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Jean-Louis Lascoux Magloiramoi 15 juillet 2006 14:05

Evidemment, un sujet comme celui présenté, avec Jean-Marie Lepen en première, ça en jette, ça brule les doigts et démangent les neuronnes de tout journaliste professionnel et, a fortiori, de tout amateur. Photo immortalisée de l’écran. Allons, que JM Lepen saisisse l’occasion de passer sur un media, c’est logique. Lepen ne peut pas refuser. Il n’aurait pas refusé. N’importe quelle feuille de choux lui envoie un questionnaire, il y répond. Pourvu que l’on s’intéresse à lui. Il a ça, il a besoin de se faire entendre... Clairement, plus que tout autre.

Sur la forme du documentaire

La manière de faire le reportage, avec les gros plans, les promenades d’un autre siècle, est plutôt agréable. Il y a de la poésie, du romantisme dans tout cela. La performance technologique est aussi remarquable. Il était tard et j’ai quand même regardé, ennuyé sans plus par la contrainte de devoir cliquer pour voir/entendre la suite, la suite, la suite etc...

Sur le contenu... sans surprise

Comme en témoigne son parcours et son discours, JM Lepen n’a pas une ligne directrice en matière politique. Relativement aux problèmes de la cité, il n’y connait pas grand chose et ne s’en cache pas. Ce n’est pas son combat. Il n’a donc rien à dire. Les OGM ? Il ne connaît pas. Le pouvoir d’achat des français n’est pas son problème. Etc. Etc. S’il est pour la peine de mort, c’est parce qu’il est en colère. Sa ligne rouge, son combat, il le dit, le répète, c’est lui, être reconnu, entendu. Il est en manque, voire en mal, de reconnaissance. Il en devient inévitablement contradictoire, soumis, colèrique ou fuyant.

Pour se faire entendre, il joue d’une certaine provocation. Une provocation qui n’a pas d’autre finalité que d’attirer l’attention sur lui. S’en rend-il compte ? Manifestement pas. Il s’incarne lui-même, capitaine du bateau, galère pour les autres. S’il paraît désordonné intellectuellement, avoir la mémoire sélective, ce n’est que parce qu’il ne s’intéresse pas à la réalité d’autrui. Ou, plus exactement, qu’il en est venu à ne plus s’y intéresser. Parce que, incontestablement, il a un parcours politique qui a témoigné, pendant une longue période, d’une recherche de positionnement, pour finalement se retrancher dans des positions extrêmes qui lui ont valu un banissement politique. Et, précisément, comment se faire une place parmi tous ces politiciens qui se bousculent aux portillons du pouvoir ? Il se fraie un passage, bouscule, frappe éventuellement. La plupart du temps, il vit comme des agressions toute confrontation à ce que d’autres identifient chez-lui comme des contradictions. Soldat de sa cause malentendue, il grogne en se suivant lui-même, donnant hostensiblement dans le politiquement correct. Retranché, il ne sort que pour véhiculer son sentiment d’exclusion comme autant d’appels à l’unification et c’est pourquoi il impacte sur ceux qui en ont un de même nature, ceux qui se reconnaissent en lui et se fourvoient dans ce chemin qu’il n’a pas tracé pour autrui, mais pour lui seul.

Après lui, le naufrage du FN ne l’intéresse pas.

Voilà un homme, perdu dans sa lutte, devenu trop lourd à force de travailler une certaine légèreté, désormais sans valeur morale. Un homme qui énonce des situations en terme de problème et suggère ou proclame posséder l’art des solutions finales. Il donne en représentation son histoire, ses balbutiements, sa réactivité, ses actes et paroles qu’il en vient à contester lui-même, son image et qui, en somme, exhibe avec force toute la faiblesse humaine. N’est-ce pas cela qui est trompeur ? Lui ne trompe personne, sinon, peut-être, lui-même. Seuls ceux qui se voient et se reconnaissent dans le jeu de miroirs qu’il tend au public se trompent. Mais cela lui échappe, même s’il en joue, disposé qu’il est à utiliser chacun comme instrument de sa propre mise en scène.

Ce n’est ni triste ni réjouissant. Qu’il séduise ou déplaise, il sait malgré tout, en se plaignant ou se mettant en colère (ce qui relève du même processus), en simulant ou en étant authentique (la maîtrise des sophistes), s’imposer dans l’agora médiatique.

Et, quand bien même il sortira un programme politique, il sera à cette image : fortement affirmée au gré de ses humeurs, avec des promesses dont la réalisation sera plus incertaine encore que celles auxquelles nous croyons ... parfois.

En fait, probablement l’acteur ne souhaite qu’une chose, mourrir sur scène. Après lui, le naufrage du FN ne l’intéresse pas. Pas plus que le chaos du reste du monde. Son programme, peu importe ce qu’il pourra en écrire, son seul programme, c’est lui.

Allez, salut grognard, maintenant, il va quand même aller à la pêche aux voix... et la République n’a pas besoin d’un soldat de plomb.


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