Les langues étrangères ne se limitent pas à l’anglais ! A lire certains commentaires ou à voir ce qui se passe dans les écoles primaires, on pourrait en douter, d’autant plus que le temps pris à enseigner des bribes d’anglais - ou parfois d’allemand, et sans que les parents ou l’enfant n’aient eu le droit de choisir... - est un temps pris au détriment du reste, donc aussi de la grammaire ! Va-t-on faire comme le Luxembourg, qui consacre, je crois, jusqu’à 50% du temps scolaire aux langues ? Devons-nous tous devenir polyglottes chevronnés, traducteurs experts ? Et comment faire suivre la logistique, combien de langues au choix ?
Par ailleurs, il est tout à fait normal que le niveau au bac en LV1 soit médiocre : il ne faut y voir ni syndrome français (l’herbe est toujours plus verte chez le voisin), ni mauvaises méthodes, ni enseignement trop tardif, ni manque d’heures, mais le simple fait que l’apprentissage d’une langue étrangère est un énorme travail qu’il est impossible de réussir à l’école sans cours de soutien, sans nounou anglaise, sans contexte familial multiculturel ou sans séjours linguistiques l’été. (et je passe sur les séjours quasi obligatoires des élèves ingénieurs en GB ou aux USA)
Preuve en est que l’apprentissage du français, thème de l’article, nous occupe quasiment à temps plein toute notre enfance et adolescence, voire durant une part de notre vie d’adulte, car qui peut se vanter d’un zéro faute à la dictée de Pivot, ou de maîtriser toutes les subtilités du français ? Une infime minorité. Depuis tout-petits nous entendons répéter qu’ « on ne dit pas comme ça » , qu’on peut garer une voiture mais pas la dé-garer, alors qu’on peut faire et défaire ! Ou bien encore que le mot sentinelle est doté d’un article féminin, même si ladite sentinelle fait son mètre quatre-vingt-dix et ses 95 kg de muscles ! Qu’il faut dire quatre fois vingt plus dix, soit quatre-vingt-dix, alors que nos voisins francophones utilisent le logique et joli nonante ! celui-ci est d’ailleurs légal en France, même sur un chèque, mais quel enseignant l’accepterait d’un de ses élèves ?
Ce mécanisme logique s’appelle l’assimilation généralisatrice, logique naturelle de l’enfance qui tend à généraliser le fonctionnement de la langue dès qu’on a compris un concept. Or, l’apprentissage de la langue dans les premières années consiste à assimiler simultanément ces règles mais aussi en même temps les nombreuses exceptions... Cela nous paraît facile simplement parce que nous avons oublié à quel point c’était difficile, et que nous avons finalement fait un séjour linguistique de plusieurs années, avec un facteur affectif très puissant (qui consolide les souvenirs), d’où vient l’expression « langue maternelle . »
Il est donc totalement illusoire de penser qu’on va apprendre une langue étrangère comme notre langue maternelle, ou qu’on va en apprendre une, deux, trois, quatre, comme on prend des yaourts sur une étagère.
Le fait que le nouveau CECRL (Cadre européen de référence en langues étrangères) soit un peu fumeux, ou qu’il n’existe aucune étude sur le vrai niveau en anglais dans le monde n’est pas innocent : le débat sur les langues étrangères est totalement occulté par le dogmatisme qui règne dans ce domaine.