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Accueil du site > Tribune Libre > L’école : cinq ans pour changer de cap ?

L’école : cinq ans pour changer de cap ?

Il ne saurait pas y avoir de politique pertinente d’éducation sans une interrogation sur la vision de l’être humain vers lequel nous tendons. Les questions de l’école, de la société, de l’évolution de l’humanité sont liées. Les bons apprentissages pour l’école le demeurent pour la vie : apprendre à connaître, apprendre à faire, apprendre à se connaître, apprendre à vivre ensemble. Ces quatre voies d’une éducation humanisante, au plein sens du terme, définies par l’Unesco, auxquelles s’ajoute aujourd’hui la voie écologique, devraient constituer la trame et la chair de toutes les formations de 7 à 77 ans... C’est à toute la société, et non seulement à l’école, qui en est l’émanation mais qui, en retour, l’influence, qu’incombe la responsabilité de repenser les principes, valeurs et modes d’action par lesquels elle répond ou non à ces besoins anthropologiques de base. Ce que l’on voudrait trouver dans les choix politiques pour les cinq ans à venir ce sont des projets et des programmes de développement individuel et collectif fondés :

sur :une vision écologique énonçant les conditions de survie de l’espèce (ce que satisfait en principe le « Pacte écologique » de Nicolas Hulot) ;

une vision anthropologique fondée sur une meilleure définition du processus d’humanisation, c’est-à-dire de maturation mentale et émotionnelle de l’espèce ;

une vision psychologique concernant la maturation des personnes, nourrie des connaissances des sciences humaines accumulées depuis plus d’un siècle (incluant l’éthologie humaine et les neuro-sciences) ;

une vision sociale elle aussi fondée sur ces sciences et permettant des apprentissages innovants et féconds d’un meilleur vivre-ensemble. Les voies d’actions et les outils existent qui sont ignorés ou négligés, où même rencontrent des sourdes résistances.

Cela apparaît bien faiblement au cœur des programmes politiques qui nous sont proposés : la dimension anthropologique, la connaissance de soi, la relation à autrui, la capacité à coopérer sont loin de prévaloir à l’école et dans la société. Elles ne sont pas identifiées et reconnues, « sacralisées » comme les autres savoirs. (en France en particulier). Le quotient intellectuel (QI) prime ; le quotient émotionnel (QE) ou le quotient relationnel (QR) demeurent des notions ignorées ou sous-estimées, alors que leur développement devrait devenir partie intégrante de toutes les formations. C’est même une voie royale pour reconnaître et ennoblir tous les métiers où la relation aux personnes tient une place essentielle. Ainsi en va-t-il des métiers « ordinaires », dits de proximité, appelés à se développer massivement : assistantes familiales, aide aux personnes âgées ou handicapées, aides ménagères (« bonniches »), surveillants de prison (« matons »), policiers (« flics ») etc. Le regretté Edouard Zarifian remarquait avec force que les qualités relationnelles ne comptent en rien dans le recrutement ou la certification des futurs médecins et qui ne recevaient, dans le meilleur des cas, que trente heures d’enseignement de psychologie médicale durant leurs études ! N’en va-t-il pas de même des enseignants, dont beaucoup il faut le dire se forment à la marge... A l’école tout autant que dans la société, l’excellence ne se juge que sur la capacité de surpasser les autres et non dans l’émulation constructive face à des savoirs ou des compétences à acquérir, et notamment celles de la coopération, du travail en équipe, de la confrontation positive des savoirs et des savoir-faire. Dans une orientation générale qui prendrait en compte la nécessité de ces finalités fondamentales, on pourrait proposer cinq mesures, essentielles parmi d’autres, dont l’efficacité psychopédagogique est largement vérifiée :

1- officialiser le développement des capacités de coopération, de travail en équipe des adultes comme des élèves, et assurer aux-enseignants-éducateurs les formations appropriées à cette fin ;

2- abandonner progressivement, au profit de modes d’évaluation novateurs et auto-formateurs, les modes d’évaluation stigmatisants, plus ou moins arbitraires, qui fragilisent la confiance de l’enfant dans ses capacités, exacerbent l’esprit d’hyper-compétition et pervertissent le désir et les raisons d’apprendre. A cet égard, le modèle finlandais, élaboré et expérimenté au long des trois dernières décennies, en démontre les gains humains et scolaires ;

3- repenser fondamentalement le statut de l’erreur dans les processus d’apprentissage et de formation. C’est une question centrale ;

4- assurer les apprentissages en cycles de maturation et non, rigidement, par année d’âge, qui conduit à faire avancer au même pas les élèves nés en janvier et d’autres nés en décembre de la même année. C’est sans doute un élément plus déterminant dans les difficultés et échecs scolaires que l’influence de telle ou tméthode d’apprentissage.

5- assurer la formation à « la médiation et à la résolution des conflits » pour les élèves comme pour les adultes.

Sans sous-estimer la complexité des facteurs en jeu, ces cinq mesures obtiendraient sans trop de peine un large consensus et pourraient susciter, à travers leur intégration dans les pratiques quotidiennes, des effets systémiques sur les représentations comme sur les valeurs implicitement transmises. Elles contribueraient à remotiver les élèves, à éviter leur désinvestissement ou ennui en classe, voire leur entraînement dans des spirales d’échec dont on sait les conséquences spectaculaires, mais trop peu les souffrances intimes. De nature à apaiser le climat de la classe, elles entraîneraient une économie d’énergie et de temps perdu à obtenir l’attention des élèves. Elles auraient naturellement tendance à diffuser dans le corps social, à féconder les comportements politiques, et à s’intégrer dans une culture commune. On l’observe dans les pays nordiques souvent cités, à juste titre, comme des exemples. Leur étude et formation dans les IUFM devraient tenir une place égale aux autres disciplines. Il faut noter avec espoir qu’elles apparaissent dans les instructions officielles et plus récemment dans les « Recommandations du Haut Conseil de l’Education » (octobre 2006). Changer de cap, ce serait créer les conditions d’une éducation humanisante où savoirs, savoir-faire, savoir-être et savoir-être-ensemble s’apprennent conjointement

Armen Tarpinian

Directeur de la "Revue de Psychologie de la Motivation"

* Ecole : changer de cap. Contributions à une éducation humanisante, Chronique sociale, 2007


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11 réactions à cet article    


  • benalgue (---.---.139.175) 9 mars 2007 14:19

    @ l’auteur je suis entièrement d’accord avec vos propositions et j’aurai même quelques idéees d’amelioration...
    - ralentissons le rythme de travail dans les écoles primaires
    - diminuons le nombre d’enfants par classe
    - choisissons un beau cadre pour l’ecole exemple arbre verdure
    - pour le primaire travaille le matin activités ludiques l’après midi (jeu travaux manuels promenade sport etc )
    - garder le plus longtemps le même prof pour une même classe et garder les même enfants pour qu’ils grandissent ensembles et créent des liens solides
    - si l’ecole devient un lieu agréable et non surchagée de travail alors la la notion de vacance n’à pas lieu d’être et l’enfant n’est pas coupé tous les six semaines de son monde de ses copains etc voilà pour ma part j’ai mon enfant dans une école steiner éducation avec laquelle je ne suis pas entièrement d’accord mais qui réponds tout de même à beaucoup de mes souhaits... votre projet sur cinq ans me parait tout à fait utopique il n’y a aucune volonté d’état de changer les choses


    • tarpinian tarpinian 9 mars 2007 14:50

      Merci de votre réaction. Ce serait encore plus utopique si l’on ajoutait tout ce que vous proposez,et qui serait non moins bien venu. Ce texte renvoie à un ouvrage(cf note enfin d’aricle) qui apporte des témoignages de ce qui se fait déjà, et indique des portes d’entrée esentielles ; et place les problèmes de l’école dans une perpective d’intégration de compétences nouvelles, psychosociales, cultivées ailleurs et cultivables ici pour peu que les souffrances insupportables - ou l’attrait du mieux ! - nous réveillent...collectivement. Il y a beaucoup de personnes qui travaillent déjà dans ce sens. Très cordialement


    • ExSam (---.---.54.53) 9 mars 2007 17:18

      On aimerait pouvoir dire « amen » à vos propositions, Armen.

      Malheureusement, l’article, le lecteur, l’école et le monde sont ainsi faits que l’on voudra plutôt donner quelques indications sur ce qui nous titille.

      1 officialiser le développement des capacités de coopération des enseignants.

      Les enseignants, au moins dans le primaire échangent des connaissances sur leurs élèves, apprennent le parcours et les acquis des élèves de leurs classes, en début d’année, en interrogeant et consultant bulletins, et collègues qui les ont eus l’année ou les années précédentes.

      Ils travaillent avec l’équipe des ATSEM,, dans les maternelles, et l’équipe de la cantine pour définir avec elles les taches péri-scolaires à accomplir.

      Ils ont la volonté et l’obligation de bien les articuler pédagogiquement avec le projet de chaque enseignant, les nécessités des personnels de service, le projet d’école, les volontés de la commune, la perception des parents, le bien-être des enfants, les possibles contraintes de fermeture de l’école et les horaires des transports en commun. Les enseignants ne sauraient se passer, également, de travaiiler au plus près avec les rééducateurs qui viennent intervenir auprès de certains élèves dans leur classe, interventions définies, organisées et planifiées obligatoirement en commun, et avec la supervision de l’Inspection Dépatementale.

      2- abandonner progressivement, au profit de modes d’évaluation novateurs et auto-formateurs, les modes d’évaluation stigmatisants, plus ou moins arbitraires, qui fragilisent la confiance de l’enfant dans ses capacités, exacerbent l’esprit d’hyper-compétition et pervertissent le désir et les raisons d’apprendre.

      L’école doit s’ouvrir au monde, il ne faut pas la « sanctuariser » disait Bayrou-ministre. Le monde est de plus en plus compétitif. Les parents réclament des compétences pour leurs enfants, du travail à la maison, alors qu’en primaire normalement il ne faut pas en donner. Les enfants eux-mêmes réclament une évaluation qui leur permette de voir clairement où ils se situent par rapport aux autres, bien souvent. Faut-il donc cultiver la contradiction et continuer l’ouverture de l’école - comme en témoignent les Conseils d’Ecole, les journées portes ouvertes, les participations parentales aux journées de sorties diverses, les modules de formation civique intauré entre l’Ecole, les municipalités et les parents - tout en rejetant le principe structurant la société, nous sommes d’accord, pour son mal ?

      Ou porter l’effort sur la société avant et autour de l’Ecole, pour que les relations au travail, les modèles parentaux et la société de la techno-science ne soit plus tout autant vouée à l’hyper-compétitivité, ce qui générera des adultes et enfants possiblement ouverts et demandeurs d’une éducation autre ?..

      3- repenser fondamentalement le statut de l’erreur dans les processus d’apprentissage et de formation. C’est une question centrale.

      J’ai pu constater qu’il existe un certain nombre d’ouvrages didactiques sur l’erreur et ses bienfaits.

      La pédagogie constructiviste dominante dans l’Education n’est-elle pas un système qui laisse largement place à l’erreur, comme révalatrice des impasses cognitifs à éviter dans le tunnel qui conduit l’élève à la compréhension ?

      4- assurer les apprentissages en cycles de maturation et non, rigidement, par année d’âge, qui conduit à faire avancer au même pas les élèves nés en janvier et d’autres nés en décembre de la même année.

      Un enseignant qui ne fait pas un cours magistral, mais lorgne plutôt - un peu - vers la pédagogie différenciée ne peut faire l’économie de prévoir des séquences et des contenus qui varient les temps d’acquisition, les modalités de présentation d’un savoir, comme le niveau du savoir proposé et des compétences travaillées, suivant les âges des élèves.

      5- assurer la formation à « la médiation et à la résolution des conflits » pour les élèves comme pour les adultes.

      Pourquoi investir des sommes dont les politiques seront toujours prompts à dire qu’elles coutent à la collectivité - comme si l’éducation, les enseignants n’étaient pas dans la collectivité - alors que diminuer simplement le nombre d’élèves dans les classes et élaguer les savoirs à transmettre (faut-il par exemple enseigner forcément les règles de la prévention routière en primaire ?)serait d’un effet très important et immédiat sur les incivilités en classe et autour ?..

      Sans sous-estimer la complexité des facteurs en jeu, ces cinq mesures obtiendraient sans trop de peine un large consensus

      Je ne le crois pas, pas dans le monde enseignant en tous cas. Comme tend à le montrer mon message, il y a énormément de travail fait dans les écoles, travail immense au quotidien, peu connu, pas reconnu, pas compris, et surtout passé sous silence, pour que nos politiques et nos « avis autorisés » se permettent de charger la barque Ecole et la supposée incurie des enseignants.

      C’est ainsi que la barque menace de couler, c’est ainsi que la démotivation enseignante n’a jamais été aussi forte, c’est ainsi que les agressions et incivilités à leur égard n’ont jamais aussi graves, et les problèmes de santé correlatifs prennent l’allure, aujourd’hui, d’un véritable feu de forêt.

      Ceci dit, je veux bien souscrire à l’idée que vous êtes, dans votre compétence, un excellent professionnel.


      • tarpinian tarpinian 10 mars 2007 00:41

        . Merci de ce votre long commentaire que j’ai lu avec beaucoup d’attention.Lisez la dernière phrase de ma réponse au commentaire précédent : je disais que beaucoup d’ensignants travaillent dans le « bon » sens, dont manifestement vous faites partie. Sinon le bateau tanguerait davantage... La question est que ce n’est pas vraiment reconnu, validé et généralisé. Une simple remarque : la coopération ne s’oppose pas à l’efficacité, elle l’augmente au contraire. Mais, d’une façon générale, le travail en équipe - dans le sens le plus créatif et exigeant - n’est pas encore la norme à l’école, ni pour les élèves ni pour les adultes ; il n’est pas vraiment au programme des IUFM. Mais bien sûr ce n’est qu’un aspect du problème qui est complexe et, comme je l’écris, anthropologique et même « anthropolitique »,dirait Edgar Morin. Vous soulevez beaucoup d’autres points qui mériteraint un dialogue. Relisons-nous mutuellement... Bien cordialement


        • ExSam (---.---.184.151) 11 mars 2007 10:25

          Je ne vois en quoi nous pourrions dialoguer. Vos remerciements appuyés et vos citations ne cachent que votre désir de ne pas accepter et de ne pas lire la critique argumentée que je vous fais sur vos cinq propositions.

          Le fait est que derrière des « ismes » à tous les coins de phrases vous nous faites du Café du Commerce façon « élite ».

          C’est la même posture arrogante et vide que les Ferry et Consorts, occupant depuis dix ans les plus hauts postes à la Commission des Programmes et qui viennent ensuite baver que les programmes ne sont pas bons, etc.

          Il est évidemment plaisant de se faire mousser, sur AV ou ailleurs. Toute cette clique de philosophe à deux balles, dont certains livres ont fini dans le caniveau sous des semelles excédées, ne mérite pas un pet de lapin.

          A vous vous mettre dans le droit fil de ce simulacre de pensée et ces postures Ancien Régime, vous nous faites évidemment tort, nous qui portons le réel travail, la souffrance et le dépit de la non-reconnaissance aussi matérielle que morale.

          Mais vous faites également grand tort à vous-même. En ce sens il est plus que nécessaire que vous utilisiez vos lumières psychologiques pour sonder votre ego et le fortifier contre cet air si propice au gonflement des baudruches.


          • tarpinian (---.---.228.98) 14 mars 2007 10:23

            Vous ne m’avez pas laissé le temps de relecture que je vous demandais et tiré dessus au bazooka. Je regrette vivement d’avoir pu provoquer une telle réaction, un peu trop loin peut-être du respect que vous réclamiez au départ...

            Il y là un grave malentendu, car il n’iy a pas dans mon esprit de procès fait aux enseignants qui font avancer « la barque » comme vous dites, avec beaucoup d’engagement et d’efforts pédagogiques que que vous rappelez à juste titre.

            C’est sans doute parce que je ne l’éprouve pas personnellement, que je ne ressens pas cette « non reconnaisssance »dont vous parlez avec amertume. Ce n’est pas non plus le cas autour de moi, entourés que nous sommes de professionnels qui font face avec foi et compétence à la situation actuelle. Vous posez dans votre commentaire la vraie question : comment résister à la pression d’une société dans sa fuite en avant dans une compétition effrénée à tous les registres de la vie, économique, familiale et sociale,et face aux les catastrophes dont elle se menace... L’école peut-elle faire autrement, et n’attendons-nous pas trop d’elle ? N’est-ce pas sur la société qu’il faut d’abord agir ? Mon texte tente d’y répondre de façon trop succinte et pas assez claire semble-t-il. Je suis tenté de vous renvoyer à l’ouvrage collectif, signalé à la fin de mon aricle, où des éclairages forts sont proposés^par des gens de terrain et des enseignants-chercheurs. L’idée-force étant que les changements ne peuvent bien s’opérer que si l’on agit de façon non réductrice sur les trois niveaux en interdépendance : les personnes, les institutions dont l’école où nous passons tous, la société. Mon propos n’est pas de dénigrer l’école et encore moins les personnes qui s’y impliquent. mais de tenter de montrer comment l’on pourrait rendre nos interdépendances plus constructives de bonne vie commune et cela dès l’école nécessairement ;. L’ouvrage signalé - il n’est pas le seul !- nous en indique des pistes et pointe les conditions Nécessaires. En toute cordialité.


          • florence meichel (---.---.20.73) 12 mars 2007 09:21

            Bonjour

            Merci pour ce texte qui résonne avec mes convictions profondes concernant l’école et sa nécessaire transformation !

            Juste une chose : les choses changent en dépit de toutes les résistances institutionnelles...j’en veux pour preuve ce genre d’initiatives (et bien d’autres ! ....) : http://www.etoody.com/indexie.php Le mouvement est en marche et il ne s’arrêtera pas ! Reste à l’accompagner ! Je m’y emploie et d’autres avec moi ! Rejoignez-nous !


            • LE CHAT LE CHAT 12 mars 2007 10:04

              c’est en effet dès le plus jeune âge que l’on doit faire prendre conscience de l’enjeu écologique et de l’impératif du développement durable .un autre monde est possible !


              • albert (---.---.32.58) 12 mars 2007 18:13

                juste un commentaire pour dire qu’il serait souhaitable d’éviter le langage pseudo-scientifique qui parsème tant les articles sur l’éducation ! ce serait plus compréhensible pour les non-initiés, et cela servirait ssans doute la cause des enseignants. les choses simples s’éononcent clairement m’a-t-on appris... sans jamais utiliser tout ce vocabulaire ! pour info, je suis enseignant, et je me garde bien de ne jamais utiliser ces termes


                • Tarpinian (---.---.228.98) 14 mars 2007 14:17

                  Oui merci de faire cette observation. Déformation professionnelle aidant, à quels termes « pseudo scientifiques » me suis-je laissé aller, que vous pouvez déplorer dans mon texte ? C’est me rendre service. J’adhère à l’alexandrin de Boileau, je crois, que « ce qui se conçoit bien s’énonce clairement... » et aussi à une autre formule moins célèbre selon laquelle on n’écrit bien qu’avec des ciseaux ! Peut-être ai-je manqué aux deux consignes ! Cordialement


                • ggggg (---.---.42.119) 13 mars 2007 15:20

                  80% d’une classe d’âge au baccalauréat ; plus de leçons en primaire ; plus de devoirs à la maison - le subjonctif, le plus-que-parfait, la preuve, Ronsard, Daudet, du Bellay passés à la trappe ; aucun élève qui ne se lève devant un professeur, concours de mode entre enfants dès le primaire, des leçons entièrement polycopiées, des cahiers qui ressemblent plus à des brouillons qu’à des cours ; des parents qui attendent que les professeurs fassent l’éducation de leurs enfants et qui s’étonnent de devoir y jouer un rôle ; aucune sélection à l’entrée en faculté de médecine où l’on a transformé la première année en désintégrateur des vocations sincères par un contenu des cours si difficile d’accès qu’il faut aux élèves qui veulent réussir le soutien d’une prépa privée en parallèle.

                  Un budget de 76,7 milliards d’euros ; des écoles à la semaine de quatre jours, d’autres avec samedis travaillés, aux projets d’école souvent fantaisistes ; des conseils d’école où les représentants de parents d’élèves sont de simples auditeurs ; des ZEP où tout est fait - sans contrepartie - pour des élèves dont les parents se fichent de la réussite et de l’intégration républicaine de leurs enfants ; des cours de soutien à tout-va pour les moins motivés, rien pour ceux qui se donnent du mal ; à chaque ville son clocher avec des BEP, CAP, BTS identiques à moins d’un kilomètre de distances, des universités à la soviétique - sans les brevets et les Nobel - machines à gaspiller de l’argent pour un taux d’échec record ; des IUFM où la pensée marxiste - en 2007 - fait encore loi et où l’on forme les futurs professeurs chargés de former nos enfants tout en ne sachant souvent pas corriger leurs propres fautes d’orthographe ; des professeurs - quand ils sont bons - qui demandent eux-mêmes à être notés pour que les moins performants et les moins motivés d’entre eux ne soient pas à égalité de traitement qu’eux ; un absentéisme dû moins souvent à des problèmes de santé qu’à des formations programmées sur le temps scolaire.

                  Dans le même temps, des milliers de postes qui ne sont pas pourvus, des métiers qui disparaissent et des régions entières qui sont désertées car il n’y a plus de tissus économique local faute de bassin d’emploi de proximité, aucune politique, ni orientation industrielle ne sont données pour absorber l’élévation malgré tout générale du niveau d’études.

                  Que s’est-il passé entre l’Instruction Publique de Jules Ferry et l’Education Nationale de Robien. Un enfant Français a-t-il en 2007 les mêmes chances de réussite qu’il soit de Pointe-à-Pitre, de Roubaix ou de Versailles ? Est-ce dans la facilité, dans le laminage des exigences que l’on créera une société dynamique riche des réussites de ses enfants, que ceux-ci choisissent de devenir cordonnier, charcutier, physicien ou entrepreneur.

                  Nous vivons dans l’illusion (erreur de perception causée par une fausse apparence). Illusion que tout peut s’obtenir sans effort, sans persévérance ni travail. Illusion de croire qu’un élève peut se passer de la forme - savoir calligraphier et présenter, s’habiller correctement et de façon adaptée à son âge - et du fond - savoir raisonner et mettre en relations ses connaissances les une avec les autres. Illusion que la valeur d’une personne ne s’estime qu’à partir du diplôme d’ingénieur. Illusion que tout le monde doit avoir la même forme de réussite. Illusion que tous les savoirs sont accessibles à tout le monde. Illusion de croire que plus d’argent améliorera la qualité du système. Illusion de garder en troisième des élèves de 17, 18 voire 19 ans. Illusion de nous croire performants dans nos enseignements quand on sort de terminale après 7 ans d’anglais / 1ère langue, sans être capable de demander son chemin. Illusion de s’orienter vers le développement durable sans faire naître les formations supérieures qui formeront les ingénieurs capables de concevoir de nouveaux modèles de production - les brevets - et par là-même de créer des faisceaux d’emplois innombrables.

                  Et dans la cruauté (tendance à faire souffrir) Cruauté de laisser des enfants incapables de maîtriser la lecture, l’écriture. Cruauté de laisser s’installer une deuxième école, celle des parents qui ont la capacité et les moyens de combler les lacunes des professeurs. Cruauté de laisser les professeurs sans formation, sans préparation, faire face à des enfants sans aucun repère éducatif. Cruauté vis-à-vis du reste du monde qui regarde avec envie ces 76,7 milliards d’euros dépensés si légèrement. Cruauté de ce mammouth qui descend dans la rue, fait grève tout en refusant obstinément tout dialogue de réforme. Cruauté de demander à un professeur d’avoir de l’estime pour son métier en lui demandant de surnoter des copies pour que les résultats aux examens ne nous rappellent pas trop vivement à la réalité du niveau moyen. Cruauté de laisser des élèves passer dans une classe supérieure sans avoir le niveau pour suivre et se noyer dans leur échec. Cruauté de laisser tant d’artisans qui font la gloire de notre patrimoine - dont la taxe d’apprentissage ne devrait servir qu’à former leurs propres troupes dans moins d’écoles mais de meilleure qualité - sans jeunes pour leur succéder. Cruauté de faire croire à des élèves que leur échec ou un certain type de diplôme les condamnent à vie. Cruauté de laisser tant de talents, qu’ils soient petits, modestes, grands et exceptionnels sans chance de s’exprimer.

                  Le monde s’est civilisé sur la capacité de l’homme à apprendre, à s’instruire, à se dépasser. Civilisation, progrès comment y parvenir sans des bases éducatives irréprochables. Nous avons tous les atouts pour réussir, nous moderniser, nous adapter. Qui sommes-nous pour nous montrer si inopérants avec tous les moyens dont nous disposons alors même que le premier enfant malien, somalien n’a pas toujours la première idée de ce que peut être une école, et quand école il y a, considère comme un luxe d’avoir un crayon, un cahier et d’être à quatre sur le même banc.

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