L’angoisse des financiers avant
l’orage
Aujourd’hui j’ai fait le tour de
plusieurs assureurs. Je leur ai demandé comment ils appréhendaient
les semaines à venir. Les dirigeants esquivent, contournent la
question, réservent leurs réponses. En bas de l’échelle, les
gens sont plus loquaces. Plus une affaire ne se fait. Les vendeurs
d’assurance sont payés pour boucler les dossiers en cours, et
n’ont plus de programme pour la suite.
La vraie question est de savoir qui
paiera ses primes à la fin du mois ? J’entends que certaines
grandes compagnies ont six semaines de trésorerie pour tenir. Trop
de défauts de paiement en mettra plusieurs en difficulté.
La CNP a pris soin de communiquer urbi
et orbi sur sa solvabilité. Cette précaution est suspecte. La
grande peur, je la connais : c’est celle d’un rachat massif de
portefeuilles d’assurance-vie. Les assureurs n’ont pas assez de
liquidités pour rembourser tout le monde, surtout si la panique se
fait chez les clients. Les assureurs sentent bien que le scénario
noir n’est pas à exclure dans les jours qui viennent.
Ce faisant, beaucoup d’assureurs
renâclent à payer les prestations. Ici, on me dit qu’il fallut
insister fortement pour qu’un grand assureur de la place paie les
trois mois de salaire qu’il devait à un client au titre d’un
contrat de prévoyance. Là, les patrons demandent la mise en oeuvre
de la clause de perte d’exploitation, et les assureurs refusent.
Les litiges sont remontés à Bercy.
Selon toute vraisemblance, Bercy
demandera aux assureurs de plier. Mais ce n’est que reculer pour
mieux sauter. La situation risque de se tendre dangereusement. Je
pronostique des nationalisations massives en mai pour éviter des
faillites systémiques.
https://www.lecourrierdesstrateges.fr/2020/03/20/le-jour-ou-la-france-a-commence-a-se-disloquer/