L’Algérie, le Monde arabe et l’Occident vers la fin d’un cycle historique ?
Cette étude fait suite à la publication précédente dans agoravox tant les commentaires et les contradictions postés ont obligé l’auteur de la reprendre et la développer pour mieux rendre compréhensible les forces historiques en cours dans le monde. (1)
Par ce qu’on peut appeler les universaux qui sont propres à chaque peuple dans leur développement, et en rapport à la géographie humaine et à la conjoncture historique, il y a des peuples qui se développent rapidement, et d’autres moins. Et c’est la raison pour laquelle l’auteur présente ici une approche montrant que ni les systèmes absolutistes arabes ni les systèmes autoritaires républicains arabes ne pourront fonctionner indéfiniment, puisqu’ils ne relèvent que d’un stade de l’histoire, comme tout stade historique passé, présent et futur est transitoire.
Et ce stade aujourd’hui qui est en mutation concerne aussi l’Occident. L’Amérique comme l’Europe sont de plus en plus dépassées par les forces du changement. Le vent du changement leur est aujourd’hui réellement contraire. C’est une réalité de recul historique, de dépassement par de nouvelles forces comme la décolonisation a mis fin à l’ère coloniale. Mais cela ne signifie pas une négation pour l’Occident comme cela a été constaté par le nouveau rayonnement qu’il a eu avec l’ère post-colonisation.
Et pour l’Algérie, qu’en est-il dans cette dynamique historique nouvelle ? Doit-elle espérer un avenir meilleur ? De même le monde arabe doit-il espérer sortir de l’œil du cyclone vu les guerres incessantes qui le traversent. Nous ne devons pas nous tromper, le monde se trouve à une charnière de l’histoire. Posons-nous des questions sur la marche de l’histoire. Peut-on dire que le XIXème siècle ressemble au XXème siècle ? Et déjà la deuxième moitié du XXème siècle ne ressemble pas à la première moitié du XXème siècle. Au début du XXème siècle, une grande partie du monde était colonisée ou sous protectorat. Sur le plan des techniques, le monde était très en retard. La télévision n’existait pas, l’aviation balbutiait encore, les voitures modernes n’existaient pas, ni les camions de transport lourds, ni des marines modernes équipées de missiles intelligents, c’était encore l’époque des cuirassés, la bombe atomique n’existait pas.
Hitler a existé, un homme, un seul homme a changé la face du monde par sa volonté de puissance. Mais cette deuxième mondiale qui a détruit l’Europe et une grande partie du monde, a détruit aussi la colonisation. Sans la Première Guerre mondiale et la Deuxième Guerre mondiale, le monde africain et une grande partie du monde asiatique dont l’Inde, le Pakistan et l’Indonésie, de grandes puissances démographiques, seraient restés probablement encore colonisé. Donc, il y a ce concept de « négation positive ». Sans cette négation que furent les deux guerres mondiales, le monde n’aurait pas avancé.
Mais, à la deuxième moitié du XXème siècle, le monde colonisé ne s’est pas seulement libéré, devenu indépendant, c’est le monde entier qui a changé. Le monde s’est mondialisé, les armes atomiques ont fait leur entrée et ont mis en respect les grandes puissances. Aucune puissance ne s’aviserait d’attaquer une autre puissance sous peine de voir son territoire détruit dans les heures même qui suivent l’attaque. Il faudrait en cas de guerre nucléaire même localisée prier Dieu pour qu’elle ne s’étende pas aux autres puissances et devienne mondiale. Car une guerre qui commence et touche une grande puissance, on ne sait plus comment elle finirait. En clair, toutes les puissances sont prisonnières de leur puissance.
Mais les guerres où se jouent-elles aujourd’hui, et elles sont nombreuses ? Dans le monde arabe et étendues à une grande partie des autres pays musulmans. Et l’Algérie se trouve aussi dans ce monde balkanisé. Sauf que la guerre d’abord en Irak, ensuite en Syrie, a montré les limites des puissances occidentales. Non seulement, elles ont perdu l’initiative mais elles sont en recul. Peut-on s’étonner, c’était prévisible, comme ce qui s’est passé entre la première moitié du XXème siècle et la deuxième moitié du XXème siècle avec la fin de la colonisation, se passe aujourd’hui entre le XXème siècle et le XXIème siècle avec la fin de l’hégémonie occidentale qui s’annonce aujourd’hui.
Le monde a encore changé, le monde est aujourd’hui interconnecté, tout le monde est informé via le WEB. Le monde devient de plus en plus transparent. Le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi le 2 octobre 2018 par les services saoudiens est connu aujourd’hui du monde entier. L'exploit chinois d'alunissage sur la face cachée de la Lune le 3 janvier 2019, a été une première mondiale, l’information est à la portée de tous les internautes du monde.
Donc, qu’en est-il pour le monde arabe ? En particulier pour l’Algérie qui occupe une place importante dans ce monde. Il est évident que le monde arabe est en train de changer, et il va changer, parce qu’il ne se commande pas, il doit suivre la marche de l’histoire. Et aujourd’hui, à son instar, l’Algérie est arrivée à une fin de cycle. Et malgré que globalement la situation n’a pas changé, et ce depuis l’indépendance. Évidemment il existe toujours cette revendication de légitimité révolutionnaire pour les tenants du pouvoir, mais elle est en fin de parcours, elle ne peut pas rester éternellement. Le monde avance, si l’Algérie n’avance pas, les forces de l’histoire la feront avancer. Et les forces de l’histoire peuvent être redoutables.
Certes, le système continuera de gouverner, et combien même il allèguera qu'il s'agit de sécuriser le pays, et donc le système ne change pas, sauf que la conjoncture a évolué et le système a trouvé l'idéologie fondatrice « la sécurité du pays », que les décideurs post-indépendance ont toujours mise en avant pour se légitimer. Cette idéologie tient tant que l’impérialisme d’antan, du temps de feu Houari Boumediene, qui s’est drapé d’un nouvel habit en « instrumentalisant la subversion terroriste islamique » contre les peuples arabes, tient. Mais le problème est qu’il y a une rupture de l’impérialisme qui se précise. La menace extérieure dans ce monde tend à se transformer en menace intérieure. En clair, les peuples sont en train de prendre de plus en plus conscience d’eux-mêmes, de leurs droits légitimes.
Cependant, tant que les peuples arabes n’ont pas été confrontés à une situation historique extrême qui les oblige à changer, à se transformer, pour prendre en main leur destin, à l’instar des autres peuples avant eux – des anciennes monarchies européennes de droit divin qui ont été renversées –, ils continueront à accepter leur statut de sujets des monarques. Mais précisément l’histoire du monde est en marche, et ce qui est préservé et soutenu par les monarques arabes qui sont solidaires entre eux et s’entraident pour se maintenir au pouvoir, et soutenu par les puissances occidentales qui ont fait un marché avec eux, est en train de vaciller, à voir seulement le bourbier yéménite pratiquement sans issue et la sortie de crise en cours de la Syrie au détriment des plans européo-étasuniens et leurs alliés arabes. Et ce sont les aléas de l’histoire qui ne sont pas acquis aux monarchies arabes qui laissent ouvertes les portes du changement, les portes de l’émancipation des peuples.
Les peuples arabes acceptent leur situation tant que les systèmes politiques qui les gouvernent sont opérants, et assurent la paix et la sécurité à leur existence. Et le problème pour les gouvernants est que de plus en plus les peuples arabes se réveillent, et ils l’ont démontré en 2011 avec le Printemps arabe. On dit que ce Printemps arabe s’est transformé en hiver. Mais, après un hiver, peut survenir un autre Printemps. Le monde humain qu’il soit arabe, français, chinois, évolue avec l’histoire. Il suffit de voir le mouvement du Printemps arabe en 2011, suivi du mouvement des Indignés en Occident et, aujourd’hui, les Gilets jaunes en France. Les guerres civiles qui se jouent encore au Yémen, et dans d’autres pays, et ces événements ne préfigurent rien de bon pour les régimes politiques qui gouvernent les pays arabes.
C’est un problème aujourd’hui civilisationnel et à l’échelle mondiale. Donc tous les systèmes qu’ils soient monarchiques de droit divin, de droit héréditaire, républicains n’est opérant que s’ils assurent un minimum de sécurité à leurs peuples. Ce qui signifie qu’ils ne sont pas à l’abri d’éclatement. Tant que le potentiel de « résilience de gouvernance », c’est-à-dire la capacité à répondre aux besoins élémentaires d’un peuple, est suffisant, ces systèmes tiennent.
Aussi pour les nouveaux développements d’aujourd’hui, l’Algérie, par exemple, est un « phare » pour le monde arabe. Elle a devancé, dans un certain sens, les autres pays arabes, dans ses avancées démocratiques qu’elles soient d’ordre politique, le multipartisme, ou d’ordre médiatique, la liberté d’expression. Les partis de l'opposition en Algérie sont de moins en moins une caisse de résonance pour légitimer le système politique. Ils revendiquent réellement la démocratisation de la vie politique et l’alternance au pouvoir. Certes, tout est loin d’être acquis, il reste beaucoup à faire, cependant il y a beaucoup d’espoir dans ses avancées démocratiques. Il ne peut être autrement, c’est « une loi naturelle du progrès » qui régit les peuples du monde, où qu’ils soient et quels qu’ils soient. « L’Algérie tôt ou tard sera au Maghreb ce que l’Allemagne est pour l’Europe. » Ce n’est pas qu’elle le veuille, ou qu’elle le vise, c’est sa place dans l’histoire et la géographie qui la choisira.
Le monde arabe se dirige dans les années ou décennies à venir, vers la constitution de grands ensembles régionaux, il ne peut faire autrement. La conjoncture économique mondiale va certainement être plus difficile, elle a décéléré depuis 2014, et elle continuera du fait du repli des pays occidentaux face à la Chine. Sans unir leurs forces, les pays arabes resteront des « pays-pantins » dans les stratégies des grandes puissances. Cette dissémination de forces vives n’est pas rentable pour les peuples, ce qui explique les crises et les guerres en cascade dans le monde arabe, et leur retard manifeste dans le développement. Et les nomenklaturas arabes sans contre-pouvoirs, sans réelle démocratie, qui profitent des systèmes dans cette décadence.
Il est évident pour que les systèmes absolutistes monarchiques ou autoritaires républicains mutent, il faut pour cela que de grands événements fassent irruption, et changeront l'ordre politique mondial, ce qui infèrera sur les systèmes politiques absolutistes de bon nombre de pays arabes ou des républiques autoritaires arabes. Ni !! les systèmes absolutistes arabes ni les systèmes autoritaires arabes ne pourront fonctionner indéfiniment, ils ne relèvent que d’un stade de l’histoire, qui est « transitoire ». L’humanité n’est pas une entité figée, elle n’a pas été créé pour rester telle quelle. Le Tout puissant a créé une humanité qui doit se développer et grandir et c’est ce qu’elle fait, et que montrent les différents stades de son développement dans l’histoire. Donc il y a une dynamique historique en marche dans l’agencement du monde.
Beaucoup en Occident ou chez ceux qui n’aiment pas l’Algérie, parce qu’elle constitue un « grain de sable » dans leurs plans de domination, affirment ou espèrent que l’Algérie subira ce qu’a subi la Syrie depuis 2011. Ces fous de la pensée font rire tant ils sont aux antipodes de la réalité du monde. Tout le monde a compris que c’est fini pour l’impérialisme occidental, il n’est pas seulement en recul, il est sur la défensive d’être dépassé. Le président Donald Trump l’a lui-même expliqué dans son retrait de la Syrie. Il faut être réaliste, dit-il, sa décision n’est pas seulement sa décision propre, ni la décision de ses conseillers, et on sait très bien qu’il n’est pas un Néron pour mettre le feu à Rome. Il écoute, il réfléchit à toutes les voies possibles à la stratégie américaine de continuer ou de sortir des conflits où il a plus à perdre qu’à gagner. Mais l’histoire est là, elle est sans appel, il a perdu dans son aventure impérialiste dans le monde arabe. L’Amérique comme l’Europe sont dépassées par les forces du changement. Le vent du changement est aujourd’hui réellement contraire à l’Occident. Ce n’est pas une abdication de l’Occident, c’est une réalité de recul historique, de dépassement par de nouvelles forces comme la décolonisation a mis fin à l’ère coloniale. Mais cela ne signifie pas une négation, « quitter des espaces indues » dont on n’a pas droit. L’Occident n’a-t-il pas rayonné après la décolonisation ? Le monde tout simplement se dirige vers un monde plus juste.
Et ce qui se passe pour l’Occident se passe aussi pour l’Algérie. Elle aussi se trouve à une fin de cycle. Elle doit avancer et faire sa mue. Elle doit réussir son dépassement vers une économie moderne, c’est cela l’enjeu. Et une chute des cours pétroliers, c’est aussi une « négation positive » pour l’Algérie. Jusqu’à quand doit-elle traîner ce boulet pétrolier qui ne lui donne que pour survivre, construire, certes, consommer, s’enrichir, mais ne pas s’enrichir avec une économie compétitive, ne pas compter comme les nations compétitives et toujours à la remorque des hydrocarbures. L’Algérie nolens volens doit faire comme les dragons, les tigres asiatiques. Cela prendra du temps, mais elle est en fin de cycle comme les États-Unis, comme l’Occident tout entier est aussi en fin de cycle.
C’est ce que l’on doit comprendre. Et c’est ce qui est difficile à admettre. Pour le système occidental, comme pour le système politique algérien.
Prenons un exemple très simple de mutation du monde, l’histoire du Japon et de l’Allemagne. Tout dépassement de retard civilisationnel ne peut être que d’ordre historique et transcendantal dans la sphère même de l’évolution. Le Japon avec l’ère meiji s’est redressé au XIXème siècle alors que la puissance chinoise n’a pas pu et pourtant, par sa puissance, elle rayonnait sur l’Asie. Et cette puissance ne lui a servi à rien puisqu’elle fut dépassée. Et même, une région très importante de son territoire, la Mandchourie, fut colonisée. Le Japon, en réalité, s’érigeait en « grain de sable dans l’ordre colonial en Asie », comme l’Allemagne s’érigeait en « grain de sable dans l’ordre de puissance en Europe ». Et cela relevait des « lois de la Nécessité » pour que l’histoire de l’humanité ne stagne pas dans un système colonial rétrograde pour tous les peuples colonisés et comme pour les peuples d’Europe qui sont une même humanité, et donc solidaire.
Et le même processus est en cours aujourd’hui, une mutation mondiale et des systèmes féodaux arabes qui rompront l’arrimage des peuples à cet ordre archaïque moyenâgeux moyen-oriental, et que le président américain, Donald Trump, se vante dans les médias que, sans la protection de États-Unis, ces monarchies du Golfe seraient renversées par leurs peuples. Et ce féodalisme arabe moyenâgeux infère sur les autres peuples arabes, et c’est là le dilemme dans le retard des peuples arabes. Et ces peuples ont montré lors du Printemps arabe qu’ils aspirent tous à la dignité, au travail, à une citoyenneté respectée. Certes, le Printemps arabe a été utilisé par l’Occident pour ses intérêts propres qui sont depuis toujours la mainmise sur le pétrole arabe et sur lequel est adossé le dollar américain, et indirectement l’euro, la livre sterling et le yen, quatre monnaies mondiales solidaires et mettant en coupe le monde. Sans le pétrole arabe et le dollar en tant que monnaie de facturation des transactions pétrolières, les États-Unis ne se seraient pas intéressés au monde arabe. Ni l’Europe ni le Japon. Il n’y aurait aucune utilité à tirer d’une mainmise sur ce monde, un monde presque comparable à l’Afrique subsaharienne.
Et si les systèmes monarchiques sont d’essence féodale depuis des siècles, les républiques arabes cherchent à lutter contre ce féodalisme rétrograde. Cela ne signifie pas que les républiques progressistes arabes issues de la décolonisation ne sont pas rétrogrades. Mais certainement beaucoup moins. Comme si Dieu les a mis dans cette situation, les républiques arabes dans une autre et l'Occident encore une autre. Les voies du Seigneur sont impénétrables. Cependant il y a l'« espoir ». Et cet espoir, on ne doit pas le perdre. Parce que quelle que soit la situation de l’Algérie, comme du monde arabe, il y a le Tout puissant qui veille, en clair le « Vent absolu du changement », par où viennent les touts du monde. C’est ce Dieu, le Tout puissant qui programme la marche de l’histoire, qui programme le progrès du monde. L’homme croit trouver, mais c’est par l’esprit qui vient de Dieu et qui est mis en l’homme pour qu’il avance. Sans cet esprit, l’homme ne peut penser sa voie.
C’est cela que l’on doit comprendre, aucune nation ne commande son destin. Le XXIème siècle sera le siècle d’une seconde libération du monde arabe et de l’Afrique. Ce sera certainement une nouvelle naissance. Les Américains vont certainement se retirer du monde arabe, l’impérialisme américain, par ses défaites, a montré les limites de sa puissance. En clair, de plus en plus, il n’y a rien à gratter de ce monde. La Russie se déploie, mais c’est surtout la Chine et l’Inde dans quelques décennies qui relègueront l’Occident en deuxième puis en troisième position dans d’ordre de puissance. La pax americana va se terminer, c’est inéluctable. Pour ne prendre que le Japon ou Israël, Les prévisions tablent pour le Japon une population de 47 millions de Japonais à la fin du siècle contre 130 millions aujourd’hui.
Quant à Israël, c’est simple, voilà ce qu’écrit S. Daniel Abraham, fondateur et président du Center for Middle East Peace, Washington DC (Centre pour la paix au Moyen-Orient). « D’après le professeur Sergio Della Pergola de l’université hébraïque de Jérusalem, la population israélienne est aujourd’hui minoritaire en Cisjordanie, à Gaza et en Israël, tandis que la population arabe, déjà majoritaire de la Méditerranée au Jourdain, ne cessera d’augmenter car son taux de naissance est supérieur à celui des Israéliens. [...] Sans la conclusion d’un solide accord de paix, l’avenir d’Israël ne fait aucun doute. Les Palestiniens devenus majoritaires, exerceront une telle pression démographique, culturelle et sociale, que le gouvernement israélien se verra contraint de le leur donner le droit de vote. Le Hamas, qui aura alors obtenu la majorité absolue au Parlement, en prendra acte, donnant au pays le nom de Palestine. [...] L’État d’Israël, tel que nous le connaissons aujourd’hui, aura cessé d’existé. » (1)
Dans une autre analyse, Yoram Ettinger, ancien diplomate israélien, qui a étudié les statistiques palestiniennes depuis 2004, donne son point de vue sur le problème démographique en Israël : « Pourquoi les Palestiniens gonflent-ils leurs chiffres (démographiques) ? Pour Ettinger, ils le font dans le but de recevoir davantage d’aide de la communauté internationale ainsi qu’un important approvisionnement en eau de la part d’Israël. Mais surtout, les Palestiniens tentent d’effrayer les Israéliens avec « une bombe démographique à retardement ». Kobi Michael fait le même constat : « les Palestiniens ont un agenda politique et un objectif stratégique : imposer une solution à Israël en recrutant le soutien international par la délégitimation de l’Etat hébreu. »
Mais parmi les statisticiens israéliens, tous ne sont pas d’accord avec l’analyse d’Ettinger, et beaucoup contestent ses chiffres. Le professeur Arnon Soffer de l’université de Haïfa accuse à son tour Ettinger de ne pas fonder son travail sur des recherches académiques. Pour lui, les conclusions de l’ancien ambassadeur servent ses idéaux politiques. « Les habitants des implantations se confortent dans l’illusion qu’il n’y a pas de problèmes », mais s’il n’y a pas de séparation, prévient Soffer, « dans deux ou trois ans, les Palestiniens seront majoritaires ».
Le professeur Sergio Della Pergola, expert en démographie à l’Université hébraïque de Jérusalem, explique que « les données palestiniennes doivent être minutieusement examinées. Mais ce qui est incontestable, c’est que la population arabe grandit et continuera de le faire plus vite que la population juive. Pas besoin d’attendre les chiffres publiés par Ramallah pour le comprendre. » « Si l’objectif de l’Etat d’Israël est d’être l’Etat du peuple juif, et non un pays qui adopte une politique de discrimination contre les non-juifs, la seule voie possible est de ne pas intégrer des portions de territoire où les non-juifs sont majoritaires, sous la souveraineté de l’Etat. » » (2)
Ceci est révélateur du problème démographique en Israël. Le monde avance, et le gouvernement israélien ne peut arrêter la marche de l’histoire. Et les mutations démographiques concernent de nombreux pays dans le monde, dont l’Allemagne, l’Espagne, la Russie, les États-Unis, la France..., sinon comment comprendre ce phénomène migratoire qui a commencé en ce début de siècle et qui prend de l’ampleur ? Des prémices dues au vieillissement et à la dépopulation des pays riches ? Qu’en sera-t-il dans 50 ans ? Dans 80 ans ? Et les années passent très vite sans que l’on se rende compte.
Cela est en lien avec la fin d’un cycle de l’histoire de l’humanité qui touchera tous les domaines, de l’économique, passant par le financier et monétaire, au démographique et évidemment la bonne gouvernance, c’est-à-dire la démocratisation des régimes monarchiques et républicains autoritaires arabes. Pour le monétaire, après la chine et son yuan dans le panier des cinq grandes monnaies mondiales, de nombreux postulants parmi les autres grandes puissances pourraient intégrer leurs monnaies dans le panier qu’utilise le FMI pour déterminer la valeur des droits de tirages spéciaux (DTS).
D’autre part, le brassage de races va s’accentuer dans les pays riches dont le taux de natalité est très bas. Le revers de la médaille pour les pays trop riches, trop ordonnés, trop policés. Comme la Chine s’est développée, d’autres mondes en retard se développeront inéluctablement. Les années et décennies à venir seront déterminantes, elles marqueront la « fin d’un cycle historique ». Une chose est certaine, le XXIème siècle ne ressemblera pas au XXème siècle comme le XIXème siècle ne ressemble pas au XXème siècle.
« Une loi de la nature, et cela conforte l’« espoir » pour tous les peuples riches ou pauvres. Un mouvement irréversible de changement, d’un monde toujours neuf suivant une « loi positive dans le développement ». Et cela ne peut être autrement pour l’« humanité ». C’est le sens même de son existence, de « progresser » qui s’inscrit dans sa raison d’être sur terre.
Medjdoub Hamed
Chercheur spécialisé en Economie mondiale,
Relations internationales et Prospective
www.sens-du-monde.com
Notes :
1. « L’Algérie et le monde arabe face au « Vent absolu du changement » », par Medjdoub Hamed Le 10 janvier 2019
https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/l-algerie-et-le-monde-arabe-face-211490
2. « Tribune – Israël disparaîtra sans le moindre coup de feu », par La Revue N° 29. Février 2013
3. « La guerre des chiffres aura-t-elle lieu ? », par le journal israélien, The Jerusalem Post. Le 11 février 2015
https://www.jpost.com/Edition-fran%C3%A7aise/Social-Eco/La-guerre-des-chiffres-aura-t-elle-lieu-390703
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