Héraldique : le blason d’Emmanuel Macron
La chose est peu connue : en France, aucune loi n’interdit à quiconque de créer son propre blason*. Du président de la République à madame Chardavoine ou à monsieur Meurdesoif, chacun peut, s’il le souhaite, mettre sa lignée en valeur par le biais d’armoiries originales, à l’instar des familles nobles ou des riches négociants du passé. Précisément, Emmanuel Macron a décidé, apprend-on de source élyséenne sûre, de réaliser un rêve qu’il nourrissait depuis son élection en 2017...
L’information est restée jusque-là confidentielle, et l’on se gardera bien de donner ici le nom du conseiller qui a vendu la mèche. Toujours est-il que l’on a appris – sans trop en être surpris, eu égard à l’ego du personnage – que le chef de l’État a décidé de s’armorier. Il a même été vivement encouragé dans son projet par Benjamin de Rothschild, l’héritier du célèbre banquier franco-suisse Edmond de Rothschild. C’est ainsi qu’entre la gestion de la pandémie de Covid-19 et l’émergence du conflit social sur la réforme des retraites, Emmanuel Macron a demandé à un héraldiste lyonnais de réputation internationale, Laurent Granier, de réaliser un blason dont les thèmes, après avoir été soigneusement étudiés, ont été consignés dans un cahier des charges rigoureux. AgoraVox ayant réussi à se procurer une représentation de ce travail, chacun peut en contempler le résultat en illustration de cet article.
Pour son blason, Emmanuel Macron a choisi la forme de ce que l’on nomme en héraldique l’« écu français moderne ». Concrètement, les armoiries du président de la République nous donnent à voir un « écartelé à croix potencée d’or ; d’azur en cantons 1 et 4, les deux à bâton d’Esculape sable et argent ; de gueules en cantons 2 et 3, à symbole jésuitique pour l’un, et symbole de banque pour l’autre ; brochant sur le tout, un écusson de sinople à symbole astronomique d’azur représentant Jupiter. » Vous avez du mal à suivre ? Normal, dès lors que l’on ne fait pas partie des familiers de cette discipline. Disons pour simplifier la compréhension : qu’un « écartelé » est une partition de l’écu en plusieurs cantons (ou quartiers) ; que « brochant sur le tout » signifie : placé en surimpression au cœur de l’écu ; que les couleurs en héraldique sont médiévales et ne portent pas les mêmes noms que dans l’usage contemporain courant, le rouge devenant « gueules », le bleu « azur », le vert « sinople », le jaune « or », le noir « sable » et le blanc « argent ».
Décodons maintenant le contenu de ce blason.
La croix symbolise à l’évidence la chrétienté. Bien que né dans une famille athée, Emmanuel Macron a en effet été baptisé, à sa demande, à l’âge de 14 ans avant de faire une grande partie de ses études chez les Jésuites du lycée La Providence d’Amiens. Pourquoi une croix potencée plutôt qu’une croix grecque, une croix pattée ou une croix tréflée ? nul ne le sait. Et peut-être le président lui-même n’a-t-il fait ce choix que pour une raison esthétique. À moins qu’il n’ait exprimé là un regret de n’avoir pu être un « chef scout » comme prétend l’avoir été son ami Alexandre Benalla, un rang dont on ne trouve pourtant aucune trace dans les registres du mouvement. Quant aux quartiers de « gueules » et d’« azur », le plus probable est que ces couleurs fassent référence, soit aux armoiries de la famille d’Albret – Emmanuel Macron a été élève du prestigieux lycée parisien Henri IV –, soit à celles de la ville d’Amiens, soit encore à celles de Paris, soit aux trois à la fois.
Comme on a pu le constater, les quartiers sont tous porteurs de symboles en rapport avec l’attachement que le président de la République porte à tout ce qui a fait de lui l’homme qu’il est aujourd’hui. À commencer par le bâton d’Esculape ; présent sur les quartiers 1 et 4, il rend manifestement hommage, l’un à son père, l’autre à sa mère, tous deux médecins, comme le sont également son frère et sa sœur. En quartier 2, le monogramme IHS se réfère sans nul doute aux Jésuites qui géraient l’institution La Providence d’Amiens lorsque le jeune Emmanuel y étudiait. Quant au quartier 3, il est porteur d’un symbole de banque ô combien révélateur : il montre de manière évidente le rapport étroit que, malgré son entrée en politique, le chef de l’État n’a jamais cessé d’entretenir avec le monde de la finance.
Tout aussi emblématique de la personnalité d’Emmanuel Macron est l’écusson « brochant sur le tout », autrement dit placé au « cœur » de l’écu (on dit également en « abîme »). Il représente, et cela n’étonnera guère, le symbole astronomique de la planète Jupiter, couleur « azur » comme il se doit. Rappelons à cet égard que Jupiter est la planète maîtresse des natifs du Sagittaire, le signe zodiacal du président. Mais pourquoi a-t-il choisi la couleur « sinople » en fond de cet écusson ? Peut-être faut-il voir là une manière d’allier Jupiter à Vénus dont le « sinople » est la couleur associée ? Quoi qu’il en soit, l’important est la présence centrale de Jupiter, une planète certes, mais également un dieu dont on constate qu’il a paradoxalement pris une place prépondérante dans l’esprit de ce chef de l’État chrétien. Ce qui nous amène fort logiquement à la devise qui, selon nos sources, devrait souligner l’écu du président lorsqu’il sera officiellement rendu public : « Viribus meis debeo Jovem », ce que l’on peut traduire par : « Je dois ma force à Jupiter ».
Cela dit, une question demeure : au-delà de l’évidente démarche de nature narcissique, quel motif impérieux a poussé Emmanuel Macron à se doter d’armoiries alors qu’il n’aura pas de descendants pour redorer son blason ?
* Interdit sous la Révolution en juin 1790, l’usage des armoiries a été rétabli par l’Empire en mars 1808. Depuis, rien n’a véritablement changé dans les textes de loi. Fait étonnant, si nombre de familles et de collectivités possèdent leurs propres armoiries, rien ne définit celles de notre pays qui peuvent à loisir être modifiées par le chef d’état en exercice. La Constitution ne mentionne en effet que la langue, le drapeau tricolore, « La Marseillaise » et la devise.
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