Le confusionnisme, ou la nouvelle inquisition moderne
Un individu bien intentionné s’est livré il y a peu à une diatribe sans concession à l’égard d’Étienne Chouard, le célèbre mangeur d’enfants. La vomissure est consultable ici : http://www.parasite.antifa-net.fr/les-confusionnistes-qui-favorisent-la-montee-du-fascisme-en-europe/
Adoncques, je n’ai pu m’empêcher de me fendre à mon tour, d’une réflexion sérieuse, objective, minutieuse à propos de cette ribambelle de points Godwin.
« Cependant, à la différence d’opposants de gauche, comme Raoul Marc Jennar qui fait le tour de la France en 150 conférences-débats contre ce projet de constitution, Etienne Chouard ne quitte quasiment jamais son ordinateur durant cette période »
De tout le texte, Jennar sera l’unique nom cité de manière implicitement positive. Après, l’efficacité d’un combat politique n’est pas fonction de la mobilité des gens, mais de la pertinence de leurs analyses et du nombre de personnes qui y souscrivent. À l’époque, Chouard a fait un travail intellectuel, non politique, en étudiant un texte, non en voulant réformer la société. L’accusation sous-entendue selon laquelle l’authenticité d’un combat politique est fonction de l’implication sur le terrain et du nombre de conférences est, non seulement fallacieuse, mais de surcroît est incohérente auquel cas Asselineau devrait être considéré comme un sain pour les centaines de conférences qui a donné.
« avec chacune des deux mouvances qui refusent ce projet : la gauche radicale et l’extrême-droite (au total 55% des votants français) »
La gauche radicale et l’extrême-droite auraient donc des points de convergence idéologique…
« Etienne Chouard caresse le mythe de l’union des contraires contre le pouvoir en place »
Nouvelle incohérence : il n’est pas possible de dire que pareille union est un mythe pour avoir affirmé la phrase précédente que la droite radicale et l’extrême-droite refusaient le même texte, de surcroît en disant que la majorité de la population l’a rejeté, ce qui tendrait à prouver que soit la majorité de la population est de gauche radicale et d’extrême, soit qu’il puisse exister des idées transpartisanes qui déplaisent à la majorité de la population sans que cette dernière ne se soucie du courant à laquelle on pourrait l’associer.
« se rapproche d’organisations d’extrême droite prônant également ce rapprochement, à commencer par Egalité et réconciliation dont le président-fondateur se revendique « national-socialiste » (2) et avec laquelle il multiple les rencontres, conférences (3, 4), entretiens et soutiens mutuels. »
Premièrement, peut-être que si les médias de masse traditionnels donnaient plus souvent la parole à Chouard, il n’aurait pas eu besoin de se tourner vers cette structure pour avoir de l’audience. Quand la parole est à ce point muselée, il ne faut pas s’étonner de la voir se propager par d’autres moyens. Ce qui en soit démontre que le musellement, le confinement et l’anathème sont inefficaces, et participent même à leur expansion grâce à l’effet Streisand.
Ensuite, ce n’est pas parce que Chouard participe à une conférence organisée par E&R qu’il valide la totalité des analyses de cette association, d’ailleurs la conférence ne portait pas sur les idées de Soral, mais sur la remise en cause du courant philosophique des Lumières. Que je sache, les intellectuels qui contestent ce courant ne sont pas nationales-socialistes, d’autant que le national-socialisme, historiquement, ne contestait pas l’apport des penseurs du XVIIIe siècle.
Enfin, il est malhonnête de parler de rencontres qui se multiplient en prenant pour exemple une unique conférence. Si Chouard avait tant d’appétence pour les idées de Soral, il aurait participé à bien plus.
« Ménageant la chèvre et le chou, les racistes et les antiracistes, les phallocrates et les féministes, »
Comme il est aisé de formuler autant d’assertions accusatrices sans se donner la peine de livrer des noms et de procéder à une analyse détaillée montrant l’effective accointance idéologique…
« Il essaie notamment de faire croire que toutes les idées se valent, y compris les plus nocives et dangereuses visant des groupes discriminés ou menacés (femmes, migrants, juifs, musulmans…). »
Cette phrase a une syntaxe incorrecte puisque la première proposition porte sur la question de la valeur des idées, tandis que le reste de la phrase n’a pas de lien sémantique avec le début, qui tend à porter le débat sur un aspect manichéen des idées. En effet, si on isole un morceau « les idées se valent, y compris les plus nocives » il est facile de comprendre l’absence de sens puisque la question de la valeur implique une réflexion globale, notamment fondée sur la comparaison entre lesdites idées, alors que parler de nocivité ne procède pas à une analyse, mais à un jugement.
L’assertion se prive naturellement de lister les idées tant nocives que Chouard défendrait, et de sourcer les documents où Chouard le ferait. À l’inverse, l’auteur procède à une citation de groupes discriminés pour instiller l’idée selon laquelle Chouard chercherait à leur nuire, sans pour autant étayer pareil propos de la moindre preuve. L’ironie est telle que l’auteur à l’audace d’accuser Chouard de confusionnisme.
« Comme tous les fascistes »
Non seulement il n’est pas donné de définition claire du fascisme, mais de surcroît il n’est pas donné les critères selon lesquels Chouard répondrait à cette définition.
« il feint de ne pas comprendre que la première des libertés, c’est celle de vivre »
L’assertion est maligne puisqu’elle contient un postulat implicite selon laquelle la liberté de vivre primerait sur toutes les autres, or cela est une opinion, et comme toutes les autres, elle n’a rien d’absolu (coucou Sextus Empericus !), si bien qu’il n’est décemment pas possible d’accuser un individu de penser autrement, de surcroît sans avancer l’ombre d’une source où Chouard prétendrait refuser à chacun la liberté de vivre, ce qui en soit n’est pas une idée constituant le noyau du fascisme originel.
« Comme tous les fascistes, il feint de ne pas comprendre que la première des libertés, c’est celle de vivre, et non d’exprimer un propos qui menace la vie d’autrui (incitations à la haine, discriminations, boucs-émissaires, théories du complot, lynchages ou inégalités violentes qui peuvent mener à l’élimination physique). »
La phrase présente elle aussi une syntaxe erronée puisque la conjonction de coordination « et » est superfétatoire. Ensuite, elle présente à nouveau une série d’accusations fondées sur des sources qui brillent par leur absence. Chouard n’a d’ailleurs jamais tenu le moindre propos visant à nuire à qui que se soit.
« Dans cet esprit relativiste et hasardeux »
Si son esprit est hasardeux, soit une absence total de contrôle pour être une émanation ne répondant à aucune logique, il est contradictoire de prêter à Chouard une intention spécifique qui serait issue d’une volonté très précise. Ainsi, si son esprit est hasardeux, c’est au hasard qu’il faut s’en prendre et non à l’homme qui le subirait.
« Etienne Chouard prophétise une solution unique à tous les problèmes : le tirage au sort »
Il propose, il ne prophétise pas ; Chouard n’a jamais prédit qu’il s’appliquerait, il entend simplement en faire la promotion. À noter que les vertus de cette idée ne sont abordées à aucun moment dans l’article.
« et s’en proclame le chantre sur son blog »
Aucune source à nouveau, d’autant que l’affirmation entre en contradiction avec la volonté répétée de sa part de « déchouardiser » l’idée du tirage au sort pour qu’elle ne soit plus associée à sa personne. Chouard n’en revendique de toute manière même pas la paternité pour citer Yves Sintomer et André Tolmer comme travaux antérieurs aux siens.
« Il associe les travaux de ses prédécesseurs aux interprétations les plus farfelues. »
Quelles interprétations ? Mystère. L’utilisation d’adjectifs dépréciatifs semble plus aisée que l’articulation d’arguments au sein d’une démonstration.
« Il idéalise abusivement la Grèce antique »
Au passage, idéaliser de manière abusive est un pléonasme. Après, nous avons là une source. Un lecteur averti s’attend à une démonstration précise, implacable, présentant des arguments irréfutables tendant à démonter point par point l’intégralité des travaux de Chouard. Or, il se trouve que le lien renvoie à une vidéo de 42 secondes sans la moindre réfutation d’aucune sorte autre que le titre du document disant que c’est faux. J’applaudis à dix doigts.
Premièrement, tout l’exposé que Chouard peut tenir à l’endroit de la Grèce antique ne tient pas en 42 secondes. Deuxièmement, même si ce qui est dans cette vidéo serait faux, cela n’invaliderait pas tout le reste de sa démonstration. Troisièmement, ce n’est pas affirmant qu’une chose est fausse qu’elle le devient automatiquement. La source est donc parfaitement irrecevable.
« comme le fait traditionnellement toute la nébuleuse fasciste. »
Malheureusement en l’absence de source, on ne peut pas le vérifier.
« Et surtout, il mélange ses sources de gauche et antiautoritaires (Rousseau, Castoriadis) à la promotion de nombreux analystes et commentateurs d’extrême droite »
Au moins avance-t-il des sources contrairement à certain (suivez mon regard).
« Sa méthode est principalement basée sur la confusion (confusionnisme) et favorise de plusieurs manières la montée du fascisme. »
Pas de définition du confusionnisme. C’est le nouveau mot à la mode, depuis qu’on sait que conspirationistes est une invention de la CIA pour discréditer toute personne posant des questions embarrassantes, confusionnisme est apparu, innocemment pour désigner les vilains, les affreux, les méchants-vilains-pas-bô. L’auteur a du utiliser cette carte magique très puissante : https://odieuxconnard.files.wordpress.com/2013/03/dc3a9bat-magique.jpg . En effet, il existe principalement deux manières de débattre : celle consistant à argumenter avec son adversaire, l’occasion de devoir renforcer son argumentation tout en, pourquoi pas, apprenant un ou deux trucs et essayer de convaincre son auditoire, et la technique dite de l’indignation, permettant de se draper dans sa cape l’air outragé en expliquant qu’il ne saurait être question de répondre à un argument, et d’expliquer en quoi il est faux des fois que ça puisse convaincre quelqu’un (fous que vous êtes), en arguant du fait qu’il est rac/mach/droitdelhomm/cycl/paternal (biffez les mentions inutiles) – iste, et que donc, je ne mange pas de ce pain là mon petit Monsieur, le problème de votre argument, c’est vous !
Autant démonter les concepts d’autrui semble aisé pour l’auteur, autant définir les siens semble lui causer quelque détresse intellectuelle.
Au passage, je me permets de lister quelques critères constitutifs du fascisme :
- L'identification d'ennemis ou de boucs émissaires comme cause d'unité : le besoin d'éliminer la menace ou l'adversaire communément perçus (ce que l’auteur fait en désignant Chouard comme un ennemi de la pensée).
- Des médias de masse sous contrôle : les médias sont contrôlés indirectement par une réglementation gouvernementale ou par des porte-parole et des dirigeants sympathiques aux vues du gouvernement. Le corollaire induit de conspuer toutes plateformes de diffusion d’informations ne répondant pas à l’éthique desdits médias (ce que l’auteur fait en critiquant E&R).
- Une obsession avec la sécurité : la peur est utilisée comme instrument pour motiver les masses (ce que l’auteur fait en tentant de montrer la supposée dangerosité des méthodes et des propos de Chouard : Han ! Tremblez mortels…).
- La protection du pouvoir des entreprises : c’est souvent l'aristocratie de l'industrie et des affaires d’une nation fasciste qui a mis les dirigeants du gouvernement en place, créant ainsi une relation avantageuse entre les affaires et le gouvernement et pour l´élite du pouvoir (l’auteur reproche à Chouard de dénoncer les liens entre finance et politique, ce qui par réciprocité induit de défendre lesdits liens).
- Le mépris pour les intellectuels et les arts : les nations fascistes ont tendance à promouvoir et à tolérer une hostilité ouverte envers l’éducation supérieure et le milieu universitaire (ce que l’auteur fait en raillant les ateliers constituants et en s’attaquant à Chouard qui fait partie du corps enseignant). Il n’est pas rare de voir des professeurs et autres universitaires censurés ou même arrêtés.
- Un parti unique strictement hiérarchisé : les gentils virus n’est pas un parti politique, il n’est pas hiérarchisé (les organisations horizontales, ça doit parler à l’auteur).
- Un chef unique, incarnation de l’État qui concentre tous les pouvoirs : Chouard ne dirige pas les Gentils Virus au point de refuser le rôle de chef, si bien qu’il n’incarne pas l’État et défend la stricte séparation des pouvoirs.
- Une absence de délibération : les ateliers constituants réunissent des gens dont l’objectif premier est la délibération et le débat.
- Pas d’opposition : Chouard milite pour un système reposant sur une série de contre-pouvoirs et de procédures administratives de sorte à garantir la parole d’opposants et de sanctionner ceux qui entendent museler la parole d’autrui.
- Interdiction de toute association, sauf le parti unique : l’idée que des gens se réunissent pour réfléchir à leur sort semble contrarier fortement l’auteur.
- Abolition de toutes libertés individuelles : la liberté de se réunir et d’expression sont considérées par l’auteur comme nuisibles.
- Endoctrinement systématique : Chouard combat les dogmes en refusant les clivages politiques et proposant quantité d’ouvrages à lire pour multiplier les sources et développer l’esprit critique là où l’auteur conçoit de l’aversion pour le fait de pousser les gens à s’intéresser à des alternatives en dehors des médias de masses et des institutions et cloisonne la pensée en décrétant que certains auteurs ne se mélangent pas.
« Ainsi, Etienne Chouard brouille les marqueurs politiques et, surtout, dédiabolise l’extrême droite, notamment en prétendant qu’Alain Soral est un « vrai résistant », que le Front National est « à gauche » et qu’il n’est « pas un danger » »
C’est en procédant à des critiques lapidaires et simplistes de la sorte qu’il est possible de constater l’absence totale du moins d’honnêteté intellectuelle, sinon de cohérence dans la pensée. Parmi les personnalités Mônstres de l’extrême droite du Camp du Mâl, il se trouve des personnes qui critiquent Alain Soral. En effet, Michel Collon, François Asselineau, Robert Ménard, Adrien Abauzit, Nicolas Dupont-Aignant (qui s’est séparé de la sorcière maléfique Marion Sigaut) sont autant de personnes contestant les idées de Soral, qu’ils ont publiquement condamnés (ce que Chouard a d’ailleurs fait il y a quelques mois mais qui semble avoir échappé à l’auteur). Le fameux schéma, digne des fiches de la Gestapo, contient une occurrence pour Jean Robin, dont l’acrimonie envers Soral est notoire. Ce faisant, il y a une contradiction manifeste entre le fait de reprocher à Chouard de s’associer à ces personnes pour lui reprocher de défendre Soral alors que ces personnes le critiquent.
« , ou encore en répétant partout que « l’unique fascisme » est celui de l’argent et des institutions qui lui donnent sa puissance. »
http://www.amazon.fr/Street-lAscension-Hitler-Antony-Sutton/dp/2355120439
« En dix ans, Etienne Chouard est devenu le prototype de la passerelle entre la gauche radicale et l’extrême droite. »
Il existe un dicton que l’auteur devrait méditer : si certains se montrent enclins à balayer devant la porte des autres, c’est parce qu’il y a trop à faire devant la leur. Adoncques, une analyse honnête entendrait d’abord une réflexion sur les défauts de la gauche radicale du Bien Absolu, en tentant de comprendre pourquoi il présente moins d’attrait que le Camp du Mâl (rajouter selon votre degré d’indignation, un bruit d’éclair, des chiens qui aboient ou des enfants qui pleurent). Il ne semble pas absurde de penser que les gens préfèrent les personnes qui proposent une alternative à celles qui n’offrent pour seule production intellectuelle la destruction de celle d’autrui.
« A ce titre, avec la mouvance confusionniste, il est l’une des causes de la montée de l’extrême droite en France et de la stagnation des mouvements libertaires et de gauche radicale (alors que ces mouvements se développent ailleurs, notamment en Grèce et en Espagne). »
Naturellement, les gouvernements successifs depuis les 40 dernières années et leur incapacité à résorber la dette et le chômage ne sont en rien responsables dans ce revirement politique. On me chuchote à l’oreillette que le Camp du Mâl obtient des victoires électives dans des pays où Chouard est totalement inconnu…
« Voici l’essentiel de sa méthode décomposée en 10 points, tous parfaitement vérifiables »
Après avoir occulté quantités de sources, ou bien n’en proposer comme celle ne durant que 42 secondes, la superbe rhétorique de l’auteur présente quelques lézardes entamant sensiblement le crédit des borborygmes qu’il a la fausse bonne idée de considérer comme de bonnes idées, n’augurant ainsi rien d’intellectuellement grandiose pour la suite.
« A l’heure où le fascisme est aux portes du pouvoir en France »
Le Retour des Heures les plus Nauséabondes de l’Histoire : mais que fait le Crif ?! La source est incohérente avec l’affirmation. Il s’agit de Soral délirant, ne démontrant en rien en quoi le Camp du Mâl serait aux portes du pouvoir.
« 1 – Etienne Chouard soutient de nombreuses personnalités d’extrême droite, comme le prouve le schéma montrant ses nombreux liens confirmés par les copies d’écran de ses propos »
Le fameux schéma traine maintenant depuis quelques temps sur Internet sans qu’il n’ait endigué de quelques manières que ce soit l’engouement pour Chouard et/ou ses idées, preuve de son inefficacité manifeste. En effet, ce schéma accuse plusieurs défauts :
- son existence induirait un manichéisme politique en supposant une pensée valide, qui, sans la moindre légitimité, serait récipiendaire du Bien, s’arrogeant le droit qu’elle ne possède pas de condamner à loisir des gens.
- le procédé rappelle trop la chasse aux sorcières dit MacCarthysme, qui, sous couvert de préserver une sphère politique honorable, a conduit à une répression intellectuelle majeure et une paranoïa collective.
- il ne présente aucune analyse des personnes incriminées, ni des idées qu’elles défendent.
- le schéma n’a aucune consistance idéologique puisque les personnes listées se critiquent entre elles. Il n’est donc pas possible de reprocher à Chouard de mettre en avant des personnes qui dénoncent les agissements et les idées. Ceci met en lumière une autre contradiction, puisque si Chouard est accusé de croire que les idées se valent, il n’est décemment pas possible de croire que les idées et les actions des personnes listées se valent.
- les mentions de personnes listées ne constituent pas des soutiens directs, ni ne valident l’intégralité de leur pensée.
- il n’est fait aucune distinction entre l’intérêt d’une idée et l’ensemble de la production des personnes listées. Ainsi, certaines mentions ne montrent aucune accointance idéologique. Par exemple quand Chouard dit qu’il s’est entretenu avec Sylvain Durain (sans qu’il soit, même vaguement, présenté succinctement qui est ce personnage et ce qu’il a écrit) ne signifie pas qu’il souscrit à toutes ses idées. Quand Hollande s’entretient avec le président du Kazakhstan ou le roi d’Arabie saoudite, cela ne signifie pas qu’il valide leur idéologie. Quand Chouard dit qu’il trouve le livre de Rougeyron intéressant, cela ne signifie pas non plus qu’il retienne tout ce qu’a pu écrire Rougeyron. Jules Verne défendait le colonialisme et a tenu des propos racistes dans ses livres, ce n’est pas pour autant que ses millions de lecteurs à travers le monde vont revendiquer ces idées.
- Chouard ne porte pas de jugement de valeur sur les idées pour pousser les gens à multiplier les lectures et développer l’esprit critique là où les concepteurs de l’affiche entendent interdire et condamner toute forme d’intérêt pour les personnes listées, sans la moindre explication.
- le schéma est à charge ne procédant à aucune analyse d’ensemble de la totalité des mentions de Chouard. Il se trouve qu’il a aussi suggéré quantité de lectures de gauche, des communistes, des radicaux, des libertaires, des anarchistes, citant fréquemment Kropotkine, Rousseau, Graeber ou Aristote. Autrement dit, pour que ce schéma présente un intérêt véritable, il faudrait quantifier la totalité des sources proposées par Chouard, chiffrer celles qui seraient du Camp du Mâl, et voir, si effectivement, les occurrences maléfiques prévalent sur celles du Bien Absolu. Or ce n’est pas le cas.
Enfin, il faut avoir en tête la citation de Maurice Lemaître : « La seule critique définitive : c'est la création ». Ainsi, il serait plus efficace pour les détracteurs de Chouard et du Camp du Mâl de proposer une alternative valable et de soumettre des textes en réponse plutôt que de se livrer à de l’inquisition moderne.
« 2 – Etienne Chouard soutient de façon privilégiée, ancienne et réciproque Alain Soral, »
Une vague mention ponctuelle lors d’un entretien filmé précipitamment ne constitue pas un soutien privilégié. Quant à Soral, il ne l’a pratiquement jamais évoqué dans ses vidéos, pour n’en mettre que quelqu’unes en liens sur son site. Au passage, Soral est pour une forme de despotisme éclairé là où Chouard combat et dénonce cette idée, pour ne citer que cette divergence, ce que l’auteur occulte sciemment, tout comme la récente condamnation par Chouard des propos de Soral.
« 3 - Etienne Chouard propage l’idée que les fascistes ne sont pas fascistes ; il refuse notamment ce qualificatif et celui d’extrême droite pour « les racistes », « les antisémites », « catholiques traditionnalistes », « les partisans de la peine de mort » et « les partisans de l’interdiction du droit des femmes à l’avortement » »
Et ça ose parler de confusion ? Le Japon, les États-Unis, l’Inde, la Corée du sud, Taïwan ne sont pas des régimes fascistes et pratiquent pourtant la peine de mort. Il existe des racistes de gauche (l’auteur devrait relire certaines déclarations de Jules Ferry, ou plus récemment revoir la vidéo de Valls au marché d’Ivry…) et les catholiques ne sont pas des fascistes, preuve en est que des pays à majorité catholiques, par exemple la quasi intégralité des pays d’Amérique latine, possèdent des gouvernements socialistes de gauche, avec un Camp du Mâl ne se développant pas. Il est d’ailleurs amusant de constater que l’auteur évoque la montée de la gauche radicale en Espagne alors que le pays a restreint le droit à l’avortement.
« Etienne Chouard va jusqu’à affirmer que le Front National est « à gauche, vraiment à gauche » et que « le danger, ce n’est pas Le Pen » »
Le Camp du Mâl n’a jamais formé de gouvernement, n’a jamais obtenu de majorité absolue à aucun scrutin, n’a jamais dépassé 14 % de la totalité des électeurs inscrits, n’a jamais eu de majorité parlementaire, a échoué à la constitution d’un groupe au parlement européen.
Il se trouve que Chouard préfère se concentrer sur ceux qui ont le pouvoir et s’en servent mal, ce qui hélas, est actuellement le cas du Bien Absolu qui semble concevoir quelques difficultés à comprendre ce qu’est la démocratie en usant du 49.3, en laminant le code du travail, en refusant de soumettre les traités à référendum ou en se montrant incapable de faire reculer le chômage. Quand un membre du Bien Absolu dit que son ennemi c’est la finance, et qu’il prend pour ministre des finances un banquier et qu’il y a plusieurs millionnaires comme ministres, il semblerait que les maîtres dans l’art de la confusion se situent ailleurs.
« Il appelle également à renforcer les frontières et à lutter contre l’immigration »
95 % des pays du monde ont des frontières avec des tarifications douanières et un contrôle des personnes entrants sur le territoire, or 95 % des pays du monde ne font pas partie du Camp du Mâl. Il serait bon que l’auteur se renseigne sur les modalités de séjour en Australie, au Japon ou en Corée du sud (pays qui au passage ont parmi les IDHs les plus élevé au monde, une croissance en hausse et un taux de criminalité parmi les plus bas).
« 4 – Etienne Chouard propage l’idée que les antifascistes sont de vrais fascistes et publie, le 27 mai 2013, une accusation selon laquelle les antifas seraient même payés par le pouvoir, exactement une semaine avant l’assassinat du jeune antifa Clément Méric à Paris. »
À nouveau l’auteur fait preuve de contradiction puisqu’il qualifie Chouard de fasciste, et donne ici comme source un lien renvoyant vers un site contenant un article où il est spécifié que Chouard n’est pas considéré comme un fasciste. Assez savoureux il faut dire.
De plus, il y a un mensonge flagrant. Voici ce que Chouard a écrit exactement : « Pas difficile de comprendre pour qui travaillent en fait les antifas et les anticonspis. Le vrai mystère n’est plus de savoir s’ils croient eux-mêmes à tous leurs mensonges et amalgames malhonnêtes, mais de savoir s’ils sont bien payés pour leur sale besogne. » Ainsi, il exprime un doute, non une certitude, et n’affirme pas que les antifas sont payés, encore moins par le pouvoir, pour se demander si effectivement ils le sont. Aurait-il touché une corde sensible ?
En outre, il y a erreur sur les mots : un assassinat est un meurtre avec préméditation. Or concernant l’affaire Méric (dit le vaillant leucémique qui attaque par derrière), la justice n’a pas ouvert d’information judiciaire pour meurtre avec préméditation, bien au contraire puisque la mise en examen porte sur « violences volontaires en réunion et avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner » supposant un accident et non à une embuscade préparée, et de surcroît n’a pas condamnée Esteban Morillo qui a été remis en liberté. L’enquête n’a donc jamais conclu à un assassinat. Il s’agirait de ne pas confondre le sens des mots.
Enfin, ce drame n’infirme ni ne confirme l’idée selon laquelle les antifas seraient payés.
« 5 – Etienne Chouard diffuse des théories conspirationnistes, de surcroît situées sur des sites d’extrême droite vers lesquels il envoie ceux qui le suivent. »
Peut-être serait-il temps de réfuter les thèses plutôt que de lister qui les formule et les diffuse. Je dis ça, je dis rien…
« 6 – Etienne Chouard soutient le film hommage sur Robert Faurisson, célèbre négationniste de la Shoah, comme le montre la copie d’écran de son message de soutien à Paul-Eric Blanrue, réalisateur, publié sur le site du film, aux côtés de celui d’Alain Soral. »
Trois mots formulés par Chouard ne démontrent pas en quoi il validerait la totalité du travail de Blanrue, et surement pas qu’ils donnent crédit aux thèses de Faurisson. De plus, louer le courage d’une personne ne signifie pas pour autant s’associer à la pensée de la personne. On peut saluer le courage d’Alexandre le Grand sans avoir envie d’envahir la Perse et de conquérir Athènes. En l’occurrence, Chouard salue davantage la défense de la liberté d’expression que le fond ; une distinction qui est la base de l’essentiel du travail de Chomsky, sachant différencier la méthode du propos (ce qui en soit est une approche héritée du fasciste Aristote faisant la distinction entre le prédicat et le sujet).
« 7 – Etienne Chouard idéalise abusivement la Grèce antique (procédé très répandu dans l’extrême droite, de la Nouvelle Acropole à l’Institut Iliade et du G.R.E.C.E. à Aube Dorée) »
L’auteur oublie de spécifier que chacun de ses mouvements puisent différemment dans la Grèce antique. Après, en matière de Grèce idéalisée, il faudrait pendre tous les professeurs de collège et les philosophes compte tenu des libertés qu’ils prennent avec ce régime.
« fait de nombreux contresens sur l’Athènes classique, notamment au niveau des chiffres et de la réalité politique effective. »
Premièrement, un contresens et une erreur chiffrée sont deux choses différentes. Deuxièmement, l’auteur ne donne ni les chiffres avancés par Chouard, ni les chiffres conformes.
« Il va jusqu’à affirmer que « les plus pauvres ont gouverné durant 200 ans » en parlant de « gouvernement des 99% »
Il n’appartient qu’à l’auteur de réfuter cette assertion, ce que ni lui ni sa source ne font.
« Et, comme tous ceux qui parlent de démocratie directe à l’extrême droite, notamment Yvan Blot (Club de l’Horloge, Front National, fondateur du site democratiedirecte.fr) »
Il faut une certaine audace, une désinvolture particulière pour oser critiquer Chouard sur un usage maladroit de chiffres vieux de 2 500 ans, et parler de pluralité en évoquant « tous ceux » pour dans le même temps, ne citer qu’une seule personne. Manifestement, seul le Bien Absolu a licence pour se jouer correctement des quantités (6 millions ! Qui dit mieux ?).
« Etienne Chouard ne parle quasiment jamais d’expériences plus récentes et plus poussées comme la Commune de Paris, l’Espagne libertaire, le Chiapas au Mexique, le quartier d’Exarcheia à Athènes, etc. »
En premier lieu, ne pas parler d’une sujet ne signifie pas qu’il y a une volonté de l’occulter. Ensuite, la phrase contient un détail qui a du échappé à l’auteur puisqu’il n’est pas dit que Chouard ne parle jamais, mais qu’il ne parle quasiment jamais, ce qui suppose en soit qu’il en parle quand même. Ce minuscule petit adverbe illustre deux choses :
- l’auteur n’est pas certain de ce qu’il avance, incluant une nuance pour hypothéquer — en vain — toute contestation du Camp du Mâl.
- l’auteur ne reproche donc pas l’absence de la mention des cas historiques précités, mais le fait qu’ils n’aient pas été suffisamment évoqués par Chouard, comme s’il existait un quota minimal de mentions de certains sujets pour estampiller un individu son appartenance au Bien Absolu ou au Camp du Mâl. Tel le pénitent ne s’étant pas assez fouetté pour être absout de ses pêches, Chouard est coupable de crime lèse-pensée pour ne pas avoir convenablement vénérer l’église proudhonienne et léniniste de la Sainte Anarchie. Gageons qu’il sera puni bien assez tôt par Zarx, le dieu de la Lutte des classes !
« 8 – Etienne Chouard occupe et détourne l’espace de réflexion sur la démocratie directe »
Ou comment admettre sa jalousie au grand jour.
« en pratiquant l’imposture (il se prétend à la fois anarchiste et nationaliste) »
En terme d’imposture, l’auteur doit s’y connaître au regard du peu de cas avec lequel il fait montre de malhonnêteté intellectuelle.
« la confusion (il mélange des fragments d’œuvres de Castoriadis ou Rousseau avec des éléments qui n’ont absolument rien à voir) »
Pour citer les propos de Chouard sur Soral, pas de soucis, c’est facile, ça traîne sur n’importe quel site du Bien Absolu. En revanche, pour faire une recension exacte des analyses de Chouard, quand il faut faire un véritable travail de vérification de fond, il n’y a plus personne.
« au point de déboussoler, parfois, ses soutiens qui finissent par le quitter »
La colère de l’auteur est compréhensible, Chouard est plus doué que lui pour éloigner ses soutiens.
« 9 – Etienne Chouard se comporte à l’intérieur de son réseau à l’inverse des principes qu’il évoque. Il multiplie les similitudes avec l’attitude d’un gourou à l’égard de ses disciples, »
Malheureusement pour l’auteur, ni Chouard, ni Soral ou les gentils virus ne sont classés par la Miviludes comme étant une secte.
« Il utilise notamment le procédé très courant dans l’extrême droite qui est d’inverser les rôles et de se positionner systématiquement en victime (exactement comme Marine Le Pen et Alain Soral). Ce procédé est également la base du fonctionnement des sectes. »
http://www.derives-sectes.gouv.fr/quest-ce-quune-dé ;rive-sectaire
« La dérive sectaire - Il s'agit d'un dévoiement de la liberté de pensée, d’opinion ou de religion qui porte atteinte à l'ordre public, aux lois ou aux règlements, aux droits fondamentaux, à la sécurité ou à l’intégrité des personnes. Elle se caractérise par la mise en œuvre, par un groupe organisé ou par un individu isolé, quelle que soit sa nature ou son activité, de pressions ou de techniques ayant pour but de créer, de maintenir ou d’exploiter chez une personne un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d’une partie de son libre arbitre, avec des conséquences dommageables pour cette personne, son entourage ou pour la société. »
En analysant cette définition officielle, on rend compte de plusieurs choses :
- dévoiement de la liberté de pensée, d’opinion : Chouard pousse les gens à multiplier les sources d’information et à développer l’esprit critique là où les antifas se livrent à des procès de la Pensée en rejetant n’importe quel support ou personne du moment qu’il est fait mention d’une seule idée ou d’un seul individu du camp du mal.
- qui porte atteinte à l'ordre public, aux lois ou aux règlements, aux droits fondamentaux, à la sécurité ou à l’intégrité des personnes : Chouard n’a jamais été condamné par la justice et aucune de ses conférences ou de ses ateliers constituants n’a porté atteinte à l’ordre public, à l’inverse, les antifas ont à leur actif des condamnations, des mises en examen, et une série de dégradations publics et d’agressions dans plusieurs manifestations. Quant aux droits fondamentaux, Chouard milite pour une égalité absolue entre les individus là ou le Bien Absolu se permet de formuler des anathèmes sans la moindre légitimité.
- la mise en œuvre, par un groupe organisé ou par un individu isolé : Chouard n’a constitué aucun parti, aucune association, et il n’a rien d’isolé puisque de nombreux intellectuels partagent ses idées (comme David Van Reybrouck, Yves Sintomer ou Bernard Manin, lesquels sont curieusement jamais cités par le Bien Absolu parce qu’ils n’ont rien à voir avec le Camp du Mâl).
- de pressions ou de techniques ayant pour but de créer : Chouard n’a jamais fait la moindre pression sur quiconque là où les antifas se livrent à l’intimidation, la provocation, la diffamation, des menaces et des fichages de tout adversaire.
- de maintenir ou d’exploiter chez une personne un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d’une partie de son libre arbitre, avec des conséquences dommageables pour cette personne, son entourage ou pour la société : Chouard pousse les gens à avoir confiance dans leur bienveillance et dans leur capacité à s’approprier des sujets complexes de la politique, en misant sur leur libre arbitre pour se faire eux-mêmes une opinion, alors que les antifas contestent les personnes qui ont des doutes sur les versions officielles, qui s’interrogent sur le gouvernement, les conflits d’intérêt et l’histoire, cherchant à priver quantités de personnes de matériel intellectuel, automatiquement considéré comme illicite sans la moindre légitimité ni objection irréfutable.
« 10 – Etienne Chouard fonctionne comme un lobby à l’extérieur de son réseau, sur Internet et dans les mouvements sociaux, en utilisant le secret, l’entrisme et la manipulation. »
C’est mal connaître ce qu’est un lobby et comment ça fonctionne, notamment en proposant des sommes importantes ou des services à des responsables politiques pour influer sur la décisions gouvernementales. Chouard ne propose ni argent ni service à aucun responsable politique pour pousser les gens réfléchir sur les décisions gouvernementales.
« Il baptise ses fans, autour de lui, ses « Gentils Virus » en mission pour diffuser sa parole (évangéliser), »
Plusieurs erreurs sont présentes dans cette phrase :
- Chouard n’a pas de fans, il a des gens qui souscrivent à ses analyses, comme n’importe quelle personne qui s’associe à la pensée d’un politicien ou d’un intellectuel.
- il n’est pas question d’évangélisation puisque Chouard ne se prétend pas homme d’église, et n’a pas reçu de révélation divine.
- il n’a pas baptisé ces personnes, il a simplement évoqué à plusieurs reprises le moyen de corrompre le système oligarchique par une pensée simple et profitable au plus grand nombre, en la qualifiant de virus, par analogie à la manière dont les maladies se répandent. Ce sont certains démocrates qui par la suite ont repris cette expression par simplicité.
Après, il y a une incohérence dans le propos puisque l’auteur, ne faisant pas la distinction entre la méthode et le propos, sous-entend que diffuser une parole est néfaste, tout en diffusant ses propres opinions dans un article sur son blog.
« Faut-il s’étonner du choix du mot virus ? Un virus est le vecteur, non pas d’un progrès, mais d’une maladie, et son étymologie ne souffre aucune ambiguité : virus en latin signifie poison. »
Il s’agit non pas d’une apothéose, mais d’un acmé dont le paroxysme confine au pathétique. C’est du génie ! L’auteur tient un blog intitulé « Les Morbacks Véners », soit une référence explicite aux morpions, qui ne sont rien de moins que des parasites vecteurs de maladies, et il se permet de critiquer un nom qui évoque un poison. Je confesse volontiers manquer de mots pour qualifier l’ampleur de ce foutage de gueule intercosmique. C’est au-delà de la connerie, c’est du talent.
Je conclurais par cette citation de la célèbre antisémite cryptofascistoïde Eleanor Roosevelt : « Les grands esprits discourent sur les idées. Les esprits moyens discutent des événements. Les petits esprits parlent des gens ». Laissons le soin au lecteur averti de déterminer à quelle catégorie appartient l’auteur de cette bulle du Saint Siège contre Chouard.
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