Maillé et les « vérités » d’un ancien SS
Dans un documentaire diffusé le soir du Jeudi 23 Juin sur France 2 en seconde partie de soirée, un entretien en caméra cachée révèle le point de vue totalement délirant d’un ancien de la Waffen SS et fier de l’être ! Ces déclarations choc concernent un crime de guerre : Maillé. L’homme témoigne (en off bien entendu) sa haine du gouvernement allemand et une nostalgie du IIIème Reich qui mettent mal à l’aise.

Maillé : un crime sans coupables.
Pour ceux ne connaissant pas les circonstances du Massacre de Maillé, perpétré le 25 Août 1944 par un escadron allemand encore inconnu, le site internet d’une survivante de Maillé, ainsi que la page Wikipédia dédiée au massacre donnent plus d’indications. Le film revient sur la journée d’horreur vécue par ce petit village de 500 habitants (à l’époque, environ 700 aujourd'hui) au sud de l’Indre et Loire (37), alors que Paris se libérait dans la joie au même instant. A l’image du crime d’Oradour-Sur-Glane, Maillé a vu sa population décimée et ses bâtiments détruits, pilonnés au Flak 88 sous les yeux impuissants de la gendarmerie et des locaux, écartés par les tirs de ces soldats enragés. Aucun de leurs noms n’a survécu à ces actes, à peine un écusson, celui de la 17ème Panzerdivision SS. Ces circonstances sont, encore une fois à l’instar d’Oradour, le terreau d’une théorie révisionniste exprimée par le vétéran de la Schutzstaffel dans le film « Maillé, un crime sans assassins », diffusé jeudi soir.
La faute aux anglais
Dans un article de la Nouvelle République du Centre consacré à la présentation du film aux survivants de ce massacre, on peut voir quelques bribes de cette théorie montée de concert entre les différents anciens de la 17ème SS : Pour ce représentant de l'organisation déclarée criminelle lors des procès de Nuremberg, le bombardement de Maillé est un acte de l'aviation alliée. « Les Anglais visaient la gare, ils se sont trompés ». Absolument hallucinant, compte tenu des billets retrouvés sur les cadavres d’habitants signés du tampon de l’armée allemande et du message : « c’est la punission des terroriste et leurs assistents ». En outre, n’importe quel amateur en balistique saurait faire la différence entre l’impact d’un obus de 88 et une bombe larguée par voie aérienne. Mais les zones d'ombre de l'histoire permettent ces suppositions sans contradiction absolue. Selon le journal, le panel de spectateurs a été choqué par cette affirmation digne d’un Vincent Reynouard. De plus, comme pour se discréditer par des justifications contradictoires, l’homme admet aussi au cours du même entretien que l’activité résistante attira l’attention de la Feldkommandantur et que la responsabilité du massacre revient, au final, aux maquisards trop zélés de la région. De pire en pire. Peut-on assister alors à un retour de thèses punies par la loi avec le débat autour des faits commis à Maillé ?
L’enquête allemande
Pour remédier à ces doutes et permettre aux survivants de mettre un nom, un visage sur le malheur de leurs vies, le procureur de Dortmund, Ulrich Mass a lancé depuis 5 ans une enquête avançant pas à pas et qui a déjà donné lieu à une centaine d’interrogatoires, plus de 50 ans après les faits. Non content de troubler le sommeil des 300 octogénaires encore en vie, le procureur a l’opportunité de mettre un terme à ces théories par un procès, comme celui de John Demjanjuk, véritable définition du mot « imprescriptible », particularité du droit allemand sur les crimes de guerre. Des audiences ouvertes au public avec la présentation des preuves encore sous le secret de l'instruction remédieraient au brouillard persistant de doutes autour de Maillé. Pour le Président de l’Association pour le Souvenir du village, Serge Martin, ce reportage pris dans la quête de vérité pourrait peut-être tourner une page, celle de la dernière enquête sur la Seconde Guerre Mondiale en France.
Déjà des coupables ?
Si le banc des accusés est encore vide, des éléments livrés au compte-gouttes par le parquet de Dortmund donnent quelques pistes supplémentaires : des Allemands, Autrichiens, mais aussi des Français, ces « malgré-nous », enrôlés de force dans l’armée allemande auraient pris part au massacre. Peu d’indices et des survivants trop taiseux depuis 1944 pour maintenir l’intérêt des médias autour de cette affaire : Maillé et Oradour-Sur-Glane sont totalement différents à partir de ce point, puisque le village d'Indre-et-Loire s'est reconstruit directement après le drame, pour pouvoir vivre « comme avant », les pierres ne témoignent donc plus. Le déni de la part des habitants eux-même, ce refus de porter au vu de tous ce fardeau, tout ceci a précipité Maillé dans l'oubli, conforté par la symbolique positive du 25 Août 1944, imagé par les Champs-Élysée en fête. Il a fallu attendre 2008 et la visite de Président de la République, Nicolas Sarkozy pour entendre parler de cet autre 25 Août dans les mass-médias souvent amnésiques. Trois ans après cette visite et à la veille de la diffusion de ce documentaire signé Christophe Weber pour Infrarouges (23/06 à 22h40, sur France 2), beaucoup de secrets restent enfouis et laissent cours aux interprétations les plus folles. Dans le descriptif du film, la société Sunset déclare avoir répondu à la question du « comment » et du « pourquoi » avec leur production. Mais pour tout crime, la question principale, la plus obsédante , reste le « qui ? ».
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