A la suite des graves incidents de Sisco, un village proche de Bastia, la plupart des politiciens n’a pas condamné la manifestation ouvertement xénophobe menée aux cris de « on est chez nous ! » (à Ajaccio, au début de l’été, c’était encore plus explicite : « Arabi fora ! »*), mais ils ont approuvé, Valls en tête, les maires LR démagogues du Sud-Est qui ont pris des arrêtés contre le port du « burkini » sur les plages de France (notre camarade Léon Landini, ancien résistant, s’est déjà exprimé sans la moindre ambiguïté sur notre site à ce sujet).
Peu leur importe que, suite à l’enquête sur les incidents de Sisco, aucune certitude n’ait pu être établie sur le port d’un « burkini » par une baigneuse « maghrébine » (sic), aussitôt, la polémique malsaine portée par le FN et par les LR, Sarkozy en tête, a enflé en prenant sciemment le double risque de stigmatiser encore davantage les Français de tradition musulmane (dont l’écrasante majorité n’est pas pratiquante !), de violer les libertés individuelles de tous et de pousser nombre de musulmans, essentialisés comme tels, au repli communautaire dont ne peuvent profiter que les intégristes et les fanatiques. C’est exactement ce qu’espèrent à la fois les islamistes terroristes – qui veulent prendre en otage toute une population – et les pyromanes professionnels du FN et de leurs suiveurs de l’ultra-droite sarkozyste, prêts à tout pour exciter l’hystérie raciste et gagner des voix sur des bases malsaines. Plus grave encore, la « justice », de moins en moins encline à statuer sur le droit et de plus en plus portée à juger sous la pression de l’ « opinion », tend à valider les décisions des maires LR au seul motif du « trouble à l’ordre public », le même motif que celui qui servit à Valls, à la mi-juin, pour tenter d’interdire les manifestations de l’Intersyndicale contre la loi Travail. Voilà où l’on en est en France aujourd’hui, dans le cadre d’un état d’urgence à perpétuité, d’un empilement incroyable de lois répressives, d’une vidéosurveillance et d’un flicage de la Toile sans précédent, en un mot, dans un climat de fascisation galopante où la droite et la « gauche » hollandienne ne savent plus quoi inventer – sans pour autant endiguer véritablement le terrorisme ! – pour fliquer la population laborieuse exaspérée par le chômage, la précarité, les inégalités et la paupérisation qui frappent des millions de Français.
Dans ces conditions, le PRCF rappelle son total attachement à la laïcité républicaine telle que la résument les deux articles initiaux de la Loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat mise en place en 1905 sous l’influence de Jaurès :
- sur la liberté de conscience : celle de croire en la religion de son choix, sans immixtion aucune de l’Etat dans l’organisation des cultes, celle également de ne pas croire et d’exprimer sans limite toute critique de la religion, les croyants étant libres de répondre aux critiques par des arguments ;
- Séparation totale de la République et des cultes : « la République ne reconnaît ni ne salarie aucun culte » ; d’où découle le fait que les services publics doivent être libres de toute manifestation religieuse ostentatoire et que, tout bonnement, l’Etat n’a pas à connaître la religion des citoyens (ou leur irréligion), pas plus qu’à l’inverse, les cultes n’ont à se faire reconnaître dans le cadre du fonctionnement institutionnel de la République (à l’école et à l’hôpital publics, dans les mairies, etc.).
- Pour le reste, à partir du moment où le visage est découvert – une condition élémentaire de la citoyenneté et du débat public – libre à chacun de se vêtir à sa guise quitte à encourir la critique d’autrui, ce qui n’a rien à voir avec la répression d’Etat. Cela ne signifie pas que les progressistes, notamment les féministes, n’aient pas le droit de critiquer les tenues qui leur semblent attenter à la dignité des femmes ou à leur égalité avec les hommes (et dans ce cas, n’y a-t-il que les tenues d’inspiration religieuse qui posent problème dans notre société qui marchandise de mille façons le corps des femmes ?), mais cette discussion doit se faire avec la volonté fraternelle de convaincre, et non dans l’esprit de contraindre et de stigmatiser ; faute de quoi c’est systématiquement l’effet contraire au but recherché qui s’imposera et la spirale des haines communautaires sous influence s’aggravera avec un danger évident d’implosion sanglante du peuple français. Fermeté totale contre la burka, qui privatise le visage féminin et qui attente à l’égalité et à l’altérité, interdiction de TOUS les signes religieux ostentatoires sur les bancs de l’école (comment enseigner la philosophie, l’histoire, les sciences naturelles si chacun affiche en classe une « identité » préfabriquée et fermée par avance à tout ce que peuvent apporter la discussion collective et la démonstration scientifique ?). mais pour le reste, liberté pour chacun de parler, de penser et de se vêtir à sa guise, quitte à encourir la mise en discussion de son comportement, voire l’ironie et la caricature, avec bien évidemment le droit d’y riposter sur le même terrain pacifique.
Ces évidences étant rappelées, il faut revenir au vrai motif, sordide, de la « polémique » sur le « burkini » : alors que notre pays se dissout dans l’acide sulfurique de la « construction » euro-atlantique, qui détruit ses acquis sociaux, son emploi industriel et agricole, ses services publics, ses communes, sa République une et indivisible, son Éducation nationale, sa souveraineté diplomatique et militaire (vassalisation par l’OTAN), alors que la politique étrangère irresponsable de Sarkozy et de Hollande a déstabilisé des pays entiers en attirant le terrorisme sur notre sol, alors que la contestation ouvrière ne désarme pas face aux contre-réformes néolibérales, il s’agit pour Valls et pour les LR d’ouvrir un contrefeu communautariste et fascisant aux luttes sociales, quitte à embraser le pays, à le fasciser, à préparer de futures St-Barthélémy contre une « communauté » religieuse » inventée ad hoc, tout en liquidant la loi laïque de 1905 : en effet, Valls a désormais la prétention d’organiser lui-même le culte musulman tandis que Sarkozy ne cesse de promouvoir, contre la volonté des protestants et d’une majorité de catholiques, le mythe diviseur et typiquement anti-laïque de « la France fille aînée de l’Eglise ». On l’a vu au moment des fêtes de Noël avec la campagne grotesque menée parallèlement par le FN et par les LR pour imposer des crèches – symbole religieux s’il en est – dans les Mairies, notamment à Béziers et à Hénin-Beaumont. En quoi certains maires LR de la Côte d’Azur, qui parfois, participent ès qualités à des cérémonies religieuses catholiques, en quoi Manuel Valls, qui représenta la France à la canonisation de Jean-Paul II, en quoi Hollande qui vient de se faire adouber par le Pape, en quoi Hollande et Valls qui participent ès qualités à des cérémonies religieuses coiffés d’une kippa, en quoi Sarkozy – le « chanoine du Latran » intronisé par le Pape Benoît XVI – ont-ils la moindre légitimité pour se poser en défenseurs d’une laïcité à sens unique qu’ils sont les premiers à violer, y compris en Alsace-Moselle (où l’Etat continue de salarier les prêtres, rabbins et autres pasteurs luthériens) ?
A cette politique de division et de guerre civile, dont profiteront en dernière analyse les fascistes bleu marine et les islamistes fanatiques, et dont le triomphe signerait l’implosion déshonorante de la patrie des « droits de l’homme », le PRCF appelle les progressistes à préférer une politique authentiquement patriotique, républicaine, laïque, ouvrière, sociale et révolutionnaire : celle du tous ensemble et en même temps contre les régressions et la fascisation, celle d’un Front Antifasciste, Patriotique, Populaire et Ecologique reconstruisant, hors de l’UE, de l’euro et de l’OTAN, la République sociale et souveraine en marche vers le socialisme.
Déclaration du PRCF, 26-8-2016
*L’ultranationalisme cultivé par les sécessionnistes à la Talamoni ne vise pas que les « Arabes » (alors que la tête de Maure est l’emblème de la Corse !), il encourage aussi le racisme anti-« Français », comme le montrent les scandaleux graffiti IFF (I Francesi fora, « les Français dehors ! ») qui souillent les murs près de Bastia. La Corse du jacobin Paoli, qui avait demandé une Constitution à J.-J. Rousseau, et que ses héroïques FTPF ont libérée par eux-mêmes du joug mussolinien, mérite mieux que ces étalages de haine tous azimuts.