Bonjour easy
Quand Saramago disait,
tout de suite après l’attentat épouvantable du 11 septembre 2001, que "le
facteur Dieu est la plus criminelle des inventions", c’était une manière
d’exprimer, par un non-croyant, combien les croyants sont dangereux avec le
Dieu auquel ils croient et tel qu’ils le croient, c’est-à-dire conçu par eux à leur image, donc capable des crimes dont les hommes se savent
capables.
Si on pousse un peu
l’observation on voit que les croyants n’en sont pas restés là, ils ont
carrément attribué au Dieu qu’ils
ont imaginé, des intentions criminelles. Ils lui ont fait dire qu’il commandait
des lapidations, qu’il punirait des petits-enfants parce que leur grand-père
avait fauté… Ils lui ont même fait dire qu’il ordonnait très explicitement un
très explicite génocide au moins.
Saramago voit donc, le
11 septembre 2001, une très logique application de "la plus criminelle des
inventions". Je la vois moi aussi mais, sans doute à cause de ma jeunesse
chrétienne je vois aussi, au moins chez le Dieu de Jésus et des Evangiles,
« la plus pacifiante des inventions » et, par conséquent, mon objectif est
d’amener les croyants, les chrétiens au moins, à rejeter leur folle double croyance, celle qui veut que leur Dieu ait commandé le
meilleur et le pire. Je veux
qu’ils ne croient qu’aux commandements du meilleur.
Un an et demi avant
septembre 2001 j’écrivais ceci dans "Désacraliser la violence
religieuse" (que je n’ai pas pu publier) :
" Dans les dernières pages de son livre Le
système totalitaire Hannah Arendt rapporte que Luther
« eut un jour l’audace de dire » que : "il devait exister un Dieu
parce qu’il fallait à l’homme un être auquel il pût se fier". Ce propos
donne une réponse à notre actuelle interrogation : à quoi bon la religion ? Il
la donne d’une manière qui peut nous ramener à une conception de
« l’homme-Dieu », mais sans l’orgueil qu’implique ce concept dans son
expression philosophique dominante.
C’est seulement le meilleur de l’homme qui est Dieu,
pas le pire, pas même le simplement mauvais, pas même le seulement imparfait.
Dieu, c’est le parfait de l’homme, cette part de lui-même à laquelle il aspire
et qu’il sait ne pouvoir atteindre jamais. Mais cette part est si mystérieuse
et si belle dans son imagination qu’il veut lui donner toute la place. Il la
fait toute puissante et infinie. C’est pourquoi il la projette hors de lui-même
et la nomme Dieu. C’est pourquoi il sait qu’il « peut s’y fier ». C’est
pourquoi elle est pour lui absolument sacrée.
L’autre part de l’homme, cependant, celle qui va de
l’imparfait au pire déforme Dieu en permanence. C’est la vie ! Les difficultés,
les fatigues, les angoisses, les égarements de toutes sortes, les nécessaires
combats de la vie déforment à chaque instant la part inconnaissable et
inatteignable de l’homme. Et l’homme se trompe et fait Dieu à son image. Il le
fait même violent. Quand il déraisonne complètement il oublie l’aspiration
merveilleuse qui lui a fait inventer Dieu, et il va jusqu’à sacraliser sa
propre violence qu’il a projetée en lui.
Pire : il dogmatise, il interdit toute remise en
question de cette sacralisation. Il dit aujourd’hui : voici trois mille ans que
nous sacralisons la violence, nous n’avons pas pu nous tromper si longtemps.
Mais c’est seulement la mauvaise part de l’homme
religieux qui s’entête dans cet égarement, qui l’empêche de rejoindre la
société présente de la laïcité et des Droits de l’Homme. C’est d’autant plus
stupide que souvent, l’autre part le sait, ces Droits furent progressivement
imaginés, voulus, exigés par les meilleurs prophètes religieux bien avant les
autres hommes. "