Et en plus ils méprisent la voix du Peuple !
En attendant la reprise des travaux de l’Assemblée Nationale sur le projet de révision constitutionnelle, pour faire suite à « Pourquoi ils ne supportent pas le vote blanc », qu’en est-il en matière de référendum ? Alors que la mise en place d’un véritable référendum d’initiative citoyenne est une demande récurrente des citoyens, malgré les nombreuses propositions d’amendements des députés, l’exécutif y est particulièrement hostile.
Le projet de loi constitutionnelle du gouvernement ne comporte aucune proposition pour redonner du pouvoir au peuple, même l’article 14 transformant le CESE en chambre de la participation citoyenne cantonne la participation aux pétitions et consultations. Il dénie toujours au citoyen son droit de décision inscrit à l’article 6 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. ». L’article 3 de la constitution précise : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum », or aujourd’hui le déclanchement des référendums est soit à l’initiative du Président de la République ou des parlementaires à l’article 11, soit exclusivement à l’initiative du Président dans le cadre d’une révision constitutionnelle à l’article 89.
Comme pour le vote blanc, la demande de référendum d’initiative citoyenne à l’instar du système suisse est récurrente. Dans le sondage d’Elabe de février dernier 73% des français sont favorables à « Instaurer le référendum d’initiative populaire, sur proposition de 500 000 électeurs ». Cette demande est portée par de nombreux collectifs comme par exemple Article 3 membre du clic-ric ou encore RLS. Elle était par ailleurs inscrite dans les programmes présidentiels de Asselineau, Dupont-Aignan, Hamon, Le Pen et Mélenchon et donc acceptée par 52.9 % des votants du premier tour.
Sur les 2399 amendements déposés pour la lecture en séance publique du projet de loi constitutionnelle, 64 amendements abordent le sujet du référendum.
Sur la provenance de ces amendements on trouve 12 FI, 12 LR, 9 LREM (essentiellement venant des députés d’outre-mer, 3 de ces amendements sont cosignés avec un député GDR), 6 UDI, 4 GDR, 3 NG et 18 par les non-inscrits (dont 7 pour le Rassemblement National et deux cosignés avec des députés GDR ou LREM/UDI).
Petit tour de piste des propositions déposées (que vous pouvez retrouver ici en tapant référendum avec en plus 17 amendements qui citent le référendum dans leur exposé des motifs sans faire de proposition sur le sujet)
31 amendements confortent ou élargissent le recours au référendum
On peut noter l’obligation de référendum à plusieurs endroits de la constitution : dans le préambule pour les modifications de la DDHC de 1789, du Préambule de 1946 et de la Charte de 2004 (2406), aux articles 53 et 72 (97, 1185, 82) pour les modifications des collectivités locales ou d’outre-mer, aux articles 53 et 88 pour les traités et accord commerciaux y compris pour l’élargissement ou la délégation de compétences à de l’UE (1160, 184) ou encore à l’article 89 pour les révisions constitutionnelles (1223). On observe aussi la demande d’extension des motifs de référendum à l’article 11 (189), notamment 7 amendements souhaitent inclure dans le périmètre les lois sociétales (1).
18 amendements qui ne font qu’améliorer le dispositif existant
Parmi ceux-ci 11 amendements souhaitent modifier les seuils de déclenchement du référendum d’initiative partagé de l’article 11 qui nécessite aujourd’hui d’être initié par 185 parlementaires puis soutenu par 4.7 millions d’électeurs ! Les seuils les plus bas évoqués sont un groupe parlementaire et 1% des électeurs (692, 1382). On notera aussi 2 amendements interdisant de revenir sur le résultat d’un référendum avant 10 ans (188).
15 amendements donnent réellement de nouveaux pouvoirs aux citoyens
La moitié sont proposés par la FI, on y trouve essentiellement la mise en place d’un véritable référendum d’initiative citoyenne (RIC) à plusieurs endroit de la constitution : dans le préambule pour convoquer une assemblée constituante (1246), à l’article 11 pour des référendums législatifs et abrogatoires (189, 1131), aux articles 6, 24 et 72 pour des référendums révocatoires (1126, 1201, 1177) ou encore à l’article 72 pour des référendums locaux (1182). Etonnamment personne n’a proposé de RIC constitutionnel qui est l’instrument de base au niveau fédéral de la Suisse. De même aucun député n’a proposé d’inscrire le RIC à l’article 3 qui pourtant précise les principes de la souveraineté.
Quelles sont les arguments invoqués par l’exécutif pour rejeter tous ces amendements ?
Les débats s’étant arrêtés le 18 juillet à l’article 24 de notre constitution, seuls 37 de ces 64 amendements ont été examinés en séance publique. Ils ont tous été systématiquement rejetés par l’exécutif. La position de celui-ci peut être résumé par la fameuse phrase de Sieyès dans son discours du 7 septembre 1789 : « Les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie (et la France ne saurait l’être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants. »
Quant à l’argument le plus faux-cul, devant les demandes réitérées des députés d’abaisser les seuils du référendum d’initiative partagée, il revient à la rapporteure LREM Yaël Braun-Pivet, : « Je fais partie de ceux qui se sont longuement interrogés en commission des lois sur la question des seuils. Nous sommes arrivés à la conclusion qu’il n’était pas possible d’affirmer que les seuils ne sont pas les bons, puisqu’à ce jour, aucun référendum n’a été organisé dans ce cadre. Ce processus est encore trop récent, puisque la loi organique n’a été adoptée qu’à la fin de 2013. À ma connaissance, aucune tentative n’a échoué faute d’avoir atteint les seuils exigés. ». Tout cela se passe de commentaires !
Et maintenant ?
Pour être cohérent avec ma lettre ouverte de novembre dernier, j’aurais aimé pouvoir faire un troisième article sur les amendements prônant le tirage au sort, mais à part l’amendement 358 de l’UDI créant un Conseil Supérieur de la Justice avec des citoyens tirés au sort assistant le Conseil Supérieur de la Magistrature, aucune proposition n’a été faite en ce sens. On verra si le sujet émerge avec la lecture au Sénat.
Pour ceux qui voudraient faire « leur part de colibri » vous pouvez signer la pétition pour des états généraux de la démocratie qui fait suite à cette tribune cosignée par une vingtaine de collectifs citoyens. Lorsque les travaux parlementaires redémarreront à l’automne (ou pas ?) vous pourrez aussi soutenir des amendements citoyens auprès de vos parlementaires au moyen de la plateforme Lobby-Citoyen.
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