Merci Eternit !
Un pas (tardif )en avant...
Joseph Cuvelier, patron du groupe d’amiante-ciment
en France de 1971 à 1994, a été mis en examen pour « blessures et
homicides involontaires ». Les victimes saluent un pas en avant dans
l’instruction.
Une fois n’est pas
coutume, une bonne nouvelle dans l’affaire de l’amiante. Mardi, Joseph
Cuvelier, ancien directeur général de 1971 à 1994 d’Eternit France, le
plus gros producteur d’amiante-ciment dans l’Hexagone, a été mis en
examen par la juge d’instruction Marie-Odile Bertella-Geoffroy, pour
« blessures et homicides involontaires ». D’après l’AFP, il lui est
notamment reproché l’absence de mesures de sécurité nécessaires pour
protéger les salariés de l’exposition aux fibres d’amiante dans les
cinq usines françaises de groupe : Vitry-en-Charolais
(Saône-et-Loire), Thiant (Nord), Caronte (Bouches-du-Rhône), Albi
(Tarn) et Saint-Grégoire (Ille-et-Vilaine).
Pour les victimes et leur association nationale (Andeva), il s’agit
d’un grand pas en avant. « Enfin, on arrive au cœur de l’affaire de
l’amiante, se félicite Michel Parigot de l’Andeva. Jusqu’à présent,
seuls des chefs d’établissement ou des médecins du travail avaient été
mis en examen. Joseph Cuvelier, lui, était non seulement un employeur
qui n’a pas respecté les règles de protection pour ses salariés, d’où
des centaines de morts parmi le personnel. Mais il a aussi une
responsabilité en tant qu’industriel producteur d’amiante, dont les
produits ont provoqué des milliers de décès parmi les travailleurs du
bâtiment. Et il a été impliqué dans le lobbying très fort pour retarder
l’interdiction de l’amiante en France. »
Jean-François Borde, ancien délégué CGT chez Eternit à
Vitry-en-Charolais et président de l’association locale des victimes de
l’amiante, se dit « très satisfait » de cette mise en examen, « pour
les victimes et pour toutes les personnes qui espèrent que ça empêche
les patrons d’empoisonner ». Sur son site, aujourd’hui Etex, qui a
compté jusqu’à 1 200 salariés, 94 décès par amiante ont été reconnus,
un chiffre « sous-estimé », souligne le militant. Dans les années 1980,
« les ingénieurs Cram passaient, disaient qu’il fallait installer des
systèmes d’aspiration, mais Eternit ne faisait rien », se souvient-il.
Quand la fibre toxique a été interdite en France fin 1996, « Eternit
n’a pas jeté l’amiante qui restait mais l’a envoyé dans ses usines
d’Amérique du Sud, où on continue de faire mourir des gens ».
Fanny Doumayrou