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Accueil du site > Tribune Libre > Culture vs. démocratie ?

Culture vs. démocratie ?

Les écrits de Renaud Camus sur « La Grande Déculturation » présentent une série de constats alarmants sur l’état de la culture dans notre pays, désastres qu’il attribue aux excès supposés de la démocratie et aux concepts égalitaristes qui les fonderaient. Cependant, subsiste après lecture une question fondamentale : comment l’auteur peut-il définir ce qui relève de la culture ?

La culture comme discriminant social

Il est très significatif Renaud Camus affirme que le baccalauréat ne peut avoir une valeur si 80 % d’une classe d’âge le passe avec succès. Cette affirmation n’est pas simplement celle, vraisemblable, du fait qu’aujourd’hui l’examen n’est pas la marque de la maîtrise de certaines connaissances et compétences qu’il devrait être, sous-entendant que c’est au prix d’une baisse des exigences et non d’un effort d’amélioration des compétences des élèves que ces résultats ont été obtenus. Elle prétend que cela est de toute façon impossible, quels que soient les moyens employés, au vu de la proportion fixée.

Or, l’Histoire nous apprend qu’alors qu’autrefois seule une élite restreinte pouvait maîtriser la lecture et l’écriture, plusieurs pays sont parvenus, au bout de plusieurs siècles, à les enseigner presque à l’ensemble de leur population. De la même façon, il n’y a donc aucune raison logique objective pour que, si l’on fixe un contenu au baccalauréat en termes de compétences, on ne puisse pas faire en sorte qu’au moins à long terme la quasi-totalité de la population puisse y accéder.

S’il est possible que tout le monde puisse acquérir les compétences spécifiées par le baccalauréat et qu’il est tout de même impossible dans ces conditions que ce diplôme ait une valeur, c’est qu’il ne reste, toujours logiquement, qu’une possibilité : le diplôme n’aurait pas pour rôle de sanctionner un ensemble de connaissances, mais d’opérer une division de la société en deux groupes hiérarchiques, ceux qui passent, et ceux qui échouent. Selon cette vision, il est clair qu’un baccalauréat trop largement accordé n’a aucun sens, quelles que soient les compétences des élèves, car son rôle de sélection sociale aurait disparu.

Les connaissances sanctionnées par le baccalauréat ne pourraient ainsi pas être perçues pour leur valeur propre, à laquelle l’argumentation de Camus n’accorde aucune place, mais seulement comme leur valeur relative à leur aspect de discrimination sociale. De la même façon, on peut comprendre que les œuvres ne sont pas tellement appréciables pour elles-mêmes, mais surtout au regard du fait qu’elles sélectionnent le petit nombre d’individus qui savent les apprécier comme « cultivés ».

Culturel ou pas culturel ?

Renaud Camus et Alain Finkielkraut désignent fréquemment des genres qui selon eux ne peuvent être considérés comme faisant partie du domaine de la culture, comme le rap ou d’autres formes de musique populaire. Cependant, les raisons fondant cette affirmation ne sont jamais explicitées, et restent à l’état de questions censées mettre en cause le bon sens du lecteur. Une déduction qu’on peut en tirer est que c’est la tradition, s’exprimant au travers des habitudes enfouies dans chaque individu, et non par exemple la raison, exigeant l’explicite, qui sépare le culturel du non culturel. Ainsi, la musique et la littérature classiques font partie de notre culture, non parce qu’ils possèdent des qualités propres intrinsèques dont on peut faire la démonstration, mais parce que l’usage à travers le temps les a reconnus comme tels.

A la fin du livre La Défaite de la pensée, vieux aujourd’hui de plusieurs dizaines d’années, Alain Finkielkraut désigne la bande dessinée comme un des exemples typiques de ce qui ne peut être culturel. Cependant, alors qu’à certaines époques ce genre a pu être, comme l’est aujourd’hui le jeu vidéo et comme l’a été le dessin animé, désigné comme portant la fin de la culture, voir comme étant source de danger, il est aujourd’hui, à travers des festivals comme celui d’Angoulême, promu au rang d’art à part entière, faisant ainsi qu’il n’est plus de bon ton pour ces auteurs de désigner comme non culturel. Mais les remarques faites par certains auteurs aujourd’hui reconnus sont édifiantes : le manga et autres genres graphiques asiatiques, désignés comme non culturels, viendraient menacer leur art qui est lui véritable. L’acceptation, par l’œuvre du temps et de la tradition, de nouveaux genres dans le champ culturel, s’accompagne donc de la création d’une division interne, parfois très brutale, entre deux sous-ensembles, celui, nécessairement restreint, des œuvres dignes d’intérêt culturel, et celui des autres. L’élargissement du domaine culturel ne se fait donc que par création de nouvelles démarcations au sein des champs englobés.

De ceci, on peut conclure que la culture telle qu’elle est conçue par les auteurs tels que Renaud Camus et Alain Finkielkraut se définit comme pure différence entre « bonnes » et « mauvaises » œuvres opérée par la tradition, et non par exemple comme valeur objective positivement reconnue à des œuvres par la raison explicite, conformément au projet des Lumières.

Culture et démocratisation

En résumé, l’unique source du culturel serait donc la tradition, et son seul intérêt la discrimination sociale.

La conclusion est donc que culture fondée sur ces conceptions et démocratie aspirant à l’égalité sont par nature incompatibles. Pierre Bourdieu et Renaud Camus, pourtant d’idéologies assez radicalement opposées, se rejoignent d’ailleurs totalement sur ce point.

Cependant, une conception de la culture qui n’a pour objet que la discrimination en vue de sa propre reproduction, qui n’aura elle-même pour effet que des discriminations ultérieures, mérite-t-elle d’être défendue, ou doit-elle être au contraire vue comme pur moyen au service de la domination ? Il serait donc sans doute temps de poser les barrières et de réfléchir à une théorie réellement émancipatrice de la culture...


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26 réactions à cet article    


  • sisyphe sisyphe 24 juin 2008 15:11

    Marre des réacs et des vieux barbons de la Kulture élitiste, reconnue, statufiée (pas étonnant qu’on y retrouve l’ineffable Finkielcrot...).

    Ceux qui opposent Mozart au slam, le Titien à la BD, c’est, finalement, les mêmes qui se scandalisaient aux premiers films parlants, aux premières expos des surréalistes, voire des fauvistes.

    Les mêmes vieux cons à cause desquels Picasso, Miro, Bacon auraient disparu dans les oubliettes, et qui s’extasient aujourd’hui parce que leurs toiles valent des fortunes.

    La culture, heureusement, est protéiforme et en mouvement ; quand elle évolue, elle est toujours transgression.

    J’aime Mozart et Grand Corps Malade, Verdi et Souchon, Giotto et la BD, et ça n’a rien d’incompatible.

    La culture, n’en déplaise à ses fossoyeurs, n’est pas réservée à une élite qui se déplace à l’Opéra ; elle court les rues, comme les chansons, les pochoirs, les tags.

    Merde à toutes les pleureuses nostalgiques et ratiocinantes : vive la culture en mouvement, transgenre, transcourant, transgressive.


    • sisyphe sisyphe 24 juin 2008 17:04

      Le votre est transpirant de bétise.....


    • ZEN ZEN 24 juin 2008 19:32

      Quoi ! Florentin n’aime ni Mozart ni Verdi ?...


    • Caton d’Attique 24 juin 2008 21:50

      Finkielkraut rebaptisé " Finkielcrot" ? Voilà qui est presque aussi beau et inventif que "Durafour crématoire" ... Courage Sysiphe, vingt fois sur le métier remets ton ouvrage et bientôt tu égaleras le grand Jean-Marie.


    • karg se 24 juin 2008 18:11

      Enfin une analyse pertinente de ce que les "intellectuels" appel culture. C’est simplement un signal d’éltitisme et de ségrégation sociale. Ils leur paraient impossible que 80% de la population est la capacité d’avoir un bac sanctionnant un bon niveau, hors les lycéens travaillent et y arrivent. Tous ceux qui sont passé par une prépa comprennent sans doute ce que je veux dire, quand un étudiant est très motivé il peut atteindre un niveau de connaissance et de raisonnement très élevé par le travail.

      Chose intéressante et qui m’interpelle en temps que "scientifique" c’est l’absence de source, de donnée et de raisonnement dans ces attaques contre notre système éducatif et culturel. Un article paru sur Avox il y a quelques jours défendait les thèse de Camus sans présenter une seule étude et avec des citations non sourcé.

      Ce genre de démarche très cavalière ne permet pas un vrai débat puisqu’il n’y a aucun argument rationnel pour justifier leurs thèses élitiste. On tombe dans le "on sait bien que" "il est évident que" sans débat d’idée mais plutôt des discussions de pilier de comptoir avec des gens cultivés mais qui sont incapables d’intégrer et d’utiliser leur connaissance pour se forger eux mêmes.

      Comment concilier culture et démocratie ? la qualité d’une oeuvre est un jugement très subjectif, considérer que seul la tradition justifie l’art est absolument ridicule. Ce qui compte c’est la démarche, la volonté d’expression artistique, elle seule permet de différencier l’art de l’objet purement commercial.


      • karg se 24 juin 2008 23:24

        Parle de ce que tu connais, parle pas de ce que tu connais pas.

        Ecoute du HP ou du Rocé et on en reparle


      • karg se 24 juin 2008 23:25

        C’est aussi complétement ridicule de comparer Verdi à NTM, leurs démarches respectivent n’ont rien n’a voir et vouloir hiérarchiser des genres artistiques est ridicule. Vous faites encore de l’élitisme.


      • sisyphe sisyphe 25 juin 2008 00:41

        Pas du tout d’accord avec Leon, et votre conception élitiste de la culture.

        La culture ACTUELLE va de Mozart, Verdi, Bach, Chopin, jusqu’au slam, en passant par Bob Dylan, Bob Marley, les Stones, la musique africaine, le jazz, le R’nB, et de Giotto, de Vinci, Le Titien, à la BD, en passant par les surrealistes, Picasso, Matisse, Bacon, Barcelo, etc.....

        Chacun de ces créateurs apporte sa vision, sa technique, son art à l’édifice global de ce que l’on appelle la culture.

        Que certaines oeuvres nécessitent plus de technique artistique que d’autres, c’est sûr, mais ça n’assure pas pour autant leur supériorité sur le plan de la création : on connait de parfaits techniciens qui ne sont restés que d’habiles continuateurs, quand des êtres moins "formés" techniquement ont, par leur fulgurance, leur créativité, fait progresser la culture de leur temps.

        Une fois de plus, la culture ne se limite pas aux opéras, théâtres ou musées ; elle est vivante, et circule dans les rues, comme les chansons, le hip-hop, les tags, l’art vivant.

        Quelque chose de différent est l’accès à la culture. De ce point de vue, il est sûr que la civilisation contemporaine des écrans (jeux video, TV, internet, blockbusters au cinéma) a entrainé des comportements beaucoup plus passifs, et facilité l’accès à une culture beaucoup moins créative, moins riche, moins élaborée, plus "marchande" et stéreotypée que, par exemple, la litterature, la peinture, la musique plus élaborée.

        Mais là, il s’agit de la conséquence directe de la société marchande où tout est instantanément consommable et jetable, dès que consommé.

        Il n’en reste pas moins que je pense qu’il en a toujours été ainsi : la grande majorité du "peuple" n’a jamais eu accès qu’à une culture dite populaire, à toutes les époques ; pas plus aujourd’hui qu’hier, et cela n’a jamais empêché la création artistique d’être vivante, de se renouveller, de transgresser, de créer : aujourd’hui comme hier.

        Profitons donc de notre accès, par les médias, à la culture mondiale ; tant l’ancienne que la nouvelle, et ne venons pas pleurer une culture statufiée.

        Quant à la question de la démocratie qui "tuerait" la culture, je la trouve carrément honteuse d’élitisme et de socio-racisme. Je vous propose de retourner la question et de me dire si vous oseriez affirmer que l’autocratie, la dictature ou les régimes autoritaires favoriseraient la culture. On sait ce qu’il en a été, sous toutes les latitudes où ces formes de régimes ont existé ; que ce soit en Russie, en Chine, en Allemagne nazie, ou en Italie fasciste : partout, on a assisté à une dégradation totale de la création, quand ce n’est pas à son éradication au profit d’un art officiel figé et sclérosé.


      • HappyPeng 25 juin 2008 07:00

        La mesure que vous proposez pour les œuvres culturels est celle de la quantité de travail incluse dans leur réalisation. En termes marxistes, pour vous, la valeur d’une œuvre se mesure comme la valeur d’un bien.

        Il me semble que vous commettez la une erreur en ancrant la valeur d’une création non pas dans l’évaluation de ce qu’elle peut apporter à l’humanité mais uniquement dans ses conditions de production, c’est-à-dire, pour reprendre à nouveau le Capital, que vous considérez pour une œuvre la valeur et non la valeur d’usage.
         
        Or, pour les « consommateurs » des œuvres elles n’ont d’intérêt, de la même façon que les biens, qu’à travers leur valeur d’usage. De la même façon que je n’achète pas un objet pour son coût de fabrication élevé mais parce qu’il m’est utile, je ne « consomme » une œuvre que parce qu’elle peut m’apporter quelque chose, et non pas parce qu’elle est le fruit d’un travail complexe. Si j’ai très soif, de l’eau me sera plus utile que du vin, alors que celui-ci est le produit d’un travail plus complexe.
         
        De la même façon, nous n’avons aucune raison logique de pouvoir égaliser valeur d’usage et valeur d’une œuvre. Or ce qui m’intéresse ici c’est bien ce que la culture peut apporter à l’humanité, pas ce qu’elle coûte à créer.
         
        Ensuite, l’opposition entre nature et culture n’est pas valide. En effet, il ne peut y avoir de nature dans la création humaine, celle-ci étant par définition artificielle. Pour reprendre l’expression populaire, il n’y a en réalité pas plus de productions relevant de la nature que de beurre en branches. Ce que vous opposez est donc vraisemblablement travail simple et travail complexe, ce qui est très différent : un travail donné se situe sur une échelle continue de complexité, il ne peut donc pas y avoir de domaines clairement séparés entre le simple et le complexe. 
         
        La différence entre ce que vous pourriez définir comme nature ou comme culture nécessite donc de transformer une échelle uniformément continue en un signal binaire, ce que vous ne pouvez faire qu’en plaçant vous-même une frontière, nécessairement arbitraire. Cette frontière est de même nature que celle qui sépare les candidats qui réussissent le Baccalauréat de ceux qui échouent, ce qui renvoie à la problématique de l’article.
         
        Rappelons donc que d’après cette conclusion tout le monde ne peut pas accéder à la culture de l’élite puisque celle-ci se définit justement par son écart avec la majorité du peuple. C’est donc un objectif contradictoire.

      • 1984 1984 25 juin 2008 02:24

        Assez d’accord avec Léon, à vrai dire. Les cris d’orfraie, les accusations "d’élitisme", ça suffit. Ça fait 30 ans qu’on se fait escroquer à coup de "Tout se vaut". Regardez n’importe quelle exposition d’art contemporain, quelle mascarade.

        A avoir trop voulu qu’il n’y ait que d’Art véritable celui qui nous plaisait, on en a oublié son véritable but. La vérité, c’est que ce sont les bien-pensants qui auraient brûlé Picasso au siècle passé. Trop élitiste, sûrement.

        Le véritable problème de la démocratisation culturelle, c’est qu’elle abaisse l’Art au niveau du spectateur, au lieu d’élever celui-ci au niveau de l’oeuvre. Alors on invente de nouvelles catégories, médiocres, pour donner l’illusion au citoyen de se cultiver : L’art urbain, par exemple. Certains considèrent en effet qu’un pochoir pinturluré sur les murs d’une ville mérite d’être considéré comme une oeuvre.

        Récemment, c’est avec le slam qu’on nous a fait le coup. Il parait qu’il est artistique de déclamer bancalement des histoires banales avec un vocabulaire réduit. Ça pourrait être conceptuel, malheureusement ça se veut sérieux.

        Devra t-on bientôt retraduire l’intégrale de Flaubert, au prétexte que la jeunesse actuelle s’accomode fort mal de la métaphore et ne dispose pas du bagage suffisant pour décrypter son oeuvre ? C’est dans la logique. Flaubert, c’est socio-raciste après tout. N’importe qui ne peut pas comprendre et apprécier Flaubert. D’ailleurs, je demande expressément que La porte de l’Enfer de Rodin soit remplacé par une porte traditionnelle, étant donné qu’il faut avoir lu La divine comédie de Dante Alighieri pour la comprendre, et que La divine comédie, il y a quand même beaucoup trop de lignes (Mais beaucoup de jolies images, selon l’édition).

        C’est là la limite de la démocratisation de la culture. La culture, celle qui fait partie de notre patrimoine, est gratuite. Vous trouverez Voltaire dans n’importe quelle bibliothèque, vous trouverez des analyses approfondies de Céline sur n’importe quel moteur de recherche. A vrai dire, il m’en a coûté autant samedi passé pour une douzaine de bouquins neufs que ce que m’aurait coûté les DVD de la dernière série à la mode.

        Ce que vous appellez l’élite, c’est la frange de la population qui a décidé de se cultiver. Démocratiser l’art, c’est encourager l’oisiveté. Je veux aimer l’art, mais c’est trop difficile, alors je veux que l’on ne crée que des choses que je comprends. Il n’existe rien d’autre que ce que j’aime, et j’interdis, au nom de la bienscéance démocratique, d’émettre un avis qui ne soit pas positif.

        Justifier l’apoplexie d’un chanteur à texte par une différence de démarche n’est pas démocratique, c’est stupide.


        • HappyPeng 25 juin 2008 07:05

          Je n’ai qu’à reprendre les questions posées dans l’article : comment distingue-t-on ce qui est une oeuvre culturelle de ce qui ne l’est pas ?

          Comme Alain Finkielkraut et Renaud Camus, vous passez outre la question pour laisser sa résolution au bon sens...


        • karg se 25 juin 2008 07:12

          En fait ce qui vous gènes dans le Hip Hop c’est l’origine modeste voir étrangère des gens qui participe à ce mouvement, qui s’avère être le dernier assemble culturel créer pas l’Homme. Rap, slam, beat box, mix, graff, danse, le Hip Hop est un système artistique que vous méprisez car il n’est pas de votre "niveau". Alors comme on dit chez nous, si t’aime pas, t’écoute pas et puis c’est tout.

          Papillon en papier

          Même s’il est né de ma plume, si tu l’as aimé et qu’il t’a plu ce n’est plus mon poème mais un papillon en papier
          Il survole une dune pleine d’amour près d’une plaine abandonné
          Les critères de l’écriture sont ce qu’ils sont
          L’encre attire dans de longs cratères le parfum des mots et le sublime en effaçant ce qu’ils sont
          Comme une fleur sentimentale qui aurait appris à voler en battant des pétales
          Le papillon en papier se fraie un chemin de l’horizon éteint à son étoile natale
          Il porte un tatouage silencieux sur la peau de ses ailes
          Et de ses airs de ses oncles les oiseaux de nuit rêvent de saisir
          Le puits d’un seul sein n’attend pas la pluie d’un seul ciel
          Quand l’eau fredonne l’offre reprend
          Et assainit les océans et les salives salées par le sang
          Pour mettre un pied dans l’immortalité le papillon en papier en a payé de sa vie
          Même s’il est né de ma plume, si tu l’as aimé et qu’il t’a plu ce n’est plus mon poème
          Il est devenu un genre de vœu nomade visible à l’œil nu
          L’empreinte d’une pierre d’ambre teintée que l’auteur a emprunté à un grand peintre
          Pour que les phrases utopiques croisent les angles morts et leurs perspectives
          Que chaque guerre rencontre un jour sa paix respective
          Même s’il est né de ma plume, si tu l’as aimé et qu’il t’a plu ce n’est plus mon poème mais un papillon en papier

          Souleymane Diamanka


        • karg se 25 juin 2008 09:58

          La complexité n’est qu’un terme technique, l’art n’a pas besoin d’être complexe. C’est plutôt l’élite qui cherche à mettre en place une culture complexe hors de porté de la masse.


        • sisyphe sisyphe 25 juin 2008 18:16

          par Léon (IP:xxx.x01.54.211) le 25 juin 2008 à 09H56

           
          Il n’y a pas le moindre argument dans ce que les uns et les autres opposent à mon post. Le critère de la complexité (moyenne) est le seul argument qui permette de porter un jugement objectif sur la qualité d’une oeuvre culturelle. Tout le reste est du subjectivisme de marché et de consommation.
           
          Mais de quelle légitimité vous permettez-vous cette sentence définitive ?
          Franchement , d’où parlez vous ?
           
          Matisse disait, au contraire, en vieillissant, qu’il essayait de se rapprocher le plus possible de la simplicité, que c’était le travail de toute une vie.
          Les oeuvres gravées sur la grotte Chauvet, ou à Lascaux, sont jugées parfaites par nombre d’artistes
          L’art africain a totalement influencé toute la peinture contemporaine : de Modigliani à Picasso, en passant par Lam, Miro, etc....
           
          Qu’est-ce que c’est que cette histoire de complexité qui serait (sic) "le seul argument" , et "objectif" en plus : drôle de terme pour poser un jugement sur une oeuvre d’art, qui est avant tout, une oeuvre subjective ?
           
          Il va falloir donc inventer des instruments de mesure de la "complexité" d’une oeuvre, pour juger si elle est une oeuvre d’art ou non ? Compas , microscope, fil à plomb, logarithmes ????
           
          Allons, allons... Que vous essayiez de faire valoir votre point de vue, d’accord, mais de là à se poser en juge des critères "objectifs" d’une oeuvre d’art, vous passez totalement à côté de la plaque, et discréditez votre propre point de vue.
           
           

        • sisyphe sisyphe 25 juin 2008 23:44

          par Léon (IP:xxx.x01.54.211) le 25 juin 2008 à 21H16

          Vous n’avez, Sisyphe, pas compris ce que j’ai écrit. La complexité fait référenceà la quantité d’informations,c’est à dire pour faire simple, au nombre de caractères ou de signes nécessaires pour déterminer l’oeuvre. La décrire par exemple. C’est la seule mesure objective de propriétés ici très qualitatives

          Du charabia.

          L’oeuvre sans doute la plus connue de Matisse, est la plus simple : elle est entrée dans l’iconographie mondiale, comme la photo du Che, la Joconde, et tant d’autres images immédiatement identifiables, sans aucun besoin de références préalables.

          Je ne vois pas où vous voulez aller chercher des "mesures objectives", des nombres ou je ne sais quoi d’autre.

          Je répète ma question : il faut alors se servir d’insruments pour "mesurer objectivement" les "propriétés qualitatives"d’une oeuvre ? Lesquels ? Compas, logarithmes, fil à plomb, compteur du "nombre de caractères" ??

           


        • alceste 25 juin 2008 09:32

          Je suis en désaccord avec votre article ,votre conclusion et les connotations systématiquement négatives dont vous chargez certains termes, comme "discrimination" : voici le sens premier du terme : "Action, fait de différencier en vue d’un traitement séparé (des éléments) les uns des autres en (les) identifiant comme distincts. Synon. distinction. " ; il s’agit donc, en matière de création artistique et culturelle, de distinguer ce qui a, à nos yeux, le plus de valeur . Le temps qui passe est un grand discriminateur, quelques chefs d’oeuvre sont immortels, ils échappent aux modes, aux contingences temporelles et géographiques, ils appartiennent au patrimoine de l’humanité. Maintenant, si cela leur fait plaisir, et leur donne le sentiment d’oeuvrer utilement pour la démocratie, les contemporains peuvent s’égosiller en criant "Mort aux barbons !". C’est à peu près aussi utile et démocratique que de tronçonner les beaux arbres qui bordent les routes sous prétexte qu’ils tuent les usagers. Faites donc exploser les Boudhas, brûlez les bibliothèques, karchérisez les musées, finissez en avec ces témoignages du passé, et ..."Viva la muerte !"


          • HappyPeng 25 juin 2008 09:48

            Si vous approuvez la sélection par la tradition et le caractère discriminatoire alors vous n’êtes pas en désaccord avec le constat que je fait, juste avec mon opinion affirmant qu’il faudrait se débarasser de ces conceptions.


          • karg se 25 juin 2008 09:56

            Le problème c’est que vous ne définissez pas la culture autrement que par une sorte de bon sens élitiste qui s’appuit surtout sur l’ancienneté et le consensus autour d’une oeuvre ou d’un courant. Je vois pas ce que ça à de culturelle de tous s’extasier devant les mêmes choses, et de préférence des antiquités. Vous critiquez la pauvreté culturelle mais vous ne vous intéressez qu’a des oeuvres "mainstream" et rejetez vivement toute innovation.

            L’art a aussi une place dans une époque et un lieu, certaines oeuvres n’ont aucun sens en dehors de leur contexte. Hors vous essayez de sublimé l’art et de le déshumanisé, c’est à dire de considérer que seul l’objet artistique compte et non pas la démarche qui l’accompagne. Ca explique votre incompréhension de l’art moderne qui consiste à transmettre au delà de l’oeuvre en elle même, qui n’est qu’un canal par lequel passe les sentiments et les émotions de l’artiste.


          • alceste 25 juin 2008 13:35

            @ l’auteur,

            je vous remercie de votre réponse, mais là encore, je vais revenir - bien que ce soit probablement irritant au possible - sur les termes que vous employez : là où j’évoque le Temps, notion philosophique, vous utilisez le terme "tradition", qui implique d’une part une forme de pesanteur sociale, et qui, d’autre part a pris aujourd’hui des connotations politiques auxquelles je n’adhère pas. Quant au "caractère discriminatoire", je crains d’avoir vainement repris la définition de base , puisque vous ne la concevez que dans l’acception de "discrimination sociale", alors que j’ai passé quarante ans de mon existence à essayer de convaincre des esprits plus ou moins rétifs que l’héritage culturel dont nous disposons et qui s’enrichit sans cesse ne doit pas rester aux mains des privilégiés de l’ordre social. Maintenant, débarrassez-vous de ce que vous voulez, prônez à votre aise le culte unique du présent, je compte bien transmettre autre chose à mes petits enfants : "Si Peau d’Âne m’étais conté, j’y prendrais un plaisir extrême". Et nous irons voir aussi des dessins animés. En écoutant Eric Satie ou Thélonious Monk.


          • alceste 25 juin 2008 13:47

            @ léon,

            "Mais essayer de décréter que la richesse c’est la pauvreté est une escoquerie intellectuelle, politique et morale", voilà selon moi la meilleure des synthèses. Elle souligne aussi le côté "orwellien" de certains arguments, Big Brother ayant convaincu tout le monde que " la liberté c’est l’esclavage" etc. etc.


          • sisyphe sisyphe 25 juin 2008 18:25

            par Léon (IP:xxx.x01.54.211) le 25 juin 2008 à 12H02

             
            Que la culture soit dicriminatoire est une évidence, au même titre que les patrimoines ou la force physique. La question est : comment lutter contre cette discrimnation ? Il a deux façons : soit vous rendez tout le monde pauvre soit vous essayez de les rendre tous riches.
             
            Pffffff... Déjà, bonjour la comparaison ! "Au même titre que les patrimoines ou la force physique"  : pourquoi pas aussi la couleur des yeux, la taille, la longueur du sexe ?
             
            Quant à la dichotomie, elle est carrément ridicule : l’accès à la culture peut se faire par un tas de moyens, qui n’ont pas forcément à voir avec la "richesse" ; d’autant plus aujourd’hui, avec les formidables instruments de "vulgarisation" ou plutôt d’accès, que sont la télévision, internet, etc.... Ce n’est qu’une question de CHOIX POLITIQUE, c’est tout.
             
            Et puis, on dirait que vous parlez de la culture comme de ce qui serait, a priori, exclusivement réservé aux riches ; mais de quoi parlez vous donc ? De ce qu’on trouve dans les musées ? Un tas de gens y ont aujourd’hui accès.
            En fait, vous ne parlez de la culture que comme si c’était une chose morte ; codifiée, répertoriée, cataloguée, encensée et embaumée.
             
            Sortez un peu, écoutez, regardez ; la culture se fait aussi là, devant vous, et vous ne vous en apercevez même pas : c’est dommage pour vous, mais, en tout cas, ça ne vous donne aucune légitimité pour en parler de façon définitive.

          • golgoth 25 juin 2008 11:09

            Trés bon texte et trés bonne question.

            Il est vrai qu’un principe de nos démocraties est "égalité pour tous, accés à la culture pour tous". Mais l’expression "culture populaire", qui regroupe les formes d’art jugées moins "nobles", ne veut elle pas dire que la "vraie culture" est et doit rester réservé à une élite ?

            Il est évident que l’on doit mettre en oeuvre tous les moyens pour que tout le monde puisse accéder à la culture. C’est même une des motivations des mouvements révolutionnaires ayant aboutis à notre démocratie. Mais la question qui se pose est le choix entre un nivelement par le bas ou la quete d’une ouverture vers une culture "élitiste" (qui sera forcément inaccessible à tout le monde et en même temps) ? (en relisant ma phrase, je ne la trouve pas vraiment claire mais je ne sais comment exprimé ma pensée correctement désolé). Avoir une élite cultivée et éveillée n’est elle pas une necessitée pour le fonctionnement correcte de notre démocratie ? C’est d’ailleurs à cette élite (bourgeoisie et certains nobles) que l’on doit notre démocratie (même si c’est également eux qui en ont tiré le plus de profit).

            Ne pas oublier que le mot culture peut aussi englober d’autres choses que l’art pur et dur : on peut y greffer la cuisine (qui est un art aussi), la religion et toute sortes de traditions. Ca peut embrouiller les esprits.

            Avant d’etre moinssé parce que j’ai osé dire qu’avoir une élite comme "exemple à atteindre" était peut etre pas une mauvaise chose, je tiens à préciser que je ne fais pas parti de l’élite, que j’aimerai bien savoir apprécier l’art mais que malheureusement je n’ai jamais eu la chance d’etre "eveillé" à l’art ni par ma famille, ni par l’éducation nationnale.


            • alceste 25 juin 2008 14:01

              @ Golgoth,

              J’espère bien que vous ne serez pas moinssé ! en matière de culture, il n’y a pas d’élite sociale qui tienne, il y a des exemples très en vue de gens blindés de pèze et très jet set qui sont d’une inculture monumentale, et qui n’ont jamais eu la moindre soif de savoir quelque chose qui ne leur rapportait pas d’argent ou de pouvoir ( je ne nomme personne, si vous voyez ce que je veux dire) . Mais vous, qui avez cette curiosité, cette soif, ce désir, la culture est à vous, croyez moi. Ne vous laissez snober par personne. Et pour reprendre une formule de Coluche, moi non plus, je ne suis pas "sorti de la cuisine de jupiter".

              cordialement,

              Alceste.


            • 1984 1984 25 juin 2008 14:06

              En quoi l’élite culturelle serait forcément l’élite financière ? Les bibliothèques sont gratuites, on retrouve beaucoup de films anciens dans de plus petites salles pour 3 ou 4€ (Contre 8 ou 9€ pour un film récent), et en tant qu’étudiant, je paie ma place d’opéra ou de théâtre 5€ (De toute façon, il me coûterait 2 ou 3 fois moins cher d’acheter une place d’opéra qu’une place de concert d’un artiste en vue).

              Un livre de Stendhal, Flaubert ou Zola coûte moitié moins qu’un album de Diam’s. Toujours en tant qu’étudiant, je vais au Musée gratuitement. Il faut arrêter, nous ne sommes plus au 18éme siècle, où l’art de la lecture n’était enseigné qu’à la bourgeoisie, où seuls les plus riches pouvaient jouir d’un tableau. La vérité, c’est que la sous-culture est hors de prix, mais qu’on s’obstine à considérer comme bourgeois ceux qui lisent un bouquin qui leur a coûté 2€ d’occasion au lieu d’écouter du rap sur un téléphone portable à 400€.

              Je viens d’une famille d’ouvriers, alors l’argument de la bourgeoisie, merci.


              • golgoth 25 juin 2008 16:23

                +1 pour le monsieur

                Quand je disait "elite" je faisais référence aux gens cultivés et non à l’elite politique ou financière (même si le fait d’etre riche facilite l’accés à la culture).

                Pendant une longue période de notre histoire, la culture a été entretenue (sauvée ?) par des moines vivant en soutane et en sandale dans des monastère parfois trés austère. Et nombre d’artistes ou lettrés ont vécu dans une grande pauvreté avant de s’en sortir ou bien ont finis dans la fosse commune.


              • Thomson 25 juin 2008 21:50

                Sysiphe a écrit à Léon :

                « Mais de quelle légitimité vous permettez-vous cette sentence définitive ?
                Franchement , d’où parlez vous ? »

                Alors, celle-là, vrai, elle me laisse baba. Je ne savais pas qu’on avait encore le droit de se livrer à ce chantage gauchisto-lacanien qui sentait déjà les cabinets bouchés dans les années 1970 : d’où parles-tu (parce que, forcément, on parle au nom d’une norme, hein, donc fasciste, oh là là, l’autorité, le père, tout ça....).

                Sur le fond, je crois que je comprends ce que Léon veut dire. La grande œuvre se caractérise par une utilisation optimale de ses propres contraintes, ou de ses propres codes, et elle atteint à ce moment un degré de complexité — oui, c’est le mot qui convient — qui la rend inépuisable. C’est pourquoi on lira toujours le Dante, Shakespeare, Dickens, etc. Ces œuvres-là ont quelque chose à dire à chaque époque. C’est précisément pourquoi elles entrent dans un canon.

                Dès lors, il peut y avoir des grandes œuvres dans des domaines de la culture non légitime. Par exemple il y a des bandes dessinées qui sont de très grands chef-d’œuvres (Jean-Claude Forest, quelqu’un ?) et il n’est pas besoin de justifier cela en disant que ce sont de véritables romans, mais mis en bande dessinée, ou que c’est comme un film, mais sur du papier. Ce sont des chefs-d’œuvre PARCE QUE ce sont des bandes dessinées.

                De toute façon, l’opposition art noble art populaire est une opposition sociologique. Ca n’a strictement rien à voir avec l’art ou la littérature.

                En sens inverse, il y a des critères techniques d’appréciation. Par exemple si un musicien connaît en tout et pour tout trois accords qu’il plaque pendant tout un concert ou tout un CD, ça n’est pas du grand art. Mais on a AUSSI le droit d’aimer les arts simples. On a même le droit d’aimer des trucs complètements idiots.

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