Bonjour franc
Vous
évoquez Simone Weil. Ce qui m’intéresse ici chez elle c’est justement pourquoi
elle considère qu’elle ne peut rejoindre le christianisme. Sa recherche
spirituelle n’est pas seulement une démarche philosophique, elle s’apparente à
la religiosité, à la spiritualité religieuse. Mais, très soucieuse de
l’existence d’un monde non-violent, elle constate que l’Eglise, parce qu’elle
ne veut pas de la réflexion philosophique dans la liberté, dans l’indépendance
de tout dogme, ne peut pas comprendre réellement, en tous cas pas admettre, ce
qui est indispensable à la non-violence.
D’une
certaine manière je suis sorti de l’église catholique pour les mêmes raisons
qui ont retenu Simone Weil d’y entrer : la recherche spirituelle y bute sur le
dogmatisme, pas même sur le dogme au sens propre. Regarder Dieu comme n’étant
pas l’auteur des ordres de massacrer donnés en son nom n’oblige pas vraiment à
rejeter des vrais dogmes, seulement l’attitude dogmatique, que je peux
qualifier aussi comme ce que Jean-Claude Michéa dans son plus récent livre
nomme le « mentir à soi-même ».
Il
me paraît évident qu’aujourd’hui, avec la menace islamique omniprésente et le
sort fait aux chrétiens (entre autres) dans les pays islamisés les plus
violents, les théologiens de l’école Ratzinger / Benoît XVI ne peuvent plus
ignorer d’où vient cette violence hors christianisme, ni la responsabilité -
ancienne mais maintenue - du christianisme dans ses origines.
Quand
je vois à quelles « horreurs logiques » ont abouti, en certaines pages,
les rédacteurs des annotations de la Bible annotée de Jérusalem - en 2000,
alors que le besoin de non-violence religieuse n’a jamais été aussi évident ! -
j’imagine combien ils ont dû se mentir à eux-mêmes pour ne pas conclure à la nécessité d’abandonner leur fausse route
et choisir plutôt de rejeter fermement la partie criminogène de leur théologie.
Je l’ai dit plus haut, je crois que la part morale de la fatigue de Benoît XVI
vient principalement de ce mauvais choix : continuer de se mentir à lui-même et
de mentir aux croyants chrétiens quand la nécessité de prendre impérativement
l’autre route était devenue manifeste. Pour sa défense, il faut reconnaître au
moins à ce mauvais pape que la plupart de ceux qui l’accusent, notamment les
athées superficiels que je qualifie de « bouffeurs de curés », lui
reprochent précisément le peu des efforts qu’il a réellement faits pour
redresser la barre : ils lui ont reproché son discours de Ratisbonne parce
qu’il y critiquait l’islam. S’ils n’étaient eux-mêmes des complices des
islamistes ils lui auraient reproché de ne pas avoir assez, et pas assez directement, montré la violence islamique et sa source
théologique.
Celle-ci
ayant pour origine le mauvais choix des Pères de l’Eglise catholique, et sa
pérennisation par les responsables de cette Eglise jusquà nos jours, il ne
pouvait guère aller plus loin et plus directement.
C’est
pourquoi je dis dans cet article que ce sera la tâche la plus importante et la
plus urgente de son remplaçant que de le faire, de rejeter très
explicitement la théologie criminogène,
fut-elle devenue depuis longtemps seulement indirecte dans toutes les
composantes du christianisme. Encore faut-il le lui demander.
Contrairement à ce que croient beaucoup de ceux qui
me reprochent ma démarche, me voyant comme "un ancien catho brûlant ce
qu’il a adoré" je compte beaucoup plus, pour le faire, sur les catholiques
restés dans l’Eglise que sur ses adversaires athées sans objectif réel de
permettre la réalisation d’un monde non-violent.