• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Dudule

sur La vie serait une propriété émergente de la physique (et non de la chimie)


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Dudule 9 décembre 2010 16:09

Plusieurs remarques de physicien (même si je n’ai pas pratiqué depuis longtemps, j’ai fini mes études il y a une quinzaine d’années, mais la physique, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas...), et même de physicien du solide, et on est en plein dedans. Donc, si mes souvenirs sont bons :

_Les phases condensés, à ce que j’en ai appris, sont les phases solide, liquide, et pas mal d’autres phases plus exotiques comme le plasma, les solides amorphes, les polymères, et autres... Mais bon, ce n’est peut-être qu’un question de vocabulaire.

_Les phases loin de l’équilibre sont dites supercritiques, et n’ont rien à voir avec les phases condensées ou non, c’est un autre problème.

_"Nous pouvons définir ici la supraconductivité (ou supraconduction) comme un phénomène caractérisé par l’absence de résistance électrique et l’annulation du champ magnétique.« 
Il s’agit du champ électrique : un conducteur de résistance nulle n’a pas de différence de potentiel entre ses différentes parties, donc pas de champ électrique qui en est le gradient.
Le champ magnétique, lui, est là et bien là, et il accompagne toujours des charges en mouvement : on fait des bobines (électro-aimants) supraconductrices, et le champ magnétique qu’un supraconducteur génère lui-même fini par bousiller la supraconductivité elle-même par effet Hall (en simplifiant...) si l’intensité est trop forte (création de vortex, etc...).

_ Considérer un flux de particules quantiques comme un fluide (et même dans certains cas un gaz parfait) est une approximation féconde qui donne d’excellents résultats. Il s’agit en fait de pouvoir appliquer les statistiques de Boltzman à un ensemble quasi infini de particules quantiques... ça marche très bien lorsque ces approximations sont justifiés : faible interaction entre les particules, approximation du gaz dilué, comme dans la théorie des gaz parfait, donc ça marche bien dans les semi-conducteurs (pas »supra« ), dans lesquels les porteur de charges (...au dessus du niveau de Fermi, donc) sont peu »denses« . C’est un excellent modèle pratique très fécond, en aucun cas une question théorique.
Les bons conducteurs (cuivre ou autres) ont leur gaz d’électrons libres beaucoup mieux décrit par une physique purement ondulatoire. C’est encore plus vrai pour les supraconducteurs, dont le comportement quantique est directement lié au concept de corrélation des fonctions d’onde (paire d’électrons corrélés appariés)... purement ondulatoire, donc.

_Les condensation de Bose-Einstein qui accompagnent les phénomène que vous décrivez (supraconductivité et hélium suprafluide) sont prévus théoriquement depuis le début des années trente. Rien de mystérieux là dedans... sauf pour la supraconductivité qui ne devait pas théoriquement avoir lieu au-dessus d’une température précise (température critique, quelque chose comme 21K, si mes souvenirs sont bons). On l’obtient pour des températures bien supérieures aujourd’hui...

_Je n’ai jamais bien compris cette mode de vouloir à toute force faire entrer la théorie de l’information en physique théorique. Je ne doute qu’elle soit intéressante à un niveau »subalterne« , des ingénieurs et des informaticiens, pour quantifier certains comportements globaux des circuits logiques ou autres, mais de grâce, la thermodynamique n’a pas besoin de béquilles : les second et troisième principes se suffisent à eux mêmes, et ne sont jamais pris en défaut. Il ne faut pas confondre la théorie et la technologie (l’application de la théorie aux techniques), qui peut parfois justifier des raccourcis et des concepts utiles uniquement dans un domaine particulier.

La physique du solide à en effet ceci de passionnant qu’elle est un exemple frappant de la façon dont l’ordre peut émerger du chaos. Mélangez quelques particules en interactions faibles, changez un peut la température et la pression, et paf ! Votre chaos de particules bordéliques se transformes comme par magie en de magnifiques cristaux irisés... et cela se passe de façon, on va dire, mathématiquement très violente et difficile à modéliser (hors équilibre, en fait).
Des paramètres thermodynamiques deviennent transitoirement infinis, la porté des interactions relayée de particules en particules par l’ordre émergeant devient infiniment plus grande que ce qu’elle était lorsque votre particule errait toute seule comme une âme en peine, piégée par l’entropie thermique.

Voir à ce sujet la théorie phénoménologique des transitions de phase de Guinzburg-Landau, facile à appréhender »avec les mains", comme on dit, sans équations compliquées.

Que cette approche intéresse et donne des pistes aux chercheurs qui recherchent les origines de la vie, c’est très bien, ça peut apporter des résultats... ou pas. Qui vivra verra.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès