc à tous ces détails dans le cadre de la Turquie moderne et contemporaine.

Par Baskin Oran

J’ai déjà largement commenté les rôles et relations réciproques de "l’indépendance" et de "l’occidentalisation" au sein du kémalisme, cette idéologie de la modernisation en Turquie portée par le fondateur de la République Mustafa Kemal Atatürk (voir l’article sur 335 sur mon site ou sur celui de Turquie européenne). Mais ce que je souhaite évoquer à partir de cette triste affiche, ce sont les états dans lesquels est aujourd’hui tombé ce kémalisme dont la première marque de fabrique a pour nom "la civilisation moderne".

Je parle "d’états" au pluriel pour une raison bien précise : quand dans les années 1920, Mustafa Kemal s’est lancé dans ses réformes et révolutions, il a repris le modèle occidental (celui d’Europe occidentale) tel quel et sans complexe aucun. J’insiste bien là-dessus : tel quel. Or les kémalistes d’aujourd’hui sont comme une sorte d’antithèse à Kemal lui-même.


Il me suffirait d’ailleurs d’évoquer deux points pour étayer cette thèse :

1) Sans faire aucune distinction entre l’Europe et l’Amérique, ils sont explicitement animés d’un anti-occidentalisme. Et ce sentiment d’hostilité traîne derrière lui, bien naturellement et de façon parfaite, une véritable haine des droits de l’homme. La même que sur l’affiche évoquée plus haut.


2) Dans un second temps, ils dévient ouvertement la laïcité de ses principes.

- a) M. Kemal, alors que le coeur de la Révolution était encore tout chaud, avait compris et appliqué la laïcité comme une arme destinée à briser le pouvoir des anciennes élites (les oulémas) et la force de cet islam figé dont ils étaient les meilleurs représentants. C’était un comportement normal et nécessaire en période révolutionnaire.
Or les "kémalistes" d’aujourd’hui, en excluant systématiquement cet islam qui, en Turquie,a commencé à se doter d’une bourgeoisie, qui a entamé une évolution sociale, qui se déglace peu à peu grâce notamment à son sens du commerce et de l’exportation, n’ont de cesse d’entraver cette évolution même.

En attaquant en Justice ceux qui organisent des rituels religieux chez eux au nom de la Loi sur les couvents, ils en viennent même à empêcher l’islam au plus intime de la vie privée. Et d’ailleurs, dans le cadre du Forum des Affaires internationales auquel participent des entrepreneurs de tout le monde musulman, la Müsiad (patronat turc anatolien et conservateur, ndlr) qui n’avait pas peu commencé à évoluer ces derniers temps, renoue depuis peu avec des messages anti-occidentaux (Milliyet, économie, le 23-11-2006).

- b) Mustafa Kemal avait essayé d’extraire l’élément musulman de la définition du "Turc" : il avait tenté de différencier la nation et la religion. Or les “kémalistes” d’aujourd’hui font tout ce qu’ils peuvent pour mêler inextricablement ces deux notions. Je l’ai déjà expliqué à maintes reprises : nos "hyper kémalistes" institutions judiciaires ne dérogent pas à cette tendance (cf. mon livre sur les minorités en Turquie, ou encore mon article n°317). Si dans cette configuration des choses, les "kémalistes" d’aujourd’hui ne renforcent pas l’islam, que font-ils ?

- c) Dans un troisième temps, les "kémalistes" de l’an 2000 ont fait du principe de laïcité qui leur a été légué un instrument qui leur permet de rendre les plus pieux des croyants musulmans hostiles à l’Etat et de mener une politique de discrimination à l’endroit des citoyens turcs non musulmans. Le Conseil de contrôle de l’Etat rattaché à l’autorité d’une personne pour qui j’ai le plus grand respect, Ahmet Necdet Sezer (président de la République, ndlr) a abordé cette question des biens des non-musulmans sous le titre des "biens étrangers". Pardon, Monsieur le Président, mais comment avez-vous pu laisser s’écrire une telle chose ? Puis nous nous sommes rendus compte que le président lui-même, au moment de la ratification de la nouvelle législation sur les biens des minorités non musulmanes, avait décidé d’opposer son veto aux quelques articles susceptibles de quelques avancées bien limitées dans la réparation des injustices commises dans ce domaine...(Article 339).

***


Les "kémalistes" de notre belle époque, tout autant que l’islam dans son rapport à la période de Mahomet, vivent en plein dans et par le mythe de l’âge d’or : "Ah Atatürk, ah Atatürk ! Combien peux-tu nous manquer ! Qu’ils étaient beaux heureux les temps où tu étais parmi nous !"

Nous sommes ici affrontés à un kémalisme donnant dans la littérature de cet âge d’or qui, comme toutes les idéologies qui font obstacle aux adaptations nécessaires aux temps actuels, est restée figé et complètement incapable de se réformer. Par là, ce discours de nos "kémalistes" a vraiment fini par ressembler à celui tenu par l’islam. A tel point d’ailleurs qu’ils différencient leurs "hadiths" (traditions du prophète, ndlr) entre les aprocryphes et les autres.

Ceux qui sont incapables d’ajouter ne serait-ce qu’une seule brique à l’édifice de Mustafa Kemal se voient dans l’obligation absolue de prévenir toute évolution au cri de "la patrie en danger". En islam on ne dit d’ailleurs pas autre chose : "la religion en danger".


Dans le même temps, être dans l’incapacité de la moindre évolution conduit, à l’instar de cette "charia (loi islamique) de circonstance" en islam, à vouloir tordre méchamment le cou aux règles de droit. J’aurais pu tout imaginer mais jamais qu’on pût aller jusqu’à produire des commentaires donnant la prééminence au quorum sur la majorité dans le cadre de l’élection présidentielle (celle-ci a lieu au sein de l’Assemblée en Turquie : le parti d’opposition cherchant à entraver l’élection du premier ministre Erdogan à la présidence de la République en mai prochain a récemment menacé de boycotter le premier tour de cette élection pour invoquer la question du quorum nécessaire devant la Cour constitutionnelle. Une condition qui ne figure pas dans la Constitution, ndlr)

Et puis on finit par entendre, de-ci de-là, des choses de ce genre : "Que voulez-vous, le peuple accorde toujours ses suffrages au mauvais parti !"

Après de telles inepties, est-il vraiment surprenant que notre gouvernement enchaîne idioties sur idioties ?


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23 réactions à cet article    


  • erdal (---.---.242.88) 15 février 2007 12:47

    merhaba bey Baskin,

    Je suis d’origine turc mais née en france. La particulrité de la turquie est une société complexe qui navigue entre anti-arabe et anti-occident. Depuis le déclin de l’empire ottoman, une psychose est encrée dans l’esprit turc sur les civilisations qui contourne l’anatolie. Mais malgré cela, je constate qu’elle résiste au mouvement qui la secoue comme les problèmes en irak, russe autrefois, iranien, kurde, grec, et bien dautres. Donc si elle résiste c’est bien qu’il y a un ciment ou derais je dire des ciments, l’un est le pouvoir militaire au sein de l’état, l’autre est l’islam au sein de la population musulmane. Que voulez vous c’est un fait...

    Pour revenir à l’article, il est claire que la situation complexe que représente la turquie amène parfois à des situations jamais rencontrer auparavant, ni par le monde islamique et ni par le monde occidentale, mais ne soyez pas fataliste car les problèmes commencent à être cernés alors que dans le passé personne n’avait connaissance de cet état (grâce à la candidature européenne). Donc on peut constater que c’est une avancée de voir les problèmes et de pouvoir peut être appréhender enfin les solutions (à voir par la suite). Mais, il est vrai que la route est longue mais le potentiel de voir surgir des bas fonds une turquie plus renforcée est possible, rappellez vous l’adage qui dit « ceux qui ne me tue pas, me rend plus fort ».

    Sinon concernant l’AKP, il faut bien admettre que la corruption a été réduite et son déficite économique aussi et en même temps retrouve une croissance économique. De plus le premier ministre actuel a impulsé officiellement la candidature à l’intégration européenne (alors que les autres se contentaient de on verra plus tard), la rencontre avec les russes (jamais vu auparavant) et a remis un peu de solvabilité sur la scène internationale. Bon, il est vrai que l’islam est d’une importance primordiale pour lui, mais n’est ce pas un bon moyen de trouver un équilibre entre pays laïque avec une majorité de musulman (pas encore connu à ce jour) ?

    cordialement/selam

    erdal

    Pour info : Je suis un laïque musulman et non un musulman laïque, cela veut dire que le respect des autres croyances prime sur ma croyance personnel, mais personne ne m’obligera à croire en quelque chose d’autre.


    • Gazi Borat (---.---.164.192) 15 février 2007 13:09

      « Laïcité »

      Si je comprends bien, vous attaquez dans cet article les tenants du kemalisme orthodoxe, à savoir, je pense le CHP (Parti Républicain du Peuple) pour le profit des idées que véhicule l’AKP (islamiste modéré) de Tayip Erdogan.

      D’autres tenants du kemalisme orthodoxe que vous fustigez sont très présents au sein du MGK (Conseil de Sécurité National) qui, selon la constitution, tient en tutelle le gouvernement civil de la Turquie.

      Les 2 soldats des Dardanelles au début de l’article semblent une très claire allusion aux forces armées du pays, ainsi que le choix d’une photo de Mustafa Kemal en uniforme de pacha.

      Dans cet ordre d’idée, il faut savoir qu’en Turquie, le ministre de la Défense reçoit les ordres de l’état major et non l’inverse. Il s’agit donc d’un état bâti selon la conception bismarckienne « l’etat est au service de l’armée ».

      La problématique est donc la suivante :

      - l’etat major est très attaché aux principes de laïcité et très pointilleux sur des détails comme le port du voile dans l’administration ou à l’université, au point (cela s’est déjà produit) de pouvoir forcer à la démission un gouvernement trop réformateur sur ces sujets.

      La pression européenne au sujet des Droits de l’Homme arrive à point pour l’AKP puisqu’elle permettrait de se débarasser de la tutelle du Conseil de Sécurité Nationale.

      Un bras de fer est donc actuellement engagé entre l’armée turque (qui vient d’effectuer une purge d’officiers soupçonnés de sympathies islamistes) et les islamistes modérés de l’AKP que semble défendre, sans les nommer, l’auteur de cet article.

      Le gouvernement tente ainsi de mettre en place un plan de réforme s’attaquant au secteur économique géré par l’armée (Renault Turquie OYAK est ainsi géré par un fond de pension des sous-officiers), au pouvoir des tribunaux militaires (qui ne devraient plus pouvoir juger de civils).

      Le rythme des réunions MGK / gouvernements devrait aussi être réduit de 12 à 6 par ans, etc, etc...

      La position de l’Union Européenne est ambigüe car elle demande à la fois un retrait de l’armée de la vie politique du pays et à la fois s’attache à la défense de la laïcité dont les militaires sont les plus sürs soutiens..

      Rien de bien simple..

      Gazi Borat


      • LE CHAT LE CHAT 15 février 2007 15:06

        Le slogan qu’ils étaient censés illustrer était le suivant : « lorsqu’il est question de la patrie, tout le reste n’est que détails... » Par détails, entendez ici démocratie et Droits de l’Homme.

        c’est la version turque de « on fait pas la guerre avec des enfants de coeur » ? Le bushisme est il une sorte de kémalisme dans ce cas ?


        • Jimmie Danger (---.---.164.192) 15 février 2007 15:13

          « On ne fait pas la guerre avec des enfants de choeur.. »

          Peut se comparer aussi à :

          - " « La révolution n’est pas un dîner de gala ; elle ne se fait pas comme une oeuvre littéraire, un dessin ou une broderie ; elle ne peut s’accomplir avec autant d’élegance, de tranquilité et de délicatesse, ou avec autant de douceur, d’amabilité, de courtoisie, de retenue, de générosité d’âme. La révolution, c’est un soulèvement, un acte de violence par lequel une classe en renverse une autre. » MAO ZEDONG

          Mais Bush n’est pas un grand timonier..

          Jimmie Danger


        • vraitravailleur (---.---.185.213) 15 février 2007 15:44

          Le garant de l’Etat turc laïc a toujours été l’Armée sans laquelle les forces centrifuges de la Turquie (séparatistes kurdes, extrême gauche, extrême droite des loups gris, islamistes etc.)l’auraient précipitée dans la guerre civile et l’éclatement.

          L’appartenance quasi-obligatoire des officiers turcs à des loges maçonniques, dans les grades desquelles ils montent parallèlement à la progression de leur carrière militaire, constitue le meilleur garant de leur laïcité et de leur fiabilité au sein de l’OTAN, où ils rencontrent notamment leurs « frères » américains, britanniques ou français.

          C’est du reste la raison véritable sinon la seule, de l’hostilité foncière de certains milieux catholiques (au Vatican où parmi les candidats à l’élection présidentielle française -suivez mon regard-) à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.

          Il faut se rappeler que c’est après la nomination du cardinal Ratzinger comme préfet de la congrégation de la doctrine et de la Foi en 1981, que celle-ci a renouvelé l’interdit aux fidèles d’adhérer à une obédience maçonnique alors que son prédécesseur, le cardinal Seper, leur en avait donné l’autorisation en 1978.

          Devenu Pape, le cardinal Ratzinger est revenu sur son hostilité à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne, après ses entretien de novembre 2006 avec des chefs religieux chrétiens mais aussi musulmans.

          Néanmoins, aucun politicien français de droite ou de gauche, secrètement hostile à la maçonnerie (spécialement celle d’obédience anglaise (les adeptes du G.A.D.L.U.), n’osera expliquer ses vraies motivations pour refuser l’entrée de la Turquie dans l’Union.

          Ce sera toujours pour une fausse bonne raison selon laquelle les Turcs sont soit trop musulmans, soit pas assez droit-de-l’hommistes, soit encore trop touchés par la guerilla, ou bien alors ce sera à cause du soi-disant lobby arménien, puisque désormais l’alibi de l’hostilité du gouvernement grec a disparu.

          vraitravailleur


          • Gazi Borat (---.---.164.192) 15 février 2007 16:30

            @ vraitravailleur

            Mais alors, le kémalisme constitue-t-il, du côté européen, un obstacle à l’entrée de la Turquie dans l’U.E. ?

            Qu’est-il préférable pour la Turquie : un recul sur la laïcité (qui n’est pas une valeur, loin s’en faut, pour la majorité des pays de l’union) et un retrait politique de l’armée en échange d’une entrée dans l’Union ou le maintien de la situation actuelle ?

            Gazi Borat


          • vraitravailleur (---.---.35.253) 16 février 2007 00:05

            Les militaires turcs, comme tous les militaires, ne semblent pas faits pour communiquer et l’imagination n’est pas encore au pouvoir en Turquie.

            En Europe occidentale, beaucoup d’ intellectuels cuistres voient encore les Turcs à travers les poèmes de Byron ou de Victor Hugo et les tableaux de Delacroix. Pour eux, ce sont encore les redoutables guerriers qui ont battu les Chrétiens jusqu’ à Vienne et ont fait rembarquer Français et Anglais aux Dardanelles. Et puis il y a eu les Grecs chassés de Smyrne, les Arméniens réfugiés à Marseille, l’invasion de Chypre en 1974.

            Pourquoi le gouvernement turc ne fait-il rien pour renverser cette tendance alors que les Grecs eux-mêmes sont prêts à les laisser entrer dans l’Union ?

            Pourtant ce pays a de gros atouts : des personnels hautement qualifiés, des zones touristiques importantes et une population accueillante donnant une image positive des Turcs. Enfin et surtout une forte émigration en Allemagne et en France qui pourrait exercer son influence pour faire entrer la Turquie dans l’Union.

            Mais ce dernier atout, aucun politicien turc n’a trouvé une solution pour l’exploiter. En effet, l’émigration turque étant en grande partie constituée de Kurdes, c’est même l’effet inverse qui se produit.

            Quant à l’armée, elle se contente d’utiliser ses affinités maçonniques avec les autres militaires essentiellement anglo-saxons sans rechercher le contact avec les élus francs-maçons des autres pays européens.

            Combien de députés socialistes français votent systématiquement contre la Turquie (affaire de la criminalisation de la négation du génocide arménien) alors qu’ils ignorent complètement qu’ils votent ainsi contre leurs frères maçons et font le jeu des « curés ».

            Osons suggérer deux solutions dont la seconde a peu de chances d’être appliquée, tant les passions absurdes sont vives :

            - la Turquie devrait perdre tout complexe à étendre son influence sur l’Asie turcophone car ce rayonnement ne peut en aucun cas nuire à son entrée dans l’Europe ;

            - la transformation de la république centralisée à Ankara en une fédération turco-kurde. C’est là qu’Ocalan, comme Mandela en son temps, pourrait trouver une utilité.

            Cette solution permettrait à la Turquie de s’appuyer sur son émigration kurde en Europe pour entrer dans l’Union et de récupérer le Kurdistan irakien avec son pétrole après le départ programmé des Américains.

            De toutes façons, cette solution fédérative s’imposera à terme même si elle est impensable aujourd’hui, comme il était impensable jusqu’à une date récente que le Premier ministre d’Israel embrasse le chef du Fatah.

            Simplement, la Turquie risque de passer à côté de l’occasion de récupérer le Kurdistan d’Irak.

            vraitravailleur


            • murat (---.---.82.153) 16 février 2007 02:21

              Pourquoi veux tu « récupérer » le nord de l’Irak. Le jour où les Kurdes en Turquie se sentiront comme les Bretons en France avec l’avantage d’avoir conservé leur culture et langue, l’oeuvre révolutionnaire du kémalisme aura gagné une énorme victoire. En tant que turc laïc agnostique, je suis contre l’invasion du nord de l’Irak par l’armée turque. La Turquie n’a t-elle pas déjà un territoire assez vaste avec des ressources énormes ? Elle doit pouvoir maintenant régler tous ses problèmes par le dialogue, l’union européenne aurait raison de ne pas intégrer un pays avec des méthodes qui aujourd’hui sont d’un autre âge. Les Kurdes de Turquie doivent avoir confiance à long termes en ce pays. Une très simple remarque : si les turcs en majorité voulaient absolument effacer l’identité kurde et les turquifier de force, ils ne souhaiteraient pas entrer dans l’union européenne.


            • Gazi Borat (---.---.164.192) 16 février 2007 15:57

              @ vraitravailleur

              « la transformation de la république (...) une fédération turco-kurde. C’est là qu’Ocalan, (..) pourrait trouver une utilité. »

              Voilà qui est osé.. mais pas absurde.

              On peut noter que, sur la période 1983-1997 où se situèrent les affrontements les plus durs dans le sud-est anatolien que :

              - Öcallan prit garde à ne frapper que des cibles militaires et qu’il n’y eut pas d’attentats aveugles (voitures piégées, etc..) dans les grandes villes de Turquie.

              - La propagande du PKK ne poussa jamais à la haine entre Turcs et Kurdes.

              - L’objectif d’indépendance fut très vite transformé en projet fédéraliste sur le modèle espagnol.

              Par contre, un projet fédéraliste serait une grave entorse au modèle jacobin que prônait Atatürk..

              Gazi Borat


            • vraitravailleur (---.---.67.185) 17 février 2007 11:45

              Atatürk était avant tout un pragmatique : il voulait sauver ce qui pouvait l’être de la Turquie et la maintenir dans un statut de puissance en la transformant en un état moderne, par des moyens énergiques, impensables aujourd’hui. Il n’avait rien d’un dogmatique.

              S’il était encore là aujourd’hui, il chercherait certainement la meilleure solution.

              Bien à vous. vraitravailleur


            • Zorro (---.---.231.181) 16 février 2007 01:02

              Très franchement, la Turquie on s’en fout... Je suis désolé de le dire aussi directement mais on n’en veut pas ni laïque, ni kémaliste, ni modérée, ni raciste, ni si elle fait des progrès, ni si elle n’en fait pas.

              On n’en veut pas parce que les Turcs font chier. Voilà, c’est dit ! Tout ce qui se passe normalement avec tout le monde devient un problème critique avec la Turquie parce que tout compromis est vécu comme une atteinte à l’honneur, à l’intégrité territoriale, à l’identité turque, à la personne d’Atatruc etc...

              Ya Basta ! Et c’est pas avec de la masturbation intellectuelle sur les curés, les francs-macs, les kémalistes, le pape, cohn-bendit et la reine d’angleterre que vous convaincrez qui que ce soit.

              Que la Turquie commence donc par se retirer SANS CONDITION de Chypre, de demander pardon pour le génocide arménien et on verra ....

              Selam


              • Gazi Borat (---.---.164.192) 16 février 2007 07:38

                @ Zorro

                Vous exprimez un paradoxe :

                - D’une part, vous reprochez aux différents gouvernements turcs qui se sont succédé une tendance au refus du compromis.

                - D’autre part vous ne semblez pas vous-même, par la forme dans laquelle vous vous exprimez, démontrer un goût pour le compromis, voire le dialogue..

                De plus, tout en vous désintéressant du sujet, vous revenez à la charge avec une demande de concessions sur Chypre et le génocide arménien.

                - Le nationalisme intransigeant semblant vous inspirer, on peut le comprendre, un dégoût profond. Mais êtes-vous réellement dépourvu de ce type d’idéologie ? Seriez-vous prêt par exemple, sur demande d’une puissance tiers, à reconnaître d’éventuels crimes de la période coloniale ?

                Gazi Borat


              • murat (---.---.82.153) 16 février 2007 01:34

                Tu dis que tu t’en fous, mais çà t’as pris au moins dix minutes pour écrire tes inepties. Moi, en trois minutes...


                • murat (---.---.82.153) 16 février 2007 01:44

                  Cet article est excellent, c’est un constat que je réalise à chaque fois que j’entends Deniz Baykal du CHP. Comment en sommes nous arrivé à cette contradiction ? J’aurais souhaité que quelqu’un éclaircisse ici cette histoire de liens entre les militaires et la franc-maçonnerie. Car là, j’ai un doute.


                • Gazi Borat (---.---.164.192) 16 février 2007 08:06

                  « Franc maçonnerie et armée turque »

                  La pénétration des pratiques maçonniques débuta dès l’époque des Tanzimat et des réformes opérées dans un but de réorganisation de l’armée, devant le déclin inéluctable de l’Empire qui apparaissait à cette époque. L’orientation choisie fut la voie occidentale.

                  Le phénomène se renforça par les officiers qui étudièrent à l’étranger et commencèrent à constituer une opposition à Abd-ûl-Hamid, et qui, à Paris notamment découvrirent dans la philosophie des Lumières une possibilité pour la Turquie d’entrer dans la modernité.

                  Dès 1909, le Grand orient ottoman, auquel appartenaient de nombreux membres de l’état-major du Comité Union et Progrès,offrit son soutien à la révolution jeune-turque.

                  Celui-ci continua à le soutenir lorsque « Ittihad ve Terraki » instaura un régime autoritaire.

                  Si l’on veut même chercher plus loin dans le passé, les Janissaires (Yeni Ceri) eux-mêmes suivaient une confrérie musulmane, l’ordre des Bektashis, au fonctionnement occulte et qui institua chez eux un certain d’état d’esprit de garants de l’unité nationale.

                  Ceux-ci n’hésitèrent pas à déposer des sultans de la même façon que leurs successeurs effectuèrent des putschs en 1960, 1971, 1980..

                  Gazi Borat


                • Gazi Borat (---.---.164.192) 16 février 2007 13:39

                  « Origines de la franc maçonnerie turque »

                  Pour le lien entre soufisme, bektashis et franc maçonnerie, vous pouvez lire :

                  www.religioscope.com/articles/2002/019_zarcone_fm.htm

                  Gazi Borat


                • vraitravailleur (---.---.241.9) 16 février 2007 08:40

                  à murat : Je n’ai jamais écrit que l’armée turque devait « envahir le Kurdistan irakien ». En revanche, plutôt que de rester dans l’Irak, il est évident que les Kurdes d’Irak préféreront se rapprocher d’un autre état reconnaissant pleinement le fait kurde où le passage de leur pétrole sera davantage garanti.

                  à Zorro :

                  En 1974, Ecevit a envoyé l’armée turque à Chypre parce que Makarios, puis Simpson avaient commencé le génocide des populations turcophones : Une photo d’un charnier de Turcs a même été publié dans France-Soir, mais le sous-titre de celle-ci présentait ce charnier comme un charnier de Grecs.

                  A propos des Arméniens : qu’attend-on pour parler du génocide des Gaulois par les Romains ou du génocide actuel des Papous par les compagnies forestières : le souvenir des Arméniens morts a-t-il plus de valeur que la vie des Papous actuels ?

                  vraitravailleur


                  • Gazi Borat (---.---.164.192) 16 février 2007 09:02

                    @ vraitravailleur

                    « A propos de Chypre »

                    - Vous avez raison pour le début des évènements. Mais la suite est complexe.

                    - Dès la fin de 1973, Mgr Makarios, opportuniste, avait opéré un spectaculaire virage à gauche de real politik en vue de s’assurer le soutien de l’URSS. Il fut rapidement déposé par un coup d’état téléguidé par la junte grecque qui en profita pour proclamer l’ENOSIS ( version grecque de l’Anschluss) à la Grêce.

                    - Dès lors, les populations turcophones de l’ïle couraient un risque certain. L’opération Atila (l’invasion par l’armée turque) fut donc lancée..

                    Gazi Borat


                  • vraitravailleur (---.---.241.9) 16 février 2007 09:38

                    « les populations turcophones couraient un risque certain » : c’est un euphémisme. C’est comme si l’on avait dit en 1938 à propos de l’Allemagne que « les Juifs y couraient un risque certain ».

                    vraitravailleur


                  • (---.---.155.19) 18 février 2007 19:40

                    En 1955, le 6 septembre à Istanbul, les grecs de Turquie ont également couru un grand danger mais là, il y a eu passage à l’action : pogroms, viols, dégradations se sont succédés avec une frénésie sans obstacles avec la neutralité totale de la police (la même qui photographie son héros, l’assassin de Dink) et même son assentiment.


                    • Gazi Borat (---.---.164.192) 19 février 2007 12:43

                      « Pogrome anti-grec de 1955.. »

                      A noter que le gouvernement en place à l’époque (Celal Baylar et Adnan Menderes) étaient de la même sensibilité « anti kemaliste » que celui en place aujourd’hui et opposé à Ismet Inönü, l’héritier de Mustafa Kemal .

                      Il fut renversé lors du coup d’état de 1960.

                      Gazi Borat


                    • (---.---.155.19) 19 février 2007 13:27

                      Certes, mais on a pas vu l’armée grecque voler au secours des malheureux grecs de Turquie pendant les massacres du 6 septembre 1955.....


                      • Gazi Borat (---.---.164.192) 20 février 2007 08:25

                        « Le conflit greco turc »

                        Les relations entre Grêce et Turquie sont complexes. On peut noter l’aide considérable qu’apporta la Turquie à la Grêce lors de la famine de 1941. Si on examine le contexte de l’époque : la stratégie isolationniste adoptée par la Turquie la forçant à vivre en autarcie, le geste n’en a que plus de valeur.

                        Les équipes grecques qui intervinrent durant le récent tremblement de terre d’Istanbul citèrent ce précédent..

                        Gazi Borat

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