RENNES – L’anthropologue et économiste Paul Jorion, ancien
financier qui avait prévu la crise des subprimes, estime que le futur
président devra d’abord tenir compte de la gravité de la situation et
« stopper la spéculation ».
Q : Qu’attendez-vous du président après son élection ?
R :
J’attends tout d’abord qu’il prenne des mesures tenant réellement
compte de la gravité de la situation, comme cela a pu être fait en 1933
par Franklin Roosevelt. Si c’est Nicolas Sarkozy qui est réélu,
j’attends qu’il fasse – mieux vaut tard que jamais – ce qu’il a promis
en septembre 2008, à savoir refonder le capitalisme. Si c’est François
Hollande qui est élu, j’attends des mesures dans le même ordre d’idées,
mais plus radicales, à savoir mettre en place les éléments du système
qui remplacera le capitalisme dont la faillite a été constatée en 2007.
Q : Que devra-t-il faire en premier ?
R :
Stopper la spéculation. Je le réclame depuis 2007. Ce n’est pas
compliqué : il y avait deux articles qui l’interdisaient dans le code
pénal (art. 421 et 422) et un autre dans le code civil (art. 1965). Ils
ont été abrogés en 1885 sous la pression des milieux d’affaires, au
terme d’une campagne qui a duré près de trente ans. Il suffit de
restaurer ces articles.
Q : Ce qu’il ne devra surtout pas faire ?
R :
Il ne devra surtout pas se mettre aux ordres du Fonds monétaire
international (FMI) et prendre des décisions qui poursuivent la mise en
application du programme ultralibéral de cet organisme depuis
soixante-dix ans, et qu’il impose en ce moment à la Grèce.